Le but de cet article est d’encourager une réflexion sur le fait que Ferenc Puskás n’ait pas gagné le Ballon d’Or 1960, ce qui peut être considéré comme une mauvaise blague puisque Puskás est né un premier avril (en 1927) mais surtout comme une terrible injustice. Je ne prétends surtout pas connaître tous les tenants et aboutissants de cette décision, mais voudrais plutôt évoquer des possibilités. J’encourage vivement tous les lecteurs et contributeurs de ce site remarquable à ne pas hésiter à me contredire et à apporter leurs propres hypothèses ou faits.
Supputons donc. Mais pour cela, il est nécessaire de se replonger, même brièvement, dans la carrière de Puskás jusqu’en 1960. Là encore, il y a de plus grands spécialistes de ce joueur brillant sur ce site, qui sont invités à commenter et compléter cet article.
Flashback :
Le nom de Puskás renvoie automatiquement à la très grande équipe de Hongrie des années 1950 : les Mighty Magyars, aussi surnommé le Onze d’or, qui sont champions olympiques en 1952, battent 6-3 l’équipe d’Angleterre à Wembley en novembre 1953 dans le match du siècle avant de regagner contre cette équipe anglaise mais à Budapest en mai 1954 et sur le score faramineux de 7-1. Le Onze d’or, c’est une équipe invaincue entre le 10 avril 1949 (défaite 5-2 contre la Tchécoslovaquie) et le 19 Février 1956 (défaite 3-1 contre la Turquie), à la grande exception de la finale de la Coupe du monde 1954 perdue contre l’Allemagne de l’Ouest. Il est important de se rappeler que Puskás dira après cette finale que les Allemands étaient dopés, ce qui est peut-être le cas, avec la même drogue, la pervitine, que les soldats nazis utilisaient pendant la Seconde Guerre mondiale.
L’histoire de Puskás avec l’équipe nationale hongroise s’arrête le 14 octobre 1956 avec une victoire au PraterStadion de Vienne contre l’Autriche sur le score de 2-0, une rencontre pendant laquelle il marquera son 84e but en 85 sélections (son compère et meilleur buteur de la coupe du monde 1954, Sandor Kocsis, marquera, lui, son 75e et dernier but en 68 sélections à Colombes contre la France une semaine plus tôt lors de la victoire hongroise 2-1). Cette histoire prend fin car la révolution de 1956 éclate en Hongrie le 23 octobre 1956, avec des étudiants qui manifestent contre le contrôle soviétique de la politique hongroise. Les chars soviétiques entrent dans Budapest le 4 novembre 1956, et la révolte hongroise est réprimée dans un bain de sang. L’équipe du Honved dont fait partie Puskás (et Kocsis) joue ce même mois de novembre 1956 un match de coupe d’Europe contre l’Athletic Bilbao à San Mamès. Plusieurs joueurs, dont Puskás, refusent de rentrer en Hongrie. L’UEFA suspend alors Ferenc Puskás pour deux ans.
Toutefois, le Real Madrid le recrute en 1958, après cette suspension et à l’âge avancé de 31 ans ; ceci, malgré les 18 kilos qu’il a pris durant cette période de suspension. Le major galopant était devenu le major bedonnant.
Penchons-nous maintenant sur la saison 1959-1960 de Ferenc Puskás avec le Real. Cela frise l’irrationnel de la part d’un joueur qui fêta ses 33 ans le 1 avril 1960. Il décroche le titre de meilleur buteur de la Liga (Pichichi) avec 25 buts et se déchaîne en Coupe des clubs champions européens : un triplé à Madrid contre le club luxembourgeois de La Jeunesse d’Esch pour une victoire 7-0 lors du match aller du premier tour, accompagné d’un autre but au match retour pour une victoire 5-2 du Real ; un but à Santiago Bernabeu lors de la victoire 4-0 contre Nice lors du match retour des quarts de finale ; un autre but à Madrid pour une victoire 3-1 contre le rival du Barça pour la demi-finale aller, suivi d’un doublé au Camp Nou pour une autre victoire du Real par 3 buts à 1. La finale de cette C1 se joue alors à Glasgow contre l’Eintracht Francfort. Afin de pouvoir la jouer, Puskás est obligé de s’excuser par écrit auprès de la fédération allemande de football (la DFB), pour ses dires sur le dopage de la RFA lors de la finale de la Coupe du monde 1954. En effet, la DFB interdisait à tous ses clubs de jouer contre une équipe dans laquelle se trouvait Puskás, en représailles à ses paroles précédentes sur le dopage. En guise de revanche, Puskás réalise le seul quadruplé d’une finale de C1 lors de ce match du 18 mai 1960, avec une victoire 7-3 du Real (avec un Di Stefano qui, lui, mettra un triplé pour le club de la capitale espagnole). Puskás termine meilleur buteur de cette coupe des clubs champions européens, avec 12 buts.
Il est maintenant temps de jouer la Coupe intercontinentale contre Peñarol. Le match aller en Uruguay en juillet 1960 se termine par un match nul 0-0 mais le retour en septembre 1960 est une démonstration espagnole avec une victoire 5-1. Puskás se distingue encore en marquant deux buts, et ceci lors des huit premières minutes du match. La saison 1960-1961 verra également Puskás terminer une nouvelle fois pichichi avec 28 buts, ce qui démontre que sa fin d’année 1960 est encore phénoménale.
On a donc affaire à une merveilleuse histoire avec Puskás en 1960 : l’un des meilleurs joueurs du monde, peut-être injustement privé d’une victoire en Coupe du monde avec l’une des plus belles équipes nationales, est revenu à un niveau exceptionnel après une suspension de deux ans et à l’âge canonique de 33 ans. La résurrection a eu lieu, le Phoenix renaît de ses cendres, la fontaine de jouvence est une réalité et non un mythe. Il est donc évident que Ferenc Puskás va gagner son premier Ballon d’Or en 1960 et la question est plutôt de savoir qui va être deuxième et avec combien de points d’écart.
Le vote du Ballon d’Or 1960 :
Ce vote a lieu le 13 décembre 1960 et c’est une consternation pour les amoureux et connaisseurs du football. Non seulement Puskás est deuxième derrière l’espagnol Luis Suarez, mais l’écart est stupéfiant. Il est de 17 points car le Barcelonais a reçu 54 points tandis que Ferenc n’en glane que 37. Il y a donc une différence de 46% entre ces deux joueurs en faveur de l’Espagnol, alors que Luis Suarez peut seulement se targuer d’avoir gagné la Liga lors de la saison 1959-1960 et d’avoir fait partie du groupe barcelonais qui a remporté la Coupe des villes de foires. Foire, étant en fait sûrement le nom que ce Ballon d’Or 1960 mériterait d’après les fans de Puskás. Il est aussi surprenant de constater que Puskás ne devance le troisième, Uwe Seeler, que de quatre petits points.
Que s’est-il passé ? Pour répondre à cette question, affichons tout d’abord le résultat de chacun des 19 votants (ces résultats et photos ont été scannés puis transmis par le docteur José Luis Pierrend, à qui j’exprime mes sincères remerciements).



Organisons maintenant ces résultats dans le tableau suivant.
Joueur\Pays | Al | An | Au | Be | Bu | Es | Fr | Gr | Hol | Hon | It | Pol | Por | UR | Sue | Sui | Tc | Tu | Yo | Total |
Luis Suárez | 1 | 1 | 2 | 4 | 4 | 1 | 3 | 5 | 4 | 5 | 3 | 3 | 5 | 4 | 4 | 5 | 54 | |||
Ferenc Puskás | 2 | 2 | 5 | 5 | 5 | 1 | 5 | 2 | 3 | 2 | 5 | 37 | ||||||||
Uwe Seeler | 5 | 4 | 2 | 2 | 2 | 4 | 3 | 3 | 5 | 3 | 33 | |||||||||
Alfredo Di Stéfano | 4 | 5 | 3 | 5 | 5 | 2 | 2 | 2 | 4 | 32 | ||||||||||
Lev Yachine | 4 | 4 | 5 | 4 | 5 | 1 | 5 | 28 | ||||||||||||
Raymond Kopa | 3 | 5 | 3 | 3 | 14 | |||||||||||||||
John Charles | 4 | 1 | 1 | 1 | 4 | 11 | ||||||||||||||
Bobby Charlton | 1 | 1 | 4 | 1 | 1 | 3 | 11 | |||||||||||||
Omar Sivori | 2 | 4 | 3 | 9 | ||||||||||||||||
Horst Szymaniak | 3 | 2 | 4 | 9 | ||||||||||||||||
Francisco Gento | 5 | 3 | 8 | |||||||||||||||||
Bora Kostic | 1 | 2 | 4 | 7 | ||||||||||||||||
Joseph Ujlaki | 3 | 2 | 5 | |||||||||||||||||
Kurt Hamrin | 4 | 4 | ||||||||||||||||||
Bobby Smith | 3 | 1 | 4 | |||||||||||||||||
Luis Del Sol | 3 | 3 | ||||||||||||||||||
Jimmy Greaves | 3 | 3 | ||||||||||||||||||
Ivan Kolev | 1 | 2 | 3 | |||||||||||||||||
Janos Gorocs | 2 | 2 | ||||||||||||||||||
Karoly Sandor | 2 | 2 | ||||||||||||||||||
Dragoslav Sekularac | 2 | 2 | ||||||||||||||||||
Agne Simonsson | 1 | 1 | 2 | |||||||||||||||||
Antonio Angelillo | 1 | 1 | ||||||||||||||||||
Gerhard Hanappi | 1 | 1 | ||||||||||||||||||
Erich Hof | 1 | 1 | ||||||||||||||||||
Blagoje Vidinic | 1 | 1 |
Al : Allemagne ; An : Angleterre ; Au : Autriche ; Be : Belgique ; Bu : Bulgarie ; Es : Espagne ; Gr : Grèce ; Hol : Hollande ; Hon : Hongrie ; It : Italie ; Pol : Pologne ; Por : Portugal ; Ur : URSS ; Sue : Suède ; Sui : Suisse ; Tc : Tchécoslovaquie ; Tu : Turquie ; Yo : Yougoslavie
La première rangée correspond au pays du votant, avec les deux ou trois premières lettres du pays étant indiqué (la correspondance entre ces lettres et le nom complet du pays est donnée en dessous du tableau). Les rangées suivantes indiquent les résultats de ces votants (en nombre de points) pour chaque joueur nommé ainsi que le total (« Total ») de points que ce joueur a reçu. Une première place vaut cinq points, une deuxième donne quatre points, une troisième permet de recevoir trois points, une quatrième rapporte deux points et une cinquième place signifie un point. Une case vide indique que le joueur de cette rangée n’a pas été choisi parmi les cinq premiers par le jury associé à la colonne. Par exemple, le joueur de la dernière rangée, Vidinic a seulement été nommé par le jury yougoslave (dont l’abréviation est Yo) pour sa cinquième place (qui vaut un point).
Ce tableau permet tout d’abord de s’apercevoir que Puskás récolte plus de premières places que Suarez : cinq pour le Hongrois, qui a été plébiscité par le jury de l’Autriche, la Belgique mais également la Bulgarie et la Pologne (qui sont deux pays qui ont appartenu à un moment donné au bloc de l’Est) ainsi que la Yougoslavie (qui est alors un pays socialiste). C’est à comparer aux quatre premières places pour Suarez qui arrive en tête des votes pour les journalistes hollandais, italiens, suédois et turc. Jusqu’à présent, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, comme disait Pangloss dans Candide de Voltaire. C’est après que les choses se gâtent, avec un nombre effarant de huit juges sur 19 qui n’ont même pas mis Puskás dans les cinq premiers de leur classement alors que Suarez apparaît dans toutes les listes des votants, à l’exception de la Bulgarie, l’URSS et la Yougoslavie.
Attardons-nous donc sur ces huit pays et cherchons de possibles raisons pour l’absence de Puskás dans leur choix. Il y a le propre pays de Puskás, la Hongrie, qui en fait partie, ainsi que le cousin tchécoslovaque et le grand frère soviétique. Ces trois pays sont d’ailleurs les seuls à avoir choisi le soviétique Lev Yachine à la première place de leur classement. Il est donc évident que Puskás paye son refus de rentrer en Hongrie après la révolution de 1956, le tout orchestré par Moscou. Cependant, même si ces trois pays avaient placé Puskás en tête de leur classement, ce qui lui aurait donné 15 points supplémentaires tout en en enlevant deux à Suarez (étant donné qu’il aurait perdu une place dans les classements hongrois et tchécoslovaque), le Ballon d’Or ne serait pas seulement revenu à Puskás car il aurait alors eu le même nombre de points que Suarez. Il faut donc aussi regarder les cinq autres pays qui n’ont pas mis Puskás dans leur liste. Dans ces cinq-là, il y en a quatre, la Grèce, la Hollande, l’Italie et le Portugal, qui ont tous placé Suarez au minimum à la troisième place. Pourquoi ce choix de Suarez et pourquoi ne pas avoir choisi Puskás dans les cinq premiers ? Certains auraient-ils des sympathies communistes ? Est-ce que le jury italien, qui n’a même pas inscrit un seul joueur du Real dans sa liste, ne s’était pas remis de la défaite du Milan AC contre le Real en finale de la coupe des clubs champions européens 1957-1958 ? Pourquoi ne pas aussi penser que certains avaient tout simplement envie d’un nouvel air frais sur le football européen après que le Real a gagné cinq C1 de suite entre 1956 et 1960, et ont alors voulu récompenser la première élimination du Real en C1 par le Barca de Suarez juste un mois avant le résultat des votes du Ballon d’Or 1960 ? Cette dernière possibilité est à fortement considérer car Suarez avait marqué les deux buts du Barça à Madrid lors du match aller du deuxième tour, qui s’était terminé sur le score de 2 à 2 et qui avait été joué le 9 novembre 1960. Le titre du journal France Football : « Luis Suarez, champion de la nouvelle vague européenne », semble confirmer cette possibilité.

Cependant, pour moi, l’énorme surprise du Ballon d’Or 1960 vient du juré français qui est le dernier récalcitrant à ne pas avoir nommer Puskás dans sa liste des cinq joueurs. Ce juré, c’est le légendaire journaliste Gabriel Hanot qui fut un des initiateurs du Ballon d’Or, mais également de la Coupe des clubs champions européens. Cette dernière a été créée en réaction du match Wolverhampton-Honved du 13 décembre 1954 (gagné 3-2 par les Anglais), afin de proposer une compétition qui établirait l’identité du meilleur club européen de la saison. Et qui jouait pour Honved lors de ce match historique de 1954 ? Ferenc Puskás, bien sûr. On peut donc sereinement avancer l’idée que la coupe d’Europe a Gabriel Hanot comme père fondateur et Puskás comme l’un de ses fils chéris (surtout après quatre buts en finale d’une C1) et imaginer la réaction suivante de Puskás quand il a vu le choix du journaliste français : « Et tu, Gabriel ? » Comment Hanot a-t-il pu ne pas mettre le génie hongrois dans sa liste ? Comment Gabriel a-t-il pu brûler l’esprit de Ferenc ? Une possibilité remonte au vote du Ballon d’Or 1958, pour lequel il y avait une règle (non-écrite, je pense) qui empêchait le précédent vainqueur, en occurrence Di Stefano, de remporter ce trophée. Raymond Kopa l’avait alors remporté et avait indiqué des années plus tard que Di Stefano l’avait alors jalousé pour cela. Pour éviter de nouveau un tel courroux de la flèche blonde, Hanot n’a-t-il pas mis Di Stefano à la première place ? De plus, un des critères du Ballon d’Or a souvent été le palmarès obtenu avec son équipe nationale et/ou club. Et qui mieux qu’un Yachine vainqueur de l’Euro 1960 et un Gento vainqueur des cinq premières C1 avec le Real pour satisfaire ce critère, ce qui expliquerait le choix de Hanot pour sa deuxième et troisième place ? Une fois que deux joueurs du Real sont choisis dans la liste, il devient difficile d’en incorporer un troisième, surtout lorsque l’on est le fondateur de la coupe d’Europe qui réunit tellement de pays et de clubs différents. Ce qui peut expliquer que Puskás n’ait pas été choisi par Hanot.
On peut également remarquer que plusieurs pays ont placé Puskás dans leur cinq premiers mais à la quatrième ou cinquième place, ce qui est indigne de son talent et de sa saison extraordinaire. Par exemple, l’Allemagne a seulement donné deux points alors qu’elle en accordé trois à son joueur local, Horst Szymaniak. A-t-elle voulu faire regretter à Puskás ses anciens propos sur le dopage, tout en lui accordant quelques points pour donner l’impression qu’elle est miséricorde ? Ou a-t-elle simplement fait parler le chauvinisme, elle qui a aussi classé Uwe Seeler au sommet de son classement ? Ce chauvinisme semblant d’ailleurs être bien présent dans la mentalité des votants, étant donné que l’Autriche est la seule à avoir placé Hanappi dans sa liste, de même que la Suède avec Kurt Hamrin et la Yougoslavie avec Blagoje Vidinic.
Mais que dire de l’Espagne, alors sous la tutelle de Franco ? Trois Espagnols nés Espagnols aux trois premières places : tout d’abord Gento en bon exemple du club préféré du Caudillo, suivi d’un Barcelonais (Suarez) et de Luis Del Sol qui avait rejoint le Real en avril 1960. Puskás n’est qu’à une piteuse cinquième place et Alfredo Di Stefano n’est même pas dans la liste. Lorsque l’on réalise que le jury espagnol est non seulement le seul à avoir mis Gento en tête de liste mais également d’avoir nominé Del Sol, on peut légitiment penser que le nationalisme du régime espagnol de l’époque s’est manifesté dans le choix du Ballon d’Or 1960.
Imaginons donc un monde en 1960 où la géopolitique n’aurait pas eu cours, où le chauvinisme aurait pu s’exprimer mais seulement pour la première place et où le talent et l’année exceptionnelle de Puskás auraient été reconnus pour le Ballon d’Or. On aurait alors pu avoir droit à un Puskás classé (1) premier par les Hongrois et Tchécoslovaques ; (2) deuxième derrière Yachine pour le jury soviétique et deuxième également mais derrière Gento pour le votant espagnol. Et là, le gagnant du Ballon d’Or 1960 aurait été Puskás. Il est ironique qu’une des possibles raisons de la défaite de Puskás à ce Ballon d’Or peut donc se trouver dans la décision commune de pays communistes et de l’Espagne franquiste de ne pas placer Puskás dans leur liste ou en haut de cette liste, alors que ces pays se détestaient tellement que le dictateur Franco avait ordonné à l’équipe d’Espagne de ne pas jouer son quart-de-finale de l’Euro 1960 contre l’URSS.
Bien dommage pour Ferenc tout cela, surtout après avoir déjà connu une si grande désillusion avec la défaite du Onze d’or en finale de la Coupe du monde 1954. On peut alors se demander si Puskás s’est remis de cette nouvelle déception de ne pas avoir gagné le Ballon d’Or 1960. Une réponse possible est donnée un mois après ce vote avec un Real Madrid-Elche joué le 22 janvier 1961. Victoire du Real 8-0. Cinq buts de Ferenc Puskás. Alors, c’est qui le plus fort ?
Les Anglais ont 6 votes puisque Angelillo et Suarez se partagent la 5ème place. Les Italiens idem, avec Kolev » le Kopa bulgare » et Erich Hof.
Que de beaux noms…
Des beaux noms mais, honnêtement, il y en avait que je ne connaissais pas ou peu.
Chauvins les votants autrichiens… J’ai mal.
Costaud, ton article. Et quelles belles archives..
Puisqu’ils furent de ceux qui n’attribuèrent aucun point à Puskas, je n’ai jamais lu les NL justifier (ni donc se sentir obligés de justifier) a posteriori ce choix.
J’ai été aussi surpris par cela. Une autre surprise est que le votant est de Hollande et non des Pays-Bas, d’après FF. Une erreur?
L’erreur est commune parmi les cultures latines, oui.
A décharge de celles-ci : il y eut un Royaume de Hollande..mais qui réunissait Pays-Bas et Belgique, histoire d’ajouter à la confusion.
Ce vote NL est vraiment des plus curieux, je ne me l’explique absolument pas.
Le vote néerlandais est presque lisible sur la photo. Pour commencer, il regrette de ne pouvoir mettre Kopa et semble bien fan du foot anglais et de la nouvelle vague, Charlton ou Greaves.
J’avais essayé de lire ça, je dois être bigleux.
Fort tropisme anglophile? C’est une explication qui tient la route, le foot NL ne jurait alors quasiment que par ça, leur scène était pour ainsi dire monoculturelle – ils doivent vraiment une fière chandelle à Happel, vraiment lamentable que tout le mérite en fût reporté sur cette saloperie d’opportuniste que fut Michels.
Maintenant, faut voir aussi à quelles images et infos ce journaliste NL avait accès, l’économie et la société NL étaient encore dans le dur en 1960, l’exploitation miraculeuse des gisements de gaz n’y avait encore vraiment produit ses effets.
Quelques quotidiens bien connus également. Der Kicker, A Bola, Sunday Times. Les Sports pour la Belgique.
Et un étonnant Journal français pour les Turcs! Si True Grit passe par là pour nous donner peut-être des infos…
Le courant francophile d’Istanbul, comme l’etait Galatasaray à sa création?
Bien, Guy Sindelar Lux
Bien
J’attends quand même de voir la réaction de Léon Fred Astaire Zitrone
Je plaisante, merci pour l’article
A nous, Cognacq-Jay
Vraie question : ce sont des magazines d’époque que tu as gardé ?
Respect, dans tous les cas
Je n’ai pas lu jusqu’à la fin, mauvais réflexe SF
Donc un autre respectable Monsieur a gardé les magazines
Je ferais bien de la boucler, désolé
Pas de problème. Docteur José Luis Pierrend est un grand passionné de foot également.
Anecdote à ce sujet :
Nous avions Sindelar et moi même toute la collection de France football et de onze depuis 1976 bien rangée dans la cave de nos parents .
Un jour , il y a 5 ans mon père a décidé de jeter tout ce qui est inutile , qui prenait de la poussière , pour faire de la place
Voilà comment toute notre collection ( y compris mon album panini coupe du monde 1982 ) a fini aux encombrants .
Dur….
J’espère que Fred va nous régaler d’anecdotes sur Puskas.
*etait inutile
Puskas est mon joueur préféré. La première fois que je suis passé à Budapest, je me suis retrouvé par hasard devant le Nepstadion. Une petite emotion de découvrir le stade où la grande Hongrie avait laminé les anglais 7 à 1. Il y avait un grand marché aux puces autour du stade, avec des stands tenus par des Tziganes pour la plupart. C’était assez bordélique mais sympa comme ambiance.
Quand j’ai visité le Santiago Bernabeu, mon frere m’avait pris en photo entre les portraits de Puskas et Di Stefano dans le musée. A l’époque, il y avait toute une façade remplie des portraits des mythes du Real depuis sa création. Mais à taille identique pour chacun. J’aimais bien l’idée.
Le ballon d’or d’Alfredo. La première c1 et l’Intercontinentale de 1960, c’est quelque chose pour un fan d’histoire de ce sport.
Content aussi de l’avoir vu avant son « arénisation »..mais dieu qu’il était pourri, laissé à l’abandon!
Grand marché aux puces : typique du destin de ces giga-stades communistes..avec chacun sa faune débrouillarde (toi les Tziganes.. et moi à Varsovie c’étaient pour bonne part des Ukrainiens voire des Russes..et bon nombre faisaient le trajet régulièrement voire quotidiennement, dingue car faut s’imaginer les routes de l’époque vers l’Est)
Je ne me rappelle pas qu’il y avait des Chinois autour du Nepstadion?? Au marché russe de Varsovie, il y a plus de 20 ans donc : y en avait (déjà) un paquet.
A Varsovie, les étals étaient installés parmi les gradins supérieurs, dans les entrailles du stade aussi.. Pas vraiment rigolo, parfois extrêmement interlope (armes de guerre à gogo..) mais très folklorique.
C’est intéressant d’essayer de comprendre les votes de chaque pays. Quels matchs ont réellement vus les votants. Pour le vote italien, j’imagine que le journaliste etait à Rome lors de la finale olympique. D’où la quatrième place de Kostic. Le point pour Kolev, j’ai cherché. Aucun match entre la Bulgarie et l’Italie cette année là. Ni d’affrontement entre le CSKA et des clubs italiens en Europe. Quelles images le journaliste italien a t il vus de lui cette année là? Probablement rien ou pas grand chose. A t il en tete une grande prestation antérieure de Kolev face à son pays? Ou peut-être est est-ce la prestation de Kolev aux J.O? Puisque la Bulgarie est éliminée par la Yougos à la différence de buts.
La rumeur et l’aura étaient des leviers importants à l’époque.
On aimerait bien voir la photo de Khiadiatoulin encadré de Puskás et Di Stéfano.
Quand Toulouse gagnera à nouveau une coupe Fred! Hehe
Pas encore lu mais je viens faire une réclamation: c’est indécent de se pavaner avec de telles archives. Vous devriez avoir honte monsieur.
Beau boulot Sindelar, merci.
Pas beaucoup de temps aujourd’hui pour dialoguer mais « Gento en bon exemple du club préféré du Caudillo », ce n’est pas si simple et les exemples de décision du pouvoir en faveur du Barça minorent largement l’affirmation. Juste après la guerre civile, le club le plus proche des gouvernants est l’Atlético.
Le Real est avant tout utilitaire pour Franco, un outil au service de la normalisation des relations internationales entre l’Espagne et l’Occident. Quand l’Espagne est admise à l’ONU en 1955, il se trouve que le club phare est le Real, après que l’Atlético et le Barça aient dominé le début de la décennie. Bref, Real et Franco, une relation basée sur l’intérêt et pas vraiment sur le supportérisme de Franco.
Sutout que je suis convaincu que si les équipes soviétiques avaient participé à la C1 dans les années 50 ou debut 60, Real ou Barca, Franco aurait refusé une confrontation. Comme il a fait pour l’Espagne URSS des qualifs de l’Euro 1960.
Au basket, le Real a du declarer forfait lors d’une confrontation en demi face à Riga en 56.Par la suite, la section basket madrilène a négocié financièrement une finale en terrain neutre face Tibilissi en 62, plutôt que de recevoir des soviétiques sur son sol. La finale etait normalement en aller-retour.
L’année suivante, les relations se sont assouplies.
Imaginons au foot, un Real Dinamo Moscou en c1 1958 et c’était la mort de la dynastie de Di Stefano.
Je pense écrire une uchronie dans laquelle la Hongrie remporte la CDM 54, place 5 joueurs aux 5 premières places du ballon d’or (instauré en 1950). Suite à des évènements que je ne dévoilerai pas, un vent de relative liberté souffle sur l’Est. Il n’y a pas de soulèvements populaires, Puskás est donc toujours un joueur de Honved. Le Real et Honved écrasent tout sur leur passage en C1 jusqu’au jour où ils s’affrontent en finale (à Paris pourquoi pas ?). Qui l’emportera ? vous le saurez peut-être un jour.
Pour finir. Au lendemain de la guerre civile, de 1940 à 53, le Real ne gagne pas un titre. Valence, le Barça, l’Athletic et meme Seville sont titrés. On est pas dans le desir d’un régime voulant privilégier un club vitrine comme dans les régimes totalitaires de l’époque.
Apres que le Franquisme se soit servi
Du Real, c’est une évidence.
Brillant article, Sindelar !
Quelle mascarade ce vote !
Comme Vahid j’ai vomi !
Tu as gâché ma matinée mais je compte me rattraper avec un Angleterre-Iran de légende et un Sénégal-Pays-Bas qui promet (sur le papier du moins).
Quelques petites stats du Major au Real:
Plus vieux joueur: 38 ans et 233 jours (le 21 novembre 1965 contre le FC Séville)
Buteur le plus vieux: 38 ans et 233 jours (le 21 novembre 1965 contre le FC Séville)
Buts inscrits dans un match: 6 buts (le 18 juin 1961 contre le Bétis Séville)
Pichichi à 36 et 37 ans.
Signe un quadruplé contre Feyenoord en 16èmes de finale en septembre 65 à 38 ans et 5 mois.
Informations glanées sur le site Football-the-story du bien nommé Freddy:
PALMARÈS
Finaliste de la Coupe du Monde en 1954 (Hongrie)
Médaille d’or aux Jeux Olympiques d’Helsinki en 1952 (Hongrie)
Vainqueur de la Coupe Internationale en 1953 (Hongrie)
Vainqueur de la Coupe des Balkans des nations en 1947 (Hongrie)
Vainqueur de la Coupe Intercontinentale en 1960 (Real Madrid)
Vainqueur de la Coupe d’Europe des clubs champions en 1959, 1960 et 1966 (Real Madrid)
Finaliste de la Coupe d’Europe des clubs Champions en 1962 et 1964 (Real Madrid)
Champion d’Espagne en 1961, 1962, 1963, 1964 et 1965 (Real Madrid)
Vice-champion d’Espagne en 1959, 1960 et 1966 (Real Madrid)
Champion de Hongrie en 1949/50, 1950, 1952, 1954 et 1955 (Budapest Honved)
Vice-champion de Hongrie en 1947, 1951 et 1953 (Budapest Honved)
Vainqueur de la Coupe d’Espagne en 1962 (Real Madrid)
Finaliste de la Coupe d’Espagne en 1960 et 1961 (Real Madrid)
Finaliste de la Coupe de Hongrie en 1955 (Budapest Honved)
DISTINCTIONS PERSONNELLES
Ballon d’argent en 1960
Élu meilleur joueur de la Coupe du Monde en 1954
Élu meilleur footballeur hongrois de l’année en 1950
Meilleur buteur de la Coupe internationale en 1953 (10 buts)
Meilleur buteur de la Coupe des Balkans des nations en 1948 (8 buts)
Meilleur buteur de la Coupe d’Europe des clubs Champions en 1960 (12 buts) et 1964 (7 buts) (Real Madrid)
Meilleur buteur du championnat d’Espagne en 1960 (26 buts), 1961 (27 buts), 1963 (26 buts) et 1964 (20 buts) (Real Madrid)
Meilleur buteur du championnat de Hongrie en 1948 (50 buts), 1950 (31 buts) et 1953 (27 buts) (Budapest Honved)
Nommé dans l’équipe type du tournoi de la Coupe du Monde en 1954
Nommé au FIFA 100
À reçu l’Ordre du mérite de la FIFA en 1994
Élu « joueur en or » de la Hongrie des 50 dernières années par l’UEFA en 2004
Élu parmi les « légendes » du foot par Golden Foot en 2006
Nommé Officier de l’Ordre du Mérite Hongrois en 1951
À reçu la Croix du Mérite en or de l’Ordre Hongrois en 2005
À reçu l’Ordre du Mérite du travail hongrois en 1953
Nommé Digne athlète de la République populaire hongroise en 1954
Nommé Athlète de la nation de Hongrie en 2004
Nommé Citoyen d’honneur de Budapest en 2001
Élu meilleur athlète hongrois du 20ème siècle
DIVERS
– Parmi les anecdotes de Ferenc Puskas, on peut noter sa popularité au Kispest Honvéd, où il jouait lorsqu’il avait 13 ans : les supporteurs avaient construit une petite marche pour que Puskás puisse enjamber la barrière du centre d’entraînement, situé juste à côté de chez lui, afin qu’il n’ait pas à faire le tour jusqu’à la porte d’entrée.
– Il sort un album en 2007 intitulé « A nevem csak ennyi voli: Ösci… ». Le disque contient sept chansons, quatre interviews (Grocsics, Buzánszky, le commentateur György Szepesi et l’épouse de Puskás aujourd’hui décédée) + une composition rétrospective intitulée « Mon nom était Petit Frère ».
C’est curieux qu’il ait été désigné meilleur joueur de la Coupe du monde 54, alors qu’il a loupé le quart et la demie et joué la finale sur une jambe. Le choix de Kocsis eût été peut-être plus judicieux, mais comme il avait déjà la couronne de meilleur buteur, ça faisait peut-être trop ?
Extrait sur Ferenc Puskás dans « Mon football »de Raymond Kopa:
« …Mais revenons au Real.
Bien sûr, Di Stefano et son extraordinaire personnalité de joueur m’ont beaucoup marqué. Mais il ne fut pas le seul. Un an après mon arrivée, le Real a recruté un autre super-joueur: le Hongrois Ferenc Puskas, ex-capitaine de l’équipe de Hongrie. Puskas avait quitté son pays à la suite des événements de 1956. Il végétait en Autriche lorsque le Real l’a engagé. Quand la nouvelle s’est répandue, cela a été un éclat de rire général. Les Français d’abord, les Espagnols ensuite. L’hilarité était unanime. Puskas avait un ventre de propriétaire, il était devenu bedonnant, il avait engraissé. Bref, pour tout le monde, c’était un joueur fini et on ne comprenait pas qu’un club comme le Real ait pu commettre l’erreur monumentale, grotesque, d’engager un tel joueur. Mais moi, je tiens à rappeler que mon idole, l’homme pour qui j’avais la plus grande admiration a toujours été Ferenc Puskas. Je l’avais découvert en 1954 lors d’un match amical que les Hongrois avaient disputé à Genève, lorsqu’ils préparaient la Coupe du Monde. Et j’avais aussi appris ce qui s’était passé lors du fameux Angleterre-Hongrie à Wembley, qui vit la première défaite (et par 7-1 !) des Anglais sur leur terrain ! Bref, Puskas, moi, je l’avais toujours vu «comme une maison». Et voilà que je le revoyais, arrivant au Real. Lourd. Gras.
Effectivement, le major bedonnant comme on l’appelait (puisqu’il était major dans l’armée hongroise), c’était lui. Il avait je ne sais combien de kilos en trop. La presse espagnole a été lamentable, odieuse à son égard. C’était même répugnant. Les journalistes espagnols venaient interroger les joueurs du Real sur Puskas. Lorsqu’on m’a questionné, j’ai répondu in extenso (et les archives de l’époque en feront foi): « Ecoutez, Puskas, c’est un très grand joueur. La classe, il l’a. Ce qui lui manque, c’est la condition physique. Il faut qu’il s’entraîne énormément. Et il retrouvera ses talents.»
Et Puskas s’ est mis à l’oeuvre. Il travaillait, il cravachait dur. Je n’ai jamais vu, même un junior, s’entraîner avec autant d’acharnement. Il avait trois ou quatre pulls sur le dos et il transpirait, le malheureux. Il se mettait à plat ventre, ça, on peut le dire. Les autres le regardaient, certains d’un air goguenard. J’ai dit: « Donnez-lui le temps de se mettre au point physiquement, qu’il retrouve sa silhouette d’avant les événements. Et je suis sûr, qu’il vous étonnera. Qu’il fera un malheur. »
Je ne dis pas cela maintenant, après coup, pour prouver ma clairvoyance. Mais parce que j’ai toujours su, rien qu’à voir l’acharnement avec lequel il s’est remis au travail, que Ferenc Puskas nous étonnerait. Il a donné une magistrale leçon de courage, d’humilité, d’orgueil aussi. Une leçon dont beaucoup de jeunes footballeurs devraient s’inspirer. Car lorsqu’on a été Ferenc Puskas, c’est-à-dire l’un des plus prodigieux joueurs du monde, lorsqu’on arrive dans un club accueilli par un tel scepticisme, parfois même de la méchanceté, eh bien, il faut avoir une grande force de caractère pour reparti de zéro, humblement, simplement, discrètement. Ce caractère, Puskas, l’a eu. Et comme son merveilleux talent était intact, il a gagné.
Pendant trois années consécutives, il est devenu le meilleur buteur d’Espagne. Il a remis à leur vraie place tous les sceptiques, les médiocres, les jaloux, les malveillants. Ce fut l’une de mes grandes joies. On avait condamné ce garçon. Et c’est lui qui finalement obligeait ses contempteurs à se promener le nez en berne. J’avais eu raison de croire en lui. J’étais heureux. Pour lui. Pour moi aussi.
On l’avait également décrit comme quelqu’un affligé d’un caractère impossible, prétentieux, orgueilleux, distant. Encore une légende. Il était charmant, un brave type, le cœur sur la main, généreux, aimant la vie, ayant le sens de l’amitié, fidèle à la parole donnée. Il n’a jamais laissé tomber ses amis. Chez lui, c’était la maison du Bon Dieu. Il s’est pratiquement ruiné tellement il avait bon cœur. C’était toujours plein de réfugiés hongrois. Ils avaient toujours porte ouverte et table mise. Et c’est ce superbe garçon que les journalistes ont osé décrire comme un fruit sec au cœur dur et à la petite cervelle !
Lorsque Puskas est enfin parvenu à baragouiner quelques mots d’espagnol, les contacts humains entre lui et moi sont devenus encore plus chaleureux. Lui et Di Stefano sont évidemment les deux personnalités qui, au Real, m’ont le plus marqué. »
Si Riu Costa pouvait nous traduire cet article sur la tournée du Honved au Brésil, ça serait super.
https://flamengoalternativo.wordpress.com/2017/01/19/magicos-rubro-negros-ha-60-anos-fla-desbancava-o-lendario-honved-de-puskas/
Magiciens Rouges et Noirs : il y a 60 ans, Fla battait le légendaire Honvéd de Puskás
Les quelque 120 000 supporters présents au Maracanã dans la nuit du samedi 19 janvier 1957 – il y a exactement 60 ans – ont assisté à l’une des pages les plus mémorables de l’histoire de Flamengo, et un moment historique dans la trajectoire remplie de grandes réalisations du football brésilien. À cette occasion, dans un spectacle magnifique, l’équipe rouge et noire a battu la légendaire équipe hongroise de Honvéd, l’équipe la plus célèbre du monde à l’époque, dans laquelle brillait, entre autres stars, le milieu de terrain gauche Ferenc Puskás, sur le score de 6 à 4 lors du premier d’une série de matches des Magyars au Brésil, à l’invitation du club du Gávea (nom du stade de Flamengo) lui-même.
L’initiative de faire venir le respecté Honvéd était déjà une victoire en soi lorsqu’elle s’est concrétisée avec la signature du contrat. Mais cela a pris l’air d’une bataille diplomatique internationale lorsque Fla a dû surmonter la résistance des dirigeants hongrois au coeur d’un contexte politique troublé dans leur pays, et même la menace d’une sanction par la FIFA. Heureusement pour le public brésilien, Flamengo a atteint son objectif en amenant Puskás et compagnie au Maracanã et a remporté un triomphe mémorable pour son histoire et celle du football brésilien, un an et demi avant de remporter sa première Coupe du monde en Suède.
LE CHAMPION VAGABOND
Cinq fois champion de Hongrie entre 1949 et 1955, Honvéd formait la base des Magic Magyars, la fabuleuse équipe hongroise qui, bien qu’elle n’ait pas remporté la coupe, a enchanté le monde lors de la Coupe 1954. Au milieu de l’année 1956, après avoir déjà affronté plusieurs des principaux clubs européens lors de matches amicaux légendaires, le club se retrouve à la veille de disputer pour la première fois la Coupe d’Europe des Champions nouvellement créée. La première, cependant, s’est terminée dans le chaos, en raison de la situation politique délicate en Hongrie.
En octobre de la même année, des étudiants hongrois sont descendus dans la rue pour demander des réformes au sein du régime socialiste en place dans le pays depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais le 23, la poudrière éclate. Quelque 20 000 manifestants rassemblèrent pour la diffusion d’un manifeste rédigé par le syndicat local des écrivains, et la tentative d’invasion de Radio Budapest se solda par une répression policière et des morts. La révolte se propagea au sein de la population et le lendemain, les chars soviétiques entrèrent dans Budapest.
Pendant les jours les plus violents, surgit l’information que le plus grand joueur du pays, Ferenc Puskás, était décédé, ce qui n’était rien de plus qu’une rumeur. Au cours d’une brève période de trêve, l’équipe put quitter la Hongrie en toute sécurité. Le 1er novembre, le Premier ministre Imre Nagy, le vice-ministre des Sports Gustav Sebes et la fédération magyare autorisèrent officiellement l’équipe à jouer à l’étranger jusqu’au 31 mars de l’année suivante.
L’équipe voyagea alors pour affronter l’Athletic Bilbao, adversaire des huitièmes de finale de la Coupe des Champions. Mais avec l’annonce de la reprise des conflits – qui se termina le 10 novembre faisant des milliers de morts, en plus de l’arrestation d’Imre Nagy, déposé par le nouveau gouvernement de János Kádár, un allié des Soviétiques –, l’équipe fut perturbée et démoralisée, et perdit par 3 à 2.
Profitant de son autorisation spéciale, et malgré le changement de pouvoir, Honvéd continua sa tournée en Europe, jouant des matches amicaux en Espagne, en Italie et au Portugal. Ils gagnèrent contre Milan et Barcelone, en plus de faire match nul 5-5 avec une équipe madrilène composée de joueurs du Real et de l’Atlético. Cependant, ils finirent par être éliminés de la Coupe des Champions, faisant match nul 3-3 avec l’Athletic Bilbao sur terrain neutre à Bruxelles. Les formidables hongrois avaient désormais un avenir incertain.
LA NÉGOCIATION DE LA VENUE
L’idée de Flamengo de faire venir Honvéd au Brésil a commencé à prendre forme vers la fin 1956, lors de la planification de la pré-saison suivante. Le club avait déjà invité les Suédois de l’AIK à un match amical au Maracanã pour ouvrir la saison internationale. Pour augmenter le potentiel de revenus, il pensa à organiser un tournoi avec d’autres clubs étrangers, jusqu’à ce que la possibilité de recevoir la célèbre équipe Honvéd pour des matchs à Rio de Janeiro se présente, par l’intermédiaire des mêmes agents qui négocièrent pour les Suédois.
Le premier contact s’est fait à Bruxelles entre l’agent Osvaldo Corckus et Emil Osterreicher, secrétaire général du club hongrois. Emil échangea plusieurs télégrammes avec le président de Flamengo José Alves de Morais, et une fois tout convenu, le contrat pour la tournée brésilienne du Honvéd fut signé à Amsterdam le 29 décembre. Le club de Rio qui avait décliné une offre de tournée en Amérique du Sud pour amener les Magyars au Brésil ne s’épargna aucun effort financier pour promouvoir les rencontres à venir et payer les billets aller-retour Rio-Milán-Rio.
Jusque-là, il n’y avait qu’une seule impasse : la date du premier match. Flamengo voulait le disputer au Maracanã le 20 janvier, jour de São Sebastião, saint patron de la capitale Rio de Janeiro – et à l’époque également du pays, étant encore siège du District fédéral. La Confédération brésilienne de football (CBD) avait pourtant déjà prévu à la même date et au même lieu le match entre les sélections de Rio de Janeiro et du Pará, pour le Championnat du Brésil des sélections d’état, et n’abandonnerait pas la date. Le calendrier prévoyait initialement que le club hongrois devait affronter la sélection de Rio le 16, puis Flamengo le 23 et Vasco le 27.
PENDANT CE TEMPS, EN HONGRIE
Le nouveau gouvernement hongrois est venu s’immiscer dans la vie du Honvéd dix jours après l’élimination en Coupe des champions. Car au final, le pouvoir central ne fut pas le seul à subir des changements au cours de ces semaines, avec l’investiture de János Kádar au poste de Premier ministre. La direction de la Fédération fut également entièrement destituée, passant sous la direction de nouveaux administrateurs intérimaires. Ce sont eux qui, le 30 décembre 1956, décidèrent en assemblée extraordinaire d’interdire tous les matchs du Honvéd dans les autres pays.
Les athlètes, qui se trouvaient à Casablanca (Maroc) depuis Paris, ont décidèrent de ne pas accepter l’ordre de la nouvelle direction de la Fédération et de poursuivre leur tournée – même si certains membres ont exprimèrent leur intention de retourner au pays à la fin du voyage. Emil Osterreicher, pour sa part, déclara que la Fédération n’avait pas le droit d’annuler les matchs, car les contrats avaient été signés et ratifiés. Et il confirma que la prochaine étape serait en Italie, où les joueurs se reposeraient, rencontreraient leurs familles et joueraient encore quelques matchs, avant de traverser l’Atlantique pour l’Amérique du Sud.
La fédération hongroise envoya un télégramme à la FIFA, rappelant sa nouvelle décision d’interdire au Honvéd de jouer à l’étranger. La raison alléguée était la « fatigue » des joueurs après les matchs qu’ils avaient déjà joué. Mais il s’agissait d’une tentative d’empêcher la concrétisation de l’intention d’une partie de la délégation à ne pas revenir au pays. La plus haute instance du football ne prit pas position. Elle ne fit que transmettre à ses affiliés la décision de la fédération hongroise. L’article 9 du Règlement de la FIFA prévoyait une interdiction de trois mois à un an pour tout club disputant des matchs internationaux sans l’autorisation des fédérations nationales.
LA RÉACTION AU BRÉSIL
Au Brésil, si la CBD présidée par Sílvio Pacheco considérait l’intention et les efforts de Flamengo comme louables, elle avait deux craintes : qu’une éventuelle punition par la FIFA des clubs impliqués ne se répercute sur les autres clubs, voire même sur l’équipe nationale brésilienne, et qu’elle puisse entraîner l’exclusion du Brésil des éliminatoires de la Coupe du monde en Suède ; et que la venue des Hongrois fasse de l’ombre au championnat des sélections, qui débuterait ce mois-là. Malgré cela, elle envoya une demande de Flamengo à la FIFA pour que la Fédération hongroise reconsidère la décision, ce que refusa l’entité magyare.
Je continuerai plus tard, il faut que je sorte.
C’est formidable, ça, pourquoi n’en fais tu pas un article à part entière plutôt qu’un commentaire ?
Imaginon Puskas sous la tunique du Flamengo…
Magnifique.
Je vais savourer ce texte un peu plus tard.
Magiciens Rouges et Noirs : il y a 60 ans, Fla battait le légendaire Honvéd de Puskás
Les quelque 120 000 supporters présents au Maracanã dans la nuit du samedi 19 janvier 1957 – il y a exactement 60 ans – assistèrent à l’une des pages les plus mémorables de l’histoire de Flamengo, et à un moment historique dans l’histoire remplie de grandes réalisationsdu football brésilien. À cette occasion, dans un magnifique spectacle, l’équipe rouge et noire a battu la légendaire équipe hongroise de Honvéd, la plus célèbre du monde à l’époque, et dans laquelle brillait, entre autres stars, le milieu de terrain gauche Ferenc Puskás, sur le score de 6 à 4 lors du premier d’une série de matches des Magyars au Brésil, à l’invitation du club du Gávea (nom du stade de Flamengo) lui-même.
Le fait de faire venir le respecté Honvéd était déjà une victoire en soi lorsqu’elle se concrétisa par la signature du contrat. Mais cela prit l’air d’une bataille diplomatique internationale lorsque Fla dut surmonter la résistance des dirigeants hongrois au coeur du contexte politique troublé de leur pays, et même la menace d’une sanction de la FIFA. Heureusement pour le public brésilien, Flamengo atteignit son objectif en amenant Puskás et compagnie au Maracanã et remporta un triomphe mémorable pour son histoire et celle du football brésilien, un an et demi sa première victoire en Coupe du monde en Suède.
LE CHAMPION VAGABOND
Cinq fois champion de Hongrie entre 1949 et 1955, Honvéd formait la base des Magic Magyars, la fabuleuse équipe hongroise qui, bien qu’elle n’ait pas remporté la coupe, a enchanté le monde lors de l’édition 1954. Au milieu de l’année 1956, après avoir affronté plusieurs des principaux clubs européens lors de matches amicaux légendaires, le club se retrouve à la veille de disputer pour la première fois la Coupe d’Europe des Clubs Champions nouvellement créée. La première, cependant, se termina dans le chaos, en raison de la situation politique délicate en Hongrie.
En octobre de la même année, des étudiants hongrois descendirent dans la rue pour demander des réformes au sein du régime socialiste en place dans le pays depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Et le 23, la poudrière éclate. Quelque 20 000 manifestants se rassemblèrent pour la diffusion d’un manifeste rédigé par le syndicat local des écrivains, et leur tentative d’invasion de Radio Budapest se solda par une répression policière et des morts. La révolte se propagea au sein de la population, et le lendemain les chars soviétiques entrèrent dans Budapest.
Pendant les jours les plus violents, surgit l’information que le plus grand joueur du pays, Ferenc Puskás, était décédé, ce qui n’était rien de plus qu’une rumeur. Au cours d’une brève période de trêve, l’équipe put quitter la Hongrie en toute sécurité. Le 1er novembre, le Premier ministre Imre Nagy, le vice-ministre des Sports Gustav Sebes et la fédération magyare autorisèrent officiellement l’équipe à jouer à l’étranger jusqu’au 31 mars de l’année suivante.
L’équipe voyagea alors pour affronter l’Athletic Bilbao, adversaire des huitièmes de finale de la Coupe des Clubs Champions. Mais avec l’annonce de la reprise des conflits – qui se termina le 10 novembre faisant des milliers de morts, en plus de l’arrestation d’Imre Nagy, déposé par le nouveau gouvernement de János Kádár, un allié des Soviétiques –, l’équipe fut perturbée et démoralisée, et perdit par 3 à 2.
Profitant de son autorisation spéciale, et malgré le changement de pouvoir, Honvéd continua sa tournée en Europe, jouant des matches amicaux en Espagne, en Italie et au Portugal. Ils gagnèrent contre Milan et Barcelone, en plus de faire match nul 5-5 avec une équipe madrilène composée de joueurs du Real et de l’Atlético. Cependant, ils finirent par être éliminés de la Coupe des Champions, faisant match nul 3-3 avec l’Athletic Bilbao sur terrain neutre à Bruxelles. Les formidables hongrois avaient désormais un avenir incertain.
LA NÉGOCIATION DE LA VENUE
L’idée de Flamengo de faire venir Honvéd au Brésil a commencé à prendre forme vers la fin 1956, lors de la planification de la pré-saison suivante. Le club avait déjà invité les Suédois de l’AIK à un match amical au Maracanã pour ouvrir la saison internationale. Pour augmenter le potentiel de revenus, il pensa à organiser un tournoi avec d’autres clubs étrangers, jusqu’à ce que se présente la possibilité de recevoir la célèbre équipe Honvéd pour des matchs à Rio de Janeiro, par l’intermédiaire des mêmes agents qui négocièrent pour les Suédois.
Le premier contact s’est fait à Bruxelles entre l’agent Osvaldo Corckus et Emil Osterreicher, secrétaire général du club hongrois. Emil échangea plusieurs télégrammes avec le président de Flamengo José Alves de Morais, et une fois tout convenu, le contrat pour la tournée brésilienne du Honvéd fut signé à Amsterdam le 29 décembre. Le club de Rio qui avait décliné une offre de tournée en Amérique du Sud pour amener les Magyars au Brésil ne s’épargna aucun effort financier pour promouvoir les rencontres à venir et payer les billets aller-retour Rio-Milán-Rio.
Jusque-là, il n’y avait qu’une seule impasse : la date du premier match. Flamengo voulait le disputer au Maracanã le 20 janvier, jour de São Sebastião, saint patron de la capitale Rio de Janeiro – et à l’époque également du pays, Rio étant encore siège du District fédéral. La Confédération brésilienne de football (CBD) avait pourtant déjà prévu à la même date et au même lieu le match entre les sélections de Rio de Janeiro et du Pará, pour le Championnat du Brésil des sélections d’état, et n’abandonnerait pas la date. Le calendrier prévoyait initialement que le club hongrois devait affronter la sélection de Rio le 16, puis Flamengo le 23 et Vasco le 27.
PENDANT CE TEMPS, EN HONGRIE
Le nouveau gouvernement hongrois est venu s’immiscer dans la vie du Honvéd dix jours après l’élimination en Coupe des champions. Car au final, le pouvoir central ne fut pas le seul à subir des changements au cours de ces semaines, avec l’investiture de János Kádar au poste de Premier ministre. La direction de la Fédération fut également entièrement destituée, passant sous la direction de nouveaux administrateurs intérimaires. Ce sont eux qui, le 30 décembre 1956, décidèrent en assemblée extraordinaire d’interdire tous les matchs du Honvéd dans les autres pays.
Les athlètes, qui se trouvaient à Casablanca (Maroc) depuis Paris, décidèrent de ne pas accepter l’ordre de la nouvelle direction de la Fédération et de poursuivre leur tournée – même si certains membres exprimèrent leur intention de retourner au pays à la fin du voyage. Emil Osterreicher, pour sa part, déclara que la Fédération n’avait pas le droit d’annuler les matchs, car les contrats avaient été signés et ratifiés. Et il confirma que la prochaine étape serait en Italie, où les joueurs se reposeraient, rencontreraient leurs familles et joueraient encore quelques matchs, avant de traverser l’Atlantique pour l’Amérique du Sud.
La fédération hongroise envoya un télégramme à la FIFA, rappelant sa nouvelle décision d’interdire au Honvéd de jouer à l’étranger. La raison alléguée était la « fatigue » des joueurs après les matchs qu’ils avaient déjà joué. Mais il s’agissait d’une tentative d’empêcher la concrétisation de l’intention d’une partie de la délégation de ne pas revenir au pays. La plus haute instance du football ne prit pas position. Elle ne fit que transmettre à ses affiliés la décision de la fédération hongroise. L’article 9 du Règlement de la FIFA prévoyait une interdiction de trois mois à un an pour tout club disputant des matchs internationaux sans l’autorisation des fédérations nationales.
LA RÉACTION AU BRÉSIL
Au Brésil, si la CBD présidée par Sílvio Pacheco considérait l’intention et les efforts de Flamengo comme louables, elle avait deux craintes : qu’une éventuelle punition par la FIFA des clubs impliqués se répercute sur les autres clubs, voire même sur l’équipe nationale brésilienne, entrainant l’exclusion du Brésil des éliminatoires de la Coupe du monde en Suède ; et que la venue des Hongrois fasse de l’ombre au championnat des sélections d’état, qui débuterait ce mois-là. Malgré cela, elle envoya une demande de Flamengo à la FIFA pour que la Fédération hongroise reconsidère sa décision, ce que refusa l’entité magyare.
-> Je continuerai plus tard, il faut que je sorte.
J’ai corrigé quelques fautes. C’est la traduction de l’article d’Alfredo Puskás.
Ah, j’avais pas tilté. En tout cas, merci !
Vasco et Santos, initialement intéressés pour affronter les Hongrois, finirent par être dissuadés de leurs intentions par leurs fédérations respectives. Il y avait aussi, des deux côtés, la peur d’être sanctionné par la FIFA. Malgré tout, le club cruzmaltino (Vasco) publia une note exprimant sa sympathie pour la cause défendue par Flamengo qui envoya le 7 janvier des billets pour Rio à la délégation hongroise, confirmant ainsi sa volonté de recevoir Honvéd.
La Fédération Paulista, qui prévoyait une suspension de 100 à 365 jours pour ses affiliés s’ils ne se conformaient pas à ses ordres, envoya une circulaire, signée par son président Mendonça Falcão, dans laquelle elle interdisait toute exhibition du Honvéd dans la capitale et dans l’état de São Paulo.
En fait, même la FIFA avait des raisons d’avoir peur : très impopulaire sur le continent américain, elle a évité une implication plus profonde dans l’affaire, craignant que cette attitude ne motive une insurrection menée non seulement par les Brésiliens, mais aussi par les Argentins, Uruguayens et Colombiens – tous partisans du Flamengo et intéressés par la venue du Honvéd – et qui pourraient scinder l’entité. Ainsi, il se contentèrent de n’agir que comme garçon de courses, transmettant les décisions prises d’un parti à l’autre .
La presse brésilienne (majoritairement favorable à la venue du Honvéd, qu’elle qualifiait d' »équipe interdite ») a suivi de près l’évolution de l’affaire. Certains chroniqueurs en vinrent même à contester la légitimité du directoire de la fédération hongroise, placé au pouvoir après la destitution du précédent par le régime de Kádar, à prendre la décision d’interdire la tournée des vedettes magyares. Dans sa chronique du Jornal do Brasil , le poète Manuel Bandeira, originaire du Pernambouc mais basé à Rio, et l’un des plus grands noms de l’histoire de la littérature brésilienne, écrivit en soutien à Flamengo :
« J’ai été interrogé à de nombreuses reprises par des journalistes ou des amis qui voulaient savoir « quel était mon club ». J’ai toujours répondu que je n’avais pas de préférence : je soutenais l’équipe qui jouait le mieux ou était la plus fair play. Mais j’ai remarqué que mon inclination hérissait un peu et j’ai fini par me définir vaguement pour Flamengo. « Pourquoi ? » me demanda un journaliste minicieux. ‘Parce que je trouve que le nom est beau et c’est le club de Zé Lins [l’écrivain de Paraíba, rouge et noir honoraire, José Lins do Rego] ‘. Eh bien, maintenant, mes amis et mes ennemis, après l’attitude qu’ils ont pris dans le cas de l’équipe hongroise, je suis de Flamengo et de coeur ».
ENFIN, LE DENOUEMENT
La question passa alors devant le Conseil national du sport (CND), qui s’abstint de l’analyser car il ne l’estimait pas de son ressort. Entra alors en scène la première dame brésilienne, Sarah Kubitschek, qui interviendra auprès du ministère des Affaires étrangères pour ordonner au consulat brésilien à Milan d’accorder un visa d’entrée au Brésil à la délégation du Honvéd. Les Hongrois viendront.
N’ayant pas les moyens d’imposer son veto à la tournée, la fédération hongroise pris une mesure un peu extrême : elle décida de suspendre tous les membres de la délégation et leur interdit d’utiliser le nom « Honvéd » dans les matchs qu’ils disputèrent, ce à quoi Emil Osterreicher répliqua : « Nous ne reconnaissons pas l’association hongroise de football si l’association hongroise de football ne nous reconnaît pas comme le club Honvéd. Nous rejetons totalement cette décision partiale décidée pour des raisons politiques ».
La délégation hongroise – les joueurs, le secrétaire Emil Osterreicher et les entraîneurs János Kalmár et Bela Guttmann (ancien entraîneur du club, invité à participer au voyage après avoir rencontré les joueurs à Vienne, la ville où il fit sa carrière d’athlète et vivait à l’époque), ainsi qu’un dirigeant – débarquèrent à Galeão (quartier de l’aéroport international de Rio) le 14 janvier et reçurent un accueil digne des stars internationales par la foule qui les attendait.
De là, ils partirent pour l’hôtel Glória, à l’époque l’un des hôtels les plus luxueux et prestigieux de Rio, où ils séjourneront. Pendant leur séjour à Rio, Puskás, Kocsis, Sandor et Budai seront également interviewés par le journaliste Luiz Mendes et l’ancien joueur vedette Ademir de Menezes pour une émission sportive sur TV Rio. Et plusieurs joueurs de l’équipe participeront à des matchs animés sur la plage de Copacabana.
De l’équipe nationale hongroise de 1954, parmi ceux qui ont défendu Honvéd, viendront le gardien Gyula Grosics (qui à l’époque avait déjà quitté le club pour Tatabanya), le milieu de terrain central József Bozsik et le quatuor d’attaquants formé par László Budai, Sándor Kocsis, Ferenc Puskás et Zoltán Czibor. Les autres joueurs de Honved qui voyageront seront les gardiens de but Faragó et Garamvolgyi, les défenseurs Rakoczi, Dudas, Banyai et Bagoly et le milieu de terrain Antal Kotász.
Le casting fut encore renforcé par des joueurs d’autres clubs, qui décidèrent de rejoindre les dissidents. Outre Grosics, le défenseur Mihály Lantos, l’attaquant Károly Sándor, le milieu de terrain gauche Szolnok (tous de Vörös Lobogó, le nom du MTK à l’époque), ainsi que des athlètes plus jeunes, qui émergèrent après la Coupe du monde suisse, comme le milieu de terrain Szabo ( de Kinizsi, comme on appelait alors Ferencváros) et le milieu de terrain droit Toroczik. Enfin, l’attaquant vétéran Ferenc Szusza (de Ujpest Dozsa), le plus grand joueur du pays avant la génération dorée, faisait également partie du groupe.
Lors de l’entraînement au stade de Gávea, à nouveau suivi par une foule, les Hongrois impressionneront non seulement par leur qualité technique, mais aussi par la puissance et la précision de leurs tirs – cadrés au trois quart. Même si la chaleur estivale à Rio était assez intense, on s’attendait à ce que l’acclimatation ait lieu dans les jours précédant le premier match contre Flamengo, dans la nuit du 19 janvier, la veille de la fête du saint patron de la ville de Rio de Janeiro.
-> Suite à venir plus tard
C’est pas un article, c’est une nouvelle. Je vais essayer de terminer ce soir.
« Quand Toulouse gagnera à nouveau une coupe Fred! Hehe »
La coupe Drago n’existant plus, ça risque d’être dur !
On peut faire une analogie avec 64 où c’est Suarez, avec pourtant un palmarès bien plus riche, qui est cette fois distancé par Law de…18 points. Ça mériterait également un article. Ça m’interpelle ces votes unanimes de 60 et 64, car à ma connaissances les Wotan (https://lee.classite.com/music/Hotter/hotter1.gif) ne se concertent pas.
Je constate aussi que Kopa, de 56 à 60, est toujours bien placé. Le chouchou ?
Law 64, encore une fameuse bizarrerie..
Prompt rétablissement à l’auteur de l’article.
@Khiadia, Der Kicker? Ach!
https://jungle.world/sites/default/files/styles/article_wide/public/2022-06/d-16-Ausschnitt-Buchcover.jpg?itok=30TOgeZr
🙂
(Kicker resta quelque peu puant après 45)
Une photo qui intéressera Bobby!
Essaie de lire les explications soviétiques. Génial! Il explique qu’il est difficile pour un journaliste de son pays de voir les joueurs étrangers. Et sur les espagnols, je cite » le monde sportif sait pourquoi un journaliste soviétique n’a pu les juger à Moscou. »
En référence au forfait espagnol en qualif de l’Euro. Haha
Je vais réessayer ce soir.
Ce que tu en rapportes est effectivement truculent et instructif.
Je n’avais pas vu qu’il s’agissait de Lev Filatov, pas n’importe qui ça, une référence absolue en ex-URSS!
On lui doit des accusations de matchs arrangés, portées contre Lobanovski, et qui au final lui coûtèrent cher malheureusement.
Je ne m’étonne pas du ton sans fioritures de son texte, ça colle avec ce que je sais du personnage, en substance : ne pas badiner avec la vérité mais toujours la dire toute crue.
Wa super article sindelar!
Super complet.
Merci. Comme d habitude j découvre tout, sauf que les magouilles existaient déjà bien sûr ahah.
Il faut lire sur Footballski les articles consacrés au Honved Budapest.
Je recherche désespérement un article et des photos sur le match amical de 1957, Real-Honved (5-5), la seule fois où Di Stéfano et Puskás se sont affrontés, mais je n’ai trouvé que cette photo: https://pbs.twimg.com/media/E9-dnocWYAEP_ZP.jpg
« la seule fois où Di Stéfano et Puskás se sont affrontés »
Je ne parle pas évidemment pas du Espanyol-Real du 13 septembre 64 de leur fin de carrière.
https://c8.alamy.com/zoomsfr/9/2593962239a54942a03be73dde360f95/2gj0erc.jpg
Terrible photo ! Kopa est svelte, même Puskas est étonnamment « fit » (lui qui fut toujours un peu enrobé, même avant d’être le major bedonnant, disons que sa pointe de vitesse n’était pas sa qualité première…), mais Di Stéfano… La flèche blonde en prend un coup, elle ne devait pas alors courir bien vite : la bouée, les nichons, la calvitie, les bras ballants à la François Hollande… Comment qu’y disait le Général ?
Puskás courait quand il le fallait, mais c’était tout sauf un plot. Di Stéfano sera très présentable en 60, en 62 et même 64.
J’ai pas dit que c’était un plot (mon Dieu ! Puskas, un plot…), j’ai dit que la vitesse n’était pas sa qualité première. De là à être un plot…
Je suis désolé de t’avoir fait bosser, Cebolinha, car j’ai trouvé un autre article similaire, en portugais avec traduction:
Honved au Brésil le 23 janvier 2007
Honved, une équipe hongroise qui dans les années 50 a servi de base à la fantastique équipe hongroise qui nous a enchantés avec de beaux matchs mettant en vedette des joueurs comme Puskas, a fait un court séjour au Brésil en 1957 à la suite du fait que l’équipe a été déclarée non- existant et interdit d’organiser des matchs officiels par la FIFA, où qu’il se trouve, c’est-à-dire que la FIFA a placé l’équipe dans l’illégalité. Cela était dû au fait que le ministre hongrois des Sports, à l’époque, était favorable au maintien du régime communiste soviétique dans le pays. A cette époque, la révolution anticommuniste, plus connue sous le nom de Révolution hongroise de 1956, éclate en Hongrie, menée principalement par des étudiants et des gens populaires dont l’objectif principal est de contester le régime communiste et les mesures imposées par la politique stalinienne de l’Union soviétique. Syndicat. Dans ce contexte, Honved, symbole de force, de fierté et de liberté hongroise à l’époque en raison des réalisations récentes et du bon football joué, s’est tenu en faveur de la révolution et par conséquent de la majeure partie de la population hongroise. Le gouvernement, favorable au maintien du régime communiste dans le pays, a fini par faire pression sur la FIFA pour que ce »symbole de la force et de la persévérance hongroise » prenne fin et soit empêché d’organiser des matches, ce qui en pratique ne s’est pas produit. Honved faisait une sorte de tournée internationale à l’époque. La FIFA a établi qu’à la fin de la tournée (31 mars 57), Honved cesserait d’exister et ne pourrait donc pas jouer de matchs. Même dans cette situation, Honved est venu au Brésil et a joué un total de 5 matches : 3 contre Flamengo, 1 contre Botafogo et 1 contre une équipe combinée de Botafogo et Flamengo. Gagné 3 et perdu 2. Un bref commentaire sur les matchs :
»L’arbitre brésilien Mario Vianna a arbitré le premier match de Honved. Il apparaît sur la photo avec le capitaine de Flamengo Evaristo qui reçoit le trophée du vainqueur du match.Enfin, juste au moment où le fruit défendu a été goûté, le fan carioca a regardé les débuts de Honved au Brésil. Le maracanã était bondé pour regarder les magiciens hongrois, dont le président Jucelino Kubitschek, le maire Negrão de Lima, le ministre Luiz Galloti et Don Helder Câmara. C’était un match sensationnel. Le fan qui est allé voir Honved a fini par être ébloui par les Flamengo boys. Les Hongrois, venant d’une saison sans ballon sur la Riviera italienne et trouvant étrange le terrain mou du maracanã, n’ont pas impressionné. Parfois, ils sont apparus avec des mouvements montrant le talent de leur grand football. Le jeu de Flamengo, agile et déconcertant, a complètement démantelé le système d’action des visiteurs. La légèreté de l’attaque rouge noire, avec des feintes rapides et des passes immédiates, n’a pas non plus bien profité à la défense magyare, qui n’était pas au niveau de sa puissance d’attaque.
Flamengo 1×0 Moacir
Flamengo 2×0 Henrique
Flamengo 3×0 Evaristo
Flamengo 3×1 Szusza en première mi-temps
Flamengo 4×1 Paulinho
Flamengo 5×1 Dida
Flamengo 5×2 Budai
Flamengo 6×2 Evaristo
Flamengo 6×3 Puskas
Flamengo 6×4 Puskas.
Le juge était le Brésilien Mário Vianna. Les équipes ont joué comme ça. Flamengo : Ari. Tomires et Peacock. Milton. Luis Roberto et Edson. Paulinho. Moacir (duc). Henri (Dida). Evaristo et Baba.
Honvéd : Grosic. Rackoszye Baniay. Boszik. Kotasz (Farago) et Lanthos. Budaï. Kocsis. Suzza. Puskas et Czibor (Sandor).
Flamengo a concédé le match revanche qui a eu lieu à São Paulo, au pacaembu. Honved a rendu le score et a gagné par 6×4. Les buts ont été marqués par Puskas (Honved). Moacir (flamand). Puskas (Honved) ? première fois. Budaï (Honved). Puskas (Honved). Puskas (Honved). Sandor (Honved). Henri (flamand). Dida (flamand) et Evaristo (flamand).
Les Hongrois sont retournés au Maracanã et ont affronté Botafogo. Honved a gagné par 4×2. Les buts. Kocsis (Honved). Garrincha (Botafogo). Puskas (Honved). Paulinho (Botafogo). Kocsis (Honved) et Koscis (Honved).
La saison s’est poursuivie avec un autre match entre Flamengo et Honved. Un flic têtu. Résultat? Honved 3 x Flamengo 2 . C’était un grand jeu et décidé en détail. Les buts. Budaï (Honved). Sandor (Honved). Henri (flamand). Evaristo (flamand). Suzssa (Honved).
Le dernier match était contre un combiné Flamengo-Botafogo. Dans ce match, les Brésiliens ont été les maîtres de la partie. Et ils ont fait leurs adieux aux Hongrois sous la forme d’une déroute. La combinaison gagnée par 6×2. Les buts. Garrincha (combiné). Puskas (Honved). Didi (Combiné). Evaristo (Combiné). Dida (Combiné). Puskas (Honved). Didi (Combiné) et Evaristo (Combiné). Combiné formé avec Amauri (Botafogo). Tomires (flamand) et Pavão (flamand). Bauer (Botafogo). Panpolini (Botafogo) et Bob (Botafogo). Garrincha (Botafogo). Didi (Botafogo). Evaristo (flamand) (Moacir) (flamand). Dida (Flamengo) et Paulinho (Flamengo). »
Cent treize mille personnes ont regardé le 1er match de Honved, disputé au Brésil, contre Flamengo d’Evaristo Macedo, disputé au Maracanã. À la fin du match, Flamengo a reçu une coupe commémorative pour la victoire sur Honved.
Le public brésilien a été émerveillé par le niveau de jeu présenté par les Hongrois et ils ont vu de près un football majestueux qui enchantait le monde à cette époque. En raison de la situation défavorable dans leur pays, la plupart des joueurs ne sont pas retournés en Hongrie. Beaucoup sont restés ici, beaucoup sont allés dans d’autres pays, comme dans le cas de Puskas qui a marqué l’histoire au Real Madrid. L’entraîneur de Honved, Bella Guttman, est allé entraîner São Paulo et a remporté le championnat Paulista en 1957. Honved existe toujours aujourd’hui et occupe la 13e place de la ligue hongroise de football.
Bien que la situation aujourd’hui ne soit pas la meilleure, Honved a marqué l’histoire à son époque et mérite toute la reconnaissance possible, non seulement pour les joueurs qu’ils avaient et qui constituaient la majorité de l’équipe hongroise, mais simplement pour ce que ces joueurs ont représenté et fait pour l’histoire du football et pour le peuple de son pays.
La trajectoire d’Honved au Brésil a servi d’inspiration pour un reportage spécial sur Globo Esporte, qui a servi de base à ce billet. Il est très intéressant car il contient des opinions de joueurs qui ont participé aux matchs comme Evaristo de Macêdo, ainsi que des opinions d’historiens et du grand Armando Nogueira. o Lien :
Si vous voulez en savoir plus sur la révolution hongroise de 1956, accédez à :
http://pt.wikipedia.org/wiki/Revolu%C3%A7%C3%A3o_H%C3%BAngara_de_1956
Sources :
http://www.museudosesportes.com.br
http://pt.wikipedia.org/wiki
http://www.youtube.com
posté par Joaquim Luiz à 22:29:00
« J’ai pas dit que c’était un plot »
Si, tu l’as dit et j’ai un témoin:
https://pbs.twimg.com/media/B0kc_QrCMAA39vm.jpg