Pierre Arrighi : « Les contes de fées officiels s’imposent toujours » (1/2)

En ce début d’année, l’auteur franco-uruguayen Pierre Arrighi a bien voulu nous accorder une interview consacrée au football uruguayen et aux premiers championnats du monde de football. En voici la première partie.

Bonjour Monsieur Arrighi. Vous avez publié en octobre dernier votre premier livre en français : Trois naissances du championnat du monde de football. Est-ce que vous pourriez commencer par vous présenter et expliquer pourquoi publier un livre en français, après plusieurs en espagnol ?

Je commence par le deuxième point. Le livre des Trois naissances devait être publié en espagnol mais des amis lecteurs m’ont convaincu de faire une version française et proposé une première traduction. C’est un juste retour des choses. La FIFA, les JO, le championnat du monde sont des créations françaises. Dans moins de deux ans on fêtera les 100 ans des grands JO de 1924, les 130 ans de l’invention des Jeux par Coubertin, et on devrait aussi fêter la première naissance du championnat du monde universel de football. Pour ce dernier point, ça ne sera pas le cas puisque les contes de fées officiels s’imposent toujours. Mais je garde espoir quant à l’ouverture d’un débat à la marge.

Aujourd’hui le débat n’existe pas. Les livres publiés par les présidents de la FIFA, qui se présentent comme officiels, sont rédigés par une poignée d’individus, français ou anglais, sans légitimité aucune, et ne recueillent qu’un seul son de cloche, celui qui convient à la politique de la fédération internationale. Mais les fans et les médias ont leur mot à dire. Ils ne sont pas tous hostiles à la connaissance et à l’indépendance d’esprit.

Quant à moi, je suis né à Montevideo en 1954. Mon père dirigeait le Lycée français. Mon enfance a baigné dans le football. J’ai fréquenté les tribunes du stade Centenario. Quand la Suisse d’Amérique s’est écroulée, vers 1969, je suis passé à autre chose. Je me suis installé en France en 1976. Je suis devenu graphiste et professeur à la Faculté des Arts d’Amiens. J’ai écrit sur l’histoire du dessin, travaillé au Centre de recherches en arts, sans pouvoir faire prospérer un travail sur le football, qui est un art de l’action. En 2007 j’ai pris conscience des aberrations que des livres comme La balle au pied (Alfred Wahl) ou 1904-2004, le siècle du football (Wahl, Lanfranchi, Mason, Eisenberg) colportaient sur l’Uruguay. J’ai commencé un modeste travail critique dans un site très dynamique qui fonctionnait alors, Sportvox.

Mes articles étaient bien accueillis, mais les participants, souvent de l’espèce des fans érudits à mémoire d’éléphant, s’amusaient à me coincer à propos des quatre étoiles de la Celeste. Je n’avais pas d’arguments solides. Les journalistes uruguayens ne m’apportaient que des spéculations indirectes, provinciales et suspectes. Il me semblait impossible de trouver la solution documentée. C’est L’intégrale des Bleus de Pierre Cazal qui m’a donné l’idée d’aller voir du côté de la bibliothèque de la FFF, boulevard de Grenelle. Mais sans conviction, pressentant que je n’y trouverai rien. C’était le 29 juillet 2010. Sylvie Blangy-Mari m’a accueilli. J’y ai passé la journée. Stupéfait, j’avais sous les yeux les premières clés.

Alors, pourquoi quatre étoiles sur le maillot de la Celeste ? Habituellement, les maillots des équipes nationales ne font figurer que les victoires en Coupe du monde, or l’Uruguay y ajoute les titres olympiques de 1924 et 1928, ce qui peut surprendre.

Les étoiles sont une invention des associations, pas de la FIFA. C’est la CBD brésilienne qui en 1968 ajoute deux étoiles bleues sur son écusson, puis trois en 1970 sur le maillot. D’autres champions du monde suivent. En 1991, l’association uruguayenne décide de s’appliquer les mêmes symboles de manière à ce que son véritable palmarès soit exhibé. Elle présente une demande officielle à la FIFA. Le secrétariat général approuve les quatre étoiles une première fois, et ce processus se répète tous les deux ans, sans objection. L’idée selon laquelle les étoiles représenteraient des victoires en Coupe du monde de la FIFA est tardive. Le règlement de la FIFA à ce sujet n’apparaît qu’en 2001 et reste flou jusqu’en 2010. Mais il y a désormais jurisprudence.

Pourquoi l’AUF décide d’exhiber quatre étoiles ? Elle s’appuie sur trois textes officiels : les rapports des délégations uruguayennes de 1924 et 1928, et le rapport officiel de la Coupe du monde de 1930 où Rimet déclare très précisément que l’Uruguay « a gagné trois coupes du monde consécutives ». Ses dirigeants ne sont pas dans la polémique puisqu’à l’époque la question du palmarès mondialiste reste une affaire nationale et la FIFA ne cherche pas à commercialiser « ses » étoiles comme elle tente de le faire aujourd’hui. Les étoiles faisaient partie de l’identité et du palmarès national, non d’une supposée « marque FIFA » ou « marque Coupe du monde ». La question commerciale ne se posait pas alors comme elle se pose aujourd’hui.

Les dirigeants uruguayens de 1991 avaient encore une mémoire fraîche qui les portait à penser que les titres de 1924 et 1928 étaient de même valeur que les titres suivants. Ils savaient très bien, par ailleurs, que la Coupe du monde de 1930, sauvée par l’AUF après la désertion de la FIFA européenne, n’avait été mise en place que parce que le championnat olympique ouvert à tous ne serait plus possible après le Congrès olympique de Berlin de 1930. Puis cette mémoire directe s’est estompée. Mazali, le gardien corse de la Celeste, disparaît en 1975. Et par la suite, certains journalistes uruguayens influents se sont improvisés historiens et ont semé la plus grande confusion. C’est bien le problème : passer de la mémoire directe, des témoignages, des impressions, au travail d’archives, solide et définitif. Or, les archives de 1924 et 1928 ne sont pas en Uruguay. Elles sont en Europe, à la FFF, à la FIFA, au CIO.

C’est ce que j’ai commencé à découvrir ce premier jour boulevard de Grenelle. L’avant-garde française – Rimet, Delaunay, Gamblin – argumentait systématiquement : 1924 sera le premier championnat du monde universel ouvert à tous les footballeurs. Les précédents n’étaient ni mondiaux ni universels. Dans le France Football hebdomadaire tout était écrit et répété. Il y avait le règlement ouvert, les explications de Delaunay dans ce sens et le titre mis en jeu : Tournoi Mondial universel. Fini l’amateurisme dégradant.

Mais il y avait aussi un grand mystère : si, sous la houlette de Coubertin, Rimet et Delaunay avaient pu réglementer le tournoi de football comme un championnat ouvert aux non-amateurs et aux professionnels, alors les Jeux n’étaient pas vraiment, comme on ne cesse de le raconter, réservés aux amateurs.

L’équipe d’Uruguay, championne du monde 1930.

Et pourtant, à partir de 1925, le CIO entreprend d’imposer l’amateurisme au sein des Jeux. Par ailleurs, et c’est une objection souvent entendue, peut-on réellement considérer comme mondiaux des tournois ne rassemblant qu’un nombre limité d’équipes ? Peut-on considérer comme mondial un tournoi comme celui de 1924 où il n’y a ni l’Angleterre, ni le Brésil, ni l’Autriche, ni l’Argentine ?

Petite précision : ce n’est pas le CIO qui tente d’imposer l’amateurisme, mais le congrès olympique entre les mains des dirigeants des pays monarchiques (Britanniques, Suédois, Belges, Hollandais), et qui agit alors contre les principes définis par Coubertin et les commissaires fondateurs dès 1894. La réforme se fait en deux temps. D’abord le congrès s’arroge le pouvoir législatif. Ensuite, il vote le code amateur qui interdit l’accès aux jeux des athlètes salariés. Le problème est que certaines fédérations se révoltent. Le tennis quitte les Jeux en 1926. Le cyclisme décide de rester mais de ne pas respecter la nouvelle règle. Quant à Rimet, président de la FIFA, il entreprend de vaincre les amateuristes au sein même de la FIFA et en mai 1927 fait un chantage au successeur de Coubertin, Baillet-Latour : si le CIO n’accepte pas l’Open de la FIFA, le football n’ira pas à Amsterdam. En août, le Comité exécutif du CIO cède et les professionnels envahissent le stade olympique, en football mais aussi en athlétisme.

En ce qui concerne le fait mondial ou pas, entendons-nous bien : ce sont les dirigeants olympiques qui, dès 1894, définissent un championnat du monde comme un championnat olympique qui atteint la rencontre entre Europe et Amérique. C’est pourquoi l’athlétisme est un championnat du monde depuis 1900. Et n’oublions pas que la FIFA est créée par l’USFSA de Coubertin, la même organisation qui crée les JO. Les dirigeants de la FIFA sont aussi des dirigeants olympiques. Rimet est salarié du Comité Français entre 1921 et 1925, et la FIFA est une fédération officiellement olympique depuis 1914. La FFF appelle à un championnat du monde dès août 1923 et désigne le tournoi olympique comme « Tournoi mondial » dans tous les textes officiels.

Pour ce qui est de la représentativité, il faut d’abord comprendre que le monde c’était alors 70 pays, le monde sportif moins de 50, et la FIFA une trentaine. Il faut comprendre aussi que dans le concept olympique, un championnat du monde veut dire quelque chose de précis : la rencontre entre l’Europe et l’Amérique. Enfin, il faut admettre que championnat du monde ne veut pas dire, en matière de sport, que tous les pays politiques doivent être là. Regardez les mondiaux de ski, de judo, de baseball ou de hockey sur glace. Il ne faut pas confondre monde politique et monde d’un sport spécifique.

Le fait est qu’en 1924, tout le monde sportif moderne existant est invité à jouer au football, plus que les membres de la FIFA. Le résultat est sans appel : une ronde finale avec 22 pays et cinq continents sportifs représentés : Europe, Asie (Turquie), Afrique (Egypte), Amérique du Nord (USA) et du Sud (Uruguay, champion continental). La situation se maintient en 1928, mais avec cinq pays américains dont l’Argentine. En quantité de pays présents lors d’une ronde finale, le niveau de 1924 et 1928 ne sera dépassé qu’en 1982, comme le remarque la FIFA elle-même dans son dernier livre. Pour ce qui est du nombre de continents, il n’est égalé qu’en 1970. Faut-il annuler les titres mondiaux de l’Italie, de l’Allemagne, les deux premiers sacres de Pelé ? Ça n’a aucun sens sportif.

Il faut rappeler qu’à l’époque la participation en championnat olympique ou mondial était facultative. En 1966, c’est toute l’Afrique qui boycotte. En 1938 il n’y a pas l’Uruguay ni les Anglais, et en 1950 il y a les Anglais mais pas les Argentins, pas les Français. Ne participaient que ceux qui en avaient vraiment envie. Aujourd’hui c’est une obligation et celui qui ne joue pas est sanctionné. On ne participe plus seulement par esprit sportif mais par obligation et intérêt : ça rapporte. On force ainsi la supposée universalité du football de manière artificielle.

Le football est un fait de culture, donc de participation libre. Avant de jouer les enfants s’interrogent: « qui VEUT jouer ? ». Toute la valeur des championnats de l’époque est que jouaient ceux qui manifestaient d’entrée de la sportivité. Rappelons que les premières Copa América se jouent à quatre et personne ne suggère de les annuler. La première Coupe d’Europe n’a regroupé que 17 pays. Rappelons aussi qu’en 1950 au Brésil il n’y eut que 13 participants, comme en 1930. Faut-il effacer tous ces titres de l’histoire ? Certains historiens le disent en coulisse mais c’est alors récompenser l’abstention, récompenser le manque d’élan et de sportivité. Le cas anglais est particulier : la Football Association s’oppose depuis le début aux championnats de la FIFA, surtout s’ils sont ouverts aux professionnels. Les Anglais sabotent la Coupe d’Europe de Guérin en 1905, le championnat du monde d’Amsterdam de 1928, et ça continue jusqu’à la Guerre. C’est bien ça ? Je ne le crois pas. L’Uruguay, plus fair-play, ne va pas à Rome en 1934 ni à Paris en 1938, mais n’a jamais remis en cause les titres mondiaux conquis par l’Italie.

Lorsqu’un titre mondial ou continental est mis en jeu dans les conditions suffisantes et réalistes d’une époque donnée, il faut accepter le résultat. D’autant que la Coupe du monde a été créée non par plaisir mais parce que l’Open mondial ne pouvait plus se poursuivre dans le cadre olympique : la Coupe du monde n’est rien d’autre que la manière de sauver l’Open olympique, avec les mêmes dirigeants, les mêmes joueurs, etc.

Enfin, il faut bien saisir ceci : la mise en jeu d’un titre mondial suprême dès 1924 n’est pas une invention des Uruguayens après-coup : c’est ce titre-là que Rimet met en jeu en 1924 et les Anglais comme les Argentins et les Brésiliens sont attendus. En 1925, fait majeur, Rimet veut étendre « ce championnat du monde » olympique en créant des « préludes continentaux ».

La deuxième partie de cette interview est ici.

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108 réflexions sur « Pierre Arrighi : « Les contes de fées officiels s’imposent toujours » (1/2) »

  1. Merci pour cette interview de qualité.

    J’aime bien Pierre Arrighi, et je retrouve ici pourquoi :), c’est un vrai plaisir de le relire.

    Juste un nano-regret après lecture de ce premier volet : il se disait démuni, manquer de ressources solides pour contrer la doxa.. et puis, il semblerait qu’il y eût une illumination au boulevard de Grenelle, « les clés » étaient là.. mais quelles clés, plus précisément? Quelque document en particulier eut-il sur lui un effet décisif?

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    1. Son style est particulièrement agréable et rythmé. On retrouve les mêmes qualités dans son bouquin : on s’ennuie rarement, malgré les 350 pages.

      Pour les premières clés, voir la réponse à la deuxième question : la documentation d’époque, notamment « France football » (rien à voir avec le titre actuel, c’était alors l’organe officiel de la 3FA).

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    1. La FIFA s’est construit un récit, fondé par Rimet en 1954, révisionniste et anti olympique. Mais en parfait accord avec les « Britanniques », qui comme vous le savez, restent dominateurs….. Quand les Britanniques et l’ensemble des puissances monarchiques renversent le républicanisme de Coubertin, en 1925 provisoirement et en 1930 définitivement, ils imposent une fausse histoire des JO: les JO intrinsèquement amateurs, c’est-à-dire, réservés à l’aristocratie des clubs….. Rimet qui est une victime de cette régression, accusera plus tard « les JO » en général en épargnant les Britanniques qui viennent de rejoindre la FIFA en 1946…. Il trouve alors une solution géniale comme toujours du point de vue politique, lamentable du point de vue de la vérité et du sport: il attaque les JO amateurs et décide que la FIFA a toujours été universaliste. Il explique alors que le premier championnat qu’il dirige est celui de 1930 ce qui est doublement faux: il ne dirige pas 1930 et dirige 1924 et 1928. Ce conflit entre mouvement olympique et FIFA se dessine deux récits distincts tout aussi faux les uns que les autres: le CIO toujours amateur, la FIFA anti olympique et universaliste depuis….. 1930. Tout est faux mais ça a l’avantage d’un partage des produits. Par la suite, la FIFA affirma « sa marque »: la Coupe du Monde. Coubertin a inventé les Jeux, Rimet le championnat mondial de football. Et ça devient un problème commercial. Les étoiles uruguayennes posent donc un problème: si elles sont vraies, alors le championnat du monde a été inventé « dans le cadre olympique » et le mérite initial revient à Coubertin ! Mais ça n’arrange ni le discours aristocratique et politique qui enfume les JO (l’amateurisme, cette momie comme disait Coubertin) ni la FIFA qui perd sa supposée invention……..

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  2. Merci Bobby de cette initiative et merci à Pierre Arrighi de s’être prêté au jeu.
    Je suppose que la non attribution du titre de champion du monde à la Belgique au titre des jeux olympiques d’Anvers est liée à l’absence des nations sud américaines (je crois me souvenir que la Belgique se plaindra d’un traitement inéquitable en comparaison de celui réservé à l’Uruguay ou à l’Argentine – finaliste des derniers JO – lors du tirage au sort des poules de la coupe du monde 1930) ? Quelle est la raison de leur absence alors qu’il existe déjà la Copa América depuis plusieurs années et que voyager en Europe ne devait pas être beaucoup plus compliqué que de se rendre au Chili pour des Argentins, des Uruguayens ou des Brésiliens ?

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    1. Je viens de lire sur la critique de Bobby du livre de Pierre Arrighi que 1920 n’est pas ouvert aux professionnels, ce qui pourrait être un argument complémentaire à la « non universalité » du tournoi de football et à la non reconnaissance de celui-ci en tant que championnat du monde. Mais en 1920, hormis au UK, où le football est-il vraiment professionnel ? En quoi la situation du professionnalisme est-elle différente entre 1920 et 1924 ?

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      1. La définition d’un professionnel (ou, devrait-on peut-être dire, un non-amateur) pouvait être excessivement étroite. Sans être officiellement professionnel, s’il s’avérait que le bonhomme percevait ou avait perçu quelque dédommagement (remboursement de frais, compensation pour les salaires ou revenus perdus, etc.), cela suffisait à le priver du titre d’amateur.

        Dans les années 1920, personne ne s’illusionne sur l’amateurisme marron. Et celui-ci est vigoureusement puni par certaines instances puristes.

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      2. Oui, je suis bien d’accord, mais peut-on réellement penser qu’en 1920, même tout jeune, Zamora est un « pur » amateur ? René Petit en équipe de France ? De fait, je ne pense pas que la différenciation tournoi ouvert aux amateurs vs pros ne puisse être un facteur discriminant pour l’attribution a posteriori du titre de CM 1920. L’absence des Sud-américains l’est et suffit à réduire la portée du titre de la Belgique… Mais, et c’est ma question initiale, s’il s’agit d’un choix délibéré des Sud-américains de ne pas se rendre à Anvers, en quoi la Belgique devrait-elle être « pénalisée » (je reprends d’ailleurs une partie des arguments de Pierre Arrighi en écrivant cela) ?

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    2. Il n’y a pas en 1920, au contraire de 1924, l’idée de faire se rencontrer l’Europe et l’Amérique. En tout cas, pour le football. Le tournoi de foot des Jeux reste un tournoi européen, de surcroît amateur. Il n’y a pas réellement d’ambition mondiale, sinon à proclamer que la meilleure nation européenne est la meilleure mondiale ! D’ailleurs, une fois passé les émois des premières semaines qui proclament la Belgique championne du monde, la presse européenne redescend sur terre et l’affuble plus volontiers du titre de championne d’Europe.

      En 1920, la Copa América a lieu à peu près en même temps que les Jeux. L’idée est nette : il y a une compétition continentale en Amérique du Sud (la Copa) et une autre en Europe (les Jeux). Il faudra attendre 1924 pour que l’idée de confronter les deux continents majeurs du sport moderne se concrétise dans le football. Et les deux pays américains présents à Paris ne sont pas là par hasard : l’Uruguay est le champion d’Amérique du Sud et les Etats-Unis sont le leader de l’Amérique du Nord.

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      1. Ah ok, désolé, j’ai écrit plus haut pendant que tu me répondais. Il est vrai qu’il y a très peu de Sud-américains inscrits aux JO 1920 : un Argentin, deux Chiliens et quelques Brésiliens (au tir notamment).

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    3. « (je crois me souvenir que la Belgique se plaindra d’un traitement inéquitable en comparaison de celui réservé à l’Uruguay ou à l’Argentine – finaliste des derniers JO – lors du tirage au sort des poules de la coupe du monde 1930) »

      Je présume que tu réfères ici à la désignation des têtes de série?

      Sincèrement pas souvenir – mais je connais très, très mal le foot d’avant-guerre – que la Belgique s’en plaignît..??..mais je te crois / le crois bien volontiers!, dans la mesure où les élites belges connurent dans les 20’s et en tout une inhabituelle montée d’hormones :), marquer son territoire on va dire.. C’était bien le genre, oui!

      Les têtes de série furent Uruguay, Argentine.. Je ne sais plus qui des Etats-Unis ou du Paraguay.. Les Yougoslaves aussi??

      Rétrospectivement, et quand bien même les Européens (dont les Belges?) la trouvèrent peut-être saumâtre : qu’objecter à ces choix au regard des résultats lors des tournois de 24 et 28..voire au regard de ce qu’accomplirent ces nations durant la WC 1930? Ben pas grand-chose : ce fut bien vu de l’organisateur! (je crois me rappeler que c’est l’organisation uruguayenne qui désigna ces 4 têtes de série)

      De toute façon le foot belge ne valait déjà plus tripette, dès le début des années 20 il entreprend son long déclassement sportif.. Dès lors, revendiquer un statut de tête de série sous prétexte (je présume ne connaissant cette histoire?) de son sacre en 1920.. 😉

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      1. Oui, c’est ça, la Belgique revendique un statut de tête de série pour son titre aux JO 1920. Uruguay, Argentine et Brésil et Paraguay/US dans le groupe de 4. Il semble que ce choix repose sur une volonté de ne pas faire s’affronter les équipes venues d’Europe. Mais sportivement, faire du Brésil une tête de série, c’est à l’époque effectivement contestable.

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      2. Et la Belgique tête de série, voilà décidément une idée qui ne pouvait guère procéder que de l’hubris, alors, de bonne part des élites belges..

        Au sortir de la guerre, à la table des négociations et probablement encouragés en ce sens par la propagande belgophile menée à compter de 14 par les Anglo-Saxons (jusqu’alors elle avait été léopoldophobe pour pouvoir exploiter les richesses du Congo, éternelles girouettes) : l’establishment belge exigea par exemple que les..Pays-Bas (neutres durant le conflit) restituent à la Belgique les provinces de Zélande et du Limbourg hollandais (cédées plus tôt aux NL en contrepartie de la reconnaissance de l’indépendance belge), que dire..

        Ils avaient des cartes magnifiques à jouer!..mais hérissèrent à ce point le solde des négociateurs, qu’ils se discréditèrent bien vite et n’y glanèrent en définitive que trois fois rien (des cantons allemands à la frontière, et encore : par le biais d’un referendum de bout en bout manipulé), bref : d’une bêtise et d’un hubris crasses! 🙂

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    1. Oui et, si je ne dis pas de bêtise, en charge à ce titre de la préparation physique de l’équipe.
      On parlera plus précisément, dans la deuxième partie, de la tactique uruguayenne, du football uruguayen et du rôle qu’y jouèrent les footballeurs eux-mêmes.

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  3. Bonjour à tous,
    avant tout je remercie Nicolas de m’avoir ouvert cet espace. Ensuite je veux saluer Alexandre, que j’ai longtemps côtoyé à SportVox, et dont l’érudition a toujours fait l’objet de mon admiration. Comment vas-tu?
    Il y a une deuxième partie et peut-être je me répéterai, mais j’ai toujours eu l’habitude d’être dans la discussion. La question des étoiles est surtout celle de la valeur des tournois. Il est vrai que la France a AUSSI inventé la Coupe d’Europe, mais j’attribuerai ce mérite à Robert Guérin (Clément Robert de son vrai nom), qui a proposé le projet en 1905, saboté par les Anglais alliés à l’époque à certains dirigeants belges, hollandais et danois. Paul Dietschy, qui est un des historiens français du football les plus connus, m’a toujours dit ceci: « tu sais bien pourquoi je ne reconnais pas les titres uruguayens de 1924 et 1928. Ces championnats étaient réservés aux amateurs et donc, non universels ». Le problème est que Dietschy, mais pas que lui, argumentent que les JO étaient obligatoirement amateurs dès leur création en 1894, ce qui est faux. Les JO sont DEVENUS amateurs seulement en 1930 au Congrès de Berlin, une fois Coubertin oublié. Ce fut la nouvelle grande trahison des Britanniques, menés par le sanguinaire Lord Cadogan dès 1921, qui agissait dans ce sens après avoir sévit en Afrique du Sud… Alors, durant la période dorée des JO, sous Coubertin, et grâce aussi à la révolte de Rimet entre 1925 et 1927, les JO n’imposait pas l’amateurisme, et le CIO se limitait à émettre un vœu creux et pieux. Les tournoi étaient donc réglementés complètement par les autorités du sport concerné, qui décidait des lois techniques mais aussi des conditions d’admission. Et c’est là que la France joue un rôle. Sous la présidence anglaise de la FIFA, 1908, 1912 et 1920 sont réglementés amateurs (on a les règlements dans les Rapports officiels des JO et reproduit dans le livres des trois naissances). mais sous présidence française (et c’est en cela que la France invente ou fonde le championnat du monde universel), on ouvre le règlement du football à tous y compris aux amateurs. Il ne faut pas oublier qu’une ligue professionnelle fonctionne en France depuis 1897, aux USA des ligues professionnelles depuis 1910, qu’en 1920 déjà les Tchèques et les Français sont tous salariés (non amateurs) et qu’en 1928 participant les pros italiens, yougoslaves et espagnols. Coïncidence historique: ce n’est qu’en 1924 que le « Tournoi Mondial » (c’est ainsi que le championnat est baptisé) réunit pour la première fois Amérique (Nord et Sud) et Europe. C’est qui fait que les tournois olympiques antérieurs peuvent être considérés comme des championnats européens amateurs et celui de 1924, Open et mondial.

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    1. Tu me fais beaucoup trop d’honneur, Senor Pilo!

      Mon érudition tenait du rat de bibliothèque mais manquait désespérément de sens, de consistance et de regard critique – dont acte : je n’oublie pas t’avoir au début stupidement éreinté.. 😉

      Mais la générosité et l’intelligence de ton propos étaient telles.. C’est fondamentalement à toi et à Yves/Condor que je dois d’avoir gagné une lecture perfectible encore, mais déjà plus « profonde » et panoramique.. Vous avez été mes « clés »!, et garderez toujours ma gratitude.

      Je ne pense pas que tu aies besoin du moindre encouragement pour poursuivre ton chemin :), mais s’il t’en fallait : éh bien voilà, sache que tu n’écris pas pour rien, loin s’en faut!

      Et j’en connais d’autres, nombreux!, qui m’ont confié aussi avoir grandi à ton contact.. Gracias!

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  4. Oui Mazali était de père et mère corse. Sa grand-mère maternelle était Venezziana Arrighi. J’ai tous les papiers concernant ce grand bonhomme. On l’appelait « el francés », ou plus simplement « Mazalí », avec l’accent sur le « i »….. Il était l’interprète en 1924. Il avait promis une photo à l’arbitre français qui admirait la Celeste et dirigeait la très compliquée rencontre contre la Hollande. Georges Vallat. Menés 0-1, ses coéquipiers lui criaient: « Mazalí, la Photó!!!!!! »…… J’ai voulu, avec le soutien de l’historien français et d’associations corses, qu’une petite statue ou plaque soit érigé en son hommage, dans un village de ses parents (Vezzani ou Vico) ou à Ajaccio, où ils habitaient avant leur migration: « Un Corse champion du monde »…. ça n’a pas marché. Sans doute, l’initiative n’était pas assez corse.

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    1. Mazali, athlète de haut niveau comme Gradin donc.
      Jusqu’à la fin des années 50, l’Uruguay était également une grande nation de basket, avec deux médailles de bronze aux J.O 1952 et 56. Avec comme figure principale Oscar Moglia qui fut l’artilleur numéro 1 à Melbourne. Ainsi qu’au Mondial 1954.
      Ce niveau en sports collectifs pour un petit pays est assez remarquable.

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      1. La loi stimulait le sport et chaque place de quartier était un lieu de pratique sportive. Cela reste en partie vrai, mais l’Uruguay d’aujourd’hui c’est la Croatie. A Montévidéo il y a un peu partout des « places de sport », ouvertes à tous, avec pleins de petits terrains de foot et de basket, parfois des piscines et des salles de boxe. Les conditions sportives pour être en sélection étaient draconiennes… si mes souvenirs sont bons il fallait courir les 100 mètres sous la barre des 12 secondes… Ce n’est plus le cas de la Celeste actuelle !!!!!!!!!!! Par ailleurs, c’est un fait que de nombreux gardiens incorporent au football leur savoir venu d’ailleurs: Mazurkiewicz… et plus encore, Lev Yachine.

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      2. Mazurkiewicz s’est formé dans quel autre sport?
        Ah si tu parles de boxe et Uruguay, je pense forcément à Alfredo Evangelista. Lourds ayant longtemps combattu pour l’Espagne. Champion d’Europe et surtout ayant combattu pour le titre mondial face à Ali et Holmes. Une référence. Il fait d’ailleurs la limite face à Ali.

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      1. Merci Pierre
        Mon pere me parlait souvent d’Evangelista et de ce qu’il a pu représenter pour le sport uruguayen et espagnol. Sa victoire face à Urtain pour le titre européen. Urtain, l’ancien champion de force basque dont la vie est également un roman.
        Un peu plus tôt, les heros étaient Jose Legra le cubain et Pedro Carrasco qui avait épousé la star de mon village familial, Rocio Jurado. Une sorte de Dalida espagnole.
        Au hasard des rencontres , nous avions passé avec mon frère un bout de soirée avec les petites-filles de Carrasco. Des beautés…

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      2. Vérification faite, la victoire face à Urtain n’est pas pour le titre européen. Ce titre, il l’aura face à Lucien Rodriguez qui aura sa chance mondiale face à Holmes.

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  5. Le problème de la Belgique est qu’à cette époque elle se trouvait TROP proche des Anglais et elle s’est opposée au combat mené par Coubertin, Rimet et Delaunay en faveur de l’Open olympique. De ce fait, elle ne pourra revendiquer le tournoi de 190 comme Open qu’en contestant son passé. Or, aucune association nationale n’est autocritique, aucune n’est prête à dire: « ah oui, là, je me suis trompé »….. Et en effet, en 1920, c’est l’amateurisme marron qui l’emporte: 20 des 22 français vivent du football. Cette « tricherie » disparaît de fait en 1924 grâce au règlement de Delaunay ! Les sources du règlement sont France Football, ainsi que les bulletins olympiques de 1924 (cette fois les règlements ne sont pas dans le rapport; en 1920 non plus…). la question du règlement est LA CLÉ dont parle Alexandre. Les historiens ignorent à tort ce fait objectif majeur: LA LOI. Elle définit la nature du championnat.

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    1. Merci ! Si je comprends bien, la Belgique n’est pas CM 1920 car elle a elle-même créé les conditions pour que le titre soit officiellement un titre amateur. C’est l’argument officiel. Et l’argument sportif, c’est l’absence de l’Amsud qui enlève au titre un caractère universaliste nécessaire à la crédibilité d’un titre mondial. Capito !

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      1. Il y a deux raisons objectives qui différencient les championnats de 1908 à 1920 par rapport à tous les suivants: ils sont règlementairement amateurs (et ça fait que des équipes professionnelles comme les USA refusent de participer par souci de légalité), rabaissés en valeur légale; et ils se limitent à ne convoquer que des pays européens, ce qui, dans les concepts de l’époque, qui sont olympiques (la FIFA EST olympique) exclue le titre mondial. Il ne faut pas oublier que le tournoi interallié avait regroupé 6 nations d’Europe en deux d’Amérique (USA et Canada), et que l’idée du MONDIAL était dans les esprits depuis cette date, 1919, voire bien avant, depuis la participation militaire américaine. Le Tournoi interallié est le premier mondial, mais un mondial restreint: seuls les pays alliés ont été invités. Les Tchèques ont battu la France en finale, et le règlement disait explicitement: « la question de l’amateur-professionnel sera ignorée ».

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  6. @pilo, je profite de votre présence ici pour vous poser une question relative à la CM 1950.
    L’UAF envoie une sélection d’espoirs et de « jaunes » à la Copa América 1949 qui se déroule pendant la grève des joueurs . Matias González fait partie des « jaunes » et est manifestement très critiqué par la majorité des joueurs. Sauf erreur, il est le seul de cette sélection 1949 présent pour la CM 1950. Savez-vous comment il est parvenu à retourner l’opinion en sa faveur ?

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  7. Quelle encyclopédie vivante ce M. Arrighi ! Très intéressant d’apprendre tout ça concernant une période assez peu connue du football international où les sources, qu’elles soient écrites ou visuelles, peuvent facilement manquer et/ou être divergentes. Merci Bobby !

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    1. Oui, Bobby l’avait d’ailleurs spécifié quelque part, documentation livrée clé sur porte, je trouve ça généreux d’ailleurs..et trop rare!

      Et surtout je trouve ça très bien (je compte d’ailleurs le faire de plus en plus), car chacun peut de la sorte aussitôt juger des bases sur lesquelles tu t’appuies.

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  8. Merci à tous pour les questions et commentaires. Je réponds ici un peu à tout le monde.

    1) Il n’y a pas d’érudition, mais un peu de connaissance sur une certaine période, à force d’étudier les documents et de chercher à résoudre LES ÉNIGMES. La recherche en histoire est une enquête qui doit se laisser guider dans le but de trouver la solution aux mystères, aux explications et croyances qui clochent. Si vous envisagez de trouver des vérités historiques, il faut creuser là où les récits actuels ne sont pas crédibles. Le problème est aussi d’introduire des concepts. Non pas des concepts artificiels, mais des concepts extraits de l’histoire elle-même. Un exemple très simple: on parle de la création du championnat du monde. Mais c’est quoi un championnat du monde? Voilà une question de concept. C’est quoi le football, c’est quoi le jeu, c’est quoi le gardien de but, c’est quoi la tribune? Voilà autant de questions conceptuelles. Sans y répondre, on ne peut pas avancer sur les sujets qui les touchent.
    Vous me direz que tout le monde sait ce que c’est qu’un championnat du monde. Et moi je réponds: tout le monde LE SAVAIT au moment où le championnat du monde a été créé, mais ensuite? Pour la plupart des gens championnat du monde de football=coupe du monde la FIFA. Mais saviez-vous que le livre de la FIFA (le livre du Musée) publié en 2017 ose énoncer que le premier championnat du monde est le tournoi olympique de 1908, qu’il a été créé par la Football association et gagné par les….. Anglais? Devinez la nationalité du rédacteur payé par la FIFA pour écrire ce genre de sottises. Saviez-vous que de prestigieux historiens français soutiennent lors des colloques internationaux que la Coupe du Monde a été créé en 1954, voire en 1982? Là on est dans les faux concepts, les concepts de laboratoire, manipulés, non extraits de l’histoire elle-même……
    2) Alexandre, je ne sais pas si mes livres servent à qq chose. En tout cas, en Uruguay, malgré le fait qu’ils apportent sur un plateau la clé de tant d’attentes et la reconnaissance à tant de grandes figures du passé, je suis plutôt mis à l’écart….. Les portes me sont fermées…. C’est paradoxal, mais en France je suis plus « reconnu » que là-bas !…..
    3) Ladislao Mazurkiewicz était basketteur, dans sa ville natale….
    4) En ce qui concerne 1930 et la Belgique, son groupe était le plus facile. Mais pour revenir à cette question d’histoire, il faut savoir que trois mois avant le championnat le boycott européen avec la complicité du Comité exécutif européen de la FIFA est total. Le délégué uruguayen Enrique Buero parvient cependant à obtenir que le gouvernement belge force la main de la Fédération. Les Belges rompent le boycott, avant Rimet et avant la France. Quand ils sont à Montévidéo ils essaient de faire valoir CE mérite: c’est grâce à notre décision que quatre équipes européennes sont là ! Ils se moquent de Rimet et veulent que les Uruguayens reconnaissent leur geste. Mais pour les Uruguayens, la Fédération belge n’a aucun mérite puisque elle a agi contrainte et forcé par son gouvernement. La AUF a sauvé le Mondial contre toute l’Europe et contre la FIFA, c’est dons SON MONDIAL…..
    5) Matías González. C’est un « traître »…. mais Nasazzi qui contribue à sélectionner les joueurs, et surtout, Obdulio Varela, savent que ce gars-là a la force physique et la force de caractère qu’il faut pour jouer une Coupe du Monde. Varela, qui a été le leader de la grève, assume la décision de le sélectionner. Les autres joueurs s’y opposent. Mais l’ascendant de Varela est énorme, et personne n’ose le contester frontalement. Lors des premières concentrations, Matías González se retrouve isolé. Personne ne lui parle. Alors que tous les joueurs se préparent pour l’entraînement, Varela fait sortir González et lui dit d’attendre derrière la porte. Il dit alors à ses coéquipiers: « maintenant vous allez sortir un par un et serrer la main de Matías González. Celui qui ne le fait pas, ne sort pas d’ici. » Tous s’exécutent. Voilà Varela, le leader, l’homme du pardon, celui qui la nuit du Maracanazo va dans les bars consoler les Brésiliens. Une autre époque…….

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  9. Precision: Ladislao Mazurkiewicz migre à Montévidéo et joue au basket au Club San Martín dans le quartier de Reducto. Ce jeu lui donne, je pense, cette facilité à chercher la balle dans les airs, à la capter…. ce manque de peur de sortir pour cueillir le ballon….. Yashin le cueillait plutôt dans les sols, parmi les crampons des attaquants.

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    1. Merci pour ces réponses. Une question supplémentaire : la grève en Argentine provoque un exode massif de joueurs (qui ne s’interrompt pas après la fin de la grève, le plafond salarial incitant les cracks à migrer vers d’autres cieux, la Colombie ou l’Europe pour l’essentiel).
      Alors que la grève en Uruguay se déroule à peu près à la même période (novembre 1948 – mai 1949 de mémoire), peu de top joueurs quittent le pays à l’exception peut-être du jeune Villaverde. On peut imaginer qu’avec un exode massif, la Celeste n’aurait pu prétendre à une victoire en 1950. Quelles sont les raisons expliquant le comportement différent des joueurs uruguayens comparativement aux Argentins ?

      Par ailleurs, j’ai toujours lu que la non sélection de Bibiano Zapiraín au profit de Vidal était lié à une mésentente avec le sélectionneur. De vos propos précédents, faut-il comprendre que Zapiraín était sinon ostracisé au sein de l’équipe, au moins peu apprécié de Varela et des leaders ?

      PS : oui, oui, je pose beaucoup de questions !

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      1. Et des questions très difficiles…. pour moi, qui ne suis pas dans le coup d’histoires aussi pointues !!!!!!!!!
        Ce que je peux te dire sur la grève des joueurs uruguayens c’est qu’elle est massive et que l’objectif est de faire entrer le football dans le système social-démocrate général. La revendication principale n’est pas salariale. Il s’agit de faire reconnaîtr le syndicat et de fixer un statut du joueur qui le libère de l’esclavage des clubs. La presse, l’Etat, la AUF, les clubs sont contre la masse des joueurs…. Ces joueurs veulent vivre en Uruguay. L’Uruguay est un beau pays, paisible, facile à vivre, avec un football merveilleux. Ils n’aspirent qu’à entrer dans la vie active footballistique par la porte de la dignité. Je ne connais pas les conditions de la grève argentine. Ce que je peux te dire c’est que les deux pays et les deux football ne sont pas frères comme on le laisse entendre. L’Argentine c’est l’armée et la corruption, la verticalité, l’Uruguay la démocratie et le Parlement, l’horizontalité. L’Argentine c’est la supériorité dominatrice, l’Uruguay la modestie excessive. N’oublie pas que l’Argentine ne reconnaît pas la victoire de 1930 ! Et qu’elle ne va pas au Brésil en 1950. D’ailleurs la presse argentine dit alors que ce titre-là, uruguayen, ne vaut rien non plus puisque EUX n’étaient pas là. Le football argentin a toujours été conflictuel, querelleur, source de schismes. Le football uruguayen -sauf la période 1923-1925, entraînée par le club britannique Peñarol- non….
        En ce qui concerne l’autre question, aucune idée ! j’essaie de me renseigner.

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  10. j’ajoute que l’hypothèse d’un conflit entre Bibiano Zapiraín et « l’entraîneur » me paraît peu vraisemblable: quel entraîneur? Quelques semaines avant le départ au Brésil, on ne sait toujours pas QUI va figurer en tant qu’entraîneur!!!!! Peñarol avait lutté pour imposer Hirschl le Hongrois, Nacional s’y était opposé…. Et Juan López est un masseur, illustre inconnu, qui est là tout à fait par hasard, parce qu’il fallait mettre quelqu’un…..

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      1. Verano
        je viens de consulter le livre de Garrido sur Maracana -Garrido est un homme de détails-, pas de mention au sujet. Là je consulte le livre de Franklin Morales « Los laberintos del caracter ». Je vois que dans les listes proposées Zapirain ne figure pas. Je cherche encore un peu…..

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    1. Oui, il joue même une mi-temps des matches de présélection au Centenario en novembre 49

      Primer tiempo

      ROJOS (1): Pereyra Natero; Bermúdez y Urbano Rivera; Sabatel, De Angelis y Cajiga; Zunino, Carlos Romero, Nicolás Falero, Ramón Villaverde y Morán.

      VERDES (2): Máspoli; Raúl Pini y Chagas; Rodríguez Andrade, Durán y Luz; Luis Ernesto Castro, Burgueño, Miguez, Julio Pérez y Vidal.

      Goles: Miguez (V), Julio Pérez (V) y Romero (R)

      Segundo tiempo

      ROJOS (1): Radichi; Bermúdez y De Angelis; Sabatel, Rodolfo Pini y Cajiga: Zunino, Romero, Alejandro Pereyra, Bentancor y Morán.

      VERDES (1): Máspoli; Matías González y Villaverde; Rodríguez Andrade, Durán y Luz; Babarles, Abraham González, Cancela, Julio Pérez y Zapirain.

      Goles: Romero (R) y Cancela (V).

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      1. pas mal disparaissent par la suite, je dirais même que beaucoup disparaissent non pas de manière rationnelle, à la suite d’un plan, mais dans le chaos qui règne à l’époque, emportés par ce chaos, et par une succession de décisions obscures prises dans des contextes obscurs pour le bien ou le mal de la cause…… Ce contexte obscur peut se résumer ainsi: les cadres ont finalement décidé, et les cadres c’est Schiaffino, Máspoli, Varela, peut-être aussi Vidal, qui, avec 28 ans, fait office de vétéran.

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  11. Ensuite il disparaît des listes et convocations à mesure que la sélection diminue mais aucune explication. Mais je te confirme qu’il n’y a pas de conflit possible avec un entraîneur. La cause de sa non-sélection est ailleurs….

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    1. En fait, je m’appuie sur un vague souvenir de lecture que je ne parviens pas à retrouver.
      En tout cas, sur le côté gauche, Vidal, Morán et Villamide sont ceux qui se partagent les sélections côté gauche, Villamide étant écarté pour la CM.

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      1. Tu sais que l’image de Varela reste mauvaise…. l’Uruguay est un pas assez avancé mais…. Varela est métisse, fils de femme noire, ami des pauvres, et rebelle, indomptable. Les élites ne l’aiment pas. Elles n’aiment pas ce Noir là dans leur soupe. Et même des supporters de Peñarol gardent l’image d’un type trop intransigeant, éternellement ancré dans sa classe, et peu lettré. Varela c’est le Zidane de l’Uruguay 1950…. Peut-on faire un parallèle?

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      2. Zidane – Varela, j’avoue que j’ai du mal à faire le parallèle eh eh ! Une partie des élites n’aime pas Zidane mais pas en raison de son lien avec le milieu d’où il vient, mais plutôt en raison de son manque d’engagement sur les sujets sociétaux. L’autre partie l’aime bien parce qu’il est un modèle d’intégration, ou la représentation qu’ils s’en font.

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  12. Il ne faut pas imaginer une situation « propre », comme on peut le voir aujourd’hui, tant bien que mal, en France ou ailleurs. La situation du football uruguayen fin 1949 est totalement chaotique. Les luttes intestines fusent de partout, et au final, c’est une poignée de joueurs qui tranche. Tout est sujet à querelles, et finalement, c’est parce que le groupe qui reste se replie sur lui-même que les choses fonctionnent un peu. La veille de la finale la consigne de la AUF est de ne pas perdre par 5 buts de différence. Varela, qui déteste les dirigeants et qui après la retraite n’aura même pas accès libre au Centenario en tant que spectateur, crache sur eux dans le tunel. Lorsqu’il dit: « los de afuera son de palo », il ne se réfère pas au 200 mille Brésiliens mais aux dirigeants de la AUF, défaitistes et pas à la hauteur. Sur ce plan, les choses n’ont pas changé, sauf que la celeste n’a plus les joueurs de caractère, d’intelligence et d’indépendance d’esprit de l’époque.

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  13. Merci à Pierre Arrighi et à Bobby pour ce passionnant échange. Déjà pu lire de Pierre Arrighi par ailleurs, et toujours intéressent de le lire.
    La 2e partie sera consacrée à la période après 1930 ? sans quoi j’aurai une question à propos de 1938..

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      1. à propos des forfaits 1938 de l’Uruguay et de l’Argentine, est-ce que vous auriez des éléments plus précis à apporter ? Beaucoup de choses ont été dites dans les motivations de chacune des fédérations*, mais l’ordre et l’importance des faits n’est pas si bien défini (ou ne l’a jamais été…)

        * Pêle-mêle de ce qu’on peut lire à droite et à gauche: eurocentrisme FIFA peu de considération pour les autres nations en terme de places attribuées (de mémoire: 2 pour les Amériques), non respect d’une promesse (écrite, seulement orale?) de Rimet d’une organisation alternée Amériques/Europe; volonté d’un boycott organisé des Amériques dès les qualifs (le Brésil ne s’y joint pas donc sera qualifié d’office ); tentative de Rimet de convaincre Uruguay (?) et Argentine (l’Argentine tergiverse…); conflits et rivalités au sein de la CONMEBOL entre les 3 géants; conflit interne en Argentine (suites longues du houleux passage au professionnalisme, 1931 mais qui dure jusque 1935, et qui avait déjà amputée sévèrement l’albiceleste de 1934 + oppositions des cinq grands à libérer leurs joueurs pour le Mondial + désaccord sur les demandes financières par l’AFA pour participer (une grosse partie pour indemniser les clubs).

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      2. La réponse est simple: la cause est le problème Pérou-Autriche lors des JO de 1936 qui motive le boycott de la Confédération Sud-américaine, non suivi par le Brésil. C’est LA cause. Nette et précise.

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    1. L’annulation du match Pérou-Autriche, que le Pérou gagne 4-2, est une grossière manœuvre de Rimet pour faire plaisir à Hitler. Les délégués européens, notamment Polonais, s’insurgent contre la décision du Jury d’Appel qu’ils jugent incompréhensible et dangereuse. Les PV du congrès de la FIFA montrent que la décision ne passe pas du tout et le rapport du Jury qu’elle montée de toutes pièces. Les délégués uruguayens sont indignés et réclament une révision. S’ajoute à cela le fait que la candidature argentine pour la Coupe du Monde est balayée d’un revers de main au profit de Paris, en accord avec les Italiens. Tout cela crée les conditions d’une rupture, et la Coupe de 1938, avec des arbitres exclusivement européens et un Jury d’appel exclusivement européen est de fait une Coupe d’Europe élargie, ou plutôt une Coupe du Monde européisée.

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  14. Merci à Pilo de passer par là et de nous gratifier de son savoir.

    Je profite de tous ces Arrighi originaires de Corse pour vous raconter un incroyable repas fait à Fontainebleau dans un restaurant corse appelé « Chez Arrighi ».

    Bref, je n’étais point seul et j’avais visité le château dans la journée. Et le soir nous décidâmes d’aller au resto. Nous cherchâmes et nous trouvâmes donc ledit « Chez Arrighi ». Un resto corse à Fontainebleau, c’est comme un resto thaïlandais à Strasbourg ! Ayant déjà fait le second (autre aventure incroyable), il me fallait faire le premier…

    Dès l’abord, un gosse vêtu d’une sorte de livrée et de chaussures trop grandes nous fit un effet désopilant. Il était à ce point tendu, stressé que, sans nul doute, les coutures de son vêtement ne tenaient qu’à un fil ! Entrée : fort moyenne, pour ne pas dire pire. Mais le spectacle était ailleurs : la patronne, d’une obséquiosité dégoulinante avec la clientèle, se transformait en matronne sitôt passée la porte de la cuisine. Pile : langage sirupeux, onctueux. Face : une gueulante digne d’une gorgone. Une dame florentine (comme l’était Mitterrand) qui peinait sans doute à comprendre que les murs, surtout lorsqu’il s’agit d’une porte (!), ne sont point hermétiques.

    Plat : correct. Vrai progrès depuis l’entrée (n’avais-je pas pris un ragoût de cabri ? Si, il me semble). Nouveau spectacle : le gosse de sortir de la cuisine en portant un plateau sur lequel était une pyramide de verres haute de 2 bons mètres. Et les verres qui s’entrechoquaient : gling-gling-gling ! Nous cherchâmes en vain la caméra cachée. Ouf ! aucune chute, aucun verre ne se brisa. Instant magique, néanmoins.

    Dessert : chef-d’oeuvre. Je me souviens parfaitement avoir pris un assortiment de fromages corses (oui, oui, en dessert…). C’était tout simplement divin… Inoubliable !

    Cette gradation de l’entrée, tout à fait quelconque, vers le dessert, dionysiaque, était étonnante, surprenamment agréable. Un grand moment.

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  15. Etant été en déplacement aujourd’hui, ce n’est que maintenant que je peux lire l’interview.

    1/Fin du teasing (Enfin j’ai envie de dire!)
    2/Salut Pierre, merci pour l’interview et c’est un plaisir de te retrouver ici après tant de temps depuis SportVox. Mes meilleurs voeux pour cette nouvelle année 🙂
    3/Vu mes connaissances limitées, je n’aurai pas grand chose à apporter à la discussion mais je vais lire ça avec attention ainsi que vos coms.

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  16. Comme Verano : plein de questions mais j’attends la seconde partie.

    Pierre : un grand merci déjà! Et, puisque tu parlais plus haut de « concepts », éh bien voilà je crois l’une de tes signatures, une marque de fabrique.

    Je vois certes que ton propos a évolué sur l’un ou l’autre points, c’est le témoignage d’ailleurs d’une belle honnêteté, il n’y a là rien de dogmatique. Mais sur le fond tu n’as pas changé en 15 ans, toujours cet appétit et ce talent pour enrichir le logos du football.. Ce n’est pas le moindre de tes apports! : conceptualiser le football pour pouvoir le penser ; change pas! 😉

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    1. Oui le propos a beaucoup évolué
      Il y a 10 ans de recherches
      Beaucoup de travail documentaire
      et de recherche de solutions de quantités d’énigmes
      la critique du livre de Rimet
      une étude approfondie de l’histoire de la réglementation olympique
      une compilation documentaire sur 1924 puis
      ce livre en français qui huile le tout
      Au milieu, une géographie footballistique de Montévidéo avec une cartographie des 2419 terrains de foot existants en 2019, depuis le terrain enfantin jusqu’au Centenario.
      Mais l’essentiel est concentré sur un seul aspect de l’histoire diu football: les organisations et l’organisation des compétitions…..
      La différence est qu’à l’époque de Sportvox je maniais des hypothèses encore très éloignées de la réalité du passé. Là je crois tenir une partie de la grande mais médiocre histoire du football……..
      Ce que je regrette c’est que, hormis des lieux comme celui-ci, le débat ne se développe pas.
      J’avais eu un échange avec le petit-fils de Rimet qui m’avait un peu enguelé lors de la sortie du livre « 36 mentiras de Jules Rimet ». Je voulais lui offrir ce dernier livre qui rééquilibre les choses, insistant sur le fait que Rimet a créé le championnat du Monde…. en 1924, l’a sauvé en 1928, et a commencé à le resauver en 1930…. puis finalement, l’a lancé en 1950. Mais son arrière-petit-fils m’a répondu ceci:
      « Cher M . Arrighi,
      Je suis Christian Rimet, le fils de Yves Rimet qui malheureusement est mort dimanche le 13.11.2022 à Rennes entouré de tous ses proches. Je suis assis à son PC et parcours son courrier et suis tombé sur votre Email et me permets ainsi de vous informé , car je soupçonne que vous appréciiez mon père. Je ne parles pas espagnol, mais si vous avec des informations en français concernant Jules Rimet, je vous serai reconnaissant de bien vouloir me les faire suivre.
      Cordialement
      Christian Rimet »

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      1. Evolution sur Rimet, oui.

        Ou par exemple sur la valeur du titre olympique/ »mondial » belge de 1920 aussi.. J’ai une mémoire photographique (ou d’éléphant 😉 ), j’ai bon souvenir que tu écrivais alors, a minima et en substance, « il ne tient qu’à la Belgique d’inscrire une médaille sur son maillot »..même si tu considérais déjà, et légitimement quoique plus prosaïquement qu’aujourd’hui, qu’il était certainement plus raisonnable de parler de champion « d’Europe ».

        Pour ma part j’étais surtout resté bloqué sur le Congrès de Cristiania, qui semblait en entériner le caractère de championnat du monde. Vue personnelle confortée par les coupures de presse de l’époque aussi (mais Bobby dit vrai : l’intitulé générique « Belgique, championne du monde » semble disparaître très vite ; il ne subsiste guère (à ma connaissance, et tant à l’international qu’en Belgique) que dans la poignée de mois suivant le terme du tournoi.

        Et puis voilà que je te lis hier, et lirai bientôt en détails ton dernier (pas l’ultime, j’espère – ce serait une sacrée perte) ouvrage! Mais le fruit de tes recherches et conclusions est convainquant!, merci d’ailleurs : c’est très stimulant!

        Quand tu dis que ton « travail sur le football s’achève » : ce n’est qu’une pause, dis? Le sentiment d’avoir fait le tour de la question? Tu sembles un peu désabusé aussi peut-être.. Comment expliques-tu les réceptions distinctes que tu reçois d’entre ici et Uruguay? Y aurait-il par là (comme souvent, d’ailleurs) quelque entre-soi académique?

        Ce que tu écris me fait par exemple penser au Sudaf juif d’ascendance NL Simon Kuper : il a fini par y faire son trou en s’imposant à l’international, mais brin snobé au début, étranger à la matrice/roman national footballistique……….. Il a foutu un beau bazar! 🙂

        Question qui me taraude depuis longtemps, tiens : quid désormais de tes rapports avec, premier nom qui me revienne, un Mason? Sens-tu parfois, dans leurs productions propres, que tes travaux sont lus par, puis influent des auteurs de cet acabit?

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      2. Salut Alexandre,
        Sur Cristiania, il faut se souvenir de la décision exacte: à condition que le règlement respecte les désirs de la FIFA, celle-ci reconnaîtra le tournoi olympyque comme championnat du monde des amateurs ». C’est le « des amateurs » qui fait la différence. En 1914, c’est les Anglais qui dirigent la FIFA et ils s’opposent à l’universalisme français. La FIFA est alors une fédération amateur, qui ne travaille que pour une partie du football, contrairement à la légende qui dit que la FIFA a toujours été universaliste.

        Et c’est la première fois qu’elle parle de « mondial ». C’est qu’elle cesse alors d’être européenne: l’Argentine et les USA sont dedans… Elle est donc devenue mondiale! Grâce à qui? Grâce aux Allemands, qui en 1912 dénoncent le fait que la FA anglaise affilie directement à elle-même des associations du « reste du monde » (Amsud, AmNord, Australie, Nouvelle-Zélande, Malte…..).

        Le tournant c’est les Jeux Interalliés, puis le départ des Anglais en 1920, après avoir échoué dans leur tentative de faire couler la FIFA définitivement. Puis 1921, le Congrès olympique de Lausanne, majeur, lorsque Coubertin passe la main aux fédérations internationales et demande à Rimet d’universaliser le football. Rimet le fait avec grand plaisir: il est celui qui a ouvert les vannes du professionnalisme dès 1910 !!!!!! Et celui qui a participé à la direction des championnats du monde d’athlétisme de 1900, à Paris, où l’USFSA organise des tournois professionnels et distribue des prix en espèces conséquents dans beaucoup de sports importants: tir, boules, cyclisme, automobilisme, etc.

        Oui j’arrête le football. Je lui ai consacré trop de temps. Je croyais que j’allais apporter beaucoup à l’Uruguay et c’était pour moi une manière d’être un peu là-bas. Mais je n’ai reçu que fermeture de portes, jalousies et mise à l’écart. Pas d’écoute, encore moi de la gratitude.

        La différence entre l’Uruguay et la France à ce sujet? Le public là-bas est ignorant et rejette la connaissance au profit de l’opinion de comptoir. Ici, il y a, on le voit ici même, soif de savoir, ouverture d’esprit. Les gens lisent. Je me demande si un Uruguay a lu un de mes livres entièrement…..

        Bon, en France les universitaires de l’école politique m’évitent. Par contre, une partie de mes découvertes je les dois à l’aide de Pierre Cazal, qui est un historien non universitaire et non lié aux appareils, donc un esprit libre. En Uruguay, la « recherche historique » sur le football est entre les mains d’une association dénommé AHIFU, qui est un groupement de journalistes pilotés par Tenfield. Tenfield est une structure qui de manière un peu mafieuse a la mainmise sur le football uruguayen via son image de marque et la télé. Son objectif est de contrôler toute la communication de la AUF et donc écarter toute pensée libre, indépendante, aussi positive soit-elle. Elle a une arme fatale: de l’argent.

        Par ailleurs, Tenfield est lié au mauvais passé de Peñarol et est peu favorable, malgré les apparences, à la connaissance du passé olympique. La théorie aberrante de ses « penseurs » est que l’Uruguay a gagné trois mondiaux amateurs (24, 28 et 30) et une Coupe du Monde, ce qui fait qu’on devrait alors lui enlever non pas deux étoiles mais trois !!!!!!! Leur connaissance du football est provinciale, une projection du village vers le monde et non l’inverse. Et ils sont nationalistes !

        En Uruguay, la réflexion sur le football n’est plus intellectuelle comme elle le fut dans les années 50. Le journalisme est people. Ce qui intéresse c’est le twit de Suarez à Messi ou de la femme de Suarez à la femme de Messi. Si Cavani est en train de pêcher ou sur un cheval, et si Araujo a fêté ou pas son anniversaire. Réfléchir, connaître, ça non! Idolâtrer, fanatiser, ça oui! Pourtant, la Celeste au Qatar c’est un peu la honte: chants homophobes, insultes des joueurs envers les officiels, sans parler de la mauvaise prestation du nouvel entraîneur.

        Dans ce milieu tenfieldisé je n’ai aucune place, aucune écoute. Quand la FIFA a voulu enlever les étoiles à la Celeste, les ânes ont invoqué unanimement Cristiania ! Bref: ils ont fait le boulot de la FIFA…. A l’époque j’avais encore deux ou trois oreilles qui m’écoutaient. Mais la AUF n’a jamais osé me contacter ou me répondre malgré le fait qu’elle me nomme dans ses communiqués. Le message est passé: attention avec Pilo, c’est un gauchiste! et il est contre la FIFA! Nul n’est prophète en son pays, dit-on.

        Alors oui, je suis las… Parce que l’ignorance et la croyance rejettent l’effort de connaître….

        Mason, Diestchy, Rey, Lanfranchi, non, je ne crois pas avoir influencé leur récit en quoi que ce soit. C’est « le récit français », c’est un récit politique, qui convient à la FFF et à la FIFA…. qui ne cherche pas la vérité mais le positionnement au niveau du soft power géopolitique du sport: l’Europe ! Connais-tu un historien qui après avoir écrit trois gros bouquins reconnait qu’il s’est trompé sur toute la ligne? Moi, à part Paul Veyne, je n’en connais pas. Il faut un sacré caractère pour faire ça.

        Même le travail sur l’histoire réglementaire olympique n’est pas reconnu. Pourtant les faits sont là, clairs, lumineux, et Coubertin lui-même s’égosillait à les proclamer avant sa mort: « mais non je n’ai jamais été amateuriste, mais non les JO n’ont jamais été -sous ma direction- réservés aux amateurs, mais oui l’amateurisme est une momie caduque depuis 1900 !!!!!!!! Pauvre Coubertin. Comme on a dénaturé son oeuvre ! Comme on l’a chargé de tous les défauts !!!!!!!!

        Alors, si on me sollicite, je réponds. Mais je n’écris plus. Je sens une usure qui est le fait de cet échec relatif. Je n’ai pas de relais véritable. Alors je me tourne vers ce qui m’a toujours plu: peindre…. !!!!!!!! Là j’ai des alliés sûrs: les murs de mon appartement !

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      3. Merci de ta réponse.

        Oui, c’est ce « des amateurs » qui m’échappait durablement.

        Le solde de ta réponse me fait penser à l’une ou l’autre autres mafias du discours-football (je ne connaissais pas Tenfield..mais en connais des équivalents sous d’autres latitudes) – je compte d’ailleurs en aborder deux sur ce site.

        Souvent hélas, l’on ne peut que jeter son pavé dans la mare..puis attendre que le temps fasse son oeuvre. Mais l’inertie peut être terrible, oui.

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      4. J’évoquais plus haut le dénommé Simon Kuper, juif donc.. En l’espèce c’est sa judéité qui le préserva de se faire démolir par la mafieuse doxa du cruyffisme (d’autant plus complexe à affronter, désormais, à mesure qu’elle devenait moins organique et plus diffuse) : sa judéité aura agi comme un blanc-seing pour pouvoir ressortir (fût-ce superficiellement!, mais ai moins ouvrit-il une brèche..dont j’observe qu’elle devient crevasse!), des placards, les cadavres sur lesquels prospéra Ajax (..et son Président juif..), et tout le mythe putride qui en procède.

        Un goy aurait été annihilé!, ou au mieux serait resté inaudible.. mais lui.. 🙂

        Eh, va savoir ce que les années réservent à tes livres..

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      5. Maintenant tes livres sont là, proposés au monde. Comme des enfants auxquels tout parent veille à donner les meilleures chances de se frayer un chemin parmi la folie du monde.

        « Enfant je t’ai donné ce que j’avais, travaille » (Apollinaire)

        Moi j’ai confiance en tes enfants!

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      6. En termes d' »équivalents sous d’autres latitudes », l’un est particulièrement pervers (mais très facile à débusquer puis démonter) : la galaxie Jonathan Wilson!

        Sous couvert d’une production prétendument révolutionnaire, innovante voire artisanale (ah, l’image savamment cultivée du profane Wilson, écumant les footballs d’Europe et d’ailleurs avec son bâton de pélerin, lol..) : voilà bien au contraire un auteur très institutionnel, et qui ne fait au fond que donner une seconde vie au séculaire discours victorien anglais..

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  17. Très joli article empreint d’une érudition que le simple mortel ne peut pas approcher. Les arguments en faveur du comptage des étoiles à partir de 1924 sont convaincants, comme le sont ceux de l’Uruguay pour conserver celles d’avant 1930. À titre accessoire, je trouve que le logo de l’AUF, surtout dans sa version actuelle, est peut-être le plus beau de toutes les fédérations de football du monde. Entre les formes intemporelles, les rayures du drapeau national parfaitement intégrées, les épis qui réussissent à la fois à souligner la verticalité du dessin, à en équilibrer les proportions, et à introduire une touche d’avenir radieux très XXème siècle, on a là du très beau travail. Je ne vois guère que les trois lions de la FA, classieux comme savent si bien le faire les Anglais quand ils s’en donnent la peine, et l’aigle (ouest-)allemand dans son cercle, avec le “Deutscher Fussball-Bund” dans une police à l’épreuve de toutes les modes, pour lui faire concurrence.

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  18. Je vous avoue que vos commentaires me vont droit au cœur au moment où mon travail sur le football s’achève et je passe à autre chose… Je trouve plus de compréhension, d’intelligence et de gratitude ici avec vous qu’avec mes compatriotes uruguayens, et ceci, je vous l’avoue aussi, m »éloigne un peu de la Celeste et me rapproche des Bleus intenses. Une autre forme de nomadisme du supporter…..
    A demain !!!!!!!!!!!

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    1. En tous cas merci à vous de participer aux discussions sous l’article.
      Ayant pu vous lire en espagnol il y a quelque temps, j’avais l’impression contraire que c’etait l’inverse, que vous etiez plus « reconnu » ou « a minimum écouté » en Uruguay qu’en France; surtout que vos travaux vont plutot dans le sens de la Celeste et de l’AUF; et remettent en cause le discours officiel de Rimet/ Fifa (notamment votre livre « 36 mentiras de Rimet ») ?

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    2. Ce n’est peut-être qu’une question de temps, Pierre.

      Ce que tu essuyas à tes débuts, sur la forumosphère francophone, était souvent odieux, de l’ad hominem….. Les esprits n’étaient pas prêts, conditionnés, limités aussi par un néant cognitif sur ces questions.. mais tu avais la garra! :), et ton propos a fini par se frayer un chemin, bien plus audible désormais que tu essuyas alors les plâtres en fissurant la coquille d’une doxa sclérosée.

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      1. J’ai un très bon souvenir de Sportvox. J’ai oublié les attaques. Et puis je n’avais pas les armes. J’y ai beaucoup appris. Je me souviens des Italiens, parfois agressifs et moqueurs, mais aussi de ce Hongrois, qui est mort d’un cancer au cerveau (quel était son nom?) au moment où je publiais « Hongrois voyageurs », et de cette fille, la seule je crois, qui écrivait, elle aussi disparue après avoir déposé son bébé, Magda je crois. D’Intérim, de Condor, de tant d’autres (je n’ai pas la mémoire des noms), et de belles plumes, celle d’Interim bien sûr, plumevivace et vivante, à l’opposé de la mienne, si raide….. C’est le forum de Sportvox qui m’a fait comprendre que le football méritait la connaissance.

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      2. Lol, c’était moi « Interim » 😉

        Je tiens quand même à te dire que ton plus vaste apport, pour moi (produit de l’Occident, élevé dans l’utilitarisme), ce fut de rappeler voire de m’enseigner (!) que « le football est un jeu » (et qu’il peut être un art). Y a plein d’autres trucs aussi dont je te sais infiniment gré, mais ça : ce fut et restera pour moi fondamental.. Un avant et un après-Pilo, en ce qui me concerne!

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      3. je sais bien que tu es Interim !!!!!!!!!!!!!
        Merci pour tes coms et la citation d’Apollinaire !!!!!!!!!!!!

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      4. Il y a un endroit à Montévidéo, sorte de marché aux Puces, qui s’appelle la « feria de Tristán Narvaja » (le nom de la rue principale. Dans cette zone et dans cette feria tu trouves pas mal de vendeurs de vieilles pièces, de vieux objets, et des bouquinistes. Là tu déniches de merveilleuses revues écrites il y a 60 ans par des intellectuels uruguayens, gens de littérature ou de théâtre, qui te parlent du football. On trouve des exemplaires des revues « 100 años de fútbol » et du livre, très beau, de Nilo Suburú, « Fútbol uruguayo y fútbol moderno », qui essaie en vain de détecter « le style de la Celeste ». Je me dis que dans cinquante ans il y a aura peut-être des passants qui chercheront dans ces boutiques sombres et minuscules un de mes livres…. Mais comme mes livres sont imprimés à la commande et circulent au compte-gouttes, il y a de fortes chances pour qu’ils rentrent bredouille !

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      5. Et pourtant ce sont des choses qui arrivent, Pierre!

        J’évoquais par exemple ici comment je fis à Kinshasa l’acquisition, par pur hasard et faute d’autre choix, d’un bouquin probablement guère publié qu’en une centaine d’exemplaires (et encore..), a priori des plus inoffensifs..et qui pourtant était (à ma connaissance, hein) l’unique voire ultime trace écrite évoquant la tentative de corruption dont avait été l’objet (et pas par n’importe qui!!!) un arbitre international durant la WC78.

        Accessoirement : révélation tonitruante à l’époque, bien vite étouffée, tombée dans l’oubli.. Un cadeau du ciel!

        https://www.pinte2foot.com/article/memoires-dun-trublion-en-eaux-troubles

        Ne pas sous-estimer combien la vie est une farce..et souvent bien faite aussi 😉

        Je me réjouis de lire bientôt ton livre – à d’ici-demain pour la suite, le travail me rappelle à l’ordre.

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      6. Sinon, pas d’inquiétude. Je ne sais pas si la vie est une farce mais ce que je sais c’est qu’il faut faire ce qui nous plaît, ce qui nous intéresse, suivre son vent, indépendamment du reste. Et cette enquête m’a intéressé et m’a donné satisfaction puisque j’ai trouvé les solutions définitives aux quelques dizaines de mystères que je ne comprenais pas. Toi tu dois écrire des livres, et je pense que tu devrais écrire des livres où le football se mêle à la littérature, plonge dans le jeu de la littérature. L’as-tu fait? Quand tu parles de Kinshasa, je pense à mon passage là-bas, en 81, sous Mobutu. Kinshasa, Mabandaka, Kisangani, Gbadolité…… Je ne vois pas de livres ni de footballeurs, mais de longues routes jaunes, des arbres rouges, des marchés le long du fleuve et aussi…… Le football est un jeu. Bacon disait que la peinture est un jeu. Le football est un art d’action, fondé sur un jeu, fondés sur des règles de jeu -comme tout jeu- qui, sur le plan quantitatif sont totalement élastiques et sur le plan qualitatif les mêmes, dans la rue et dans une finale où joue Pelé.

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      7. Bon, voilà qui complique les choses. J’ai sur ma « bucket list » d’aller passer une ou deux semaines à Buenos Aires pour parfaire mon espagnol et me gaver de matchs : River au Monumental (j’ai choisi mon camp), Velez à El Fortin (en souvenir d’Oswaldo Piazza et de Carlos Bianchi), peut-être Racing Club ou plutôt Independiente (bonjour Enzo Trossero), et peut-être même un petit tour à Rosario où un copain fan de Central depuis son enfance m’a invité. Après avoir lu tout ça, il va falloir que je case une visite à Montevideo aussi, ça fait envie !

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  19. désolé un peu absent en ce moment pas eu le temps de beaucoup lire d’articles et les com qui vont avec!
    j’ai pas de mot devant cette 1ere partie d’intw et l’érudition (c’est le mot qui ressort hein^^) des commentaires… en tous cas ce qui peut ressortir c’est que Rimet et une partie de sa clique étaient bien copains avec Hitler et la frange « droitière » de l’époque (ça n’a pas du bcp changer de nos jours ).
    j’ai pas encore mis un pied en Uruguay malgré mes nombreux séjours dans ce magnifique continent mais va falloir

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  20. @pilo, une question à tout hasard. Je me suis attelé à l’écriture d’un article sur l’amitié entre Pepe Samitier et Carlos Gardel. S’il est établi que le foot n’est pas une passion pour Gardel (il est malgré tout hincha du Racing), il fréquente régulièrement les stades par amitié pour de grands footballeurs. Il y a des épisodes célèbres comme l’après match de la finale des JO 1928 dont je vais rendre compte, reflet de toutes ses hésitations / dissimulations dans sa vie, mais il y a un point que je n’arrive pas à élucider et à propos duquel j’aimerais ne pas écrire d’âneries : préférait-il Peñarol ou Nacional ? Chaque club revendique son afición mais je ne trouve rien de définitif permettant de l’associer aux Aurinegro ou aux Albos.

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    1. Cher Verano,
      Gardel est un personnage de fiction…. une construction…. une voix sans support charnel, un être plastifié…. Que Nacional ou Peñarol tente de s’approprier de cette figure de Musée Grévin, ça correspond bien au niveau actuel. C’est comme le débat sur de « decanato ». Le but réel: ouvrir des conflits sans fin pour augmenter le fanatisme des ignares, diviser, toujours diviser. Sais-tu qu’il y a une lutte féroce pour savoir si tel rue ou tel mur est « de Peñarol ou de Nacional ». Pour répondre à ton interrogation, il faudrait attendre que Gardel ressuscite ou demander à son mainate. Mais il ne dira rien non plus parce que les ventes de son maître, alors, baisseraient, et Gardel ne lui donnerait plus de pomme…. Si Gardel lui-même n’a rien dit de clair au « peuple » à ce sujet, c’est qu’il n’était pas vraiment « supporter », pas un bon supporter. Et à cet égard donc, Gardel, de Peñarol ou de Nacional, ne valait pas un clou. José Gervasio Artigas oui, était clair. Il n’y a qu’à voir son drapeau: pour Nacional en matière de clubs, pour l’équipe de France lors des rencontres internationales !!!!!!!! Et ce avec 150 années d’avance !

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    2. On ne sait même pas quelle était sa sexualité ! Remarque, cette revendication gardellienne pourrait avoir un effet bénéfique si par un effet de prudence elle fait baisser les chants homophobes qui sont la honte de tous les clasicos.

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      1. ah ah ah ! Il existe une photo où la pose de Samitier et Gardel est, disons, ambigüe !

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  21. Le problème racine de Gardel est cacher le passé de sa mère. A partir de là tout est fiction, tout est faussé. Et chercher à le démasquer est une manière de ne pas le respecter. Nacional ou Peñarol, quand tu pars de là où il part, ça devient vraiment insignifiant. C’est pour ça que je trouve l’attitude des « dirigeants » de Peñarol et de Nacional qui encouragent ce type de choses minable, vulgaire, irrespectueuse, et condamnable.

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      1. Donc ni pro-Nacional, ni pro-Penarol (toujours pas de tilde sur mon clavier), mais pro-Stade Toulousain ? Voilà qui expliquerait tout ce secret !

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      2. On voit bien que la vie de Gardel consiste à se cacher et à semer des fausses pistes. Cacher la vie de sa mère, après cacher sa propre vie, sa propre intimité. C’est pourquoi s’il avait déclaré « je suis supporter de Peñarol », il aurait peut-être fallu lire entre les lignes « il a un plan à Nacional »…. Le tango surgit à un moment où il y a beaucoup plus d’hommes que de femmes, trois fois plus je crois, à Montévidéo. C’est le chant du mâle délaissé, pleurnichard, abandonné, mais mâle quand même. La femme, qui est en position de force, obtient des lois de divorce très avancées et très tôt, de sorte qu’elle peut quitter son mari à tout moment et en prendre un autre. Ça fait l’affaire de la société, puisque, pour être brut, la femme peut vivre avec plusieurs hommes successifs en toute légalité, incitée par le droit, et donc, combler d’une certaine façon le déséquilibre. La figure de Gardel, sa vie plutôt, ne correspond à rien de tout ça. Le seul fait qu’il chante et compose ses tangos du mâle malheureux est une sorte de mensonge, de farce, de coup de théâtre magistral. C’est pourquoi, je pense, on l’appelait « el mago »: sa figure plastifiée, sa coiffure parfaite, sa tête de fils unique et de premier de la classe, ses dents publicitaires, rappellent la figure du magicien impeccable qui sort de son chapeau tous les mensonges. Cela dit, beaucoup d’hommes ont dû se cacher à cette époque. Et parmi ceux-ci, des footballeurs.

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      3. Ça en met un coup (désolé de l’expression) à l’image du gaucho ou du mâle gominé 😉
        Ceci dit, il est parfois question des avances de Luisito Monti vis à vis de Felice Borel, un soir de picole. Luisito ! Le boucher !

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      4. Interrogé à propos de son bouquin sur Gardel, Felipe Pigna a dit : « J’aurais aimé qu’il soit, comme moi, un supporter d’Independiente, mais Gardel était un fan du Racing en Argentine, du Nacional en Uruguay et du Barcelone en Espagne ».
        Supporter du Barça ? Ben non, ami de Samitier et Plattko avant tout, ce qui me laisse perplexe quant à ce qu’écrit Pigna.

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      5. Non plus, je ne sais même pas s’il a assisté à un match à Sarrià. Il allait à des Les Corts pour faire plaisir à ses amis. Idem pour la boxe. Pas en tant que supporter. Les passions qu’on lui connaît, ce sont les courses hippiques (où il perd des fortunes) et les voitures.

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      6. Sans aller jusqu’à George Best, on peut rappeler le mot d’André Citroën : « Il y a trois façons de faire faillite : les femmes, le jeu, et les ingénieurs ». Carlos Gardel et lui forment donc un duo parfaitement complémentaire.

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