Pierre Arrighi : « Rimet est un génie politique, pour ne pas dire machiavélique » (2/2)

Deuxième partie de l’interview de Pierre Arrighi (voir la première partie).

Des éliminatoires, en quelque sorte ? Concernant les forfaits de l’Uruguay en 1934 et en 1938, comment les expliquer ? La Celeste avait-elle des chances de triompher à Rome ou à Paris ? Plus généralement, comment expliquer qu’un si petit pays, peuplé d’à peine trois millions d’habitants, ait été quatre fois champion du monde ? On a l’impression de lire un lien culturel, charnel, civique entre le peuple, la nation et le football. En particulier, il y a un passage dans votre livre (pages 56 et 57) où vous évoquez les « matchs protestables » : c’est assez stupéfiant car on y voit vraiment la démocratie à l’œuvre dans le cadre du football. Est-ce révélateur d’une approche typiquement uruguayenne du football ? Ça fait beaucoup de questions…

Des éliminatoires et, surtout, un championnat du monde hybride : éliminatoires de la FIFA, phase finale olympique. C’est historique et fondamental. Le premier projet mondialiste de la FIFA n’est pas le championnat « de la FIFA » mais un championnat hybride. Et si les Britanniques n’avaient pas cherché à amateuriser les JO, ce modèle, très intelligemment conçu par Rimet, aurait pu durer quelques décennies !

En 1930, l’Uruguay se sent trahi : l’Italie est à l’avant-garde de la propagande contre le Championnat du Monde à Montevideo. Ses dirigeants ne comprennent pas qu’on donne à Rome le privilège d’organiser la deuxième Coupe de la FIFA. C’est ce qui explique leur absence en 1934. Pour ce qui est de 1938, à la suite de l’incident Pérou-Autriche à l’occasion des Jeux de Berlin en 1936, la Confédération sud-américaine décide de boycotter Rimet qui présidait le Jury d’Appel et qui a annulé la victoire péruvienne. L’Amérique du Sud boude l’épreuve sauf le Brésil qui fait bande à part et qui, globalement, ne joue plus la Copa América.

En ce qui concerne le deuxième point, il faut d’abord comprendre l’époque. Quels sont les grands footballs émergents des années 1910-1920 ? La Hongrie, la Tchécoslovaquie (qui gagne le Tournoi interallié), l’Autriche, l’Uruguay. Il y a aussi l’Italie qui se faufile et qui est, comme on le verra, l’exception. En Amérique du Sud, le Brésil n’est pas une puissance et l’Uruguay domine l’Argentine dès qu’un titre est mis en jeu.

On vit alors la domination des pays dont le football est un football de capitale, drainé vers un championnat de capitale. Le championnat uruguayen c’est Montevideo, le hongrois Budapest, l’autrichien Vienne, le tchèque Prague. Il y a donc un processus de sélection intense et facile à faire tandis que des grands pays comme la France, l’Argentine, l’Espagne ou le Brésil se trouvent divisés en footballs et championnats régionaux, ce qui génère souvent des rivalités et un manque d’esprit national qui pénalise la sélection. Il faut se souvenir qu’en 1930 les dirigeants argentins composent leur équipe en écartant les joueurs de province. Et qu’en 1950 il y a toujours une rivalité mortifère qui ronge le football brésilien entre Paulistas et Cariocas.

Dans ce contexte, animé par la rivalité avec l’Argentine – le soi-disant « grand frère » qui est plutôt un grand voisin dont on se méfie et on se distingue à peu près sur tout, l’Uruguay va pousser à l’extrême toutes les forces sportives possibles de manière à compenser sa petite taille. Le football enfantin, familial, de quartier et de petit terrain se généralise dès 1905 et en 1910 apparaissent déjà les premiers enfants prodiges. A partir de 1912, les clubs et la sélection se démocratisent, ce qui veut dire que toutes les discriminations de classe sociale, d’origine ou de race tombent. La révolution que fait l’équipe de France 1998, l’Uruguay l’a déjà réalisée en 1912. Brillent alors sous le maillot céleste les ouvriers noirs de la zone portuaire, les fils de l’élite, les jeunes immigrés italiens, basques et français.

Cette démocratie sociale et sportive, va encore plus loin sur le plan politique puisque dès la création de l’AUF en 1900 par des Écossais, les matches sont protestables. A la fin de la rencontre les capitaines présentent leurs réclamations et quatre jours plus tard se tient un Jury d’appel qui décide d’annuler un but, de faire exécuter un pénalty non sifflé, de rejouer le dernier quart d’heure, etc. Et lors des débats, les arbitres ne sont pas invités. Le gagnant du dimanche peut perdre le jeudi. Dans ce système est impliquée la future élite du pays, qui utilise le football comme un laboratoire politique. Il durera jusqu’en 1932 ! La démocratie uruguayenne, ultra développée en 1920, découle de ce laboratoire du football, comme la démocratie sud-africaine découle de l’expérience du football de la Makana à la prison de l’île Robben. Comme dans la rue, c’est un consensus entre joueurs qui fait le pouvoir judiciaire.

Cela se répercute dans le système de jeu lui-même. La Celeste de 1920 à 1950 n’a, pour ainsi dire, pas d’entraîneur. Alors qu’ailleurs on recherche les meilleurs entraîneurs anglais ou écossais, en Uruguay ce sont les cadres eux-mêmes qui sélectionnent et organisent l’équipe, définissent les tactiques et les ajustent en cours de match. En 1924 c’est Nasazzi, Scarone, Mazali, Andrade. En 1950, Varela, Schiaffino, Máspoli, Ghiggia. Ainsi, l’infériorité technique est compensée par une démultiplication tactique et une capacité à modifier les tactiques dans le jeu même, comme faisait la France en 1998 avec Zidane ou comme vient de le faire le Japon au Qatar. En 1920, l’Argentine est supérieure techniquement, mais l’Uruguay la domine sur le plan mental.

En 1950, ce système de joueurs-tacticiens est réactivé par l’action de l’entraîneur hongrois de Peñarol, Emérico Hirschl, qui bâtit de toutes pièces l’attaque qui réalisera le Maracanazo. Mais au Brésil, les joueurs sont seuls. Ils vont voir les matches des adversaires, définissent les faiblesses adverses, fixent les stratégies, rédigent même des articles pour la presse. Lors du match décisif, c’est à la mi-temps, entre Varela, Ghiggia, Schiaffino et Míguez qu’une tactique nouvelle est concoctée. Elle donnera lieu aux deux actions décisives : l’incursion de Ghiggia qui centre en retrait, puis la même incursion qui se termine par une frappe directe qui échappe à Moacyr Barbosa.

Puis les temps changent. L’Italie, qui n’est pas un pays-capitale, avait déjà marqué le chemin tant bien que mal, sous le fascisme. La Hongrie est favorite en 1954 mais c’est l’Allemagne, dont les joueurs proviennent de toutes les régions et veut tourner la page de la honte, qui gagne. Puis c’est la domination du Brésil, pays continent. La France et l’Espagne illustrent cette nouvelle période. Les petits pays ont moins de chances parce que l’unité facile qu’ils avaient grâce à leur taille est devenue désormais un handicap. Leur championnat national manque désormais d’énergie.

Egalisation de Schiaffino face au Brésil, en 1950.

D’où l’importance, sans doute, pour l’Uruguay d’affirmer sa riche histoire et son impressionnant palmarès. Et pourtant, nous l’avons dit, ces quatre titres mondiaux font encore débat. Récemment, en 2021, la FIFA a sommé l’AUF de retirer deux étoiles de son maillot. Avant de faire machine arrière. Comment expliquez-vous cet épisode ?

En juillet 2021, la FIFA Marketing, qui est un département de la FIFA, a sommé l’entreprise allemande Puma de retirer deux étoiles des futurs maillots uruguayens, et ce avant la fin du mois, en la menaçant d’engager des procédures pour contrefaçon. Puma a transmis le courrier à Tenfield – entreprise qui, très anormalement, possède tous les droits d’image de la Celeste depuis 25 ans. Tenfield n’a communiqué l’information à l’AUF que début août. Alors, la première réaction de certains dirigeants uruguayens a été de céder à la demande : on modifiera le maillot et on ouvrira ensuite « le débat ». Mais d’autres s’y sont opposé avec fermeté et la presse aussi, unanimement.

La presse a cru que l’attaque de la FIFA concernait la question historique. En réalité, l’histoire n’intéresse la FIFA que très marginalement et à des fins strictement commerciales comme le confirment tous les secrétaires généraux de ce siècle-ci. La grande affaire de la FIFA c’est de tirer le maximum d’argent de sa « marque » et de faire main basse sur tout ce qui se voit durant la Coupe du monde, y compris la bombe d’aérosol qui marque les coups francs. Tout DOIT lui appartenir puisque la Coupe du monde valorise tout.

Et comme depuis 2010 le règlement de l’équipement tourne dans le sens de l’appropriation des étoiles, qui ne seraient plus des symboles du palmarès national, mais tout bêtement des symboles de la « marque Coupe du monde de la FIFA », certains petits malins ont trouvé que l’Uruguay se moquait du monde, et que les étoiles uruguayennes étaient aussi fausses que les crocodiles Lacoste que vendent les gitans sur les places de Lisbonne.

La réaction des journalistes uruguayens a été très inconsistante et, surtout, hors-sujet. Heureusement, on a pu faire comprendre à l’AUF que la démarche de la FIFA était illégale et donc inopérante. En effet, si la FIFA veut remettre en cause des étoiles, la demande doit provenir du Secrétariat général, s’adresser à la présidence de l’association incriminée, et être dûment argumentée. Aucune de ces trois conditions n’était remplie. La présidence de l’AUF a donc engagé un litige de pure forme, et là Infantino s’est retrouvé dans une situation compliquée : un litige en la matière ne peut être traité que par la Commission de Marketing et Télévision (le nom montre bien qu’il ne s’agit pas d’histoire…). Or cette commission a été dissoute lors de l’éviction de Jérôme Valcke il y a 5cinq ans ! C’est pourquoi Infantino a tout arrêté, et a demandé à l’AUF de ne pas révéler les dessous de cette triste affaire.

De toute façon, même sur le plan historique, la FIFA ne peut pas remettre en cause les étoiles uruguayennes. Elle n’a pas, dans ses statuts, la mission d’écrire l’histoire du football. Si elle invoque un récit quelconque, par exemple celui qui figure dans le livre de son Musée, il suffira de lui demander qui l’a écrit (il s’agit d’un journaliste anglais) pour comprendre qu’il n’a pas de légitimité internationale. Il n’y a pas de récit parce l’Afrique, l’Europe Centrale, l’Uruguay, l’Angleterre, la France portent chacun leur propre perception, souvent politique, et les conditions d’accès à un regard objectif n’existent pas.

La FIFA a donc été obligée de reculer. Cependant, tout récemment, le président paraguayen de la Conmebol a fait le calcul des étoiles par continent et n’en a comptabilisé que deux pour l’Uruguay. En Uruguay on dit que la polémique est close. En réalité elle n’a toujours pas eu lieu. Ce qui est dommage c’est que les chercheurs français, qui sont influents, ont accès aux archives et connaissent les dérives du discours pro-anglais actuel d’Infantino, ne veulent pas revenir sur leurs analyses précédentes, et demeurent piégés par la fiction égocentrique inventée par Rimet en 1954. Seuls les historiens issus de l’Université des sports (Pascal Charroin, Thierry Terret, par exemple) sont ouverts à cette perspective. Mais eux aussi sont écartés des lieux influents et ce débat ne les intéresse pas vraiment.

La solution au problème des quatre étoiles uruguayennes serait que la FIFA accepte deux étoiles d’une couleur et deux autres un peu différentes, par exemple, entre parenthèses, ou séparées par un tiret, ou d’une autre couleur, et qu’elle signale cette unique exception dans le Règlement de l’équipement. Mais d’aujourd’hui, elle n’en est pas capable parce que cela reviendrait à reconnaître que les premiers Mondiaux ouverts ont été olympiques, et que le mérite de leur création est partagé avec Coubertin, le CIO, le COF, la FFF, etc. Cependant ce partage est une réalité, y compris en 1930. Puisqu’à Montevideo, c’est l’AUF qui sauve la Coupe du monde déserté par la FIFA européenne. Au sens historique stricte, le premier championnat du monde de 1924 est l’œuvre de la FFF, celui de 1928 de Rimet, celui de 1930 de l’AUF. Le vrai championnat FIFA n’apparaît qu’en 1950.

L’autre solution, supprimer deux étoiles, revient à fausser le palmarès d’un pays clé de l’époque pionnière, et c’est donc un cas trop grave de manque de sportivité et d’ingratitude, avec un risque : que des vérités très cruelles soient dévoilées. Aussi, le risque est que l’Uruguay ne mette aucune étoile en signe de révolte – les étoiles étant facultatives. Il faudra alors écrire un autre livre : Pourquoi l’Uruguay ne met pas d’étoile ?

Jules Rimet, président de la FIFA (à gauche) et Raul Jude, président de l’AUF (à droite), posent avec le trophée mis en jeu en 1930.

« La fiction égocentrique inventée par Rimet en 1954 » : est-ce que vous pouvez développer ?

Rimet, comme l’illustre bien le livre des Trois naissances, est un génie politique, pour ne pas dire machiavélique. Il manipule, joue sur tous les tableaux, soumet tous les principes au réalisme à condition que cela serve ses ambitions. Au début de sa carrière il y a peu de coïncidences : il vote l’amateurisme en 1914 et soutient la liquidation de la FIFA que les Anglais proposent en 1919 ! Par la suite, son ambition personnelle coïncide avec celle de Coubertin et avec les intérêts du football mondial : il « ouvre » le tournoi olympique aux professionnels, contre les Anglais, Belges, Hollandais et Suédois. Il s’impose. Mais sa volonté de pouvoir monopolistique le conduit à interdire la Coupe d’Europe que l’Italie veut organiser pour contrer le football sud-américain : on est en 1926 ! Cette Coupe ne naîtra qu’en 1960 à cause de Rimet ! La conséquence est le sabotage des associations européennes qui en 1929 votent en faveur de Montevideo mais avec l’intention évidente de ne pas s’y rendre.

Après 1930, Rimet comprend que la force européenne est à Rome. Il mise sur une alliance avec les dirigeants fascistes. Il offre la Coupe du Monde à Rome en 1934. Pire, il fait de la Coupe du monde une sorte de Coupe d’Europe élargie : les arbitres sont tous européens, le Jury d’appel est aussi exclusivement européen, et le quota réservé aux Sud-Américains est infime. La situation se répète en 1938. Cette édition parisienne est une caricature. Tout ça parce que Rimet ne veut pas que le pouvoir de la FIFA soit contesté par une confédération continentale. Aussi, il traverse la Seconde Guerre mondiale en qualité de Président du Comité National des Sports, poste qui lui a été accordé par Henry Paté en échange de l’envoi de l’équipe française à Montevideo, et qu’il exerce de 1931 à 1947 !

Tout ça fait tache et n’est pas glorieux. Mais s’accompagne d’un culte croissant de la personnalité. En 1946, le président de la FIFA veut que la Coupe du monde soit rebaptisée « Coupe Jules Rimet ». Le mondial au Brésil consacre l’image de Rimet au-dessus de la mêlée, pape du football. En 1954, malade, il prend sa retraite. En partant il publie un petit livre où il règle ses comptes : Histoire merveilleuse de la Coupe du monde. Il a une intention : postuler au prix Nobel de la paix. Pour ça il doit purifier son image et effacer tout ce qui, par comparaison, réduit sa stature. Il fait comme le coucou : il vole l’œuvre des autres, le mérite des autres, et falsifie une histoire qui est celle qu’on connaît aujourd’hui : Rimet inventeur du championnat du monde de Montevideo en 1930 ; l’AUF comme une structure qui exécute son dessein ; Coubertin comme le chef d’un mouvement rétrograde ; le CIO amateur et la FIFA intrinsèquement universelle et supérieure.

Son idée est de se faire passer pour un grand inventeur humaniste, le Coubertin du football en mieux. Dans cette optique, avec une intelligence et un art de l’imposture admirable, il révise toute l’histoire dans le moindre détail et produit une trentaine de pages qui sont un chef-d’œuvre de la supercherie littéraire. Moi aussi j’ai cru qu’il s’agissait d’un témoignage. Puis j’ai compris qu’il y avait trop de mensonges.

La clé pour comprendre l’imposture de Rimet est le livre que le vice-président de la FIFA, l’Uruguayen Enrique Buero, publie en 1932. Ce ne sont que des documents, rapports, télégrammes, lettres. Une bombe Wikileaks de l’époque. Ça s’appelle Negociaciones Internacionales. C’est une clé majeure, incontournable. Sur cette base j’ai pu démarrer les 36 mensonges de Jules Rimet. Ce qui est intéressant c’est que Rimet invente un gros mensonge à chaque fois qu’il faut cacher une page noire. Il sème ainsi des petits cailloux dont l’ombre nous mène à la découverte d’une part importante de la véritable histoire, souvent médiocre, de cette période.

Portrait d’Enrique Buero.

Pendant 12 ans, vous avez donc mené un travail de bénédictin afin de retrouver la vérité dissimulée derrière les affabulations de Rimet. Votre dernier livre, les Trois naissances, est en quelque sorte la synthèse de vos recherches et il couronne votre entreprise : au sujet du premier championnat du monde de football, au sujet des mensonges de Rimet, mais aussi à propos du football uruguayen. Une dernière question, donc, sur l’évolution du football uruguayen après les années 1950. Alors que, dans la première moitié du XXe siècle, l’Uruguay était réputé pour son football artiste, il a depuis plutôt acquis la notoriété d’une équipe accrocheuse, opiniâtre, parfois violente – malgré la présence en son sein de véritables artistes comme Luis Cubilla, Enzo Francescoli, Alvaro Recoba ou Diego Forlan. Cette description vous semble-t-elle juste ou bien traduit-elle une méconnaissance du jeu uruguayen ? Et comment expliquer cette transformation du jeu uruguayen, ou bien la vision biaisée que beaucoup en ont actuellement ?

En ce qui concerne la rugosité du football uruguayen, elle a toujours existé. C’est le propre du jeu de rue, chercher la balle dans les pieds de l’autre avec fermeté : « trancar » dit-on en espagnol, « verrouiller ». Il faut constater ce paradoxe : déjà durant la période artistique, qui va de 1912 jusqu’au match contre la Hongrie en 1954, on voit se développer une légende noire du football uruguayen, sans aucune assise factuelle, qui est pur dénigrement, et qui consiste à expliquer les victoires de ce tout petit pays par la brutalité des joueurs. Et on attribue cette brutalité à des questions raciales irréparables. Ce dénigrement a commencé en Allemagne, à la suite du match disputé à Amsterdam, et qui de l’avis de tous les observateurs n’a eu qu’un seul grand coupable, l’équipe européenne. La presse allemande s’en est pris à la brutalité des Noirs uruguayens dans le cadre de sa propagande dite de la « Honte noire » contre l’occupant français. Il s’est poursuivi en 1930, lors de la campagne menée par Crítica, qui était plus un torchon qu’un journal à sensation, dont le but était de préparer le coup d’Etat et de couvrir le marché noir des billets mis en place par les dirigeants de Buenos Aires.

Malheureusement ce salissement raciste, ou comme disent les historiens aujourd’hui, « cette représentation », s’est perpétué après le Maracanazo contre Obdulio Varela, puis a été reprise par certains universitaires argentins et français comme Eduardo Archetti ou Patrick Mignon, qui ont eu le culot de qualifier le style de jeu intrinsèque des Uruguayens ainsi : brutal, gaucho, indien. Bêtise ? Ignorance ?

Et cela s’accompagne d’une image négative du pays. Dans le livre Le siècle du football que Wahl, Lanfranchi et d’autres universitaires français rédigent pour la FIFA avec la sociologue allemande Christiane Eisenberg, l’Uruguay figure bien dans la liste des pays autoritaires de la première moitié du XXe siècle, avec les Philippines, l’Argentine et l’Espagne. L’Uruguay est pourtant, durant toute cette période, un des pays les plus démocratiques du monde. A noter que l’Allemagne nazie, elle, ne fait pas partie de cette liste noire !

Si vous lisez les chroniques françaises de l’époque, ni en 1924, ni en 1928, ni en 1930, encore moins en 1950, le jeu uruguayen n’a été violent ou brutal. C’est plutôt le contraire qui se produit. Au Maracaná, c’est le Brésil qui commet le plus de fautes. En 1930, c’est Monti, le célèbre boucher, qui fait des siennes. En 1928 ce sont les Allemands qui cognent. En 1924 les Hollandais.

Comment expliquer cette « légende noire » ? Parce que les puissants ont du mal à accepter la défaite sportive lorsque l’adversaire est petit, inconnu et, finalement, incompréhensiblement supérieur. Alors il faut « trouver des explications », des coupables : la violence et, bien évidemment, l’arbitre. N’oublions pas que la victoire uruguayenne de 1930 n’a pas été reconnue officiellement par l’association argentine, et que l’opinion argentine minimise toujours le titre mondial de 1950 puisque leur toute-puissante équipe n’était pas là.

Cela dit, dès 1960, le football uruguayen décline. Et lorsque le pays s’effondre, avec pour la première fois une dictature de la honte, le football est entraîné dans cette chute. Il y a pression, impuissance, perte de repères moraux, rage et dérives. C’est un phénomène classique. La Hollande, l’Angleterre, le Portugal, le Brésil même, l’Argentine, l’Allemagne bien sûr, ont connu cette tentation du jeu dur à des moments où la mission imposée par l’opinion et l’Etat devient trop forte et la qualité technique du passé n’est plus au rendez-vous. Alors oui, il y a eu des abrutis qui ont sali l’image de la Celeste, mais qui, très logiquement, durant cette triste période, ont été sanctionnés et dénoncés par la presse de façon précise.

Pourtant, ce ne sont pas des Uruguayens qui ont massacré Pelé en 1966, ni des Uruguayens qui ont brisé Battiston en 1982, ou brisé la jambe de Maradona un an plus tard. Et si vous regardez les études poussées et les images qui classent les actions les plus brutales de l’histoire du football, je veux dire des actions à la limite criminelles, vous trouvez en tête de ces tristes exploits des Hollandais, des Portugais, des Anglais, des Gallois, des Espagnols, des Allemands… Il n’y a que les Français qui ont cette qualité admirable du fair-play permanent.

La critique de tout jeu réellement brutal est toujours bienvenue, y compris lorsqu’il s’agit, bien évidemment, des lamentables agissements mordants d’un de nos plus brillants attaquants. Mais il ne faut pas en faire une confirmation d’une légende noire raciste, montée de toutes pièces, dont le but est encore et toujours la dévaluation d’un palmarès conquis grâce à un jeu limpide.

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114 réflexions sur « Pierre Arrighi : « Rimet est un génie politique, pour ne pas dire machiavélique » (2/2) »

  1. Le jeu limpide des années 1920 date, hélas, d’avant la télévision. À l’ère moderne, on pense plutôt aux équipes de 1970, 1974, 2010, ou surtout 1986 qui n’étaient pas vraiment des apôtres de la bonne parole. De là à penser que cette face sombre du jeu est devenue partie intégrante de l’identité de la Celeste, à la manière de l’Atletico de Madrid, il n’y a qu’un petit pas que le bénéfice du doute empêche encore de franchir… Que faut-il en penser ? Quoi qu’il en soit, « agissements mordants » est une trouvaille qui justifie à elle seule la lecture de cet excellent article !

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    1. D’avant la télé mais pas d’avant les films. On voit le jeu uruguayen contre la Suisse en 1924 et plus longuement contre la Hollande ou l’Argentine en 28. De 1950 il y a encore beaucoup de morceaux de film à voir, et les récits de la radio. Puis il y a la quasi-totalité du match de 1954 contre la Hongrie. Il y a aussi les chroniques écrites qui permettent de comprendre. Ce qu’il faut bien saisir c’est que certains mauvais perdants attribuent un jeu brutal à l’Uruguay bien avant les années 70. L’Argentine en 1930 (c’est la honte), la propagande de la honte noire allemande en 1928, toujours avec une base raciste, anti-noir, anti-métisse. On a même attribué la brutalité uruguayenne aux Indiens !!!!!!! et aux gauchos !!!!!!!! Après c’est un classique, un football qui se croit grand et qui se retrouve totalement dépassé, s’il n’est pas parfaitement éduqué, peut devenir violent. On a même vu lors de cette dernière coupe des attitudes limites de la part de Betancur. Pourquoi? Parce que l’entraîneur leur demande de faire match nul et lui, frustré, ne veut pas ! Il y a derrière une pression passéiste qui fait mal, et ça dérape. Comme dans la rue. Puis il y a eu la dictature et ce qui s’ensuit avec la perte de valeurs sur tous les plans. Quand j’étais gosse, au clasico les supporters étaient mélangés, pas un incident. Aujourd’hui la ville se coupe en deux séparées par des cordons policiers et tu risques ta vie si tu te trompes de secteur. L’Uruguay n’est plus la Suisse d’Amérique.

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    2. Bien vu sur le football qui devient violent quand il se sent dépassé. J’ai regardé pas mal d’images disponibles sur la CM 1974 pour une série de sujets à écrire et le Brésil-Pays-Bas du second tour, une véritable demi-finale, en est un excellent exemple. Dès les premières minutes, il n’y a plus de match tellement les Néerlandais sont supérieurs dans tous les domaines. Il ne reste plus aux champions déchus que le défi physique, ponctué par l’expulsion (rare en ce temps-là) de Luis Pereira en fin de match. Le score de 2-0 ne reflète qu’imparfaitement l’écart entre les deux équipes. Côté brésilien, la prise de conscience a dû être dramatique.

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    3. Un fait me vient à l’esprit en lisant la suite des commentaires. Argentine, Brésil et Uruguay sont tous trois passés au révélateur néerlandais à la CM 1974 : 0-2 pour la Celeste, 0-4 pour l’Albi (peut-être le meilleur match de Cruijff en Oranje), et 0-2 pour les Auriverde. Les trois semblent en avoir tiré des conclusions très différentes. L’Argentine de Menotti a mis une bonne dose de football total dans son style traditionnel et a gagné la CM suivante. Le Brésil de Coutinho a misé à fond sur le physique et le tactique, au détriment des qualités traditionnelles de ses joueurs, et est le pire dont je me souvienne. L’Uruguay, lui, a sombré, absent de la Coupe du Monde pendant douze ans. Pierre peut-il nous éclairer sur les remises en question (si elles ont eu lieu) faites après le WM ouest-allemand ?

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  2. Gracias ! !

    Je reviens sur quelques points
    – « football de capitales », oui très juste de votre part. Même si pas mal de gens voient le football argentin hyperconcentré sur Buenos Aires , il y a de fortes rivalités régionales qui ont longtemps perduré (perdure toujours) et ont empêché une structuration meilleure (et plus centralisée) du foot (un sacré bin’s toujours d’actualité..). D’ailleurs, au contraire de la Celeste qui semble au dessus de ça à vous lire, l’Albiceleste en a souvent souffert, une victime directe des conflits à l’AFA et entre les grands clubs. Mon point de vue est que le foot argentin a bien été plus un football de clubs en opposition et au détriment de la sélection nationale (un peu comme le foot anglais qui était un foot de clubs et de chapelles bien avant que la sélection soit une préoccupation ou soutenue qu’à partir du milieu des 80s/début 90s – bien après 66: une parenthèse à part). De là dire pareil pour l’Argentine j’en pense pas moins, il faut attendre le milieu des années 1970 pour que la sélection soit une préoccupation nationale et plus centrale dans le foot argentin, les « grands clubs »/conflits internes ont souvent miné l’albi via les joueurs ou la Fédé. Bref, je déborde un peu.
    – Uruguay ascendant mental sur Argentine, d’ailleurs je rebondis sur 1938, si on fait un peu de foot-fiction: comment voyez-vous l’Uruguay en 1938 ? dans un léger creux générationnel ? Une favorite tout de même ? (l’Argentine équipe très forte sur le papier semble être passé devant techniquement sur les 2-3 dernières années mais toujours un complexe d’infériorité face à son voisin qui le bat Sudamericano 1937 par ex.

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  3. Et une dernière question, plus académique: dans le monde universitaire français, pensez-vous que depuis quelques années semble se développer un attrait nouveau/renouvelé pour le football ? (plusieurs chercheurs ayant consacré des thèses/travaux en lien avec le football, notamment sud-américain )

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    1. Il y a depuis 1990 une école académique française du football. En réalité il y en a deux: la politique, fondée par Wahl; et la sportive, de l’université des sports, beaucoup moins visible mais plus ouverte car plus indépendante des instance officielles. Certainement il y a des thèses. Mais cette école française fondée par Wahl est « mandarinée » et répond à un seul courant de pensée, hérité des Anglais et de Rimet, trop lié à la FIFA, incapable de contester les contes de fée. De ce fait elle se replie sur des études très ciblées, l’histoire de tel club, de tel aspect, mais sans l’envergure critique qui s’impose. En ce qui concerne la grande histoire mondiale du football, elle n’a pas réussi d’avancées, comme le montre le livre « de la FIFA » écrit par les universitaires français (1904-2004, le siècle du football) ou l’Histoire du football de Paul Dietschy. Tant que cette histoire restera acritique par rapport au récit biblique de Rimet et de la FIFA, il n’y aura pas d’avancée importante sur le plan de la connaissance. C’est en somme une histoire académique figée qui n’apporte aucun concept nouveau. D’ailleurs, elle s’est fait avoir à la FIFA, où règne en maître un journaliste anglais, qui rédige les livres du Musée et la com de la FIFA, en accumulant les sottises, aberrations et prises de position partisanes. Bien fait!

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  4. Je pense que l’image de la Celeste s’est considérablement dégradée dans les années 80 et la CM 86. Certes, il y avait déjà eu dommages par le passé (le champ de bataille en Copa 59 lors de Brésil – Uruguay raconté dans El Gráfico par Dante Panzeri), un Chili – Uruguay vers 1975 avec 19 expulsions je crois mais cela n’avait pas suffi à changer une perception plutôt positive de l’Uruguay. Il me semble que cela change à partir de 86 et cette sélection caricaturale, incapable d’exploiter ses cracks, à un moment où l’image est reine. C’est à peine mieux en 1990 puis la Celeste disparaît à nouveau des écrans européens, nous laissant avec cette image déplorable. Pourquoi n’y a t il pas ou plus de techniciens capables de travailler sur un projet de jeu séduisant ?

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    1. L’image de la Celeste brutale apparaît en 1928 !!!!!! au sein d’une presse allemande pré-nazi !!!!!! t se prolonge dans la presse putschiste argentine en 1930 puis sous Perón. Le problème est que lorsque les Hollandais sont violents -et c’est souvent- ou les Anglais ou les Allemands, on ne construit pas une légende noire raciale comme le font des chercheurs argentins ou français: football indien, gaucho, noir, non civilisé…….. Cette légende noire qui date de 1928 et qui « se confirme » dans lesq années 70-80 a pour but de dévaluer les titres de l’Uruguay: on n’admet pas qu’un petit pays gagne des championnats mondiaux, ballade les Italiens, les Allemands, les Hollandais, les Argentins, etcétéra. C’est la différence. Pourquoi il n’y a pas de projet de jeu séduisant? parce qu’il n’y a pas de vision et il n’y a plus d’ambition nationale. N’oublie pas que la AUF s’est laissée « suspendre » par la FIFA il y a qq années sous le prétexte fallacieux que les joueurs n’étaient pas représentés au niveau exécutif. Le football n’est plus une cause nationale mais un petit business et un nid de vipères. Il n’y a plus de culture mais du fanatisme. Et Tabárez a imposé une théorie selon laquelle le football uruguayen a toujours eu un style défensif. Cette vision médiocre, soutenue par la gauche uruguayenne, a fait de cette équipe une équipe sans pensée. Et a cassé l’idée de joueurs intellectuels en imposant la figure extérieure d’un entraîneur qui dicte.

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      1. « Et Tabárez a imposé une théorie selon laquelle le football uruguayen a toujours eu un style défensif. Cette vision médiocre, soutenue par la gauche uruguayenne, a fait de cette équipe une équipe sans pensée.  »

        Je suis assez surpris de lire ça car, en France tout du moins, l’esprit offensif est plutôt valorisé par la gauche. Et tu ne sembles pas être un fan de Tabarez j’ai l’impression… Comment est-il perçu en Uruguay et quel est ton ressenti envers El profesor ?

        Bel article en tout cas !

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      2. El maestro…. En Uruguay, on dit que Tabárez est très grand et on pense le contraire. En Uruguay règne aujourd’hui la langue de bois et l’idolâtrie, mais une idolâtrie sincère, l’idolâtrie au service de l’appareil, celle qui impose de se taire. C’est un peu comme Mujica: bien vu à l’étranger, mal vue au pays….. Qui te dit qu’il y a un football « de gauche »???? Le football comme le théâtre ou le dîner n’a pas de couler politique. Tabárez c’est un peu le Domenech uruguayen: méprisant, creux, donneur de leçons. Et un entraîneur médiocre. Incapable de résoudre les problèmes tactiques et idéologiquement borné. Par ailleurs, dans son état de santé, il aurait dû être mis à l’écart depuis longtemps. Il s’accrochait et les anciens étaient derrière lui. Au fil du temps, personne ne l’écoutaient, mais face à la presse il se comportait comme Castro: menaçant et méchant. Il a créé un système sclérosé entraînant aussi dans ce sillage la presse et l’AUF, qui est aujourd’hui un appareil aveugle. Tabárez a imposé un principe: il est interdit de critique, je suis le seul à savoir, et l’équipe a tout donné. Un principe de type dictatorial, qui passait mal. mais tout le monde s’est tu, sauf deux ou trois qui l’ont payé cher. Après l’Afrique du Sud, certains politiques ont même proposé qu’on érige une statue de Tabárez pas loin de celle d’Artigas, en pleine ville. Je ne parlerai pas de comportements privés que les Uruguayens connaissent. Malheureusement, Tabárez parti, son héritage reste là. Alonso a joué du Tabárez au Qatar. Mais l’appareil de l’AUF le défend comme il a défendu Tabárez. « El Maestro » est tombé uniquement parce qu’il a perdu la tête et fait des déclarations qui montraient une chute de sa santé spirituelle. Sans cela, il serait toujours là, à ne pas diriger mais à faire la leçon. Sa thèse était que l’Uruguay 4e c’était déjà le maximum et qu’il fallait fêter ça comme une couronne. Mais 4e n’importe quelle équipe classé dans les 16 premiers au classement FIFA peut y arriver. Regarde les 3 et 4 en 2002, ou en 1994!!!!!!! Une fois que tu es premier de ton groupe, c’est pas si difficile de passer le match suivant, et après, avec un peu de chance. Les 3e et 4e places sont accessibles, presque autant qu’une Coupe continentale. Le difficile c’est la une et la deux. Donc avec Tabárez tout s’est rabougri, mais SHHHHHHHHHHT, faut pas le dire!!!!!!!

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  5. Une autre question relative à Ondino Viera. Il est considéré au Brésil comme un de ceux qui ont modifié considérablement le jeu, à l’origine de la montée en puissance des Brésiliens au début des années 40 en osant des choix tactiques novateurs. Quelle est son image en Uruguay ? Il me semble qu’il dirige le Nacional dans les années 50 mais quand le foot uruguayen commence à décliner. Avec la Celeste 66, il ne fait pas de miracles. J’ai la sensation que son crédit est plus grand au Brésil qu’en Uruguay. Est-ce le cas ?

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    1. Une très bonne image, mais en 66 le problème de l’Uruguay c’est qu’il n’est plus capable de produire des attaquants. C’est le prix du monopole Peñarol-Nacional. Ces équipes achètent leurs attaquants à l’étranger: Spencer, Joya, Celio, Artime, Prieto, etc, et les autres clubs défendent. Résultat, le pays n’a plus d’attaque, de frappeurs, de créateurs de jeu, sauf un peu en milieu de terrain. Viera est un entraîneur qui paie le prix de cette époque de sécheresse. la situation change dans les années 80 lorsque les clubs ne cherchent plus à gagner le championnat local mais à produire des attaquants pour exportation. C’est là que des attaquants réapparaissent.

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  6. Merci énormément pour ce partage. Des petites questions concernant les premières négatives du foot uruguayen au niveau mondial…
    Y a t il eu un changement tactique en 1950 apres le match face à l’Espagne qui voit pour la première fois la Celeste ne pas gagner un match au Mondial?
    Comment a ete vécue la défaite face à la Hongrie? Et pire, l’élimination face au Paraguay lors des qualifications pour le Mondial 1958?

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    1. Khiadiatoulin,
      tes questions mériteraient une étude précise que je n’ai pas faite. Changement tactique? Oui, toujours. Sais-tu que les cadres de l’équipe d’Uruguay de 1950 assistaient aux matches des futurs adversaires, notaient tous les points faibles, et composaient l’équipe et le dispositif exact en fonction? Et ils écrivaient de surcroît pour la presse!!!!!!! Mais précisément….. En Uruguay la tactique ne se limitaient pas à un dispositif de type baby foot comme en Angleterre ou en Argentine. On définissait des positionnements décalés très précis et des mouvements particuliers pour les différentes phases d’attaque et de défense. la tactique changeait au cours du match lui-même, comme ce fut le cas contre le Brésil. La défaite contre la Hongrie? Il n’y a pas eu Varela pour ce match. Il y a eu des prolongations. Elle a été acceptée avec tristesse et respect. Mais ce qui n’a pas été compris, c’est la suite: la victoire de l’Allemagne, et donc, la fin d’une époque qui rendait de plus en plus difficile le triomphe de sélections composées en gros sur la base du vivier d’une seule grande ville. L’Uruguay était en 54 le pays-maître. On voit dans le film « Le miracle de Berne », les joueurs allemands étonnés de loger « à côté des Uruguayens ». C’étaient des Martiens, invaincus en championnat mondial depuis 1924. Le récit de Solé lorsque Hohberg égalise est poignant. Il me semble -mais il faudrait étudier la presse, etc- que l’opinion uruguayenne était réaliste à l’époque. N’oublie pas que Varela « regrette » la victoire de 1950, regrette d’avoir plongé le Brésil dans la tristesse, et déclare que l’Uruguay a gagné par chance…. C’est una attitude très classe, le genre de comportement qui n’existe plus. Mais à l’époque, il y avait cet état d’esprit. La défaite face à la Hongrie est admise. le score est sans appel. Les Uruguayens admettent cette supériorité. mais si tu veux plus précis, à toi de faire les recherches !!!!!!!!!

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      1. Hehe
        Merci pour ta réponse. J’imagine que la défaite face au Paraguay lors de la qualif pour 1958 a été une grosse claque pour le pays. Perdre face à cette equipe hongroise légendaire est une chose mais ne pas accéder au rendez-vous mondial…
        Même si cette equipe du Paraguay est bonne, avec des belles individualités. Et très joueuse. En 58, ils prennent énormément de buts mais en marque 3 par match! C’est pas l’époque Chilavert!

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      2. En 58 on commence à comprendre que le football uruguayen entre en décadence. Cette décadence est masquée par les résultats des clubs qui opèrent comme des demi-sélections renforcées. mais Suburú écrit déjà que le football uruguayen est en chute libre et ne sait pas se moderniser………… Ce processus se poursuit. Le fanatisme divise le football local et mine la sélection qui n’a plus le public national de l’époque. dans ce sens, la décadence continue.

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      3. je vais te répondre aussi en te parlant de 1950. L’Uruguay vient de gagner à Maracana, un des grands chroniqueurs passe en revue la prestation de l’équipe. On lit: « Varela: première mi-temps désastreuse. S’est amélioré en deuxième mi-temps ». Là tu vois l’esprit de l’époque, critique, toujours critique, un peu comme celui des Français aujourd’hui. sans critique, pas de bon football. Idôlatrie, oui-oui toujours=football sclérosé. La critique est à la base de la culture du football, et de toute culture, mais aussi, favorise la digestion des défaites. Oui la France a perdu contre l’Argentine aux tirs aux buts, oui elle a gâché une partie de son match, oui elle ne méritait pas vraiment de gagner, mais quelle génération celle qui arrive !

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      4. Pierre
        Dans l’équipe du Paraguay 1958, y avait un joueur que tu as du voir souvent au stade, Juan Lezcano. D’ailleurs, c’était pas fait exprès mais le site est dans une sacrée période uruguayenne. Ton entretien, Mujica et le Mundialito.

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      5. Lezcano oui, de la très grande équipe de Peñarol….. avec Maidana, Cano, Goncalvez, Caetano, Abbadie…. puis Rocha, Silva….. mais à l’époque mon regard se fixait sur Spencer et Joya, les deux diables !

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      6. Spencer, c’est un nom qui n’est certainement pas suffisamment apprécié en Europe. D’ailleurs, il joue avec la Celeste en amical mais jamais en match officiel. Pourquoi n’est il pas allé au bout de l’initiative? Pendant longtemps, j’ai cru qu’il avait refusé poliment la Celeste, comme Erico l’avait fait avec l’Argentine, mais non il a bien quelques matchs avec l’Uruguay.

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      7. @pilo, le fait que des joueurs s’impliquent dans les discussions tactiques n’est-il pas la marque des grands, et en particulier des futurs grands entraîneurs, bien au-delà des frontières de l’Uruguay ? Le premier exemple qui m’est venu à l’esprit en lisant ton commentaire (discussion de qualité exceptionnelle, je ne le dirai jamais assez) est la « nuit de Malente » (ville près de Hambourg où l’équipe avait son camp de base) après la défaite de la RFA face à la RDA à la CM 1974. Dans le dos d’un Helmut Schön dépassé par les événements (il y a beaucoup à dire sur le manque de créativité tactique de l’école allemande d’entraîneurs, mais ceci est une autre histoire), Kaiser Franz avait pris la situation en main lors d’une discussion entre joueurs qui avait duré toute la nuit après le match. Il était ensuite allé exposer à Schön les vues du groupe : mettre pour de bon Netzer (pas en forme) sur la touche, passer d’un 4-3-3 sans ailiers à un vrai jeu de débordement (retour d’Hölzenbein en 11, arrivée d’Herzog puis Grabowski en 7), et mettre sur le banc Uli Hoeness, son propre coéquipier au Bayern, pour lui faire comprendre les enjeux. Le lendemain, c’est lui qui expliquait tout ça en conférence de presse avec son autorité naturelle, aux côtés d’un Schön tout petit sur sa chaise. Un coup d’État qui a eu le succès que l’on sait. Face à des adversaires de haut niveau qui savent eux aussi s’adapter pour trouver le point faible de leur adversaire, il faut cette capacité de réflexion sur le terrain pour réussir.

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      8. g-g-g,
        oui tu as raison
        sans aller plus loin: Zidane, et les cadres de 98. Regarde les matches de l’époque: une demi-heure d’attente et d’observation, puis des ajustements successifs avec des échanges entre les joueurs sur le terrain. Zidane savait déjà tout. Mais le problème n’est pas là. le problème est de savoir si on peut ériger le principe de l’autogestion tactique de l’équipe comme mode de fonctionnement fondamental, comme le faisaient les clubs hongrois (mais pas la sélection…..). Et là tu ne trouves que l’Uruguay des années 20 à 54…. L’Uruguay projette le système de la rue à la sélection. Dans la rue, ce sont les joueurs eux-mêmes qui se sélectionnent et se dirigent. C’est ça le système qui permet à l’Uruguay de gagner. Pourquoi? Parce qu’il faut compenser la supériorité technique des Argentins par un autre biais. Et le biais c’est la démultiplication des tacticiens. Avec 5 ou 6 joueurs tacticiens, l’équipe uruguayenne joue à autre chose, et compense en nombre. Techniquement il joue à 9 contre 11. Mais tactiquement à 5 contre 1.

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  7. Passionnante interview. Merci Pierre et recevez toute mon admiration pour votre savoir quasi-illimité. Alors je ne résiste pas à l’exercice un peu vain mais toujours amusant: quels sont vos 10 ou même 20 joueurs uruguayens préférés de l’histoire ? curieux de voir s’il y aura beaucoup de joueurs post 50.

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    1. Alfredo, je ne peux pas répondre à cette question. Entre 1980 et les années 2000 j’ai perdu la piste du football, je ne me suis plus intéressé à la question. Par ailleurs, je ne suis pas un connaisseur des individualités. Lorsque je regarde un match, je ne vois qu’un mouvement global et mental, chose que j’hérite du fait d’avoir écouté beaucoup de matches à la radio, transmis par Carlos Solé. Je ne suis pas fan ni de Cavani ni de Suarez, que je considère des techniciens moyens et mentalement peu créatifs. J’aimais regarder Recoba, un génie, et Francescoli, un petit maître particulièrement raffiné. Si j’avais un joueur à nommer c’est Luis Cubilla, mais aussi l’élégant Pedro Virgilio Rocha. Le plus grand joueur uruguayen de tous les temps: Nasazzi. Trois fois champion du monde de suite, quatre fois champion continental, capitaine, tacticien, entraîneur, sélectionneur, tout en même temps. Dans la liste des grands joueurs de tous les temps, juste derrière Pelé, le numéro 1 indiscutable.

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      1. Il faut être Uruguayen pour citer Cubilla. Je dis cela sans ironie. Joueur immense, personnage complexe aux choix et aux amitiés douteuses. J’ai la sensation aujourd’hui qu’il est malvenu de le citer parmi les cracks uruguayens alors qu’il ne fait aucun doute qu’il appartient au gratin.

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      2. Parce que Cubilla a laissé un souvenir discutable en tant qu’entraîneur de l’Uruguay et qu’il a été successivement de Peñarol, de Nacional et de Defensor. Solé, le speaker radio, qui était un génie de la compréhension du jeu, disait de Cubilla: « uno de los últimos exponentes de las genialidades características que otrora tuvo Uruguay ». Oui, un génie, mais déjà solitaire.

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      3. Carlos Solé, Naciona-Estudiantes de La Plata, 1971, but d’Artime: « Quitó la pelota Esparrago autor del único tanto aquí en Lima, entregó para Cubilla que escapó de Pachamé, de Malbernat y también de Aguirre Suárez, entró al área, tiró el centro para Artime………, gooool de Nacional Artime, Gooooool de Nacional Artime…………. gran….. pero gran jugada de Cubilla…… genial, de esas que salen sin pizarrón……. dribleando hombres……. se la colocó en la cabeza de Artime como diciéndole, “tomá, ahí lo tenés, hacelo que no lo podes errar!!!! »

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      4. on voit dans ce récit de Solé toute l’importance de la parole qui transmet la compréhension humaine du fait footballistique et fait d’une action une œuvre d’art. Car selon Solé, Cubilla « place » la balle sur la tête d’Artime et pas seulement ça, il le fait en lui communiquant un message: « tu ne peux pas le rater ». Comment cela est-ce possible? Eh bien: c’est ce qui fait œuvre d’art, œuvre unique, ce que sentent les joueurs et les spectateurs, et que l’observateur éclaire met en évidence. Ce centre est un centre de nature magique, divine, puisqu’il parle, et à une seule personne: Artime. Artime n’est alors qu’un serviteur de toute l’action antérieure.

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      5. Ah ah ah, quand on lit les noms, on sait qu’il y a de la testostérone. Fallait se les coltiner les Aguirre Suárez, Malbernat, Madera etc… bon la défense de Nacional, c’était pas mal non plus 😉

        Pour revenir à Cubilla, il me semble qu’il prend délibérément partie en faveur des militaires au pouvoir au milieu des 70es. Idem au Paraguay où il ne cache pas son soutien à Stroessner.
        En Argentine, à son propos, Marzolini avait dit que s’il avait eu un revolver lors des clásicos Boca-River, il aurait tiré ! J’avais fait un portrait de Cubilla en le décrivant comme le diable avec ses cheveux de jais, capable de séduire pour ensuite te trucider.

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      6. Magnifique, c’est l’expression même de la générosité. Artime, celui qu’on adule parce qu’il est le buteur, remercie ses équipiers en ne vendangeant pas. J’ai encore en tête les mots d’Alfredo Amarilla, un jeune qui débute au Nacional après la victoire en Libertadores et qui connaît de beaux moments au Barça. Je crois que Prieto le prend sous son aile et lui explique ce qu’il doit faire : déborder puis centrer à destination d’Artime qui ne le décevra pas.

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      7. Merci pour la réponse. Je me doutais bien que Cavani ne rallierait pas tous vos suffrages, héhé. Je m’étonne un peu que vous ne citiez pas Schiaffino comme le plus grand comme le font les béotiens comme moi.
        On aimerait bien en France avoir plus de Carlos Solé et moins de Raphaël Sebaoun, Fabien Lévesque ou Denis Balbir.

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      8. Je n’aime pas dans cette vieille génération (Suarez, Godín, Cavani, etc), d’une part leur volonté de s’accrocher et de ne pas favoriser le renouvellement de l’équipe, leur incapacité à se replacer dans un dispositif, et aussi, leur comportement vis-à-vis de l’association, en favorisant sa subordination à la FIFA. Sur ce dernier point, Forlán ne joue pas non plus le rôle qu’on aurait pu attendre.

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      9. Sindelar,
        le fait que Nasazzi est le chef, l’organisateur, le sélectionneur, le tacticien, celui qui parle aux autres, qui dit ce qu’il faut faire, qui ne plie pas, qui tient… Certes son profil est étrange, il ne répond pas au critère habituel du buteur et du technicien, mais il est le joueur penseur par excellence, l’esprit du football…. Et dans ce sens, il incarne un aspect fondamental…. Et puis, sur les autres joueurs, Andrade le merveilleux, Scarone, reconnu comme le meilleur joueur de son époque, Cea, le décisif….. je dirais qu’ils sont tous COMPRIS dans Nasazzi…. dans ce passé qui nous laisse insuffisamment d’images et où il faut faire le tri d’une manière sûre….. je crois que cette histoire de bâton de Nasazzi et de capitanat vont dans ce sens.

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      10. Tiens, Umpierrez, je l’avais oublié. Merci Sindelar_et_Bartali pour la madeleine de Proust ! On l’avait vu au Nancy de l’époque Platini où il avait délogé Robert Pintenat (pas le plus grand attaquant français de l’histoire, mais loin d’être un des plus mauvais) de sa place de titulaire. Après, le Racing époque Lagardère, puis Créteil Lusitanos pour finir. Vu ce parcours qui n’a jamais intéressé un gros (le Racing ne compte pas), la question mérite d’être posée : vu la richesse du football uruguayen, Umpierrez a-t-il sa place dans son Panthéon ?

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      11. @Verano82 : Aguirre Suárez, c’est le même qui a pris trente matchs de suspension et fait de la prison après une finale de Coupe Intercontinentale (contre Feyenoord ?) version Rollerball ?

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      12. C’est lui. Finale retour de Libertadores 69 entre Estudiantes et Milan, une boucherie, à la Bombonera je crois.
        Aguirre Suárez, Manera et le gardien Poletti avaient en effet été envoyés en prison par le pouvoir argentin, en effet. Par la suite, il a joué à Grenade avec d’autres poètes comme le Paraguayen Fernández ou encore le père de Paolo Montero, Julio Castillo Montero. Tous les grands d’Espagne craignaient alors le déplacement à Los Carmenes (Amancio du Real se fait massacrer par Fernández).

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      13. On n’en mesure que mieux la qualité de Mario Kempes, double pichichi pour ses deux premières saisons à Valence face à ce ramassis de tueurs…

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      14. Oui, la Liga des années 70, jusqu’à 84, disons la finale de Copa del Rey entre le Barça et l’Athletic, c’est un championnat très violent. Mais en venant d’Argentine, Mario avait été bien préparé 😉

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  8. Parmi les raisons du déclin post 54, n’y a t il pas un lien avec la faible implication des champions 50 à la fin de leur carrière. Hormis Máspoli, qui s’engage sérieusement dans une carrière d’entraîneur ? Je n’en vois pas vraiment…

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    1. c’est possible, mais il y a une vraie difficulté pour ces anciens joueurs cadres à devenir entraîneurs extérieurs….. une difficulté je dirais, psychologique….Schiaffino, Julio Pérez, Varela font des tentatives, même Ghiggia plus tard….. Mais généralement ratées…….. Le problème, je crois, pour l’Uruguay, est de savoir s’il reprend la ligne « hongroise » des joueurs intellectuels qui est la sienne en 1924 et en 1950, ou s’il adhère au modèle du reste du monde, plus vertical, qui sépare la pensée générale (entraîneur) de son application (joueurs). Et sur ce point il n’y a pas de ligne. Et pas de ligne=perdition. Ton hypothèse est à creuser. Que se passe-t-il? Pourquoi en France les Deschamps et les Zidane qui ressemblent à Nasazzi et à Schiaffino-Varela réussissent et en Uruguay ce n’est pas le cas. A creuser.

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    1. Ça fait un mois que Bobby nous met la pression sur le thème : « Pierre Arrighi va intervenir ici, va falloir assurer ». On ne savait rien mais on s’y est mis a fond pour ne pas se faire engueuler par Bobby, un des chefs de ce site 😉

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      1. Et moi je suis à la rue sur les devoirs de maison comme d’hab ^^
        Te fais pas avoir Pierre, y’a la crème des escrocs de SoFoot ici 🙂

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    2. la crème des escrocs de SOFOOT? précise-moi ça!!!!!! SOFOOT ne m’a jamais répondu à aucun mail, à aucun contact. L’Equipe idem. Ce n’est plus la même presse qu’en 1924!!!!!!!!!!!!! Maintenant on suit la ligne!!!!!!! Comme des petits soldats!!!!!! L’Equipe renie même de ses propres « unes » d’autrefois (je parle de L’Auto, son ancêtre). Idem pour FranceFootball qui renie de son ancêtre officiel……

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      1. Je parlais des lecteurs et intervenants sur SoFoot.
        En ce qui concerne les journalistes eux-mêmes, je n’ai pas de mal à te croire: Ils sont eux aussi dans le star system, ils ne vont pas s’abaisser à systématiquement répondre à la populace. D’autant que leurs connaissance du football ne sont pas toujours au top, ils se contentent de suivre la ligne comme tu le dis, l’objectif prioritaire étant de faire du clic pour faire entrer le ca$h.

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  9. Si je puis me permettre une autre question… le nom de Roberto Porta revient fréquemment parmi ceux qui ont eu une influence sur le foot uruguayen. Il n’est ni champion 1930, ni 1950, trop jeune ou trop vieux, mais son rôle avec le Nacional du quinquenio est manifestement fondamental. Tu peux nous en dire plus ?

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    1. Je ne sais pas si Porta a eu une « influence sur le football uruguayen ». Il était de ces joueurs-penseurs, oui. Trop jeune pour 1930, trop vieux pour 1950. N’oublie pas: il part en Argentine puis en Italie où il joue avec le maillot de la Azzurra en 1935. On dit qu’il avait une capacité personnelle hors du commun pour capter les qualités et les faiblesses d’un joueur « avant même que celui-ci touche le ballon »….. Il pouvait tirer des conclusions immédiates sur un joueur quant à ses qualités et à ses défauts après avoir vu un seul contact de celui-ci avec le ballon. Et l’exploiter dans son jeu. Dans ce sens, il est très uruguayen, puisque pour l’Uruguay, on gagne un match en profitant du talon d’Achille de l’adversaire. Dans le numéro 12 de 100 años de fútbol il figure parmi les « maîtres » aux côtés de Piendibene, Scarone, Schiaffino, Rocha, .ce qui en dit long sur l’admiration suscitée… Suburú écrit de Porta: « il avait toutes les habiletés imaginables, de manière facile et désinvolte. Mais en plus l’intelligence tactique, la clarté mentale, la passe pertinente ». Puis il répond ainsi à ta question: « fue un auténtico precursor de los esforzados mediocampistas contemporáneos, nexo creativo entre defensa y ataque ».

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      1. Merci ! Je vais faire un break mais je reviens en fin d’après-midi, j’ai encore des questions en stock !

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      1. Ah bon, il y a deux parties?! Euh, bien sûr, que je les ai lues.

        Et je vais vous donner une info, certes sans grand rapport, mais parfaitement (in)dispensable. Un Uruguayen a porté le maillot de la sélection autrichienne. Il s’agit de Sebastian Martinez, fils d’Alberto Martinez, qui joua à l’Austria avec son compatriote Julio Morales. Le fiston a porté notamment les couleurs du Rapid avec lequel il a remporté un championnat.

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      2. J’ai même mis un lien hypertexte au début de cette partie.
        Et c’est écrit 2/2 dans le titre.
        T’as encore abusé du schnaps ?

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      3. Ahaha, mais je plaisantais!

        J’ai lu la première partie le jour où elle a été publiée.

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      4. N’importe quoi, je ne manque pas un seul article sur le football argentin!

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  10. Ce qui est marrant avec vous c’est que vous posez des tas de questions intéressantes mais rares sont celles qui ont un rapport direct avec l’interview!!!!! Ce n’est pas une critique, attention! Je constate !

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    1. Il y a aussi de simple divergences d’intérêts. So Foot reste un bon endroit pour échanger bons mots et commentaires d’actualité, p2f est un lieu d’échanges privilégié pour qui aime discuter en profondeur… et écrire !

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  11. @pilo, as tu déjà tenté de publier sur Cuadernos de futbol ? La bible du foot espagnol (selon moi). Ils acceptent les articles d’intérêt général qui dépassent ce cadre.
    https://www.cihefe.es/cuadernosdefutbol/

    Par ailleurs, puisque Rimet est au centre du propos, est-ce que le succès uruguayen de 1950 lui pose problème ? Pour les besoins d’un article écrit récemment, j’ai revu les images de l’après-march : il avait prévu de déclamer un discours en portugais, j’imagine que c’était pour lui l’occasion de se mettre en scène et in fine, il se retrouve sur la pelouse, anonyme, à donner le trophée à Varela presque furtivement…

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    1. Rimet commente le résultat de ce match dans son Histoire merveilleuse
      Résultat incontestable et incontesté dit-il
      Dans le fond, ça lui est égal. Il croyait que la France gagnerait en 1924, puis il a perdu toute illusion à ce sujet. En 1930, il sait que les Sud-américains gagneront et par la suite, il pari sur l’Italie. Pour la France, la direction; pour l’Italie, les victoires sur le terrain. Il est donc habitué à perdre. Et ce qui lui importe c’est l’argent. Dans ce sens: Brésil ou pas, le Maracanazo EST UNE GRANDE RÉUSSITE !!!!!!!

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  12. Retour du ski, enfin! (mes compatriotes sont des nouilles, savent pas rouler, bref).. Tu seras encore là ce soir ou demain, Pierre? Car j’aurai plein de questions sur la période visée par ton dernier ouvrage, tes projets aussi (je t’ai suivi de loin durant ces années 😉 ).. mais d’abord vin, douche et vin. Les fondamentaux 🙂

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  13. Eh les gars, entre les connaissances dantesques de M. Arrighi, les échanges en commentaires avec le même M. Arrighi qui répond à tout le monde, les divers participants ayant une vraie culture footballistique, je prends un pied pas possible à vous lire tous 😉

    J’me demandais juste qui est le créateur – ou les créateurs – du site ? Parce qu’entre la qualité et la diversité des articles, le fait de pouvoir proposer soi-même des sujets et des purs passionnés, j’apprécie beaucoup P2F ! Comme quoi, bien m’en a pris d’aller sur SoFoot et de lire les commentaires malgré mon bannissement définitif, j’ai pu arriver ici par la suite 😉

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      1. D’accord, merci pour ta précision ! Pourtant Sebek est toujours présent sur SoFoot je crois ?

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      2. Pig
        On n’a pas signé de contrat d’exclusivité. Hehe
        L’important était de se faire plaisir et le plus longtemps possible.

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      3. Oui oui bien sûr, c’était juste une remarque de ma part, aucunement une critique ou autre 😉

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  14. Une petite question du soir. Le foot argentin « ne s’émancipe » de l’influence des clubs britanniques et leur jeu fruste qu’avec l’émergence du Racing à partir de 1913. Il me semble qu’en Uruguay, Nacional, parvient à se défaire de la domination du CURCC/Peñarol et de quelques autres clubs anglais plus tôt, au tout début du 20eme siècle. Ce jeu au sol pratiqué par le Nacional dix ans avant que le Racing ne l’impose en Argentine a-t-il donné un avantage sur lequel surfe l’Uruguay dès les 1eres Copas puis dans les années 20 ?

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    1. La dépendance mentale du foot argentin par rapport au foot anglais demeure longtemps, je dirais même qu’elle est encore présente aujourd’hui. Quand tu regardes les compos des sélections tu vois que le foot argentin demeure britannique longtemps et l’Uruguayen est criollo dès 1910. De même au niveau des dirigeants. Concernant « le jeu au sol », je ne crois pas qu’il faille croire à ce type de choses. Le jeu au sol a toujours été pratiqué, et cette histoire selon laquelle les Anglais balance dans les airs et les Ecossais font des passes courtes est une légende. De même l’idée que les Argentins ont inventé « la gambeta » et « l’asado ». Ce sont des histoires pseudo-identitaires. Déjà la AUF de 1900 est spéciale: voire les matches protestables. Les avantages de l’Uruguay sont de plusieurs ordres. Le premier est l’espace. Buenos Aires est saturé. Montévidéo est un archipel de quartier séparés de terrains vagues: là on y joue au foot et on fait des stades, parfois quatre cinq stades côte à côte. le football enfantin et adulte se mélange, et donc l’enfant devient vite tacticien. Le deuxième avantage est la nécessité de se défendre et de penser tactiquement. On dit: L’Argentine attaque, but uruguayen. Autrement dit, l’Argentine domine techniquement, l’Uruguay plante des poignards tactiques. Dès 1916 surgissent les tactiques nationales en Uruguay, séparées des tactiques anglaises, des décennies avant le Brésil ou l’Argentine. C’est Piendibene, puis Nasazzi. Troisième facteur: la démocratie raciale, sociale, culturelle, alors que l’Argentine demeure classiste et raciste. Quatrième facteur: la qualité des dirigeants, constructifs, « suisses », alors que le football argentins c’est la querelle permanente. Il faut distinguer: l’Uruguay est une démocratie catalane; l’Argentine un autoritarisme….. italien……… qui se rapproche vite du fascisme. D’ailleurs l’Uruguay gagne quand le pays va bien; l’Argentine quand le pays touche le fond. Puis il y a 1924 et l’expérience. Et 1928 qui la double, et 1930 qui la triple. L’Argentine demeure alors en ce point aussi très anglaise: forte en amical, faible en compétition suprême. En 78, en achetant le Pérou, l’Argentine obtient sa première couronne. Le contexte est noir noir noir.

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      1. Les deux buts de Maradona en 86 contre l’Angleterre scellent cette révolte-dépendance des Argentins, fils, vis-à-vis de leur mère patrie footballistique. On se bat contre ce qui nous est lié. Et si le deuxième but est un exploit, le premier, il faut l’admettre est une tricherie bien argentine. Ainsi que la référence à Dieu, et au salvateur. le football Argentin reste un football religieux, un opium. Et bien que le monde du football uruguayen s’argentinise, il reste très laïc, avec une chance de redevenir culturel. Cette instrumentalisation politique du football est dans l’histoire argentine et le péronisme, ce mouvement qui a fini par faire sombrer le grenier du monde, a poussé ce pion. Ainsi la main de Dieu est un « acte d’indépendance », la négation de la victoire uruguayenne de 1930 un préparation au putsch et celle de 1950 aussi une instrumentalisation du péronisme et de son complexe de supériorité. Le chaos qu’est l’Argentine du point de vue de ses idéaux s’incarne dans le chaos de la vie de Maradona et dans ces deux buts. Le football uruguayen, par son passé, se veut, à l’inverse, bien français, c’est-à-dire sportif, compétitif, rationnel et olympique, un acte de santé publique dans le cadre d’une recherche du bien-être humain. On voit bien l’argument de cette équipe d’Argentine qui vient de gagner: « donner un peu de bonheur à ce peuple qui souffre tant ». Autrement dit, donner un peu d’air à la mafia corrompue qui depuis des décennies enfonce ce peuple dans les abîmes du désastre social et politique.

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      2. Il y a en effet quelque chose d’autodestructeur dans ce pays que l’on retrouve avec l’Albiceleste.
        Cette CM 1950 gagnée par l’Uruguay en est sans doute le symbole alors que l’Argentine n’a sans doute jamais eu autant de cracks qu’à cette période (même si la Máquina décline, il y a encore du beau monde). Empêtrée dans des querelles avec le Brésil, piégée par la grève et l’exil des joueurs, l’Argentine de Perón se prive d’une réelle opportunité de sacre. Et pour souscrire à ton propos, où va-t-elle chercher du réconfort ? En Angleterre en 1951, pour une défaite transformée par la presse en succès grâce à l’héroïsme du gardien Rugilo. Alors qu’elle a dans ses rangs Loustau, Labruna, Méndez, qu’elle aurait pu être championne du monde, l’Argentine célèbre un gardien moyen et une défaite à Wembley.

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  15. Voilà Pierre!

    Pas encore eu le temps de relire les commentaires et les compléments que tu y apportas ; navré si redite il y aura.

    Un détail qui m’interpelle est la date de publication des « Negociaciones Internacionales » de Buero, 1932……. Buero était diplomate donc, quitta Bruxelles en 1931, fut envoyé à Berlin à compter de mars 33.. Entre les deux : où est-il? En Uruguay? Fut-ce au pays, entre ces deux postes/missions diplomatiques, qu’il entreprit de « rédiger » ( * j’y reviens) ce wikileaks des années 30?

    (* : Je lirai dès que possible ton livre, pour l’heure je présume que tu y livres, parmi les copieuses annexes, l’une ou l’autre pages desdites « Negociaciones Internacionales »? Mais question déjà : sont-elles une livraison brute des câbles diplomatiques de l’époque, ou sont-elles plus sophistiquées, commentées? Câbles dévoilés pour alimenter la position qu’y donne peut-être Buero?)

    Bref, 1932.. Ce n’est vraiment pas commun ni banal : Buero est toujours dans la carrière, pour grosse vingtaine d’années encore. Or normalement ce sont la discrétion et la réserve qui priment dans ces milieux feutrés! Pour moi qui ai pratiqué ces milieux durant une dizaine d’années, c’est juste extraordinaire! Ce ne peut qu’être un acte politique, voire..??

    Bref : qu’est-ce donc qui motiva Buero à « balancer » ce (manifeste) pavé? Cela répondait-il à un agenda intérieur ou extérieur?

    Il y a par ailleurs une figure uruguayenne autrement tombée dans l’oubli (Buero fut abondamment décoré : Belgique, France (grand-officier de la Légion d’Honneur)..et Italie et Brésil même!

    A contrario, j’ai parfois lu que son compatriote Rivadavia Gomez avait été aussi important que lui dans la menée à bien de la Coupe du Monde 1930……… sauf que l’on n’entend quasi-jamais parler de lui pour 1930!, le sort de cette WC semble avoir toujours avoir été joué d’entre Anglais, Buero, Rimet et fédérations européennes.

    Ce Rivadavia Gomez paya-t-il son décès précoce en 1931? Se pourrait-il que Buero succombât en publiant ses « Negociaciones Internacionales », et à l’instar d’un Rimet, à la tentation d’inscrire son nom et nul autre dans le marbre?

    D’ailleurs : comment le pouvoir uruguayen accueillit-il la publication de cet ouvrage par Buero? Avait-il été missionné pour cela? Ou était-ce une initiative personnelle?

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  16. Et voilà que je parcours les commentaires, tes réponses.. C’est toujours aussi riche, lumineux.. Egoïstement envie de t’encourager à continuer..et en même temps souvenir de l’admiration que tu portais à Velazquez (et Goya?).. Il était sans doute inévitable que ta passion de la peinture te rattrape :), et surtout c’est une très bonne idée : la peinture est, de tous les arts et de loin, celui où l’on vieillit le mieux et le plus longtemps.

    Quelque part aussi, je retrouve ici bon nombre de tes sujets, thèmes et mantras jadis, signatures personnelles.. Démocratie, liberté, artisanat, jeu.. Ce livre qu’il me reste à lire semble cohérent, par ce que tu en rapportes, avec ce que tu produisis jadis, comme une clé de voûte. Je peux comprendre que la boucle-football soit bouclée mais j’espère que non 🙂

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  17. Cher Alexandre
    toutes ses questions sont extrêmement perspicaces et pertinentes.
    Je vais te dire d’abord qq chose à toi et aux autres du site: si vous le souhaitez je peux vous faire parvenir TOUS les documents officiels qui ont alimenté mes travaux, dont Negociaciones Internacionales, mais aussi les PV de la FIFA, les bulletins de la FIFA de 1905, précieux, les docs olympiques, règlements, etc.
    Cela dit: Buero reste VicePrésident de la FIFA jusqu’en 1934. Il publie donc sa bombe deux ans avant de quitter la FIFA. Il a 41 ans, il a la Légion d’Honneur, il est au dessus de tous les autres dirigeants de la FIFA, il a sauvé la CM de 1930, il a été de fait le président officieux du football mondiale entre 1929 et 1931. Rimet l’envie, le craint, et dans le fond le déteste: Buero lui fait ombre, Buero l’a court-circuité, vaincu, soumis aux politiques….
    Negociaciones est l’archive clé des Uruguayens honnêtes. Mais il est introuvable aujourd’hui. D’ailleurs, il ne faut pas croire que les Uruguayens se soucient vraiment de leur histoire: les archives de l’AUF sont dans une pièce inondée, par terre, en désordre, consulté principalement par des rats et des crottes de pigeons. Parfois un document précieux apparaît dans une vente aux enchères. Il provient de cette poubelle, qui se trouve à côté des toilettes du « Musée du Football » dans le Centenario!!!!!!!
    Alors Buero. Il a hésité, en bon diplomate. Il a été conciliant, discret, en bon diplomate. Et les organisateurs de l’AUF ont douté de lui, et l’on perçu, parfois, comme un agent de la FIFA européenne. Il y a eu des tensions, mais en fin de comptes, il a toujours suivi les ordres de l’AUF et du Ministère des Affaires Etrangères, et c’est bien lui qui a convaincu Huysmans en Belgique et pathé en France. C’est lui qui a cassé le boycott et mis fin à l’alternative poussée par Mussolini et Rimet: la Coupe Pan Européenne à Rome !
    Cependant, Buero est politicien, et trop intelligent. Et les dirigeants de l’AUF ne veulent pas de lui, ou plutôt ne veulent pas le reconnaître comme un des leurs. Buero est riche et travaille à l’étranger: deux mauvais points, surtout le dernier: ce n’est pas un type qui vit en Belgique qui va nous dire ce qu’il convient de faire. Alors, il l’écoute peu, ne lui envoie pas l’argent qu’il demande pour aller à Paris ou en Yougoslavie et se payer l’hôtel. Et quand la victoire est là, Buero n’est jamais cité, ses mérites ne sont pas reconnus. Alors Buero réclame, et ne salue pas cordialement mais de manière vindicative. Il n’obtient que des reconnaissances tardives et de façade. Il est ambitieux et vexé. Il a des archives. Toutes ses démarches depuis 1923 auprès de la FIFA, de l’AUF, puis tout ce qui concerne 1930, la véritable histoire, télégrammes, lettres, rapports, depuis bien avant le Congrès de Barcelone, qu’il raconte en long et en large, et tout ce qui s’ensuit, le boycott européen, la propagande italienne, les marches arrière de Rimet, etc, etc, et ses négociations politiques. Il décide alors de quitter le football. mais avant de le faire, il croit utile de transmettre au peuple uruguayen les documents qui montrent la réalité de l’organisation de cette Coupe du Monde. Des documents qui soulignent les mérites de Gómez, mais surtout de Usera Bermudez, Roberte Espil, et par la suie, de Raúl Jude.
    Negociaciones est une archive, il n’y a que des documents reproduits et des résumés qui organisent la présentation.

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    1. Mais c’est une bombe à retardement. A l’époque, toute la FIFA connaît la vérité. Personne ne croit que Rimet a inventé la Coupe du Monde en regardant la finale de Colombes et autres conneries. Tout le monde sait qu’il y a eu boycott avec la direction de la FIFA Europe complice, et que le souhait n’est pas la CM mais la CE. Donc ce que Buero s’apprête à sortir est la vérité connue, non cachée.Alors pourquoi Buero fait ça? D’abord pour laisser une trace, ensuite pour démontrer aux Uruguayens le travail accompli, et le travail que LUI MÊME a accompli. « On ne me reconnaît pas: tenez! »
      Il vise donc avant tout l’AUF.
      Il publie donc. En Europe le livre passe inaperçu. Il vaut mieux cacher tout ça. L’Auf achète tous les exemplaires possibles et imaginables et les détruit: Buero va trop loin. On est un pays très avancé certes, mais lui il avance un peu trop!!!!!! Buero tombe ainsi dans l’oubli. Dans le petit milieu du football uruguayen, sans qu’on le dise, il passe pour un extrémiste. Il va trop loin. C’est un franc-tireur. cependant, la lecture du livre ne le montre pas toujours lucide. Ce n’est pas lui qui prend les bonnes décisions, mais il les exécutent à la perfection. Ces documents révèlent ses propres hésitations: il ne croit pas l’Uruguay capable d’organiser la CM, il est prêt à céder au chantage de Rimet et à sacrifier le Mondial….. Bref, c’est honnête à 100%, et l’AUF reste dépeinte comme une association au top.
      Voilà donc l’affaire, et comment l’AUF commence dès 1932 à sacrifier sa propre histoire au profit des petits egos personnels.

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      1. Quelle est la suite? La suite est qu’on ne parle plus ni de Buero ni de son livre pendant des décennies. Et c’est qu’agit Machivel, Rimet. Il faut qu’il se débarrasse de tout ce qui le réduit: de Coubertin, de Delaunay, et bien sûr, de Buero. Il a Negociaciones sous la main (il est à la FIFA…..), et il commence à écrire une contre-histoire qui est basée sur negociaciones. L’Histoire merveilleuse est en partie l’annulation de Negociaciones, la transformation de toutes les vérités en une série de mensonges. Rimet vise alors le Prix Nobel de la Paix. Il doit construire sa statue. Il transforme Buero en vassal. Il explique qu’il veut organiser la première Coupe du Monde à Montévidéo et qu’il a cette idée à Colombes. Il invente qu’il en parle à Buero, et que Buero a pour mission de convaincre l’AUF. Toute l’histoire est retournée, comme une chaussette.
        Quand le livre de Rimet paraît, il n’envoie pas d’exemplaire à son « grand ami » Buero. Pour cause…..
        Puis Rimet meure. Buero ne parle pas de tout ça à ses enfants. Et au final, les petits-enfants de Buero finissent par croire la légende de la grande amitié Rimet-Buero et de Buero serviteur de Rimet: le manque total de reconnaissance nationale les pousse à aller dans ce sens, et surtout: ils ne lisdent pas Negociaciones, le livre de papi!!!!!!!!!!!

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      2. Buero apparaît donc plus tard dans les livres de la FIFA, bien évidemment, puisqu’il aurait aidé Rimet !!!!! et Negociaciones, la bombe, fait tictac sans exploser. Les chercheurs français connaissent le livre, mais bien sûr, ils ne tirent pas les conclusions qui s’imposent. Moi je reçois une copie il y a 14 ans. je lis. Je compare avec le livre de Rimet. Et je comprends immédiatement que Rimet ment de long en large, et que les deux récits sont totalement antagoniques. J’en parle à Garrido, un journaliste uruguayen, qui a du mal à comprendre, et qui se réveille difficilement. Le petit-fils Buero comprend mais résiste: c’était si beau cette amitié Buero-Rimet….. Et voir la photo de papi dans toutes les histoires de la FIFA…..
        C’est de là que naît « 36 mensonges de Rimet ».
        Negociaciones fait toujours tictac; J’ai allumé la mèche. Mais la bombe n’a pas encore explosé.

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      3. Pour revenir a Gomez: il intervient peu dans cette histoire. Il est avant tout le fondateur créateur de la Confédération et de la Copa América. Mais en 1931, lorsqu’il remet les médailles aux joueurs, Buero lui rend hommage en premier chef, puis à Jude, pas à Rimet.

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      4. Je ne sais pas si nous sommes dignes de bénéficier de toutes ces années de recherche (je ne mets pas Alex et Bobby dans le « nous », ce sont nos fuoriclasse!)…
        Je ne fais pas partie du comité de rédaction mais à titre personnel, j’exprime un vœu puisque nous sommes en janvier : que tu continues, si tu en as l’envie, à nous nourrir de ton savoir.

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      5. Est digne celui qui en a envie. C’est un savoir limité, sur un aspect et sur une époque. Peut-être y-a-il aussi une méthode, des sources, parmi tant d’autres. Il y a une légende: sur le sport du passé on ne trouve rien. Les chercheurs français me disaient ne pas connaître les règlements olympiques, ne pas savoir de quoi il s’agit. Tout ça…. En sport on écrit tout. Tout est là. Il faut le cueillir mais aussi le voir et savoir le lire. par exemple: si tu lis: Seuls les cavaliers amateurs sont acceptés. Et ensuite: est cavalier amateur tout gentleman sur un cheval. Tu comprends qu’il n’y a pas d’amateurisme.

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      6. « je ne mets pas Alex et Bobby dans le « nous », ce sont nos fuoriclasse! »
        Et soudain, mes chaussures furent propres…

        Sinon, Pierre, tu m’avais déjà donné l’Histoire merveilleuse de Rimet et une bonne partie des PV des congrès FIFA des origines jusqu’à 1946. Les rapports officiels des olympiades se trouvent assez facilement, je crois, notamment sur le site de la84. Néanmoins, tout cela, y compris (et surtout) le Buero (introuvable), m’intéresse au plus haut point.

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      7. @Verano, en digne fils de mon père : ce sera alors une grappa Fuoriclasse Leon Amarone pour moi!

        @Pierre, je repasse plus tard mais c’est un lièvre extraordinaire que tu as levé là, une histoire aussi fondamentale que hors-normes.

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      8. Il me revient à quoi cette histoire d’entre Buero et Rimet me faisait penser, du Borges évidemment : sa nouvelle dite des « Théologiens ».. Un protagoniste admiratif des talents de l’autre, qui s’évertue d’abord à effacer son oeuvre..avant de finir par se confondre avec lui.

        Verano l’a dit : il est certain que tout ce que tu as à dire sera accueilli ici avec intérêt et bienveillance.. si tu devais un jour changer d’avis, qui sait.

        Je garde précieusement cet exemplaire agrémenté d’un mot trop gentil, que tu m’offris il y a bien longtemps. J’ai veillé à ce qu’il circule en de bonnes mains car je ne comprends toujours pas l’espagnol 🙂 ..mais aussi à ce que je le récupère à chaque fois!, celui-là j’y tiens 🙂

        Mais il y a tout le reste!

        « 1924 » donc.. mais aussi « Les jeux olympiques n’ont jamais été amateurs », « Trente-six mensonges de Jules Rimet », « Pourquoi l’Uruguay a-t-il 4 étoiles? », « Trois naissances du championnat du monde de football », enfin.. Et d’autres travaux encore : souvenir d’un film sur le Maracanazo, ouvrages consacrés l’un à la géographie des terrains de Montevideo, l’autre à la poésie.. ==> D’autres traductions peut-être?

        Quoi qu’il en soit : un immense merci pour ta contribution, qu’elle fût reliée ou non. Tu fus toujours enrichissant.

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  18. Tiens ! il y a une intuition que je suis incapable de confirmer. Dans les années 1920, les gouvernements français – notamment au travers des ministères de la Guerre et des Affaires extérieures – usent du football comme d’un moyen diplomatique. A ce propos, j’ai déjà évoqué ici la tournée en Yougoslavie en 1920, la rencontre Arsenal-Racing en 1930 ou bien la Coupe Kentish : autant de rencontres célébrant les liens avec les alliés anciens (Royaume-Uni, Belgique) ou nouveaux (Yougoslavie).

    Or, en 1930, les équipes européennes qui se rendent en Uruguay sont la France et trois de ses alliés. La Belgique est un allié et un pays ami, la Roumanie et la Yougoslavie sont deux des trois membres de la Petite Entente (l’autre étant la Tchécoslovaquie) créée en 1921 sous l’égide de la France. Simple coïncidence ? Ou bien faut-il voir dans cette expédition sportive, aussi un voyage diplomatique ?

    Le fait que le choix de participer fut finalement dû à des décideurs politiques (Hymans en Belgique, Paté en France) et non à des décideurs sportifs renforce mon intuition.
    Pierre, qu’en penses-tu ?

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    1. La politique a toujours compté, et Rimet d’ailleurs a un pb, puisque lui, professionnaliste radical, se retrouve avec des alliés comme la Belgique, le Luxembourg, la Hollande ou l’Angleterre (de temps en temps), ainsi que les pays scandinaves, qui sont monarchiques et donc amateuristes. Les alliances ne se font pas autour de la question monarchie-république, mais par rapport aux guerres, et ce n’est pas simple pour bâtir des stratégies sportives. Dans ce sens la très habile alliance que noue Rimet entre 1930 et 1938 avec l’Italie est condamnée à ne pas durer…… De fait, aucun de ces pays guerriers n’a jamais pu avoir une part de pouvoir à la FIFA. La FIFA est globalement, soit anglaise soit française. Depuis l’éviction de Platini, devant laquelle la FFF, lamentablement, n’a rien fait, elle est de nouveau anglaise…. Et lorsqu’elle commande un livre, ce sont que des Français et des Anglais qui sont invités. Jamais un Allemand, un Hongrois, un Autrichien, encore moins un Sud-Américain.

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    1. Oui…. On trouve ça dans la presse (LA PRESSE, L’Auton etc) et même sur internet. Regarde:
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Championnat_de_France_de_football_(FSAF)
      Ce championnat est considéré dans la presse comme le championnat de France, le seul, le supérieur. Les professionnels ne touchent que des primes ou des salaires d’un jour. Ce sont des non amateurs, mais le souhait est se rapprocher du professionnalisme anglais. Ils forment une sélection et font des tournées en Angleterre. Certains jouent aussi dans les championnats de l’USFSA qui peu à peu se professionnalise un peu aussi. C’est important parce que, quand les Anglais, après le putsch de 1905, prennent la présidence de la FIFA, ils exigent de l’Usfsa qu’elle intègrent les ligues professionnelles. Et sous le prétexte que l’USFSA ne le fait pas assez, cette Union fondatrice est mise au ban et considérée suspecte. L’Usfsa s’en va en 1908, humiliée. Tout ça est dans les PV de la FIFA.
      Ce qui veut dire que lors du tournoi de 1908 à Londres, sont interdits de jouer les pros britanniques mais aussi les Français!!!!! sans parler des non amateurs belges, suisses, italiens, etc.
      On voit bien là une autre légende: celle qui nous raconte que le professionnalisme a été instauré en 1932….. En 1910 Rimet crée sa Ligue de FA, qui est pro. En 1913 le Red Star se professionalisme entièrement. En 1920, 20 des 22 français des JO vivent du foot! Si on ne tient pas compte de ça, tout est faussé.
      C’est vrai que « l’ère pleinement professionnelle » arrive après. Mais ça c’est autre chose: c’est quand TOUTE UNE LIGUE EST OBLIGATOIREMENT PRO. Il n’empêche que dès 1922 en France on trouve des joueurs A et B, et un système de transfert payant. Les clubs sont autorisés à embaucher leurs joueurs en quantité illimité mais non à leur payer le match du dimanche. En fait, ils sont payés QUE pour venir du lundi au vendredi s’entraîner au club…. ça change quoi? Rien. La seule différence: sur le contrat il y a écrit « employé », et non « footballeur ».

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      1. ce même système de professionnalisme d’employé est légalisé par l’Auf en Uruguay dès 1915. Et aux USA il fonctionne depuis 1905 !!!!!!

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