Comment gagner un match de foot ? – Dans les coulisses de la performance, Editions Solar, 17,90 €

Si le titre peut sembler trivial, le sous-titre (« Dans les coulisses de la performance ») permet de rapidement recadrer le débat. Raphaël Cosmidis, Philippe Gargov, Christophe Kuchly et Julien Momont, qui travaillent souvent ensemble sous l’appellation Dé-Managers chez les Cahiers du Football, décident ici de décortiquer les stratégies des clubs pour atteindre leurs objectifs. Le tout se compose en quatre grandes parties : la construction d’un « club qui gagne », la préparation d’un match, la gestion tactique une fois le match lancé et les éléments qui permettent de faire la différence pendant une rencontre.
Les quatre auteurs ont divisé les grandes lignes en 10 aspects qui sont autant de facettes pour parvenir à ses fins : culture du club, modèle de jeu, méthodologie d’entraînement, recrutement, analyse tactique, data, préparations physique et mentale, coaching et management. Autant d’éléments qui doivent, en théorie, assurer à un club de garnir son armoire à trophées chaque saison. La réalité est évidemment un peu plus complexe mais les auteurs ont l’honnêteté de souligner que le talent brut des joueurs reste primordial.
Mais justement, pour recruter des talents et savoir les sublimer, il faut avoir une stratégie d’ensemble. Rien de nouveau sous le soleil, mais les exemples glissés dans le livre et distillés à grands renforts de témoignages de joueurs, de dirigeants et de membres de staffs techniques, permettent de mieux cerner le fonctionnement d’un club. Le travail du Stade de Reims ces dernières années, qui a permis au club de s’installer assez haut en Ligue 1 malgré un budget limité, est par exemple résumé dans cet ouvrage.
Le livre ne se contente pas d’énumérer les stratégies globales. Les auteurs se sont penchés sur les gains marginaux, cet ensemble de petits détails qui, mis bout à bout, doivent permettre d’améliorer les performances (« tant sur le plan taqueutique que techeunique »). Les dernières tendances (brassières GPS à l’entraînement, data…) ont évidemment une large place dans ce livre.
La richesse des intervenants, issus de clubs et d’horizons divers, permet de livrer une vision globale et de ne pas s’attarder sur les succès d’un club en particulier. L’ouvrage est idéal pour les néophytes, mais les férus de football y trouveront leur compte eux aussi, bien que les entraîneurs ne puissent pas révéler tous leurs secrets. On peut toutefois regretter que les exemples choisis datent tous du XXIe siècle. S’il est vrai que la recherche de gains marginaux est un élément récent, les différentes tactiques utilisées sur le terrain n’ont rien de nouveau. Les choix de couleur de certains graphiques paraissent aussi parfois assez malheureux car pas pensés pour une impression en noir et blanc…
Note : 4/5
Intéressant de voir en effet l’intrusion de la data et de l’IA dans l’univers du football, un pas supplémentaire vers la déshumanisation de ce sport. Mais dans un sport mondialisé, pour des clubs qui n’ont pas les moyens de se payer des scouts sur tous les continents, c’est une alternative probablement peu coûteuse. Un stagiaire la tête bien faite, des données dispos en open sources, un modèle bien ficelé et hop, j’extrais les profils de joueurs qui collent avec les paramètres voulus. Modèle Toulouse FC si je ne me trompe pas.
Une autre considération : les gains marginaux. Je ne sais pas si c’est un phénomène nouveau, je dirais plutôt qu’il s’agit d’un déplacement de gains autrefois marginaux devenus des standards vers d’autres types de gains, encore expérimentaux ou en développement, et qui deviendront eux aussi plus tard des normes. Logiquement, le sport se nourrit des innovations, des évolutions technologiques ou des découvertes scientifiques. Les clubs se dotent même de directeurs de la performance, un terme fourre-tout dont on ne sait s’il s’intéresse à la performance sportive ou à la performance économique/efficience, comme dans les entreprises.
Les gains marginaux, encore du bullshit. Mais ça crée de l’emploi faut croire haha
Je viens qu’on parle de gain marginaux, mais si le foot c’est gagner 2 centièmes sur un sprint de 30 mètres et toujours pas savoir centrer correctement dans la foulée hehe
Les gains marginaux, encore du bullshit. Mais ça crée de l’emploi faut croire haha
on parle de gain marginaux, mais si le foot c’est gagner 2 centièmes sur un sprint de 30 mètres et toujours pas savoir centrer correctement dans la foulée hehe
Les gains marginaux chez Sky / Ineos? L’AICAR et les cliniques en Suisse ouais!
Ah ça oui, dans certaines équipes cyclistes, le gain est pas marginal du tout… hehe
Les gains marginaux, c’est l’énorme majorité du progrès des civilisations. Pour un saut technologique genre IBM PC ou iPhone, combien de gains minuscules patiemment accumulés qui, mis bout à bout, résultent en une énorme différence ? Prenons l’exemple de l’aviation civile, intéressant parce qu’il a offert les deux visages. De 1945 à 1960, c’était l’époque des sauts technologiques : pressurisation des cabines, propulsion par réaction, aile en flèche, techniques de fabrication permettant des ailes à la fois minces, longues, et très résistantes… On est passé du Douglas DC-4 à 350 km/h de croisière à 3 000 m au Boeing 707 à 900 km/h et 10 000 m.
Depuis 1960, en revanche, et aventure du Concorde mise à part, c’est le règne des gains marginaux. Par rapport au Boeing 707-320B, la « version ultime », un Airbus A321XLR est presque aussi long, d’envergure un peu moindre grâce à une aile mieux étudiée, vole aussi vite et presque aussi loin (8 700 km contre 9 300), emporte un peu plus de passagers (206 contre 189), est plus léger d’un tiers au décollage (101 tonnes contre 153), est beaucoup plus fiable, et a une consommation réduite des deux tiers ou presque (33 000 litres contre 90 000). Tout cela sans saut technologique majeur, utilisation de matériaux composites dans certaines pièces mise à part. Rien qu’1% par ci, 2% par là pendant 60 ans…
Ne méprisons donc pas les gains marginaux, ni dans le foot, ni ailleurs. C’est à eux que nous devons notre qualité de vie actuelle.
Gains marginaux et sauts (les termes sont heureux), ça c’est une sacrée question pour le football : qu’est-ce qui aura été un saut? Le dernier en date?
L’on pourrait même ajouter : le dernier saut qui relevât de la culture, et non pas de la pharmacopée.
Je crains qu’il n’y ait matière à remonter déjà fort loin.
J’aime pas la data, forme d’aboutissement de tout ce pan technocratique du foot..que j’abhorre. Mais il faut bien y concéder une efficacité certaine, car que de clubs sont parvenus à se distinguer par ce biais : Midtjylland, les pionniers de Leverkusen il y a bien longtemps déjà, Toulouse et Reims, l’Union en Belgique, Brighton.. L’outil est redoutable.
Sur les gains marginaux, pour moi ça n’a rien de nouveau, du novlangue plutôt. Si l’idée est, à énergie/capital égaux, de grignoter en efficacité et rendement : ça n’a en tout cas rien de neuf, il y a toujours eu de ces petits ajustements opérés pour gagner le petit % qui ferait la différence.
A cet égard, Happel était un champion du gain marginal positionnel, lui qui corrigeait et recorrigeait tant qu’il fallut le placement de ses hommes. Il y a aussi ces livres et interviews écrits par de grands anciens, dans lesquels ils expliquaient comment gagner la nano-seconde décisive en adaptant tel dribble, en repartant sur tel pied plutôt que sur tel autre.. Les gardiens qu’on poussa, pour gagner 2-3 centimètres en extension, à chercher le cuir avec la main opposée à la lucarne vers laquelle ils plongeaient, etc etc etc, bref : autant de détails qui, s’ils auront sans doute optimisé les performances, auront aussi concouru à des pratiques toujours plus standardisées.
La clique mentionnée, je les avait déjà lu (Cahiers du Foot) et entendu (ils avaient un podcast il y a bien 5-6 ans ? voir plus), et je leur trouvais une analyse plutôt pas mal, intéressent sur certains aspects et assez singulière dans le paysage foot français.
Mais ils ont rapidement filés, contexte de l’évolution de l’approche tactique du foot et médiatisation de leurs analyses, sur l’autoroute des données et d’une analyse tactique formatée par la data. Et où les buts « qui auraient du être marqués » semblent la valeur cardinale de toute analyse. Appauvrissement de toutes ces analyses réduites et regardées depuis ce petit bout de la lorgnette.
Après, ils ont écrit un bouquin, « les entraîneurs révolutionnaires » qui semblent enfoncer toutes les portes ouvertes possibles en la matière….
Le retour du Stade de Reims dans l’élite depuis plusieurs années est une chouette nouvelle. C’est quand même un bastion du foot français. Et je ne dis pas ça uniquement pour faire plaisir à Sacha.
D’ailleurs, en parlant du Stade de Reims, me rends compte que je suis un peu figé dans mes évaluations de qui mérite ou non d’être dans l’élite. Les parcours récents de clubs comme Clermont, Amiens ou Dijon n’ont pas suscité ma curiosité. Alors que leur place en Ligue 1 ne souffrait d’aucune contestation. Certainement parce qu’il manquait de substance, d’histoire dans l’élite. Une vision passéiste de notre championnat…
A contrario, suis ravi du retour d’Auxerre… Pas évident de lutter contre ses propres schémas.
Héhé. Reims n’est pas une grande agglomération et la région pas très peuplée. Impossible de tabler sur plus de 20 000 personnes au stade (même 15 pour une affiche moyenne), de toute façon jamais personne n’a envisagé sérieusement de reconstruire un Delaune a un plus grand capacitaire.
Mais ça reste une ville de foot. Le marnais lambda aime le foot et supporte généralement le Stade. Gamin, beaucoup de monde joue, il y a une densité de clubs amateurs impressionnante de bon niveau (le meilleur étant Sainte-Anne qui a formé Robert Pires et à un niveau moindre Cormontreuil, club de Hugo Ekitike et Ludovic Butelle). Les derbys entre ces équipes et le Stade chez les jeunes sont toujours âprement disputés.
Je ne sais pas qui « mérite » plus qu’un autre d’être dans l’élite mais ce qui est certain c’est que l’histoire du club et la fidélité du public sont un atout par rapport à des agglos plus peuplées comme Grenoble ou Clermont dont le passage en L1 était du one shot (outre le fait que le foot ne soit sport N°1 là bas – idem pour Rouen et Toulon) et bien évidemment que des métropoles de taille comparables comme Dijon, Amiens, Le Mans ou Angers.
Auxerre très bon exemple car le seul bon club français vraiment rural (bassin de population très faible dans un rayon d’une heure en voiture). L’histoire et les structures lui ont permis de renaitre, le club a survécu à Guy Roux, ce qui était une inquiétude légitime.