Top 51 – Stade de Reims (partie 3)

Numéro 30 : Manuel Abreu et Tony Giannetta

Deux destins indissociables pour ces joueurs peu connus du grand public mais dont les noms raisonnent tout particulièrement chez tout supporter stadiste. Manuel Ferreira Abreu Freitas est né près de Braga, il arrive en France gamin. Formé au Red Star, il débarque à Reims à 20 ans en 1979. L’heure est grave, le club sort d’une saison catastrophique, relégué en D2 et bon dernier du championnat avec 17 misérables points. Trois entraîneurs y ont laissé leur peau, ainsi que René Masclaux, la légende aux 553 matchs sous le maillot rouge et blanc. Quant aux glorieux argentins, c’est désormais de l’histoire ancienne (le dernier Mohican, Santiago Santamaria vient de partir).

L’équipe se reconstruit sur des bases plus jeunes et plus modestes. Place à présent aux Velud, Polaniok et Bertolino. Polyvalent, Abreu peut jouer à peu près partout en défense ou au milieu. Il devient peu à peu l’homme de base de l’équipe qui joue les premiers rôles sans jamais parvenir à remonter.

Plus jeune, Tony Giannetta débute dans le groupe pro deux ans plus tard. C’est un meneur de jeu. Sa famille a quitté l’Italie peu avant sa naissance pour s’installer à Reims et son grand frère Geraldo est au club depuis près de 10 ans. Il va s’imposer au cours de la saison 1982-1983. Cette saison, la dernière d’Abreu en Champagne est aussi la plus belle… et la plus frustrante. Longtemps leader, Reims termine premier ex-aequo de son groupe mais voit les toulonnais monter directement en D1 à la différence de buts (ils avaient pourtant battus deux fois les Varois, Abreu marquant à chaque match). Evidemment derrière, ils perdront leur barrage (contre Nîmes)…

La suite c’est au PSG que ça se passe pour Manuel. Aux côtés de Susic, Fernandez et Dahleb, il va découvrir la D1 et carrément l’Europe et pas n’importe quoi : la Juve de Platoche. Titulaire aux deux matchs, Paris sort invaincu (2-2, 0-0) face au futur vainqueur de la compétition. Mais sur la saison, il joue peu et va poursuivre dans des clubs plus modestes.

Tony Giannetta reste au club trois saisons supplémentaires. Il sera associé à son petit frère Rosario. Mais la malédiction continue pour Reims qui rate l’accession de peu à chaque fois. Contre toute attente, le duo est reconstitué en 1993, quand les deux hommes maintenant agés de 32 et 34 ans reviennent prêter main forte au Stade de Reims qui après la liquidation judiciaire a été relégué… en DH. Tony endosse même le costume d’entraîneur-joueur. Ils ne sont pas les seuls puisque Jean-Pierre Bertolino et le frangin Rosario Giannetta ont également répondu présent pour sauver le club. On se croirait revenus 10 ans plus tôt ! Surtout que ces fringants trentenaires en ont encore sous le capot et alignent les cartons. Champions après une seule défaite en 22 matchs, ils s’offrent aussi le scalp de leur rival Sainte-Anne en coupe, eux qui paradaient comme des paons car pour la première fois de leur histoire, ils évoluaient une division au-dessus de leur voisin rémois !

De retour en National 3, les anciens ne s’arrêtent pas en si bon chemin et continuent ainsi jusqu’en 1996. Mais l’équipe stagne et le club est repris par l’ambitieux Christophe Chenut. Tony Giannetta quitte alors le club et passe la main sur le banc à… Manuel Abreu. Disposant d’un groupe compétitif, celui-ci remonte alors deux divisions (la première en terminant même la saison invaincus). Le groupe est en National, mission accomplie. Il quittera le club au cours de la saison suivante, après un différend avec ses dirgeants. Messieurs Giannetta et Abreu : Grazie, Obrigado.

Numéro 29 : Simon Zimny

De nombreux joueurs d’ascendance polonaise souvent originaires du bassin houiller du nord de la France, ont marqué l’histoire du Stade de Reims, de Kopa aux frères Lech en passant Rodzik, Siatka, Templin, Krawczyk et Glovacki. C’est également le cas de Simon Zimny, cet arrière droit issu du même club amateur que Kopa (Nœud-les-Mines) arrive au club à 22 ans en 1949.

D’abord avec un contrat amateur, il fait ses débuts en équipe première un an plus tard faisant six apparitions au cours de la saison, inscrivant notamment le seul but de sa carrière lors de la dernière journée à Bordeaux. Son temps de jeu augmente et il devient titulaire à part entière lors de la saison 1952-1953. Il remporte la Coupe latine 1953 devant le Milan (3-0). Triple champion de France, il est aussi l’un des six joueurs à disputer au moins trois des quatre finales européennes du club (seul Jonquet a disputé les quatre). Sa carrière au club s’achève par la victoire en Coupe de France contre Nîmes synonyme de doublé. Devant la concurrence du jeune Bruno Rodzik, il quitte le club en 1958 après 197 matchs pour le Stade Français.

Numéro 28 : Les frères Lech

De nombreuses fratries ont marqué au cours l’histoire Stade de Reims des Sinibaldi aux Giannetta en passant les Prodoscimi, Jézierski, Polaniok, Ousfane, Schaller, Duquesne et même Batteux (Albert avait deux frères passés au club et même un neveu). C’est également les cas de Bernard et Georges Lech qui évoluèrent côte à côte dans les années 70.

Tous deux font d’abord les beaux jours de Lens, leur club formateur qu’ils vont quitter la même année en 1968 lorsque celui-ci est relégué. Leurs chemins se séparent alors, pour Georges, ce sera direction Sochaux et pour Bernard, Nancy. Mais les frangins ne renoncent pas à l’idée de se retrouver à nouveau sous le même maillot. Reims leur en donnera l’occasion. C’est d’abord Bernard qui arrive au club en 1971, il y retrouve Richard Krawczyk, son ancien coéquipier du milieu de terrain à Lens alors que Reims est remonté en D1 l’année précédente et tente de renouer avec son passé en visant ni plus ni moins que l’Europe. Ils recruteront également dans cette optique l’ancien gardien des Bleus, Marcel Aubour.

Son frère le rejoint l’année suivante, c’est le très gros coup du mercato. Car à cette époque, l’ailier Georges Lech est un des joueurs français les plus talentueux, international dès l’âge de 19 ans. C’est aussi un joueur à la carrière pourrie par les blessures et cela ne fera que s’empirer lors de ses quatre années à Reims (il ne parviendra jamais à disputer plus de 15-20 matchs par saison). Signe qui ne trompe pas, il honore sa dernière sélection en bleu quelques mois seulement après son arrivée en Champagne. Même si le duo avec Bianchi était un des plus redoutables du championnat, les deux joueurs ont trop peu souvent joué ensemble au top pour espérer davantage.

Bien que d’un niveau plus modeste et jamais international, son frère est un roc qui ne que très peu de rencontres en quatre ans. Bien entourés par la colonie argentine (Onnis et Zywica puis Bianchi, Laraignée et Santamaria), ils enchainent des saisons correctes en première partie de tableau mais ne parviennent jamais à dépasser la cinquième place et par conséquent jouer l’Europe. Ils quittent le club, là encore à un an d’intervalle. Bernard poursuivra sa carrière pro jusqu’à 33 ans mais pour Georges, c’est déjà la fin, à 31 ans. Et comme tout ceci est une histoire de famille, Nicolas Lech le fils de Bernard, portera les couleurs du Stade dans les années 90.

Numéro 27 : Jean Templin

Né en Pologne, Janusz (Jean) Templin signe à 22 ans à Reims en 1950. Pour sa première saison en rouge et blanc, il a la lourde tâche de succéder à Pierre Flamion sur le flanc gauche de l’attaque stadiste. Il doit pourtant faire face à la concurrence à l’aile du prodige de 19 ans et déjà international Francis Méano, il ne joue pas toujours ou alors en position d’inter et même à ce poste, il a le monument Pierre Sinibaldi face à lui. Il réussit cependant une bonne première saison avec six buts en 25 rencontres.
Toujours dans la rotation lors de la saison 1952-1953, il parvient cependant à disputer la demi-finale et la finale victorieuse de Coupe latine. Il remporte également son premier titre de champion. Après la disparition tragique de Francis Méano, il est repositionné ailier gauche et devient titulaire indiscutable, remportant un second titre et disputant une seconde finale de Coupe latine en 1955.

1955-1956 sera sa dernière et meilleure saison en Rouge et Blanc. Lors de la première édition de la coupe d’Europe, il est buteur une première fois en quarts face aux hongrois de Voros Lobrogo assurant la tranquille qualification des rémois. En finale, Reims retrouve le Real Madrid, il inscrit le but du 2-0 après 10 minutes de jeu. Avantage malheureusement insuffisant puisque les espagnols finiront par l’emporter 4-3. A l’issue de cette finale, Reims profite de la coquette somme récupérée du transfert de Kopa pour recruter Just Fontaine et surtout Jean Vincent, l’ailier gauche de l’équipe de France qui le condamne à l’exil (à Lens) après 171 matchs et 39 buts au club.

Numéro 26 : Santiago Santamaria

Et les finalistes malheureux de la finale de la coupe de France 1977… Pour la plupart des gens, l’AS Saint-Etienne de Robert Herbin est associée à la finale malheureuse de C1 de 1976 perdue à cause du froid réalisme allemand et des poteaux carrés de Glasgow. Très peu se souviennent en revanche (hormis du côté de Reims où personne n’a oublié) que cette même équipe a endossé le rôle du bourreau un an plus tard en finale de la Coupe de France en l’emportant de manière cynique et imméritée face au petit poucet rémois.

Retour cette saison 1976-1977 particulièrement agitée. Le club a réduit la voilure. Jodar, les frères Lech et Krawczyk sont partis, non remplacés. Les caisses sont vides et on mise sur les jeunes ou les solutions internes. Compliqué également sur le banc où Pierre Flamion a dû quitter le banc en cours d’année pour raison de santé avant d’y reprendre place en fin de saison. Son remplaçant Jean-Claude D’Armenia doit lui aussi interrompre son intérim pour cause d’appendicite obligeant un troisième larron (Léon Desmenez) à s’asseoir provisoirement sur le banc. Dans ce contexte particulier, de surcroît marquée par une hécatombe de blessures, l’équipe a terminé le championnat à une décevante mais logique onzième place.

La Coupe de France sera leur bouffée d’oxygène. Après avoir sorti Bourges, Monaco, Ajaccio et fait exploser Lorient 8-2 en quarts, ils écartent Nice en demies. Victoire à la Pyrrhus puisque Carlos Bianchi sort avec deux côtes cassées. Saison terminée pour le goleador argentin qui venait (encore) de terminer meilleur buteur du championnat avec 28 buts. Le sort s’acharne puisque l’autre star argentine, le taulier de la défense cette fois-ci, Cesar Laraignée est lui aussi blessé en cette fin de saison. C’est une équipe particulièrement diminuée qui se présente le 18 juin 1977 au Parc des Princes. Un groupe très jeune et sans star, soudée autour de son inamovible capitaine René Masclaux mais qui en réalité va se reposer sur le talent de son… troisième Argentin : l’ailier gauche Santiago Santamaria.

El Cucurucho (« le pain de glace ») est la dernière trouvaille du recruteur maison Robert Marion en Argentine. En provenance de Newell’s Old Boys, il débarque après ses compatriotes en 1974. Attaquant vif et racé, il a mis de côté ses ambitions en équipe nationale pour aller jouer en Europe, comme le voulait la règle à l’époque (de retour au pays en 1980, il finira par endosser le maillot albiceleste et disputera même le Mondial 1982). Son choix européen s’étant porté sur cette curieuse équipe française qui avait déjà attiré quatre de ses compatriotes au cours des précédentes années. Principal pourvoyeur de ballons de Carlos Bianchi mais en lumière que son compatriote, l’ancien leproso est une des pièces maîtresses du Reims des années 70. Ce soir, c’est son soir !

Les Stéphanois, eux, ont certes fini par plier sous la furia d’Anfield en C1 (face au futur vainqueur de l’épreuve tout de même) et abandonné leur titre de champion à Nantes, mais ils ont vite remis les points sur les « i » face à ces Canaris au terme d’une retentissante remontada en demi-finale de la Coupe : 5-1 à Geoffroy-Guichard après une défaite 3-0 à Marcel-Saupin. Qu’on ne s’y trompe pas, c’est un mastodonte que les rémois vont devoir affronter. Et un mastodonte surmotivé de surcroît puisqu’ils n’ont plus que la coupe pour sauver leur saison et arracher l’Europe.

Dans un Parc largement « Vert » (il en aurait été tout autrement 15 ans plus tôt !), Reims fait jeu égal et n’est pas inquiété. Arrive la 63e, Betta perce côté droit et sert parfaitement Santamaria qui trompe Curkovic. Les Verts poussent. Un but de Hervé Revelli est logiquement refusé pour une charge de Rocheteau sur Laudu le gardien rémois. Reims croit tenir son exploit mais, à cinq minutes de la fin, l’arbitre offre un pénalty de compensation sur une faute inexistante de Masclaux sur Farison. Bathenay transforme, le coup est rude mais le pire est à venir. 89e, corner de Farison et but de Merchadier. Reims passe du rêve à l’effroi. La colère contre l’arbitrage n’y changera rien. Le club ne remportera pas une troisième coupe, attendue depuis 19 ans, pas plus qu’il ne retrouvera l’Europe désertée depuis 14 ans.

Curkovic (qui inconsciemment savait sans doute qu’il ne la méritait pas) manquera de laisser tomber la Coupe que Raymond Barre vient de lui remettre. Histoire de boire le calice jusqu’à la lie, les juniors aussi ont perdu la finale de Gambardella. Reims est d’ailleurs la seule équipe a avoir réalisé ce « doublé de la lose » la même année !

Santiago Santamaria restera encore deux saisons au club. Bianchi et Laraignée partis, il sera le dernier argentin de l’effectif. Immense professionnel, il se battra jusqu’au bout pour éviter la relégation en D2 en 1979 mais la situation du club la rendait inévitable. C’est Platini en personne qui donne le coup de grâce lors d’une ultime défaite face à Nancy. Contrairement à aux autres argentins du club, il va s’offrir une très belle seconde partie de carrière une fois rentré au pays, toujours chez les Leprosos, inscrivant 90 buts en 291 matchs avec le club de cœur de Lionel Messi. Il nous a quitté à 60 ans d’une crise cardiaque.

Numéro 25 : Dominique Colonna

De l’ile de beauté à la cité des Sacres. Quelques années après la fratrie Sinibaldi, Dominique Colonna perpétue la tradition corse dans l’effectif rouge et blanc. Mais c’est évidemment de Paul, gardien du club pendant huit saisons, qu’il sera l’héritier. Entre les deux portiers corses, René Jacquet a réalisé un intérim de deux saisons. « Doumè » débarque au club en 1957 en provenance le Nice pour 8 millions de francs. Il a 29 ans et déjà une solide expérience. En outre, il a remporté le championnat 1956 avec les Aiglons et découvert la coupe d’Europe dans la foulée (qui lui a donné, à l’instar de ses nouveaux coéquipiers, l’occasion de s’habituer aux défaites face au Real Madrid). Il découvre la sélection comme remplaçant de François Remetter mais devra attendre d’être à Reims pour étrenner sa première sélection. Appelé pour le mondial suédois avec cinq autres rémois, il ne disputera aucune minute, placé derrière Abbes et Remetter dans la hiérarchie.

Sa première saison rémoise se conclut par un doublé. En finale de la Coupe, il est percuté par son futur coéquipier, alors nîmois, Hassan Akesbi. Avec l’impossibilité d’être remplacé, il permute avec Jean Vincent pour terminer le match ailier gauche (avec deux buts d’avance, ils pouvaient voir venir).

La saison suivante est celle de sa première campagne européenne avec son nouveau club. En quarts, Reims est maltraité par le Standard lors du match aller à Liège. Colonna multiplie les arrêts et permet de limiter la casse malgré la défaite 2-0. Ses efforts ne seront pas vains, au retour Reims réalise le plus beau renversement de situation de son histoire européenne et bat les Belges 3-0. Il remet le couvert en demies face aux Young Boys de Berne en évitant aux rémois une raclée rédhibitoire à l’aller en Suisse. Défaite 1-0, un moindre mal corrigé à nouveau par un 3-0 au retour au Parc des Princes.

Il retrouve son bourreau madrilène en finale mais malgré un grand match et un pénalty arrêté, il ne peut empêcher une nouvelle défaite 2-0. S’en suivent deux nouveaux titres de champion en 1960 et 1962 mais Colonna va rater les deux éliminations en coupe d’Europe face à Burnley en 1960 et au Feyenoord en 1963. Ses remplaçants, Jacquet puis Barreau n’auront pas grande réussite dans ces matchs. Qui sait si le portier corse, galvanisé par ces grandes rencontres, n’aurait pas réédité ses exploits précédents ? Il arrête sa carrière en 1963, un an avant la relégation du club.

Numéro 24 : Bram Appel

Bien avant les rejetons du totaalvoetbal (Rep, Resenbrink et Krol), Abraham Leonardus Appel (ou plus simplement Bram) fut la première star du football batave dans le championnat français. Il n’est pas le premier néerlandais à évoluer en D1, un certain Beb Bakhuys joua à Metz dès 1937 (en réalité ce joueur international est même le premier hollandais de l’histoire du Stade de Reims mais il n’y a jamais disputé le moindre match car revendu immédiatement, dans le cadre d’une sombre affaire de spéculation sanctionnée ensuite par la fédération, enfin on s’éloigne…). Appel sera en revanche le premier à marquer le football français (et je serais tenté de dire le seul, même aujourd’hui encore).

Il arrive à Reims en 1949 et trouve très vite ses marques dans le WM d’Henri Roessler en position d’inter ou d’ailier droit. Il inscrit 10 buts en 28 rencontres et surtout remporte la finale de la coupe de France 1950. Le Hollandais va surtout s’imposer à partir de la saison suivante sous la houlette d’Albert Batteux comme un redoutable buteur tournant à une moyenne de 20 buts par championnat. Il en inscrit même 30 lors de la saison 1952-1953 (toutefois devancé au classement des buteurs par le marseillais Gunnar Andersson).

C’est la saison la plus prolifique du néerlandais également sur le plan collectif. Il remporte son seul titre de champion de France et participe à la victoire en coupe latine en position d’ailier droit au sein d’une attaque également composée de Kopa, Méano, Glovacki et Templin. Peut-être parce qu’il ne joue pas au pays, il n’est appelé que 12 fois en sélection (mais trouve le moyen de marquer 10 fois !). Il quitte le club pour Lausanne en 1954 après 154 matchs et 96 buts. Un des ratios les plus impressionnants de l’histoire du championnat de France (au club seuls Bianchi et Fontaine firent mieux).

Numéro 23 : Les frères Sinibaldi

24 octobre 1948. Reims accueille Roubaix-Tourcoing pour la 12e journée du championnat. Pour la première fois dans l’histoire du Stade de Reims, trois frères sont alignés au coup d’envoi d’une rencontre de première division : le gardien Paul et les attaquants Pierre et Noël Sinibaldi. Cette situation se produira à quatre reprises au cours de la saison. Originaires de Montemaggiore (Steakù vous expliquera bien mieux que moi où ça se situe), les frères Sinibaldi furent les premières stars du Stade de Reims, lorsque ce club qui n’avait jusque-là connu que la deuxième division, entreprit juste après la deuxième guerre mondiale d’atteindre le sommet du football français sous la houlette de ses deux ambitieux dirigeants : Victor Canard et Henri Germain.

Pierre le cadet fut le premier à rejoindre le club champenois dès 1944 où il découvre le professionnalisme à 21 ans. Sous l’impulsion du nouvel entraineur Henri Roessler, l’équipe va irrésistiblement commencer son ascension dès ses grands débuts en première division en 1945 en alignant les places d’honneur. Redoutable attaquant, Pierre Sinibaldi n’est pas en reste. Il termine chaque année meilleur buteur du club avec minimum 25 buts à chaque fois. Il est aussi meilleur buteur du championnat 1946-1947 avec 33 réalisations. En mai 1946, il devient le premier joueur du club appelé en équipe de France contre l’Angleterre (il ne comptera que deux sélection).

Noël l’ainé et Paul le benjamin, comptent déjà derrière eux plusieurs saisons en D1 au compteur, lorsqu’ils rejoignent leur frère en 1948, respectivement âgés de 28 et 27 ans. Paul et Pierre prennent une part déterminante dans l’obtention du premier titre de champion de France en 1949. Moins doué que ses frères et jouant assez peu, Noël est prêté au lendemain du titre puis quitte définitivement le club l’année suivante.

Après Pierre, c’est Paul qui connait les joies de la sélection en 1950 face à la Belgique pour la seule et unique fois de sa carrière. Surnommé « le corse volant », il est victime d’une fracture du cubitus lors d’un match de championnat contre Rennes en 1951. Il échange alors sa place avec Bram Appel pour finir le match… ailier droit (la même mésaventure surviendra à son successeur Dominique Colonna, quelques années plus tard).

L’association entre les deux frères restant durera jusqu’à la saison 1952-1953 où, malgré un second titre, Pierre va progressivement perdre sa place au profit de Jean Templin qui le privera de coupe latine. Il part pour Nantes après 233 matchs et 134 buts (ratio là encore impressionnant).

Paul reste au club jusqu’en 1956, s’offrant notamment un troisième titre de champion de France. Mais, blessé au genou, il va rater les demies et la finale de la coupe d’Europe (disputées par René Jacquet). Il part ensuite en D2 au Stade Français. Partis finir leur vie dans le Var, les trois frères sont aujourd’hui tous décédés. Paul, le dernier, atteignant l’âge de 96 ans. Peu de temps après son grand ami Raymond Kopa dont il était parrain d’un des enfants.

Numero 22 et 21 : Bruno Rodzik et Jean Wendling

Avec le Nord Pas-de-Calais et la Corse, l’Alsace et la Lorraine furent aussi de grands pourvoyeurs de talents pour le Stade de Reims de Roger Piantoni à Anthony Weber en passant par Lucien Muller et Raymond Kaelbel. Mais les deux qui comptent le plus grand nombre de matchs disputés avec le club rouge et blanc sont les arrières latéraux qui évoluèrent ensemble au début des années 60 : Bronislaw « Bruno » Rodzik et Jean Wendling.

Le Stade évolue avec la même paire de latéraux Zimny – Giraudo depuis le début des années 50 et a besoin de sang neuf. Bruno Rodzik sera le nouveau titulaire à gauche et Jean Wendling à droite. C’est tout d’abord Bruno Rodzik qui débarque au club en 1957. Agé de 22 ans, c’est son premier contrat professionnel. Il joue peu l’année du doublé de 1958 (et ne dispute pas la finale de la coupe). Titulaire à partir de la saison suivante, il joue la finale de C1 1959 (aux côtés de Giraudo et Jonquet). Il est réputé infranchissable mais n’inscrira pas le moindre but lors de ses 240 matchs avec Reims.

Né la même année et passé pro en même temps au RC Strasbourg que Lucien Muller, Jean Wendling va suivre à la trace le « petit Kopa » pendant des années. Ils rejoignent ensuite tous deux Toulouse en en 1957 puis Reims en 1959 (ils ont alors 25 ans tous les deux) où ils joueront de nouveau trois saisons côte à côte avant que leurs chemins ne se séparent. Wendling poursuivra son aventure au club pendant que Muller part à la conquête de l’Espagne.

Reims va très vite permettre à ses jeunes latéraux de découvrir l’équipe de France : c’est d’abord Wendling qui honore sa première sélection contre le Portugal en novembre 1959, puis Rodzik en mars 1960 face à l’Autriche. Profitant de la saison record du Stade qui survole le championnat 1959-1960, les deux vont disputer le premier Euro de l’histoire qui a lieu sur le sol français. Ils retrouvent à cette occasion les cinq autres rémois Jonquet, Siatka (sa seule et unique sélection !), Muller, Vincent et Sauvage (qui ne disputera pas la moindre minute). Mais Kopa, Fontaine et Piantoni sont absents et les Français ne sont plus que l’ombre de l’équipe de 1958. Ils perdent en demi-finale face aux Yougoslaves puis à nouveau dans le match pour la troisième place contre les Tchèques.

Jean Wendling est le sixième joueur le plus capé en Bleu de l’histoire de Reims avec 26 sélections juste devant Bruno Rodzik avec 21, toutes obtenues lors de leur passage au club (ce qui est plus que Fontaine et Piantoni !).

Rodzik quitte le club pour Nice à l’issue de la relégation en 1964, où il réalisera encore quatre belles saisons. Wendling de son côté accompagnera le club en D2 lors de la saison 1964-1965, où il raccroche et rejoint un club amateur strasbourgeois.

Ubri pour Pinte de Foot !

41 réflexions sur « Top 51 – Stade de Reims (partie 3) »

  1. Merci Ubri !
    Que de noms prestigieux pour cette fournée !
    Tu dis que Bruno Rodzick n’a jamais inscrit le moindre but. Or d’après wikipedia, Pari et gagne et football story, il aurait scoré à 5 reprises (3 en D1 et 2 en C1).

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      1. C’est l’ami Adjovi-Boco qui avait passé une carrière sans mettre un but. Et je me souviens que pour un des ses derniers matchs avec Lens, on lui avait laissé tirer un peno. Qu’il avait raté. Quand ça veut pas…

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      2. @Khia
        effectivement sur Adjovi Boco, mentionné dans le top idoine hehe

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      1. Budzynski comme joueur, ça valait quoi? Les Stopyra (surtout Yannick), c’était pas mal aussi.

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      2. Jamais le dernier pour « caser » un Lensois, le ajde. Oui Michel Stievenard comme « légende » du SCO, ça peut le faire !

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    1. Aussi bizarre que ça puisse paraitre, Kopa est bien l’un des plus grands joueurs de l’histoire d’Angers (qui simplement en compte très peu). Le SCO a eu 2-3 grandes périodes dans son histoire. La toute récente (avant que le triumvirat Moulin-Pickeu-Chabane n’explose) qui ne compte pas réellement de joueur emblématique qui éclipse les autres. Une bonne période dans les années 70 avec Marc Berdoll, qui doit être meilleur buteur de l’histoire du club. Et donc Kopa entre 1949 et 1951. Pas bien lourd comme lien avec le club, mais ce qui a décidé Angers à rebaptiser son stade, c’est l’attachement à la ville plus qu’au club. Kopa a épousé une angevine et est revenu y vivre une fois sa carrière terminée. Il y vécut jusqu’à sa mort et c’est là qu’il a été enterré. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de le croiser là-bas.
      Jean Bouin c’était vraiment passe-partout comme nom, ils avaient aucun attachement et ont eu aucun mal à changer. A Reims c’est plus compliqué. Déjà le nom Delaune – parce qu’on dit Delaune tout court et pas Auguste Delaune (bien qu’il n’ait jamais eu de lien avec le club), ça revoit immédiatement à une image, des souvenirs. Ensuite d’autres noms pourraient donner leur nom au stade: Batteux, Germain, Jonquet, Meano (les 4 ont donné leur nom à une tribune), Fontaine. La décision a été de donner le nom de Kopa au centre d’entrainement (Centre de vie^^) et faire une statue devant Delaune. Fontaine aura droit à la sienne aussi.

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      1. Dans les top joueurs du SCO d’Angers, outre Berdoll, on peut rajouter Bruney, Guillou, Dogliani et Bourdel.

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      2. Alfredo,
        un ex lensois passé par Angers, Michel Stievenard qui est resté de nombreuses saisons à Angers dans les années 1960 (il était international à Lens, je sais pas si cela a continué à Angers), par contre son impact au club angevin, j’en sais rien.

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  2. Juste pour préciser, j’ai écrit tout ça il y a 4 ans. Entre temps, certains anciens sont décédés et je n’en fais pas mention dans l’article; c’est le cas de Dominique Colonna, Manu Abreu et évidemment Justo Fontaine.

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  3. @Ubri, quel était l’impact des footballeurs des 50es dans la ville ? Étaient ils utilisés pour faire la promotion de Reims ? Est ce que de grandes maisons les ont choisi pour faire la promotion du champagne ?

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    1. Promo, pas vraiment. Le footballer n’était pas un homme sandwich à l’époque.
      Mais oui le monde du champagne, qui a permis au club d’avoir des moyens supérieurs aux autres clubs français de l’époque, attendait un coup de projecteur de la part du club. Au delà des résultats, l’équipe enchainait les tournées et les matchs amicaux de prestige partout dans le monde et à n’importe quel moment de l’année. Les gars finissaient les saisons carbonisés et cela se ressentait sur les résultats. C’est ce qui explique que malgré un effectif très largement supérieur à ses rivaux en France, le Stade ne compte « que » 6 titres en 13 ans (à comparer aux ratios de St Etienne, OM ou Lyon à leur grande époque) et n’a jamais été capable de jouer sur les deux tableaux (c’était soit le parcours européen, soit le titre).
      Le déclin du club est également lié au retrait du champagne dans les années 70. C’est l’époque où le champagne privilégie une image glamour et haut de gamme (notamment le cinéma) et délaisse le foot, trop popu. Mais ça, Serge Bazelaire, le dirigeant de l’époque ne l’avait pas intégré. Dépensant sans compter et voulant à tout prix rendre son lustre au club alors qu’il était à présent privé de son traditionnel bailleur de fonds, il l’a conduit à la faillite. Il aura fallu 30 ans pour retrouver un autre business model.

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    1. J’ignorais le passé d’Appel, notamment pendant la guerre et les raisons qui l’ont poussé à quitter le championnat NL. Tu parles du but de Meano en coupe latine… quelques jours avant de se tuer en voiture.
      Et tiens comme il est aussi question de Rik Van Looy, Van der Poel vient d’égaler un de ses exploits datant de 1962. Lequel?

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      1. Oui mais d’autres l’ont fait aussi. En revanche, ce sont les seuls à le faire avec le maillot arc-en-ciel sur les épaules.

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      2. Ah oui, classe ! N’étant pas un spécialiste du cyclisme, j’ai mis du temps à comprendre l’importance du maillot de champion du monde. C’était Stephen Roche, que j’adorais gamin, qui disait, après son année sensationnelle en 1987, qu’une victoire au Giro te restait quelques jours en en tête, le Tour, un mois, le maillot arc-en-ciel, un an…

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    1. Sinibaldi? Un tacticien probablement trop psychorigide que pour etre un crack, il lui manqua le flair, la souplesse et l’inventivite d’un Goethals pour etre un crack.

      Et cependant : une envergure qui depasse de beaucoup le simple cadre belge, good luck pour trouver d’autres entraineurs qui, avant lui, pratiquerent au plus haut niveau la defense en ligne, de surcroit portee..au-delà de la ligne mediane.. Un pionnier majeur mais occulté au benefice de l’un ou l’autre sales cons opportunistes, pour xy raisons, tjs les memes mecanismes..

      Riou? Pas le temps, je retourne tremper une coucougnette dans la Manche.

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      1. Se baigner dans la Manche, un début mai, faut aimer souffrir !

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      2. L’eau est plus chaude que l’air ambiant.

        L’humidite quasi-kif-kif.

        Y a personne (or la solitude est un luxe).

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  4. Parmi des Puck van Heel, Wilkes, Lenstra.., Appel fut l’un des grands joueurs NL pré-..tabula rasa.

    Si peu de sélections? L’explication est double : la fede NL lui fit payer d’avoir joué en Allemagne pendant la guerre, au Hertha (il fut à Berlin voisin direct de..Himmler!)..quand bien même il s’y trouvait comme travailleur forcé, et nonobstant le genre de vrais salopards qu’on retrouva parmi la susmentionnée fede NL (comme un peu partout en Europe de l’ouest).

    Bref : il paya pour d’autres, cultiver l’idee d’un pays/football qui lava plus propre que propre.. Ce fut degueulasse mais c’est ainsi..et a de quoi faire sourire.

    Dans la foulee, son statut de professionnel en France bazarda pour de bon sa carriere comme international.

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