Coupe d’Asie 2023 : Troisième journée

Clap de fin pour la phase de groupe avec la troisième journée qui s’est achevée ce jeudi ! Qui sont les qualifiés ? Qui rentre à la maison ? Y a-t-il eu des belles surprises ou de belles histoires à raconter ? On voit ça dans ce troisième compte-rendu de la Coupe d’Asie 2023.

Groupe A : Les Tadjiks du cauchemar au rêve

Qatar 1-0 Chine

Aussi incroyable que cela puisse paraitre, la Chine pourrait, selon les circonstances, se qualifier en finissant à la deuxième place du groupe en ayant inscrit aucun but. La question étant alors de savoir comment cette sélection aux prestations si décevantes allait se comporter face à l’équipe B du Qatar, déjà assuré de la première place. Eh bien le début de match laisse présager des progrès, déjà dans les intentions. Il y a du pressing enfin un peu cohérent, enfin de la projection vers l’avant, enfin des occasions de but. Peut-être que la sortie du 11 de départ de Wu Lei était ce qu’il fallait pour changer le visage de cette équipe au point mort ? Wei Shihao oublié par la défense manque en tout cas de peu d’ouvrir le score à la 34e minute. Mais aussi Zhang Yuning juste avant la pause. La Chine fait une vraie bonne mi-temps, pas de doute. En face, les Qataris ont conscience que ce match sans enjeu est surtout un entrainement ouvert au public et l’on ne peut pas dire qu’ils se forcent pour tenter de faire le spectacle. Même si Jiang Guangtai (alias Tyias Browning) est à créditer d’un très bon match au poste de libéro avec plusieurs interventions clés réalisées, on ne peut pas dire que la Chine souffre en ce premier acte. 0-0 comme attendu, un score qui arrange bien les affaires des Chinois, même dans l’optique d’une troisième place (avec un différence de buts de 0, ils partent avec un petit avantage). Malheureusement, le plan tombe à l’eau lorsque le Qatar envoie la grosse artillerie avec l’entrée d’Akram Afif et de Al-Haydoos à l’heure de jeu. Deux minutes après, corner du premier frappé vers la limite de la surface de réparation, reprise de volée du second et c’est potentiellement le but du tournoi qui vient d’être marqué. Un golazo exceptionnel qui plie la rencontre. Les Chinois, assommés, ne se montreront jamais en mesure de réagir vraiment et terminent à la troisième place du groupe. Avec deux malheureux petits points et aucun but marqué, autant dire que la Chine n’a aucune chance de figurer parmi les meilleurs troisièmes et peuvent déjà se préparer à quitter un tournoi qui fut un fiasco annoncé. En ruines depuis la crise du COVID, le football chinois doit repartir de zéro. Quant au Qatar, avec trois succès ternes dans la poule la plus faible du tournoi, il est encore difficile d’émettre un jugement sur cette équipe, même s’il est toujours difficile de le voir conserver son titre.

Tadjikistan 2-1 Liban

Pour cette dernière journée, la sélection du Tadjikistan est attendue au tournant : magnifique dans le jeu depuis le début du tournoi, va-t-elle enfin marquer un but. Son gros défaut est en effet son inefficacité devant le but conséquence de la maladresse de ses joueurs offensifs dès lors qu’il s’agit de se mettre en position de tir. Face à un Liban qui n’a pas montré grand-chose jusque là, les hommes de Petar Šegrt font figure de favoris pour une qualification historique. Une victoire en effet leur garantirait au moins de figurer parmi les meilleurs troisièmes. Les Tadjiks peuvent aussi miser sur le Qatar : une défaite des chinois permettrait au Tadjikistan s’il marque un but de passer à la deuxième place, même en cas de match nul. Il existe plein d’autres alternatives, mais les Tadjiks vont tout de suite montrer qu’ils ne sont pas là pour calculer et commencent comme ils ont commencé leurs matches précédents. La première grosse occasion de la partie est cependant libanaise avec une frappe de El Zein aux 20 mètres que Rustam Yatimov repousse non sans mal. Cela donne le ton de la rencontre. Les Tadjiks ont le ballon, tentent de construire, mais sont considérablement gênés par le pressing et la puissance des Libanais, dont le jeu est certes rudimentaire, mais qui leur permettent de créer les meilleures occasions. L’excellent Yatimov est concentré et dégage beaucoup d’assurance, mais les minutes passent et l’on sent que les Tadjiks ont énormément de mal à s’approcher du but adverse malgré leur bonne volonté. Une bonne volonté qui laisse beaucoup de trous, notamment au milieu de terrain. Les Libanais l’ont bien remarqué et dès la récupération du ballon, les offensifs se jettent dans les espaces. Il n’en faut parfois pas grand-chose pour qu’un frisson se transforme en occasion de but. D’ailleurs, les Tadjiks se procurent enfin une grosse opportunité : le gardien Mostafa Matar sort loin de son but devant Soirov et envoie le ballon en touche… Qui est rapidement joué par ce dernier alors que le gardien n’est pas encore revenu ! Mabatshoev tente sa chance mais le ballon, qui prenait une trajectoire parfaite, est repoussé de justesse sur la ligne par un Khamis revenu en catastrophe. Dans la foulée, Maatouk sollicite une nouvelle fois Yatimov, qui réalise une nouvelle parade décisive à la 42e sur un nouveau contre libanais.. Ca va dans tous les sens et la partie est très agréable à regarder. Juste avant la mi-temps, Mabatshoev est lancé sur le coté droit sur un joli jeu en triangle, résiste à Nassar, et voit sa frappe déviée par Alexander Michel puis terminer dans les buts. Ca y est ! Le Tadjikistan a enfin trouvé la faille ! Sauf qu’après vérification à la VAR, l’arbitre refuse le but pour hors-jeu. L’image 3D est horrible… Les journalistes parlent souvent de hors-jeu « au centimètre près », mais là, c’est littéral. C’est ça un hors-jeu au vrai centimètre près : Mabatshoev est hors-jeu… Du bout de la chaussure, de l’orteil, bref, c’est terriblement cruel !

C’est donc miraculé que le Liban rentre au score à 0-0. Et la confiance n’est pas prête de retomber puisque dès la reprise, Bassel Jradi profite encore une fois des errements du milieu tadjik pour envoyer une merveille de frappe enroulée dans la lucarne de Yatimov cette fois-ci impuissant. Cela devient alors dramatique pour le Tadjikistan. Le Liban est en train réaliser le coup parfait, malgré l’expulsion logique de El Zein pour une terrible semelle sur le tibia de Dzhalilov. Dzhalilov d’ailleurs, qui comme contre la Chine vendange beaucoup trop d’occasions, avant d’enfin trouver le chemin du but à la 69e ! Mais encore une fois, Mabatshoev qui avait fait la remise est signalé hors-jeu après vérification à la VAR (celui-ci est légèrement plus net, mais reste léger). Les Tadjiks sont en train de vivre un véritable cauchemar : ils jouent bien, font ce qu’ils faut, mais semblent avoir les Dieux du football contre eux, et l’on voit mal comment ils pourraient s’en sortir… Malgré cette accumulation de malheurs, ils ne paniquent pas, continuent à faire ce qu’ils savent faire, et se procurent à la 80e minute un bon coup-franc à 24m du but. La patte gauche de Parvizdzhon Umarbaev caresse le ballon pour le faire passer juste au dessus du mur et le déposer au rad du poteau d’un Matar ne pouvant rien faire. Cette fois, c’est bon ! Rien ne pourra empêcher les Tadjiks d’inscrire le premier but de leur histoire en Coupe d’Asie. Un but d’une importance cruciale puisque la Chine est en train de perdre face au Qatar, et que donc le Tadjikistan a le même nombre de points (deux), la même différence de but (-1) mais un but marqué contre zéro. Ce qui fait qu’à ce moment là, le Tadjikistan passe deuxième de la poule. Sauf que les hommes de Petar Šegrt n’en ont que faire et repartent à l’attaque pour essayer d’enfoncer le clou. Et alors qu’on entre dans le temps additionnel, Safarov centre depuis la droite, et Nuriddin Khamrokulov dos au but effectue une magnifique tête renversée. L’explosion de joie dans le camp tadjik est à la hauteur de la qualité des buts marqués. Malgré une dernière frayeur dans le temps additionnel, il ne fait aucun doute que le Tadjikistan va se qualifier désormais. Pour sa première participation, les Tadjiks ont fait plus que se qualifier, ils ont conquis les cœurs des fans de football par leur jeu technique et protagoniste, mais aussi par les émotions données au cours de ce dernier match où ils auront renversé les éléments. Cette sélection sans stars mais qui travaille bien depuis plusieurs années se voit justement récompensée, et laissera quoi qu’il arrive en huitième de finale un merveilleux souvenir au Qatar.

1 — Qatar — 9 pts
2 — Tadjikistan — 4 pts
3 — Chine — 2 pts
4 — Liban — 1 pts

Les Tadjiks auront mis du temps à régler la mire. Mais une fois cela, cela donne des buts fabuleux et une joie méritée !

Groupe B : La Syrie dans l’histoire

Australie 1-1 Ouzbékistan

Entre une équipe bis d’Australie déjà qualifiée et une équipe d’Ouzbékistan également bien remaniée et qualifiée à 99%, l’enjeu n’est pas très grand pour l’une des plus grosses affiches du premier tour sur le papier, et le spectacle ne promettait pas d’être au rendez-vous… Perspicaces, nous avions parfaitement senti le truc venir : nous avons affaire à deux équipes prudentes, qui se contenteraient parfaitement d’un match nul, et qui ont passé le match à se neutraliser. Eventuellement, on pourra remarquer que les Ouzbèks sont bien plus habiles techniquement et plus proactifs avec le ballon que leurs homologues Aussies, toujours au brouillon quand il s’agit de produire du jeu. Il n’y pas grand-chose à signaler dans cette partie. Et malheureusement, ce que l’on en retiendra principalement est ce pénalty scandaleusement accordé aux Socceroos. Kusini Yengi s’infiltre dans la surface ouzbèque depuis la gauche, évite le tacle de Abdurahmatov et centre en retrait pour McGree dont la reprise passe de peu à côté. On aurait pu s’arrêter sur le seul frisson de cette première période, mais l’arbitre japonais M. Yûsuke Araki décide d’aller voir la VAR, avant d’accorder un pénalty : il estime que Abdurahmatov a commis une main sur son tacle. Sur le crochet du joueur australien, le ballon touche effectivement le bras de l’Ouzbèk, mais ce dernier est en train de tacler et a le dos tourné. Non seulement son bras ne peut être ailleurs, mais en plus, le fait que le ballon touche celui-ci ne gène absolument pas Yengi. Au contraire ! Son crochet était un peu manqué, et cette petit touche lui a permis de ce mettre en meilleure position pour pouvoir centrer. Dans l’esprit du jeu, ce pénalty n’a aucun sens, mais il sera transformé par Martin Boyle. Heureusement sans conséquence finalement puis qu’en fin de match, Azizbek Turgunboev surclasse Aziz Behich dans les airs (pas banal qu’un Australien se fasse autant dominer) et égalise. L’Australie ne réalisera donc le premier tour parfait avec le maximum de points et aucun but encaissé, et ce, malgré la nouvelle belle prestation du patron de la défense Harry Souttar. L’Australie sera assurément l’un des adversaires les plus difficiles à jouer en phase finale. Mais à moins que l’on ait la tête Down Under¸ one ne peut pas décemment souhaiter que cette sélection bourrine aille loin dans le tournoi. Quant à l’Ouzbékistan, le contrat est rempli. La qualification avec la deuxième place était ce qui était attendu. Mais la sélection, considérée comme un sérieux outsider, repart du premier tour avec plus de questions qu’au départ, notamment sur sa capacité à faire le jeu ainsi que sur sa capacité à gérer ce nouveau statut d’équipe attendue au tournant.

Syrie 1-0 Inde

On aurait sans doute pu au moins attendre de l’Inde, déjà éliminée, qu’elle livre une prestation honorable, qu’elle essaye de produire du football, au moins pour faire plaisir à leurs nombreux supporters qui garnissent les tribunes qataries. Elle l’aura fait… Pendant quelques minutes. La Syrie de Héctor Cúper, qui jusque là laissait à ses adversaires le soin de faire le jeu, a cette fois-ci pris les choses en main. Rien de fondamentalement flamboyant, mais suffisant pour se procurer quelques bonnes opportunités de but. Il faut dire que la Syrie n’en a toujours pas marqué de but, chose qui lui est d’autant plus indispensable qu’une victoire la qualifierait à coup sûr. Alors les Syriens construisent patiemment, méthodiquement, se heurtent parfois aux gants de Gurpreet Singh, mais ne parviennent pas à concrétiser leur nette domination. Les minutes passes en seconde mi-temps, et le scénario semble se répéter, donnant à voir quelques visages de plus en plus inquiets côté syrien. Il n’y a pourtant pas de quoi. Car en dehors d’une petite frayeur à la 53e minute, il n’y a pas franchement grand-chose à craindre de cette équipe indienne, qui a peut-être de la volonté, mais dont les limites sont tellement criantes qu’on ne peut que tirer le constant que ce sont les fondamentaux mêmes du football, techniques et tactiques, qui ne sont pas maitrisés. Et passé l’heure de jeu, on les sent tellement tirer la langue que l’ouverture du score semble inévitable. Elle survient enfin à la 76e minute par Omar Khrbin qui rentre dans l’histoire du football de son pays. Car la Syrie, pour la première fois de son histoire, franchit le premier tour d’une Coupe d’Asie. Ce n’était pas vraiment attendu. Mais Héctor Cúper a réussi à souder son groupe, lui donner une organisation tactique solide et une capaciter à faire muer son jeu par moments. Ainsi, même si la Syrie ne sera pas favorite pour son huitième de finale, elle ne sera assurément pas un adversaire facile à battre.

1 — Australie — 7 pts
2 — Ouzbékistan — 5 pts

3 — Syrie — 4 pts
4 — Inde — 0 pts

Le but aura mis du temps à venir, mais il envoie la Syrie en 8e de finale.

Groupe C : La VAR sauve les Emirats (Qatar compris)

Hong-Kong 0-3 Palestine

Dans ce « derby des opprimés », Hong-kongais et Palestiniens s’affrontent non seulement pour obtenir leur première victoire en Coupe d’Asie dans leur histoire, mais également pour une qualification qui serait tout aussi historique. Un véritable seizième de finale, à priori pour la troisième place du groupe, qui qualifierait à coup sûr la Palestine en cas de victoire, qualifierait très possiblement Hong-Kong en cas de victoire (dépendamment du score ou des résultats dans les autres groupes), et qui éliminerait les deux en cas de match nul. Un match à gros enjeu donc, avec deux gros publics en tribunes (un joli kop de 400 Hong-kongais contre des milliers de supporters de la Palestine venus de tous horizons), et une opposition qui s’annonce très prometteuse dans le jeu puisque ces deux équipes, pas encore récompensées comptablement, ont tout de même produit des choses intéressantes. Et le début de match répond aux attentes. Très équilibré, ça essaye de jouer et d’attaquer des deux côtés. Mais la Palestine va trouver la faille dès la 11e minute sur un centre parfait du capitaine Musab Al-Battat. Bien malheureux face aux Emirats Arabes Unis, Oday Dabbagh prend le dessus de la tête sur Yue Tze Nam et inscrit enfin son premier but du tournoi. Sonnés, les Hong-kongais le seront pendant un bon quart avant de se reprendre et d’enfin se reprocurer des bonnes occasions. La Palestine est en revanche très bien organisée et livre en vrai match de patron, tout en sérénité et en intelligence. Dabbagh donne l’impression d’être partout et manque même de doubler la mise en butant sur Tse Ka Wing alors qu’il était tout seul aux six mètres. Heureusement sans conséquences pour la Palestine puisque dès la reprise, Al Battat, indiscutablement l’homme du match tant son activité sur le côté droit à été grande, adresse une nouvelle merveille de centre depuis son côté droit et c’est cette fois Zaid Qunbar qui est à la réception. Les Dragons tentent le tout pour le tout et se jettent à l’attaque, laissant des trous énormes dans la défense qui permettent à l’heure de jeu à Tamer Seyam d’enrouler sa frappe sur la transversale. Dabbagh est au rebond et inscrit le troisième but. L’adition aurait même pu être encore plus lourde. Bref, la performance palestinienne est colossale, et aurait pu être entachée d’une petite fausse note avec ce pénalty plutôt généreux accordé aux Hong-kongais pour une main de Al-Battat.

Qui d’autre pour tirer ce pénalty que le soliste Everton Camargo ? Jusqu’au boutiste dans son individualisme, le natif du Brésil espérait sans doute marquer au moins un but pour attirer l’œil des recruteurs et s’offrir un contrat ailleurs qu’à Hong-Kong. Mais c’est sur la barre que termine son pénalty frappé en force et Everton termine en apothéose sa Coupe d’Asie après avoir livré une nouvelle partie scandaleuse. Même si nous en avions déjà parlé précédemment que cela ressemble à un tir au bazooka sur une ambulance, prenons quelques lignes pour parler de sa performance. Dans la lignée des précédentes, Everton a bien sûr était ultra perso, a oublié ses coéquipiers un paquet de fois, et flingué un bon nombre de belles opportunités pour son équipe. Cela est d’autant plus frustrant lorsqu’à un moment, il se bat bien pour récupérer le ballon, perce, à le temps de centrer sur un partenaire démarqué, attend trop, tente de dribler un nouvel adversaire et perd finalement le ballon. Mais à ce côté soliste il aura ajouté le ridicule avec ce plongeon grotesque dans la surface palestinienne pour lequel l’arbitre ne daignera même pas donner de carton jaune tant ce fut grotesque. Et clou du spectacle, cette action incroyable en première mi-temps où Michael Udebuluzor gagne son duel en puissance et a un trois contre un à gérer. Il pourrait servir Everton sur sa droite qui parfaitement seul et bien placé pour marquer. Mais Udebuluzor préférera adresser une passe moisie sur sa gauche à Kwan Siu Chan qui, surpris, frappe mal son ballon qui part dans les tribunes. En tant qu’amateur de football, nous ne pouvons nous empêcher de sourire face à cette ironie de voir Everton subir ce qu’il inflige à ses coéquipiers.

Mais il est dommage que l’équipe de Hong-Kong en arrive là. Car son jeu très direct a tout de même était qualitatif. Oui, Hong-Kong a produit de belles choses durant ce premier tour ! Et sans doute qu’avec une meilleure cohésion de sa ligne d’attaque, les Hong-Kongais auraient pu marquer plus de buts, et pourquoi pas avoir un meilleur bilan comptable que ces zéros points. Les Dragons quittent néanmoins le tournoi la tête haute. Les Palestiniens eux par contre se qualifient avec brio, puisque bien que troisièmes, ils sont assurés avec quatre points, une différence de but de zéro et cinq buts marqués de finir devant la Chine et la Syrie qui avaient joué avant. Au-delà même du symbole de ce que cela peut représenter pour un peuple qui vit des jours sombres, l’exploit est immense. Pour sa troisième participation à la Coupe d’Asie, la Palestine franchit enfin le premier tour, et c’est tout à fait mérité !

Iran 2-1 Emirats Arabes Unis

Déjà, qualifiée, l’Iran avaient tout de même beaucoup de choses à se faire pardonner après sa prestation on ne peut plus poussive face à des Hong-kongais qui les avaient bien bougé. Alors face aux Emirats privés de Paulo Bento (exclu contre la Palestine), la Team Melli a sorti l’artillerie lourde : équipe type avec retour de Sardar Azmoun dans le 11 associé à Mehdi Taremi. Dans les intentions, les Perses font immédiatement valoir leur supériorité avec un pressing étouffant et une circulation du ballon que l’on retrouve fluide. Azmoun et Taremi se procurent des grosses occasions, Ghayedi s’amuse sur son côté gauche, Ezatolahi ratisse tous les ballons, les Emiratis ne savent plus où donner de la tête. Ça craque à la 25e : Azmoun et Taremi peuvent se trouver les yeux fermés. En une touche, le premier lance le second qui ajuste tranquillement Khalid Eisa. Loin d’être rassasiés, les Iraniens continuent leur marche en avant, et il faut qu’une simple rotule du genou ne dépasse pour la VAR ne sanctionne Golizadeh d’un hors-jeu, annulant le but qu’il venait d’inscrire, de la même façon que le Tadjikistan la veille. Les joueurs des EAU sont inexistants, incapables de poser le jeu, ils sont à peine rentrés dans le camp iranien durant la première mi-temps. Il en sera de même en deuxième mi-temps. L’Iran attaque bien, les EAU résistent comme ils peuvent. Et arrive l’heure de jeu : Yahia Al-Ghassani et Hossein Kanaani arrivent même temps sur le ballon, et l’attaquant émirati s’effondre. L’arbitre accorde un pénalty après avoir consulté la VAR. Mais même ce cadeau tombé du ciel, Al-Ghassani ne va pas en profiter et voit son tir détourné par Beiranvand. Quelques minutes passent, et le cadeau est cette fois donné par la défense émiratie. La défense redonne bêtement le ballon à Azmoun, lequel sert Taremi qui convertit l’offrande. 2-0. Et le 3-0 dans la foulée est évité de justesse, Azmoun étant signalé à raison en position de hors-jeu. Mais les hommes de Paulo Bento sont complétement dépassés, et la déferlante continue.

Dans l’autre match, la Palestine menant 3-0, les EAU tombent à la troisième place, encore qualificative pour eux à ce stade avec leurs quatre points, mais qui les enverraient affronter le Qatar en huitième de finale. Difficile alors de trouver les mots pour qualifier le grotesque de cette fin de match. 82e, Mohebi relaye avec Haji Safi qui centre, la reprise de Jahanbakhsh heurte la barre, le ballon revient sur Mohebi qui marque le troisième but iranien, mettant fin au suspens dans ce groupe et entérinant la deuxième place pour la Palestine et la troisième pour les EAU. Sauf que l’arbitre annule ce but : il est reproché à Mohebi  sur Majid Rashid après sa passe à Haji Safi. Il y a effectivement un télescopage entre les deux joueurs. Mais non seulement il est totalement involontaire, non seulement il est léger, mais on ne comprend pas pourquoi on y verrait plus une faute de l’Iranien qu’une faute de l’Emirati. Même les commentateurs officiels de l’AFC, qui sont pourtant les mecs les plus lisses, neutres et consensuels de la terre, sont stupéfaits par cette décision invraisemblable de l’arbitre : « Vous ne pouvez pas annuler un but pour ça ! » s’exclame le consultant. Et les miracles s’enchaînent pour les EAU. Dans le temps additionnel, une nouvelle attaque iranienne est stoppée, et la défense déséquilibrée ne peut rien faire pour empêcher Yahya Al-Ghassani de réduire l’écart d’une belle frappe enroulée. Un but crucial qui permet aux EAU de repasser devant la Palestine au classement. L’Iran ne s’impose que 2-1, un score qui est tout bonnement miraculeux pour les Fils de Zayed tant ils auront été inférieurs dans tous les compartiments du jeu. Il n’est pas dans les habitudes de la rédaction de P2F de hurler aux théories du complot, mais le nombre de décisions directement ou indirectement favorables aux EAU sur la deuxième mi-temps (en comptant ce qu’il s’est passé dans l’autre match) a de quoi laisser songeur… Il est difficile de ne pas croire que tout n’a été fait pour épargner au Qatar, pays hôte, un 8e de finale explosif contre un voisin revanchard (battu 0-4 à domicile en demi de la dernière Coupe d’Asie) et sans doute bien plus difficile à manœuvrer à priori que la Palestine. Toujours est il que les Emirats terminent deuxièmes après un premier tour très très laborieux, et affronteront le Tadjikistan en huitième de finale dans match où ils ne seront peut-être pas si favoris que ça. Tout le contraire de l’Iran dont on a retrouver le jeu flamboyant du premier match et s’est affirmée avec le retour de Sardar Azmoun comme un vrai candidat au titre.

1 — Iran — 9 pts
2 — Emirats Arabes Unis — 4 pts
3 — Palestine — 4 pts

4 — Hong-Kong — 0 pts

Odday Dabbagh inscrit un doublé et offre à la Palestine une qualification historique. Et sûrement bien plus que cela.

Groupe D : Le Japon ne rassure pas

Japon 3-1 Indonésie

Match de la peur pour les Samurai Blue. Bien qu’encore largement favoris face à l’Indonésie, la défaite contre l’Irak a été vécue comme un énorme coup sur la tête, et les prestations très inquiétantes du début de compétition font que le pire est désormais craint par les supporters nippons. Mais les Indonésiens ne vont pas pouvoir espérer l’exploit bien longtemps. La faute à un Jordi Amat auteur d’une faute d’une stupidité sans nom sur Ueda dès la 2e minute. Penalty indiscutable que l’attaquant de Feyenoord se charge lui-même de transformer. Déjà 1-0 et l’on se dit que le Japon, rassuré, va pouvoir dérouler… Il n’en sera rien. Le match nippon aura encore une fois été lent, mal maitrisé, avec beaucoup de difficultés à créer le danger. Alors certes, il y parfois eu des petits instant de pressing et contre-pressing intense, parfois des actions collectives de grande classe comme ce poteau de Nakamura (34e) ou le deuxième but de Ayase Ueda (51e). Certes on a parfois retrouvé pendant quelques minutes en deuxième mi-temps ce Japon rapide, technique, inspiré et flamboyant que tout le monde aime. Mais c’est justement ce qui est très frustrant avec cette équipe : on la sent capable de pics d’accélération que peu d’équipes en Asie peuvent suivre. On sent que quand cette équipe veut mettre la machine en route, elle peut tout écraser sur son passage. Mais on sent énormément de suffisance pour le moment, et ça peut lui couter très cher. L’Indonésie n’a quasiment rien fait du match, mais le Japon n’a pas produit grand-chose non plus. Le point positif, même si l’Indonésie était extrêmement limitée, la défense nippone rien laissé passé et enfin affiché de la sérénité. intégralement remaniée après la performance catastrophique contre l’Irak (Maikuma, Tomiyasu, Machida, Nakayama entrent dans le 11), le secteur défensif présente enfin des satisfactions et termine sur un clean sh… Ah ben non ! Zion Suzuki est encore dans les buts. Oublié par tout le monde, Sandy Walsh est à la réception d’un longue touche et parvient à reprendre de volée. Mal placé et à la technique de main encore une fois pas nette, le gardien d’Urawa concède un nouveau but largement évitable. Son cinquième en trois matches. Victimes d’insultes racistes au pays en raison de sa couleur de peau (son père est d’origine ghanéenne), Moriyasu l’avait aligné en espérant faire taire les critiques. Il est malheureusement peu probable que cela cesse. Mais au-delà de ça, on peut quand même avoir des doutes sur la capacité du favori japonais à aller au bout du tournoi avec un gardien inexpérimenté et loin d’être aussi fiable que ne l’exige le niveau international. Car c’est désormais de cela dont il s’agit pour les Samurai Blue, malgré un premier tour très inquiétant, ils restent qualifiés pour les huitièmes de finale et se voient offrir, avec la complicité plus ou moins directe des équipes du groupe E, un match bien plus abordable qu’ils ne pouvaient le craindre. Mais il ne faudra pas attendre pour entrer dans la compétition. Cela n’est plus possible désormais. Quant à l’Indonésie, elle était bien trop faible pour obtenir quelque chose de cette rencontre. Mais les circonstances ont fait qu’elle se qualifie malgré tout en tant que meilleur troisième. Les Indonésiens ont gagné le match qu’il fallait face au Vietnam et se voient récompensés des choses intéressantes qu’ils ont montré malgré leurs limites criantes. Contrairement à d’autres, l’Indonésie n’est pas venue en petit faire valoir. Elle a essayé de jouer, elle en décroche les fruits aujourd’hui puisque c’est la première fois de son histoire qu’elle franchit le premier tour d’une Coupe d’Asie.

Irak 3-2 Vietnam

Déjà assurée d’être première, l’Irak n’avait pas grand-chose à jouer pour son dernier match de poule, si ce n’est donner du temps de jeu à ses remplaçants. Déjà assuré d’être dernier, le Vietnam n’a lui non plus pas grand-chose à jouer si ce n’est de sortir un match honorable. Un match qui sera bien plus équilibré et enthousiasmant que prévu. Les deux équipes ont des volontés de jeu au sol et tentent de construire proprement. Ce sont les Vietnamiens qui ouvrent le score avec un but contre son camp de Zaid Tahseen… Refusé par l’arbitre. La cause ? Un hors-jeu de Van Khang Khuat. Ce qui n’a aucun sens ! Car le tibia du vietnamien est effectivement hors-jeu, mais il ne touche pas le ballon, ne cherche même pas à le toucher, ne gêne pas son défenseur direct et encore moins l’Irakien qui marque contre son camp. On a beau chercher, on ne comprend pas pourquoi ce but n’est pas accordé… Heureusement les Vietnamiens vont finir par ouvrir le score, encore une fois sur coup de pied arrêté par Viet Ahn, preuve que ce secteur a été très bien travaillé. Mais l’arbitre malaisien M. Nazmi Nassaruddin a décidemment la volonté de plomber l’équipe de Philippe Troussier : après avoir été averti en début de match pour une grossière simulation, Van Khang Khuat reçoit un deuxième carton jaune juste avant la mi-temps pour un prétendu genou trop haut lors d’un duel aérien. C’est excessivement sévère… Mais les Vietnamiens devront bien disputer la seconde mi-temps à 10… Et avec une grosse artillerie en face puisque Ali Jasim et Aymen Hussein entrent en jeu. Il ne faut que deux minutes au premier pour déposer un corner sur la tête de Rebin Sulaka qui égalise. Puis une bonne demi-heure pour le voir déposer un centre cette fois sur la tête du second. Dans cette équipe d’Irak, on attendait Mohanad Ali, mais la révélation pour l’instant, c’est Aymen Hussein et le diamant, c’est Ali Jasim. L’arbitre pendant ce temps là continue d’être à côté de la plaque, ayant besoin de la VAR pour accorder un pénalty pour l’Irak qui semblait évident à vitesse réelle… Penalty que Hussein frappera sur le poteau. Malgré les vagues irakiennes, les Vietnamiens sont encore dans le match et arrachent même l’égalisation à l’entrée du temps additionnel. Ce n’est pas volé, mais les Vietnamiens, trop naïfs, ne repartiront pas du Qatar avec le moindre point : Vo Minh Trong provoque un nouveau pénalty bien idiot à la dernière seconde du temps additionnel. Aymen Hussein ne rate pas sa deuxième chance et offre le carton plein à l’Irak, qui s’affirme comme l’épouvantail majeur de cette Coupe d’Asie. Avec des beaux joueurs qui pratiquent un beau football, l’Irak n’est pas un adversaire à prendre à la légère et bénéficie en plus d’un tableau qui lui semble abordable pour la route jusqu’en demi-finale. C’est en revanche cruel pour le Vietnam, qui a montré des choses intéressantes face aux deux ogres du groupe, mais qui aura loupé le match qu’il ne fallait pas contre l’Indonésie. Cela ressemble à une grosse régression pour une sélection qui atteignait les quart de finale en 2019, mais le travail de Philippe Troussier laisse tout de même paraitre des éléments intéressants, et on lui souhaite de rester à la tête de ce football.

1 — Irak — 9 pts
2 — Japon — 6 pts
3 — Indonésie — 3 pts

4 — Vietnam — 3 pts

Ali Jasim (17) et Aymen Hussein (18), déjà 5 buts pour lui, ont été les grands artisans du 3/3 irakien.

Groupe E : La schizophrénie coréenne

Jordanie 0-1 Bahreïn

On ne va malheureusement pas s’attarder longtemps sur ce match. C’était un équivalent de France – Danemark 2018. Avec un but cela dit… Mais le spectacle n’a pas du tout été au rendez-vous. Il faut dire que pour cette dernière journée du groupe E, les esprits les plus mesquins se demandaient qui de la Jordanie ou de la Corée du Sud allait faire de son mieux pour ne pas finir premier de la poule et donc éviter le Japon en huitième de finale. Evidemment, c’est le genre de complot qu’il faut imaginer avec ironie. Mais les Jordaniens ont en tout cas tout fait pour que l’on se pose sérieusement la question. Et pas seulement parce qu’ils ont aligné une équipe bis. Ça à la rigueur, beaucoup d’équipes déjà qualifiés le font sans mauvaises intentions. Mais il est apparu très vite aux yeux des spectateurs que la Jordanie ne ferait pas grand-chose pour gagner ce match. On est loin de la pétillante équipe qui nous a enthousiasmé avant. Tout n’a été que circulation de balle molle et quasiment aucune action à se mettre sous la dent. En face, le Bahreïn, qui devait gagner pour assurer sa qualification, a tenté de faire le match qu’il fallait. Avec ses qualités (que l’on sait limitées) et ses défauts (que l’on sait nombreux). Et ils ont eu le mérite de profiter des largesses du défense bien trop haute et trop lente pour ouvrir le score sur contre par Abulla Yusuf Helal. Et l’adition aurait pu se corser à deux ou trois reprises, mais constatant la passivité de leur adversaire, les Bahreïnis ont eux aussi attendu la fin du match, qui se termine donc une leur deuxième victoire du tournoi… Et la première place en poche ! Autant dire qu’on ne l’avait pas vu venir celle la ! La suite nous dira s’il s’agissait bien d’un cadeau empoisonné. Mais les Bahreïnis, contre toute attente, repartent du stade avec le sentiment d’avoir déjà réussi leur tournoi. On attendra en revanche que la Jordanie nous montre un autre visage naturellement. Il n’y a rien de plus à dire.

Corée du Sud 3-3 Malaisie

Déjà assurée d’être au moins parmi les meilleurs troisième, la Corée du Sud est face à un dilemme : doit-elle laisser filer cette rencontre ? Ce qui lui permettrait d’éviter le Japon en huitième de finale ? Ou bien doit-elle jouer à fond pour au moins se rassurer un peu dans ce premier tour très compliqué. Suspect, Jurgen Klinsmann choisit en tout cas d’aligner sa grosse équipe. Il faut dire que tout autre résultat autre qu’une victoire face à la faible Malaisie serait vécu comme un nouvel affront. Sauf si les intentions sont là sur le papier, elles sont une nouvelle fois invisibles sur le terrain. La Corée du Sud a le ballon (83% de possession en première mi-temps !), il n’y a pas grand-chose en face, mais la Corée du Sud ne propose rien. Corner, tête de Joeng Woo-yeong, magnifique détente de Syihan Hamzi qui détourne le ballon… Qui a malheureusement franchi la ligne (l’occasion de découvrir avec étonnement qu’il n’y a pas la Goal Line Technology sur cette Coupe d’Asie). 1-0 donc et c’est tout. Nul ne sait ce qui s’est dit dans le vestiaire à la mi-temps, mais Jurgen Klinsmann a dû apprendre que la Jordanie était en train de perdre, propulsant donc la Corée à la première place du groupe et droit vers un huitième de finale contre le rival japonais. On ne voit pas quelle autre explication peut justifier ce début de deuxième mi-temps des Guerriers Taeguk : perte de balle dans ses 20 mètres de Hwang In-beom, et Faisal Halim a presque 10 secondes dans la surface de réparation, sans qu’aucun Coréen ne vienne aider Kim Min-jae, pour se placer et ajuster le gardien. L’action est tellement lunaire qu’on entendrait presque les joueurs Coréens supplier Halim de marquer tellement personne ne voit l’en empêcher… La Malaisie inscrit donc son premier but du tournoi, les Coréens repassent deuxièmes et sans doute que se disent que cela leur va très bien ainsi. Sauf que les Malaisiens, mis en confiance, n’ont pas du tout l’intention de s’arrêter là et reprendre le pressing. Cinq minutes plus tard, Seol Young-woo shoote dans la jambe de Arif Hanapi. Penalty incontestable que Arif lui-même se charge de transformer. Aussi incroyable que cela puisse paraitre, la Corée du Sud est menée par la Malaisie, et retombe alors à la troisième place qui l’a verrait défier la flamboyante Irak. Ce qui n’est certes pas le Japon, mais tout de même rien d’un cadeau pour autant.

Réalisant sans doute par ailleurs qu’ils sont en train de se taper la honte, les Coréens tentent enfin d’attaquer. Cela reste anarchique, ultra brouillon, mais au moins, on constate une réaction. Et heureusement que Lee Kang-in, seul Coréen performant de ce premier tour, est encore là pour sauver la mise. A la 70e, le Parisien expédie une merveille de coup franc dans la lucarne malaisienne et permet à son équipe de revenir à 2-2. Puis à l’amorce du temps, additionnel, c’est un penalty (généreux) qu’il se procure. Une nouvelle fois très décevant, Son Heug-min le transforme et la Corée du Sud mène 3-2, nous dirigeons donc vers ce fameux huitième de finale contre le Japon. Mais peut-être que cette perspective a effrayé Kim Min-jae, et c’est cet élan de lucidité qui lui a fait faire une relance en carton sur un Malaisien, puis l’a fait resté passif avec son arrière droit Kim Tae-hwan face à Romel Morales qui peut frapper au ras du poteau sans être gêné, et donc égaliser à la dernière seconde du temps additionnel. La Corée du Sud vient de concéder le match nul contre la 130e nation mondiale… Et c’est pile au moment de l’égalisation que le réalisateur nous montre un Jurgen Klinsmann… assis sur son banc le sourire aux lèvres ! Difficile de savoir s’il s’agit d’un sourire ironique ou machiavélique, mais l’image est hallucinante, fera le tour des médias coréens et déchainera les critiques contre le sélectionneur allemand. Naturellement, aucun joueur ou membre du staff ne le dira publiquement, mais la prestation pose quand même de sérieuses questions : la Corée du Sud n’avait aucune envie de terminer en tête de son groupe, et donc de gagner ce match. Cela est relativement manifeste, et en somme, la mission est accomplie. La Corée du Sud ne rencontrera pas la Japon en huitième de finale. Mais à quel prix ? Car au-delà des question morales, au-delà du fait qu’une équipe annoncée comme favorite soit la risée de l’Asie avec un tel résultat contre une des sélections les plus faibles de la compétition, la principale interrogation est : est-ce que la Corée a gagné au change ? Eh bien si le choix est entre une Arabie joueuse et quasiment à domicile et un Japon certes effrayant sur le papier mais clairement dans le mal, on a de quoi avoir des doutes. D’autant que, soyons honnêtes, à aucun moment sur ce premier tour la Corée du Sud n’a montré quoi que ce soit qui laisse penser qu’elle pourrait battre le Japon, l’Arabie, ou n’importe qui d’autre en huitième de finale. Plombée par un sélectionneur que de toute évidence n’en a rien à faire de son boulot, la Corée n’a aucun plan, aucun fond de jeu. Elle ne peut que s’en remettre aux exploits personnels de son joyau Lee Kang-in. Mais à moins d’une radicale transformation, les chances de voir cette équipe sortir dès le prochain match sont très élevées.

1 — Bahreïn — 6 pts
2 — Corée du Sud — 5 pts
3 — Jordanie — 4 pts

4 — Malaisie — 1 pts

Surprenant vainqueur du Groupe, le Bahreïn d’Abdulla Yusuf Helal sera t-il le cocus de l’histoire ? Ou va t-il continuer à fermer des bouches ?

Groupe F : Le choke omanais

Arabie Saoudite 0-0 Thaïlande

Déjà qualifiés au coup d’envoi, Saoudiens et Thaïlandais vont tous deux laisser présager des interrogations quant à leurs intentions. La cote pour le match nul est en effet très basse car on se doute bien que chacun se contenterait volontiers d’un statut quo au classement. L’Arabie d’ailleurs, sûre de sa force, ne s’y trompe pas et aligne une équipe bis. Mais la partie ne va pas être aussi ennuyeuse qu’attendue. Dès la 8e minute, les Faucons verts se procurent un pénalty. Habituellement tireur, Salem Al-Dawsari laisse le soin de la frappe à un Abdullah Radif en crise de confiance. Raté. Radif écrase sa frappe et Saranon Anuin, qui n’avait pas joué les deux premiers matches, détourne le ballon sans difficulté. C’est le début du show pour le gardien thaïlandais qui va tout au long de la rencontre multiplier les parades décisives et spectaculaires, notamment face à Radif et Al-Dawsari. En face, la Thaïlande n’est pas en reste : elle attend, tente de rester compacte, mais n’hésite pas non plus à se projeter vers l’avant et arrive même à se créer des situations intéressantes. Chacune des deux équipes vont se faire refuser deux buts pour une position de hors-jeu après vérification de la VAR. Preuve que les Eléphants de guerre n’ont pas fait que subir durant la rencontre. Une rencontre que les Saoudiens auront c’est vrai clairement dominé, mais cette domination ne sera pas récompensée puisqu’aucun but ne sera marqué. Le 0-0 attendu aura donc bien eu lieu, mais il entre aisément dans la catégorie des bons 0-0, des matches qui ont malgré tout été agréables à voir. Un résultat qui sonne comme une contre performance saoudienne (malgré l’équipe bis). Mais si l’on serait tenté d’être inquiets pour les hommes de Roberto Mancini (une victoire de justesse contre Oman, un 2-0 sans saveur contre de faibles Kirghizes et donc un 0-0), il y en réalité plus de positif qu’on ne pourrait le croire. L’Arabie Saoudite n’est pas parfaite, mais elle joue, et joue même bien. Abdulrahman Ghareeb est un véritable joyaux capable de faire des différences à chaque instant. Salem Al-Dawsari est à créditer d’un très bon match et semble enfin être rentré dans sa compétition. Mohammed Kanno et Saud Abdulhamid, quand ils sont sur le terrain, sont de formidables créateurs d’occasions. Cette équipe saoudienne semble pétrie de qualités, et l’on sent qu’il ne manque pas grand-chose pour que la mayonnaise prenne. Sans doute qu’il faudrait régler ce problème d’efficacité, criant durant tout ce premier tour. Mais au-delà de ça, l’Arabie s’avance comme un candidat crédible au titre et sera assurément le favori de son huitième de finale contre la Corée du Sud. Il n’en sera probablement pas de même de la Thaïlande, mais cette dernière a aussi ses chances. Car cette équipe en crise il y a encore deux semaines s’est soudée comme jamais et termine la phase de poule invaincue et sans avoir encaissée de but. C’est qui est une performance à mille lieux de ce qu’on lui promettait. Capable de varier son jeu, d’être aussi explosif que joueur, la Thaïlande ne sera pas un morceau facile à sortir, d’autant qu’elle jouera désormais d’autant plus libérée.

Kirghizistan 1-1 Oman

L’avantage quand on est dans le dernier groupe d’une compétition qui qualifie les meilleurs troisième, c’est que l’on a déjà connaissance des résultats des autres. Et Oman ne pouvait rêver d’une meilleure situation pour son troisième match : ils savent ce qu’ils doivent faire, il leur faut une simple victoire. Et ils doivent l’obtenir contre une équipe kirghize qui nous a donné l’impression d’être, avec l’Inde, de loin la plus faible de la compétition. La condition est en revanche de marquer un but, ce qu’Oman a la réputation d’avoir beaucoup de mal à faire. Mais cela va arriver sûrement beaucoup plus tôt qu’ils ne pouvaient le craindre : 7e minute, corner de Salaah Al-Yahyaei dans les 5 mètres, les Omanais se massent près de la ligne de but et du gardien, cafouillage, et l’on ne sait trop comment, mais le ballon arrive a entrer dans le but. Un but de raccroc immonde mais qui permet à Oman de prendre les devants. On pourrait alors penser qu’ils chercheraient à profiter de la faiblesse de leur adversaire pour se mettre définitivement à l’abri. Mais ils vont se contenter du mode « économie d’énergie » et faire tourner la balle sans trop chercher à attaquer. Jusque dans l’absurde, avec parfois des séquences où ils parviennent à entrer dans la surface de réparation, avant d’enchainer les passes en retrait… Salaah Al-Yahyaei est le seul à essayer de bouger un peu les choses. Il y a bien deux belles occasions à la 55e et la 66e minute, mais les Omanais ne se sentent pas assez en danger pour en faire plus. Pourtant, premier avertissement, Joel Kojo voit au retour des vestiaires son égalisation refusée pour hors-jeu. Deuxième avertissement, la volée de Musabekov s’écrase sur le poteau. Et à la 80e, sur un long ballon anodin, Khalil Al-Braiki fait n’importe quoi, se télescope avec son gardien, et laisse Joel Kojo tranquillement égaliser et devenir un héros en Indonésie, qui se retrouve alors qualifiée (son compte Instagram a gagné près de 300 000 abonnés en quelques heures !). A la surprise générale, les Kirghizes égalisent et se rendent compte qu’ils pourraient même se qualifier s’ils marquaient deux autres buts. Ils tentent alors le tout pour le tout… Sans succès. Et côté omanais, en dehors d’une dernière belle frappe de Salaah (le seul joueur au niveau ce soir), le coup sur la tête est trop grand. Oman vient de laisser filer une qualification qui lui tendait les bras, mais paye son match attentiste. Malgré une prestation séduisante contre les Saoudiens, leurs limites offensives sont apparues claires comme de l’eau de roche. Et bien qu’elle soit une petite surprise, cette élimination n’en est que plus logique.

1 — Arabie Saoudite — 7 pts
2 — Thaïlande — 5 pts

3 — Oman — 2 pts
4 — Kirghizistan — 1 pts

Déception pour les deux équipes, mais surtout pour les Omanais.

Classement des meilleurs troisièmes

1 — Jordanie — 4 pts
2 — Palestine — 4 pts
3 — Syrie — 4 pts
4 — Indonésie — 3 pts

5 — Oman — 2 pts
6 — Chine — 2 pts

Les pintes d’or de la troisième journée

Rustam Yatimov (Tadjikistan) : Si l’on a beaucoup parlé de la qualité du collectif tadjik, il ne faut pas oublier de mentionner son gardien, probablement le meilleur de la compétition à ce stade. Rassurant, toujours bien placé et auteur d’arrêts décisifs, Yatimov est à 25 ans un gardien mâture, en pleine capacité, et à qui le Tadjikistan doit beaucoup.
Musab Al-Battat (Palestine) : La précision des centres du capitaine palestinien en font une arme de premier choix.
Saranon Anuin (Thaïlande) : Habituel numéro 2, sa prestation XXL va probablement bouleverser la hiérarchie des gardiens thaïlandais.
Sardar Azmoun (Iran) : Sans lui, l’Iran est déjà très forte. Avec lui, l’Iran déviant monstrueuse. Associé à Taremi, l’Iran devient une machine de guerre. Le facteur X de son équipe, à tout point de vue.
Les fans malaisiens : Leurs homologues indonésiens avaient impressionné précédemment. Ils ont prouvé face à la Corée qu’ils pouvaient eux aussi mettre une ambiance exceptionnelle dans un stade. On a pu voir des supporters en pleurs quand la Malaisie a accroché le monstre coréen. Les fans de l’ASEAN sont définitivement les meilleurs du monde quand il s’agit de foot de sélection.

Les bières réchauffées de la troisième journée

Everton Camargo (Hong-Kong) : Et c’est le grand chelem pour lui ! Toujours aussi perso, désormais simulateur et boycotté par ses coéquipiers, puis un pénalty manqué en guise de cerise sur le gâteau. Un boulet jusqu’au bout pour son équipe et sans doute notre « bière réchauffée premium » du tournoi.
Abdullah Radif (Arabie Saoudite): Est actuellement le symbole de cette inefficacité saoudienne qui persiste.
L’arbitrage japonais : Déjà très critiqué par les amateurs de football japonais (pour les mêmes raisons qu’en France), l’arbitrage « made in J. League », malgré ses deux représentants, s’affiche de la pire des manières. Une prestation très critiquable de M. Hiroyuki Kimura lors de Tadjikistan – Qatar, M. Yûsuke Araki s’est ridiculisé en accordant ce pénalty honteux aux Australiens. Si le Japon n’atteint pas la finale, souhaitons de tout cœur qu’il ne soit pas représenté par un sifflet lors de celle-ci.
Les décisions prises avec la VAR : Au delà des arbitres japonais, cette troisième journée a vu un grand nombre de décisions incompréhensibles prises après consultation de la VAR. Le problème de l’arbitrage n’est pas la technologie.
La mentalité jordanienne : Si la Jordanie remporte son huitième de finale contre l’Irak, on admettra peut-être que son calcul était bon. Mais il est toujours regrettable de voir une équipe laisser filer un match…
Jurgen Klinsmann (Corée du Sud) : On peut plaisanter sur sa volonté réelle ou supposée d’éviter la première place du groupe. Mais ce qui est absolument certain, c’est qu’il n’en a rien à faire de son job et que ça se voit. La Corée du Sud est dans un flou tactique total et court droit à la catastrophe. Et il en est le premier responsable.

Le match « coup de cœur » de la troisième journée

Le spectaculaire Irak – Vietnam, les émotions de Hong-Kong – Palestine, ou le comique du Corée du Sud – Malaisie auraient pu se voir accordé une distinction, ces matches n’auront que notre « Mention honorable ». Car le Tadjikistan – Liban combine tout ce qu’on aime dans le football : du jeu, de la dramaturgie, un scénario haletant, et un moment historique. Merci aux Tadjiks (et aux Libanais !) pour ce merveilleux moment !

Le programme des huitièmee de finale

Australie / Indonésie (dimanche 28 janvier, 12h30 heure française)
Tadjikistan / Emirats Arabes Unis (dimanche 28 janvier, 17h00)
Irak / Jordanie (lundi 29 janvier, 12h30)
Qatar / Palestine (lundi 29 janvier, 17h00)
Ouzbékistan / Thaïlande (mardi 30 janvier, 12h30)
Arabie Saoudite / Corée du Sud (mardi 30 janvier, 17h00)
Bahreïn / Japon (mercredi 31 janvier, 12h30)
Iran / Syrie (mercredi 31 janvier, 17h00)

A suivre en France et en Belgique gratuitement et en intégralité sur la chaine YouTube « AFC Asian Cup »

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Xixon

Même un Bordelais peut préférer la bière. Puxa Xixón, puxa Asturies, puta Oviedo ! 俺は日本サッカーサポーター ! (Rien à voir avec le judo) 

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11 réflexions sur « Coupe d’Asie 2023 : Troisième journée »

  1. Zion Suzuki, de nombreuses critiques, voire malheureusement plus… Comment sont perçus Rui Hachimura ou Naomi Osaka? Il me semble qu’Hachimura a grandi au Japon, ce qui n’est pas le cas d’Osaka.

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    1. Pour ce que j’en sais, quand ils performent, va bien. Et quand ils ne performent pas, les c… se réveillent.
      J’ai pas l’impression qu’ils soient plus nombreux qu’ailleurs. Mais je ne suis pas assez connaisseur du sujet. J’ai surtout l’impression qu’ils sont très bruyants, comme les camionnettes noires des nationalistes qui circulent parfois dans les grandes villes.

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    1. Je crois qu’Azmoun revient de blessure récemment. Donc il est économisé. Il faut dire que normalement, l’Iran n’a pas besoin de lui pour sortir de ce groupe là. Mais sinon, n’importe quel amateur de football voit dès le premier coup d’oeil que c’est le meilleur iranien et qu’il est indispensable à cette sélection. Sa complémentarité avec Taremi est incroyable. Il faudrait être fou pour s’en passer.

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      1. « Si nous sommes réunis aujourd’hui messieurs et mesdames les jurés, ce n’est pas pour cacher la vérité ni la travestir ou la rendre sournoisement plus humaine. Non… Mon client a fauté. Il n’a jamais prétendu le contraire. Mais une erreur, aussi grossière soit-elle, ne peut tout effacer, graver dans le marbre, l’image d’un médiocre.
        Penchons nous un peu sur son passé et que voyons-nous? Des chevaux sprintant à perdre haleine, de Port St Louis à Saintes-Maries-de-la-Mer. Ces moustiques qui vous sucent la moelle, comme d’autres vous jettent des pierres. Car être né camarguais, c’est aussi cela. Susciter amour et rejet, amitié et combat. Nous jugeons plus qu’un individu aujourd’hui. Nous ouvrons un débat sur le procès injuste d’une communauté… »

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  2. Tout lu et même relu, boulot monstrueux, bravo et merci.

    J’ai une question : parmi les 24 équipes en lice, distingues-tu des styles qui semblent originaux? Qui soient distincts de cette espèce de foot continental standardisé que, malheureusement, l’on observe de plus en plus partout? L’un ou l’autre styles que l’on pourrait peu ou prou qualifier, dans leur persistance voire leur maturation, de « nationaux »?

    Ou les équipes nationales asiatiques sont-elles bien plutôt rentrées elles aussi dans certain moule, dogme..?

    Certain temps j’avais cru distinguer un caractère propre à l’équipe nationale du Japon : un foot positif, entreprenant, vif et technique, intelligent…… ==> Pour peu que ce fût pertinent, en reste-t-il quelque chose? Vois-tu l’une ou l’autre équipes dont le style ait singulièrement évolué?

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  3. Bel article Xixon ! Everton Camargo, c’est vraiment un pigniouf ce mec. Typiquement le genre de starlette que je serais capable d’aller tacler par-derrière depuis mon but (oui j’étais gardien) s’il jouait dans la même équipe que moi.

    Je confirme aussi que Zion Suzuki, c’est vraiment faiblard dans les buts japonais, à l’inverse du russo-tadjik Rustam Yatimov, bien plus solide et complet.

    La Corée du Sud n’ira pas bien loin avec une telle défense aux abonnés absents.

    Et énorme big up au Tadjikistan, qui a éliminé les Émirats arabes unis aux pénos hier soir !!!!

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