Voilà, c’est fini, comme le dit la chanson. La saison touche à sa fin, et petit à petit le vide s’installe. Pour le fan de football, une longue attente commence. Quel que soit l’état d’esprit dans lequel il se trouve, triste, amer ou heureux, la saison, sa saison est terminée. Qu’il soit champion avec son équipe, qu’il ait décroché l’Europe, un bon maintien ou une décevante place dans le ventre mou du championnat, tout supporter qui se respecte n’attend qu’une chose : la reprise.
Et si d’aventure la saison écoulée s’est avérée pénible avec une descente à la clé, une fois la déception passée, l’optimisme prévaudra. On appelle ça, la résilience. L’abattement ne durera pas, il ne pourra s’empêcher de penser qu’il y aura des jours meilleurs, que son club rebondira. L’équipe perdra très certainement ses cadres mais se restructurera autour des jeunes du centre de formation.
Evidemment rien n’indique que tout se passera comme il l’espère, mais l’espoir renaîtra, il se dira que c’est mieux ainsi, qu’il faut reconstruire pour mieux repartir. Il avait pourtant juré qu’on ne l’y reprendrait plus, que cette saison était celle de trop, et qu’il n’avait plus la force de suivre cette équipe dans tous les stades du pays. Elle ne lui rend pas un dixième de ce qu’il lui donne. Et il en a donné de l’amour, il en a dépensé de l’argent et du temps pour assouvir sa passion.
Mais il a le sentiment que les joueurs sont autant d’ingrats chèrement payés, qui se moquent de lui et de ses revendications, et qu’ils ne le respectent pas. Il les a tancé moult fois la saison dernière, les invitant à se bouger les fesses pour le club qui les emploie. Mais aujourd’hui ces mercenaires vont partir sous d’autres cieux, plus rémunérateurs. Ils le laissent tomber lui et ses camarades, confirmant l’adage qu’il martèle à qui veut bien l’entendre : « Les joueurs partent, les supporters restent ».
Rapidement le souvenir des ambiances des soirs de grands matchs refait surface. L’accueil hostile des fans adverses quand il investi le parcage lui manque. C’est tout un folklore qui se rappelle à son bon souvenir. Il se surprend à attendre le calendrier, puis viennent les premières rumeurs transferts et les indiscrétions sur le futur maillot. Il se pique au jeu.
Les années paires, la Coupe du monde ou l’Euro l’aideront à traverser l’été, à patienter en attendant la reprise. Cet inconditionnel du beau jeu devise au travail avec ses collègues. Il a un avis sur tout, tantôt objectif tantôt partisan mais toujours chauvin. Il est tour à tour président de club et entraineur. Pendant le « mercato » il commente les rumeurs de transferts avec un aplomb déconcertant, comme s’il détenait les cordons de la bourse. Et les commentaires vont bon train.
« Tu as vu ‘machin’ va peut être signer ! »
« Tu rigoles, tu mets un million de plus et tu as ‘Trucmuche’, c’est quand même autre chose ! »
Il pense que le club lui appartient, il est plus légitime qu’untel ou untel. Il fait son marché dans la peau d’un décideur. Il brasse des millions virtuels mais il chipote quand il apprend que son abonnement en kop lui coutera 200 euros au lieu de 190 la saison dernière. Soit une augmentation de… 52 centimes d’euros par match à domicile. Vous avez dit versatile ? Le fan est inlassable, il pourra avoir la même discussion tous les jours avec son collègue, en feignant l’avoir eue pour le plaisir de reparler football, encore et encore.
Le jour de la présentation du nouveau maillot arrive enfin, et le fera réagir bien évidemment. Mais qu’il lui plaise ou non, il fera l’objet d’un achat nécessaire à l’enrichissement de sa collection. Puis tout s’enchaîne, le calendrier aussi fait son apparition. Une première lecture lui indique si il supportera son équipe dans son stade ou à l’extérieur pour l’ouverture du championnat. Puis il regardera les dates de derby, qu’il cochera afin de ne pas prendre d’autres dispositions le jour J. La seconde lecture est plus fine, il s’agit de découvrir les opportunités de début de saison. Quasiment tous les fans se rejoindront pour dire qu’il vaut mieux rencontrer un promu en automne, car en début d’exercice il est souvent motivé pour engranger de précieux points en vue du maintien. Et à l’inverse, une équipe phare sera certainement plus « prenable » en début de championnat car elle aura son pic de forme lorsque les joutes européennes débuteront.
Animé par sa mauvaise foi, le calendrier des siens sera toujours plus compliqué que celui de l’équipe du collègue, et il a tous les arguments pour étayer son analyse, exemples à l’appui. De quoi nourrir de grandes et interminables discussions et alimenter la polémique.
La saison commence enfin et elle sera intense, avec ses joies, ses peines, ses coups de gueules envers les arbitres jusqu’au mois de juin suivant. Où le cycle se renouvellera… et tout recommencera…
Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne serait pas purement fortuite, car ce fan, c’est toi, c’est moi… c’est nous.
Remuald Gaudes pour pinte2foot !
Alors… moi, je suis supporter des Girondins
Alors bon, dire que « j’attends la reprise »…
^^ »
(J’ai plus de club bordel !)
Tu la sens comment pour Bordeaux d’ailleurs ?
Quel sera le prochain club assez stupide pour faire confiance à Gérard Lopez ?
Je le sens que je pars au Japon avec le sentiment de ne rien laisser derrière moi…
J’ai plus de club !… 🥲
Nan mais c’était inéluctable. Dès la descente il y a 2 ans, on était nombreux à admettre qu’on avait deux ans pour remonter, mais qu’on ne tiendrait pas trois avant la faillite. Certains espèrent encore que Gégé mettra la main au porte feuille, mais je n’y crois pas une seule seconde. Il a bien sûr une grande part de responsabilité, mais comme je le disais il y a quelques mois, c’est pas Gégé qui nous aura tué, mais M6 et les Américains.
C’est triste parce que les Bordelais sont vraiment attachés aux Girondins. J’ai pu le constater en y vivant. Difficile d’imaginer qu’un club avec cette histoire, une région attractive ait pu tomber si bas.
En allant au Matmut, j’aurais jamais imaginé que Kundé finirait au Barça et Tchouamini au Real.
Je suis sincèrement désolé pour toi et tous les amis que j’ai laissés en Gironde (et au delà).
« j’ai plus de club »
Euh si, le club ne va pas disparaître.
Merci Remuald pour ce billet.
J’ai l’impression que c’est le calme plat en France en matière de mercato et que la reprise du championnat semble encore très lointaine. Entre les incertitudes sur les droits TV et le manque d’argent des clubs, l’incertitude politique dans laquelle se trouve le pays et le ramdam médiatique dont sont capables nos députés où ils excellent, les inquiétudes avant les JO (tiens, j’ai lu récemment un article qui exposait les craintes des Français avant les JO de 1924 : les mêmes qu’aujourd’hui, hébergement, travaux inachevés, coût des billets…, la sécurité en moins), le péquin lambda ne se préoccupe pas vraiment du foot. Comme tu le mentionnes, il faut être supporter pour scruter l’actualité de son club !
Comme tu le dis, le péquin moyen a d’autres priorités et/ou centres d’intérêt que le foot, qui plus est actuellement. Moi le premier d’ailleurs ; j’attends surtout les fenêtres de rencontres internationales. J’ai suivi de loin les problèmes clownesques engendrés par les droits télé et la diffusion de la L1, c’est peu dire que c’est entre autre ce type de dérive qui m’a lentement mais sûrement fait dévié du foot en règle générale.
Merci Remuald ! En tapant ton nom, j’ai vu que tu écrivais dans d’autres médias. Une équipe de cœur ? Et n’hésite pas à nous présenter d’autres textes !
Salut Remuald. Modro m’a montré ta réponse sur Instagram. Par contre, je ne comprends pas que tu ne puisses pas commenter. Tu es incrit sur le site ? A bientôt alors !
Qu’est-ce qu’un club?
Je ne prétends pas avoir la réponse, bien qu’elle ne doive pas être bien difficile. Paresseusement et/ou lâchement, il pourrait être confortable de se réfugier derrière ce qu’en dirent l’une ou l’autre figures, Bobby Robson par exemple, peut-être avait-il raison :
« What is a club in any case? Not the buildings or the directors or the people who are paid to represent it. It’s not the television contracts, get-out clauses, marketing departments or executive boxes. It’s the noise, the passion, the feeling of belonging, the pride in your city. It’s a small boy clambering up stadium steps for the very first time, gripping his father’s hand, gawping at that hallowed stretch of turf beneath him and, without being able to do a thing about it, falling in love.”
Je n’en sais rien! Prosaïquement et dans le cas d’espèce, j’évoquerais un « espace où l’on se réunit pour..jouer »?
Par contre il me paraît assez aisé de cerner ce que ce n’est fondamentalement pas : machine à pognon, à fantasmes, canal de propagandes.. ==> A temps T+0, fondamentalement : quel club pro mérite encore d’être tenu pour « club »? Au sein duquel d’entre eux prédomine encore cette notion de communauté humaine? Parmi les clubs pros contemporains, que subsiste-t-il de l’essence « club »?
L’un ou l’autre parviennent vaille que vaille à des compromis pas trop boiteux encore, mais pour ma part ce football m’a perdu à mesure de sa dilution résolue dans le marché.. Que ce soient désormais aussi des entreprises, pourquoi pas..mais cet « aussi » est vérolé, flatteur. Car même les sélections nationales ne sont plus guère que ça : des vitrines. Et les managements à l’oeuvre sont sans ambigüité.
Xixon évoque les déboires de ses Girondins.. Moi j’ai vécu, et refais peut-être présentement l’expérience, de la disparition des clubs auxquels je me suis le plus souvent frotté ; état d’esprit voisin, quoique..au fond ça fait des années déjà que je ne m’y retrouve plus.. et cependant je me réjouis de revoir des gamins jouer, de jouer avec mes gamines dans un parc.. ==> Ce football-là est increvable.
Merci Remuald!
On sent que ça passe du temps à la machine à café eheh.
Le meilleur spot avec la cuisine en soirée.
(Mouais, moi je suis, ou du moins j’étais, supporteur du FCN (club aujourd’hui disparu), alors la saison qui vient, hein…
Combien d’entraîneurs cette saison, c’est le gros suspense.
Ceci dit, j’envie pas les autres.)
Le FCN, club..identitairement et culturellement disparu, je présume?
Si oui, consolation mesquine : il n’y a pas grand-chose à sauver ailleurs, ce qui différenciait les clubs l’un de l’autre s’est réduit à peau de zob..si bien que la perte de l’un ou de l’autre est désormais sans plus guère de réelles conséquences ; à l’échelle du vivant, et désormais qu’ils furent à peu près tous standardisés : c’est comme s’il n’y avait plus guère « que » des disparitions d’individus, non plus des disparitions d’espèces. La véritable extinction : elle a déjà eu lieu.
[quote]Le FCN, club..identitairement et culturellement disparu, je présume?[/quote]
Oui.
J’ai eu le temps de m’y faire, plus de vingt ans à voir les étapes de la sénéscence, mais je sais pas trop où j’en suis du deuil…
Il n’y a -sans doute- plus rien à espérer de ce foot, c’est assez terrible. Ça doit aller avec l’époque.
(Le « sans doute », c’est le masochisme du supporteur.)