Paraguay, parade Guarani

El Chat

« El Bulldog », « El Guerrero Guaraní » ou encore, plus communément, « Chila »… nombreux auront été les surnoms (comme pour beaucoup de sportifs ou autres personnalités sud-américaines me diriez-vous) prêtés ici à ce splendide portier paraguayen (vous avez évidemment tous déjà compris de qui l’on parle)… personnage assez spécifique qu’on ne présente plus nulle part et véritable vitrine de son pays : José Luis Chilavert ! Pour moi ce sera un particulier, aventurier et peut-être aussi quelque peu audacieux : « El Chat ». Mix franco-espagnol sans prétention, spécialement improvisé pour l’occasion et situé à cheval entre le bricolage et la curiosité… Acrobaties cavalières, cascades rocambolesques… Rodéo de cirque, pirouettes de contorsionniste ou que sais-je encore… un cocktail souple au possible, aussi explosif que parfaitement assumé et pourquoi pas ici, pour conclure, le dialecte adéquat pour officiellement lancer notre article du jour et son formidable sujet : la microscopique mais épique et fabuleuse équipe de football du Paraguay ! Franco-espagnol c’est ça ? Comment pouvait-il en être autrement… Effectivement, nous sommes en pleine Coupe du Monde 98, au stade des huitièmes de finale plus précisément et la « Planète Foot » découvre alors en direct une nouvelle espèce émergeant à la surface de sa sphère. Soudainement débarquée d’un autre espace temps ou peuplant depuis déjà longtemps une région oubliée du « globe Football » ? Après tout peu importe… L’important est ici et avant tout la rencontre ! La rencontre avec ces êtres étranges portant eux aussi une tenue tricolore, aux mêmes couleurs d’ailleurs que celles dressées en étendard sur la crête du coq local et adversaire du jour, comprenez le bleu, le blanc et le rouge… Ces êtres, ces hommes incroyables venus pacifiquement représenter l’un des plus petits pays ayant alors participé à un Mondial (pays qui, emporté par l’optimisme de cette époque et épaté par l’exploit manqué de peu par ses protégés, disposera un peu plus tard (proportionnellement à sa population bien sûr) du plus grand pourcentage de licenciés de football au monde). Des êtres, des hommes… Enfin de simples et humbles joueurs de foot ayant pourtant marqué au fer rouge ma peau sensible, ici un tatouage intemporel sur mon teint méditerranéen déjà bien matifié par cet été magnifique… et là une sacrée couche de peinture, aussi insoupçonnée que surprenante, étonnante autant que complètement inattendue et étalée à la pelle sur le totem, que dis-je le totem : le temple tout entier dédié au culte de mon éternelle utopie.

« Para todos » et « Para tutto » !

« Para todos » et « Para tutto », traduisez de l’espagnol « Pour tous » (pour la première partie)… et de l’italien « Il arrête tout », « Il stoppe tout », pour la suite… Seconde association de sons méridionaux, nouvel étrange mélange des langues et, oserai-je ajouter : joli et ludique jeu de mot léché choisi afin d’introduire ce deuxième paragraphe via les propriétés principales de notre greffier favori, notre Chilavert chéri ! « Pour tous » ? « Stoppe tout » ? On y est : plus que la plaisante découverte de la civilisation footballistique paraguayenne, cette affiche « France-Paraguay 98 » apparaît et s’impose surtout comme point culminant, apogée ou encore chef-d’œuvre de la carrière pourtant déjà plus qu’affirmée de notre sorte de « Che Guarani ». « Che » oui… étiquette parfaite d’un costume sur-mesure, ou facilement ici la casquette idéale pour celui qui aura été le héros national et, quelque part… le « Gardien du peuple » ! Carrément… et même un petit peu plus que ça : le gardien du monde entier ! « Para todos », « Pour tous »… Absolument ! Parce que paraguayen ou pas, le temps d’un été, dans chaque recoin de France et de Navarre… plus aucun gosse ne tirait la tronche au moment de se voir désigné gardien de but pour l’immanquable « match au quartier » ou l’indémodable et interminable « qualif » si cher aux cours de récré, fardeau commun de toute une génération, s’abattant souvent après un tirage au sort hasardeux : allumette qui « prend feu », « plouf-plouf » tombé à l’eau… « chifoumi » foireux ou enfin « chou-fleur » malchanceux… Terminé donc la triste mine du portier empruntant les traits d’une porte de prison, la « cage » (comme on appelle familièrement les buts) et ses filets au mieux troués, au pire absents… est indéniablement devenue l’espace d’expression rêvé pour stimuler le syndrome d’imitation indissociable de l’enfance ou de l’adolescence… et ce dernier vient de trouver un tout nouveau modèle ! Adieu Denilson, au Diable Ronaldo… Au milieu des Peter Schmeichel, Gianluca Pagliuca… Andreas Köpke et autres Chokri El Ouaer… se dresse désormais un mur infranchissable, sans aucun doute la nouvelle idole des jeunes… Icône incontournable dont le fluo de la robe (ici bien sûr celui de son sublime maillot « Reebok ») aura formidablement effacé, ou à minima rendu fades, les dorures ornant d’ordinaire les cadres religieux : José Luis Chilavert ! « Chila » donc, ou mon expérimental animal « El Chat »… Pour finir l’ « Araignée verte » qui aura autant tissé que protégé sa toile du mieux possible, repoussant sans cesse les assauts aussi constants qu’insistants d’un aspirateur français ayant franchement frôlé une crise de phobie ! L’amourette de vacances « Paraguay 98 » prendra hélas froidement fin ici, à Lens, dans un stade Bollaert bouillonnant, fidèle à sa chaleur légendaire et dont le public aura exceptionnellement été acquis à la cause du géant, lui qui généralement, pour ne pas dire quasi toujours… transpire en tribune une fièvre populaire et s’identifie fermement et profondément comme fervent partisan des tribus lilliputiennes ! Petit parcours donc mais grande épopée pour les disciples du discret sélectionneur brésilien Paulo César Carpegiani, sortis tout de même vivants avant ça de ce qui pourrait pratiquement s’apparenter au « groupe de la mort » du premier tour, une poule compliquée comprenant : l’Espagne tout d’abord (cette dernière dispensée de présentations malgré ses diverses périodes de disettes et de vaches maigres) ; la Bulgarie (demi-finaliste de la dernière édition (USA 94)) ; et pour finir le Nigeria et sa magique et géniale génération (sélection surprise (aussi) du mondial américain quatre ans plus tôt, championne d’Afrique 94 (future finaliste de la CAN 2000 par-dessus le marché) et championne olympique en titre (Atlanta 96))… L’aventure de l’ « Albirroja » (« rouge et blanc » tout simplement) se termine donc trop tôt, belle et rebelle affranchie rapidement rattrapée par la féroce et fatidique réalité du football… et alors épouvantablement abattue par un tir, autant à bout portant qu’à balle réelle, d’un « Président » Laurent Blanc absolument bluffant dans le rôle du despote impitoyable.

Ola Cesare

À défaut de maîtriser le « guarani » (langue officielle du Paraguay depuis 1992, celle-ci reléguant ainsi l’invasif et possessif palais espagnol au rang d’adjoint, ou du moins obligeant ce dernier à un partage équitable de la régence), c’est un original « Ola Cesare » (proche d’un « Ave Cesare » classique mais déjà utilisé jadis pour mon hommage à l’Empereur Prandelli) qui obtiendra le rôle (et peut-être même la palme) d’énième « créole latin » enjoué venant accentuer notre texte ! Petite touche romaine une fois encore, parfaite pour apprendre à rouler les « R » comme pour ouvrir officiellement la prochaine étape de notre « Vuelta » paraguayenne : la décennie 2000. Coupe du Monde « Japon-Corée du Sud » pour commencer et donc ici, notre osé et clairement olé olé « Ola Cesare » ! En effet, quatre ans après leur retour sur le devant de la scène via l’événement français (« retour » car le Paraguay avait déjà participé quatre fois à la « compétition phare » avant ça (1930, 50, 58 et 86 (une qualification en huitième de finale avait d’ailleurs déjà été atteinte en terres Aztèques))), les « Guaranies » se rendent à l’inédite édition asiatique avec l’expérimenté Cesare Maldini élégamment assis sur leur banc. Une petite parenthèse s’impose immédiatement : si le mot « élégamment » est évidemment exempté du devoir d’argumentation lorsque le sujet traite de la dynastie des Maldini, le terme « expérimenté » l’est au moins tout autant et prend même dans notre contexte une dimension supplémentaire (comme si repousser à leur paroxysme chaque limite (par exemple ici celles du temps) était une spécificité propre à l’ « Adn Maldinien »)… Effectivement, en disputant ce Mondial 2002, le célèbre « Papa de Paolo » devient, à 70 ans très précisément, l’entraîneur le plus âgé de l’histoire à avoir exercé dans la « reine des compétitions » (il sera détrôné huit ans plus tard par « King Otto » Rehhagel (toujours détenteur du record alors obtenu sur le banc grec))… En Corée du Sud (le Paraguay ne posera finalement pas de pied au Japon pendant cette compétition pourtant coorganisée par les deux pays voisins), le tirage ressemble à celui de 98 : l’Espagne (toujours conquérante mais pas encore impériale) ; une équipe africaine (ici les « Bafana Bafana » très exactement et leur génération dorée (à l’image de celle du Nigeria rencontrée plus haut) dans laquelle jouaient entre autres Lucas Radebe, Quinton Fortune… Benedict McCarthy, Steven Pienaar ou encore l’ancien marseillais Pierre Issa) ; et pour conclure une équipe balkanique avec la Slovénie du « numéro 10 » gaucher, héritier à ses heures de Rui Costa à Benfica : Zlatko Zahovic (version plus soft je vous l’accorde (l’équipe comme sa « Star ») de ce que pouvait laisser présager la diseuse de bonne aventure bulgare et son montreur d’ours spectaculaire, son technicien monstrueux et sorte de « Tsar-tzigane » Hristo Stoichkov à leur arrivée dans l’hexagone quatre ans plus tôt)… Groupe similaire, résultat identique ! Comme lors de leur expérience en France, le Paraguay passera l’épreuve toujours difficile du premier tour avant de sortir hélas dès le stade suivant, ici contre l’Allemagne future finaliste du tournoi (une petite défaite, 1-0 seulement sur un but d’Oliver Neuville à la 88ème minute) à l’issue d’un match : plus vertical que vertigineux. Une partie en effet surtout dessinée par les longs ballons et le jeu au pied des deux grands gardiens de buts opposés pour l’occasion (les deux capitaines d’ailleurs) : d’un côté le « vampire » Oliver Kahn (second « Oliver » du jour avec le buteur Neuville cité juste au-dessus (il y aurait tout à fait pu y en avoir un troisième mais Bierhoff n’est pas entré en jeu pour la « Mannschaft » ce jour-là))… et de l’autre côté évidemment notre coqueluche, notre chouchou Chilavert, invulnérable hélas que dans nos rêves chimériques, nos souvenirs enjolivés et notre vain battage tapageur. C’était le Paraguay « trouble-fête récidiviste », porté entre autres par les leaders toujours présents de sa « révolution 98 » : Carlos Gamarra, Celso Ayala bien sûr ou encore Roberto Acuña… Un Paraguay « entre deux âges » aussi, dont le portrait, pourquoi pas ici la façade partiellement repeinte portait à la fois la fraîcheur, la folie et la fantaisie des pinceaux, pardon des pieds, du feu follet de River Plate Nelson Cuevas… que la grâce et la finesse de la future figure de proue du pays, phénomène inflammable fortement sujet à l’effervescence de la foule ou aux fabulations de toutes parts… synonyme de plusieurs superlatifs et pour finir fresque murale à lui seul, fièrement affichée celle-ci et dont les dimensions démesurées de l’admiration qu’elle provoque suffiraient à faire jalouser ou rougir la plus gigantesque des propagandes : Roque Santa Cruz ! On clôturera ce chapitre avec un clin d’œil particulier et une dédicace spéciale à Francisco « Chiqui » Arce, auteur d’un coup franc fantastique face à l’Afrique du Sud et alors transition toute faite pour saluer une dernière fois le fer de lance de notre récit : José Luis Chilavert. « Particulier », « aventurier », ou bien encore « audacieux »… ai-je (aussi discrètement que volontairement) placé plus haut ? Chilavert c’est exactement ça ! Un gardien, un « goal volant » (pour refaire ici référence à la vie de quartier) qui, autant que les esprits, aura également marqué plus de 60 buts au cours de sa carrière ! Une collection de coups de pieds arrêtés (beaucoup de penalty certes) aux allures de collier de perles comprenant: ici un pendentif aussi ravissant que rarissime (un triplé (à ce jour seul portier connu à avoir réussi cet exploit))… et là quelques pierres précieuses éparpillées (un peu plus d’une dizaine de coups francs). Une performance hors du commun faisant de lui un candidat plus que potentiel, sans concurrent sérieux et alors pratiquement élu d’office pour le titre de « Platini paraguayen », ou peut-être « Juninho Guarani »… mais surtout une performance le plaçant deuxième meilleur « gardien-buteur » de l’histoire du football derrière le brésilien Rogerio Ceni et les affolantes 130 réalisations à son actif (même en évoluant de nombreux matchs sur le champs, qui plus est au poste d’attaquant… le multicolore, excentrique et tout autant exceptionnel « gardien-arlequin » du Mexique Jorge Campos n’a pas fait mieux (46 buts au total pour le microscopique mais merveilleusement radieux disque Maya)).

Santa Cruz déjà à la maison

Passons rapidement par le mondial 2006, petit épisode s’apparentant à un « creux de la vague » pour notre surfeur paraguayen flottant pourtant plutôt bien à la surface de l’eau et paraissant même maintenant assez à l’aise, au milieu de ce grand bain salé que représente l’immense océan du football et dans lequel il a un jour, aussi joliment que courageusement : plongé tête la première ! En Allemagne pour faire court, les hommes du désormais sélectionneur uruguayen Aníbal «Maño» Ruiz (coach méconnu mais récompensé cependant un an plus tôt en remportant le titre de « meilleur entraîneur sud-américain de l’année 2005 ») sortiront dès le premier tour, troisième d’un groupe équilibré mais plus qu’abordable constitué : de l’Angleterre (solide leader de la poule) ; de la Suède du « Jarl » ([yarl]) Lars Lagerbäck et de ses véritables « Berserker » alignés en attaque (Zlatan et Henrik Larsson bien sûr, en guise de têtes de gondole du drakkar viking… mais aussi Elmander, Allbäck ou encore Rosenberg) ; et enfin de l’équipe nationale du Trinité-et-Tobago. Énième crochet à immanquablement effectuer ensemble afin de saluer ici la qualification historique de cette minuscule sélection d’Amérique centrale, dernière équipe caribéenne en date à avoir disputé une Coupe du Monde et incontestablement « LA » grande invitée surprise de ce tournoi. Des trinidadiens d’ailleurs sur leur 31, entraînés par l’un des piliers du football hollandais, le vieux lion des Pays-Bas Leo Beenhakker… et habités par l’âme de l’ancien buteur des « Red Devil », sorte de « George Weah local » sorti (j’imagine spécialement pour l’occasion) de sa préretraite et alors intelligemment repositionné en meneur de jeu, inséparable « jumeau d’Andy Cole » de qui il était la version « Yin » (ou peut-être « Yang » ?) : Dwight Yorke ! « Creux de la vague » disions-nous ? Ce Paraguay était un peu plus poussif c’est vrai… mais ce dernier sera avant tout ici la victime toute trouvée d’une nouvelle biscotte scandinave (la deuxième en deux ans (drôle d’habitude) après l’indigeste petit déjeuner Danemark-Suède déjà servit durant l’Euro 2004). Une espèce de « Krisprolls » un peu sec et trop grillé à mon goût, grossièrement maquillé en match nul contre des anglais au mieux complaisants, au pire complices… un score de parité pour finir, faisant évidemment les affaires des deux « adversaires d’un soir » et empruntant alors à la perfection : les traits sans style ni audace du design tristement prévisible d’un meuble bon marché monté de toute pièce ! Pour terminer un « revers de médaille » aussi, ou alors un mauvais karma, selon certains observateurs qui ne manqueront pas de rappeler la partie également « généreusement jouée sur une jambe » par les nigérians face aux « Guaranies » pour le compte du dernier match de leur groupe en 98… Le Paraguay version 2006 donc, un acte de présence à l’arrière goût d’inachevé, ici un échec collectif, là un rendez-vous manqué avec son public pour l’attaquant du Bayern de Munich Roque Santa Cruz, bombardier déjà croisé plus haut dans nos lignes… Enfin un passage éclair pour notre sélection qui laissera néanmoins dans le ciel d’Asunción : la trace d’une étoile tout sauf filante ! Brillant de mille feux celle-ci et installée depuis, fortement fixée pourrions-nous facilement insister, dans cette « constellation footballistique Rojiblanca » si discrète qu’on la croirait constituée uniquement de quelques étincelles… troisième « Star » incontestée (après Chilavert et Santa Cruz) de ce microcosme qu’est le sport paraguayen, « capitaine courage » de ce naufrage en pleine campagne germanique et pour conclure recordman actuel du nombre de sélections (110 très exactement) sous les couleurs de nos « presque Colchoneros » : Carlos « Colorado » Gamarra !

Tonton « Tata »

« Tonton « Tata » » titrons nous sympathiquement ici ? Tout à fait… Quatre ans plus tard en Afrique du Sud, pour la première Coupe du Monde organisée sur le continent africain, le Paraguay se pointera à la « grande fête du football » avec l’entraîneur argentin Gerardo « Tata » Martino à la tête de l’équipe (on notera ici, à travers ces nominations de sélectionneurs aux provenances aussi diverses que variées, d’un côté une ouverture d’esprit constructive ainsi que la recherche d’une certaine richesse culturelle de la part de la fédération… et de l’autre hélas la triste absence de profils locaux). Édition « Afrique du Sud 2010 » donc : l’album collector du football paraguayen ! En effet, c’est ici, au royaume du rugby et des « Springboks »… que notre paon paraguayen, comme propulsé en pleine saison de parade printanière : proposera sa plus belle roue ! Après un premier tour maîtrisé, terminé en tête d’un groupe plus que prenable comprenant : une Italie éteinte (qui n’avait de l’éclat d’une « championne du monde en titre » que la pâleur de son statut) ; la novice mais assez costaude Slovaquie (comptant entre autres dans son effectif Martin Škrtel et, bien sûr, le magnifique punk napolitain Marek Hamšík) ; et pour conclure les « All Whites » de Nouvelle-Zélande, « Petit Poucet » de la compétition clairement en période d’essai et voisin d’hémisphère sud soufflant sur l’événement un vent, pourquoi pas ici « venu d’ovalie », qui volerait presque la vedette aux airs sifflés par des vuvuzelas paraissant pourtant tout autant invulnérables qu’inépuisables ! Après un premier tour paisible et sans secousse donc… le Paraguay se voit ouvrir les portes de « ses traditionnelles » (au possessif oui) huitièmes de finale, passage critique que les joueurs de Gerardo Martino franchiront enfin, après un plat 0-0 et une séance de penalty appliquée face au Japon (un joli Japon à applaudir, réalisant peut-être ici sa meilleure prestation en Coupe du Monde (avant son « Manga remasterisé » de 2022) et animé par de vrais « Super Saiyan » tel que Keisuke Honda (véritable révélation du tournoi) et Shunsuke Nakamura (qui dans cette rencontre aurait presque pu croiser son ex coéquipier (du temps des beaux jours de la Reggina) Carlos Paredes (ce dernier présent lors des trois précédents « Mundial » avec le Paraguay mais absent lors de celui-ci))… des « Blue Samouraï » (comme on les surnomme) avec aussi Matsui, Inamoto… Nagatomo ou bien encore la « mobylette de Catania » Morimoto)… Quart de finale alors pour le Paraguay, est-il nécessaire de préciser ou de rappeler ici : pour la première fois de son histoire ! Étape méconnue sur la route, que dis-je la route, le parcours du combattant paraguayen… mais prochain obstacle en revanche bien connu de notre intrépide sélection sud-américaine. Effectivement, face à nos guerriers guaranis se dresse de nouveau ici (pour la troisième fois désormais en l’espace de quatre Mondial) : la grande ogresse espagnole ! Grande ogresse oui… Absolument ! En effet, si lors des deux premières oppositions entre les deux pays (98 et 2002), l’Espagne était (comme cité plus haut) : « toujours conquérante mais pas encore impériale »… l’équipe coachée par Del Bosque lors de cette Coupe du Monde en Afrique du Sud était en revanche faite d’un tout autre bois ! Une « Roja » ici avec la couronne continentale sur la tête (championne d’Europe en titre), prochainement intronisée reine de la « Planète Foot » avec sa première étoile décrochée justement à l’issue de ce tournoi… et pour terminer une Espagne « tapie rouge », « maîtresse de cérémonie » et autre « toit du monde », qui enchaînera deux ans plus tard avec un second trophée européen consécutif et s’installera ainsi, pour l’éternité : au Panthéon du sport roi ! Casillas devançant Victor Valdes ou encore Pepe Reina dans les buts… Puyol, Piqué et Sergio Ramos alignés derrière (avec Capdevila, nom moins clinquant je vous l’accorde mais latéral non moins compétent)… Busquets, Xavi et Xabi Alonso au milieu (entre autres, Javi Martinez et Fabregas étaient également disponibles)… pour finir Iniesta un peu plus haut, ce dernier terminant de dessiner, aux côtés de David Villa et de Fernando Torres, le triangle offensif d’un 4-3-3 aux influences clairement catalanes, tracé et figure que l’équipe nationale d’Espagne aura su humblement copier, lui donnant même une dimension follement démesurée, sorte ici de tableau de Salvador Dali audacieusement adapté aux surréalisme du football ! Un schéma, un modèle pour finir, base fiable et moule solide… sur lequel cette « Roja moderne » se sera indubitablement bâtie et formidablement bien calquée, redorant (ou dorant) ainsi ses lettres de noblesse et adoptant alors, comme nouvel emblème ou comme principale carte postale, pourquoi pas ici une bonne vieille carte de visite en guise de fanion : les couleurs vives d’une espèce de « Sagrada Família du football » finement revisitée, fraîchement retapée mais surtout enfin finie ! Vous l’aurez compris, l’Espagne n’est plus en chantier et à l’armada de fourmis rouges citées juste au-dessus viennent s’ajouter d’autres génies du genre et force ouvrière hors-pair : les petites mains (ou plutôt petits pieds) Pedro, Mata… Silva ou Navas par ici… les grands Albiol et Llorente par là… Arbeloa aussi… Avec tout ça bien sûr, des joueurs d’une certaine classe laissés hélas au placard par manque de place sur le pont du galion espagnol : Reyes, Soldado… Negredo ou Dani Güiza devant… le « gentleman » Guti et la légende Raúl (alors encore en jambes) également restés « à la maison blanche » (pour vraiment tirer à leur paroxysme les possibilités d’un Del Bosque qui, de plus, connaissait les deux « merengues » à la perfection)… Senna (champion d’Europe deux ans plus tôt sous le règne d’Aragonés) et Arteta tous deux à leur tour exclus de l’entrejeu de la « Roja »… pour conclure d’autres ailiers (on en a déjà croisé quelques-uns juste au-dessus) dont la formation ibérique a le secret de production (Capel, Cazorla et enfin mon favori : le joli gitan « Joaquin Phoenix » Joaquín)… Face à ça donc, ogresse ou grosse armada peu importe, se hisse de toute sa petitesse (terme utilisé ici uniquement dans le caractère « physique » de sa définition) : notre presque invisible Paraguay ! Petit ? En réalité pas tant que ça… Effectivement, les troupes de « Tata » Martino comptent un élément de taille dans leurs rangs, talent étincelant et grand attaquant du football paraguayen de la décennie 2010 ayant, durant ce tournoi entre autres, carrément relégué Roque Santa Cruz sur le banc : Óscar « Tacuana » (de son surnom (espèce de plante proche du bambou)) Cardozo. La tour de contrôle Cardozo qui pour l’anecdote est, avec plus de 380 buts au compteur en un peu moins de 790 matchs en carrière, le meilleur buteur paraguayen de l’histoire (toutes tuniques confondues (Santa Cruz le devance si l’on considère uniquement les buts inscrits en sélection))… à noter pour conclure, que l’ex canonnier de Benfica (environ 170 « goles » en 290 parties disputées sous les couleurs lisboètes) est à l’heure actuelle toujours en activité du côté du Club Libertad… Un peu de hauteur est prise donc pour la « bande à Tata », avec le mètre 95 d’Óscar Cardozo, de quoi toucher les étoiles du bout des doigts mais aussi, hélas… tout ce qu’il faut pour tomber de haut ! C’est malheureusement ce qui se passera durant ce quart de finale : un rêve fou effleuré avant un réveil violent suivi d’une chute effrénée dans un puit sans fond. Morphée se transforme en affreux monstre tout droit sorti du plus effroyable des cauchemars et le « fantasme des demi-finales » s’effrite, meurt à petit feu et enfin s’effondre chez les « aficionados » paraguayens. « Chute effrénée » disais-je juste ici ? Brutale pourrions-nous surenchérir ! Tout d’abord notre gentil géant Cardozo qui, comme momentanément victime du syndrome « des pieds d’argile », manque un penalty sur le 0-0 (59ème minute)… ensuite Xabi Alonso qui dans la foulée (seulement 3 minutes plus tard) réussi le sien, avant de finalement devoir le retirer et alors : le rater lui aussi… Ici une sorte de sursis accordé comme une grâce aux « Guaranies » par les Dieux du football, du moins jusqu’à la cruelle intervention de « Dame Fortune » la capricieuse qui sortira, de sa manche ou de son chapeau : un incroyable coup de billard en trois bandes (trois poteaux touchés en l’espace de quelques secondes) accouchant d’un but plus que chanceux du chasseur David Villa à la 83ème minute (Pedro frappe sur le poteau, le ballon revient sur son futur (ou plutôt tout frais) coéquipier au Barça qui reprend (difficilement) devant un but laissé vide, le cuir ricochera encore contre les deux montants (droit et gauche) avant d’enfin finir au fond des filets (décidément un sort qui s’acharne au point de s’arracher les cheveux)). Clap de fin des festivités sud-africaines pour nos chétifs sud-américains.Hasta la vistaFin des festivités en effet, notre char, pourquoi pas à l’effigie d’un lion pour l’occasion (« Los Leones » étant curieusement un autre surnom de l’équipe paraguayenne) fini ici son défilé… « roi de la nature » errant l’air hagard (oserai-je ajouter « avec des faux airs de Garrincha »), comme égaré au milieu de cette jungle contemporaine, sorte d’ « Amazonie du football » toujours moins sauvage et chaque jour un peu plus ravagée par les flammes artificielles ou les « billets-bulldozers » d’investissements financiers dénaturant sans cesse ce sport. Un an après cette « petite apogée sportive du pays » partagée en direct de Pretoria… le Paraguay portera une nouvelle fois (une dernière fois pour le moment) bien haut le drapeau de sa nation. Lors de la « Copa America » de 2011 effectivement (organisée celle-ci par l’Argentine pour être parfaitement précis), les joueurs d’un « Tata » Martino toujours en poste atteindront carrément la finale de la compétition ! Ultime marche (au « Frigider » de River (comprenez au stade « Monumental »)) sur laquelle l’ « Albirroja » s’inclinera sans conteste, clairement éclipsée (3-0) par une Uruguay tout aussi solaire que céleste à cette époque (l’équipe du « maître d’école » Oscar Washington Tabárez venait de terminer demi-finaliste surprise en Afrique du Sud (une classe d’exception entraînée aussi par le dynamisme et les bonnes notes de quelques élèves surdoués : le célèbre duo indéboulonnable Cavani-Suárez bien sûr, mais surtout un Diego Forlán formidable, indéfinissable au possible et auteur de performances autant dingues que phénoménales)). Dernier détour ou rapide crochet, avant de définitivement refermer la parenthèse dédiée à cette « Copa America » de 2011 , avec ici deux anecdotes, deux informations insolites au sujet de cette édition : premièrement les épisodes déroutants de cette dernière, dans lesquels des prétendants parfaitement imprévisibles se sont présentés, complètement à l’improviste, dans le dernier carré (le Venezuela et le Pérou) pendant que les deux mastodontes (le Brésil et l’Argentine évidemment) désertaient le tournoi dès le stade précoce des quarts de finale (la « Seleçao » sera d’ailleurs sortie par notre hôte du jour)… et dans un second temps (trait d’union idéal) le parcours indéniablement particulier (c’est le moins que l’on puisse dire) de notre personnage principal, nos « Guaranies » adorés (le Paraguay se pointera ici à la finale en tant qu’équipe invaincue mais n’ayant en parallèle, pas non plus gagné le moindre match (6 scores de parités (dont 2 contre le Brésil (une première confrontation en phase de poule avant un remake en quart comme précisé plus haut)) pour 6 parties disputées au total (les paraguayens ont d’ailleurs passé le premier tour par la petite porte des « deux meilleurs troisièmes » (pratiquement un repêchage))))… C’était le Paraguay « fin Nineties-début 2000 », au risque de me répéter oui… Un Paraguay si familier des confrontations avec l’Espagne qu’il mériterait amplement une apparition dans ma série « match à part » aux côtés de « Colombie-Roumanie » et « Nigeria-Bulgarie »… Un Paraguay aussi, au même titre que ma Tunisie et sa « couche de Zit-Zitoun » étalée sur la peau, qui porte sur ses petites épaules les espoirs de tout un peuple, plus qu’une simple ressemblance frappante, pourquoi pas ici un croisement de races parfait pour l’obtention d’un curieux et improbable « aigle de Carthage des Andes » ! Drôle d’oiseau vous en conviendrez… Un Paraguay pour finir, un peu trop proche des propriétés de transparence de mon Piacenza ou encore de mon La Corogne, espèces en voie de disparition, répertoriées au « patrimoine immatériel du sport pure » et à alors impérativement préserver ! C’était l’âge d’or, la période dorée d’un des derniers diamants bruts sud-américains… denrée rare d’un Eldorado dangereusement divulgué et condor fantasmé d’une « cordillère du football » devenant de plus en plus floue et s’effaçant hélas: dans le fond d’un panorama répondant pourtant au nom d’œuvre d’art.

8 réflexions sur « Paraguay, parade Guarani »

  1. Hello Calcio, tu fais bien de surnommer Chila « El Chat » pour le différencier d’« El Gato », Roberto Fernández, son prédécesseur pendant 10 ans sous le maillot de l’Albirroja.
    En 1998, Chila avait réussi à convaincre ses équipiers qu’ils pouvaient mener le Paraguay au titre. Ils s’étaient préparé du côté de Montpellier, le maire d’alors, Georges Frèche avait reçu la délégation guarani à l’hôtel de ville et avait remis à chacun une médaille de la Vierge.
    Chila l’avait avec lui pendant les matchs de la CM. Quand Blanc l’avait crucifié, il était resté au sol quelques secondes, très brèves, s’était relevé et avait embrassé la Vierge. Puis il s’était dirigé vers ses défenseurs effondrés et les avait relevés un à un. Ce jour-là, il avait été immense à tout point de vue et avait fait oublier toutes les saloperies dont il était capable par ailleurs.

    1
    0
  2. Oui ce jour-là Chilavert a vraiment marqué les esprits et est devenu carrément culte, je dirais que c’est à partir d’ici d’ailleurs que tous le monde (le grand public) a su (et sait toujours) qui était Chilavert.
    PS: et puis ce soleil, cette lumière et ces couleurs pour enrober le suspense… ce match était magnifique dans le fo’d comme dans la forme.

    0
    0
  3. Tension extrême, chaleur de plomb, ce 1/8 de finale a dû être irrespirable, jusqu’à ce que la lumière vienne de Laurent Blanc. L’action est superbe d’ailleurs: (énième) débordement de Pirès, pour Trezeguet (ça rappelle France-Italie 2000 !) qui la remet avec altruisme au Président.

    1
    0
    1. Je n’ai pas vu tous les matchs des Bleus pendant cette Coupe du Monde, j’ai par exemple raté celui face à la Croatie, mais je me souviens bien du silence qui régnait dans le quartier lors du match face au Paraguay jusqu’à l’explosion du but de Blanc.
      Blanc a d’ailleurs marqué à chacune des compétitions internationales, de l’Euro 96 à l’Euro 2000.

      1
      0
  4. Le Paraguay avait réalisé des brillantes qualifications pour le Mondial 98. J’étais au Stadium lors de leur victoire face au Nigeria. Benitez de l’Espanyol avait mis une superbe frappe. Avec mon frangin, nous espérions que le Nigeria gagne pour que l’Espagne se qualifie mais il n’y pas eu de suspense.

    0
    0

Laisser un commentaire