Diego Godín, El Sicario

Officiellement, Diego Godín vient de raccrocher. Mais sa carrière en club a pris fin durant l’été 2019, quand l’Atlético l’a expédié à l’Inter. Dès l’automne, Godín s’est retrouvé sur le banc, anonyme à côté de Lazaro, Padelli et quelques autres sous-fifres.

Yeux cernés, joues creuses, teint gris, il a longtemps ressemblé à un tueur fiévreux, ceux décrits par Ricardo Piglia dans « Argent brûlé », des fuyards hallucinés, souffreteux et drogués, retranchés et engagés dans une résistance sans issue dans un barrio de Montevideo.

Avant de se perdre à Milan, il était l’incontestable chef d’une bande de bagnards en pyjamas rayés rouge et blanc, suivi aveuglément par Juanfran, son frère à la vie, à la mort, et ses complices, les Pink Panthers Savić et Vrsaljko. Et puis il y avait Giménez, belle gueule, élève doué, déjà vicieux, successeur désigné à Madrid et au pays. El Cholo, chef de clan, avait fait de Godín son capo chargé des basses œuvres, l’avait exploité jusqu’à l’épuisement dans un club fait pour lui, un club de besogneux.

Qu’est-il allé faire à l’Inter ? Il y paraissait effacé, fugitif sans repères dans une ville qui n’était pas la sienne, froide et lisse. Škriniar, De Vrij, D’Ambrosio, délinquants en costume, propres sur eux, cheveux soignés, pouvaient-ils accepter ce desperado sans fards au regard vide, portant si mal l’habit nerazzurro ? Qu’en pensait Conte, parrain de l’altière Internazionale ? Se souvenait-il de 2010 et de Walter Samuel, sa tête d’équarrisseur toxico et tout ce que l’Inter triomphante de Mourinho lui devait ? Pensait-il à faire appel à Godín, sicario égaré, quand les combats de fin de saison exigent le sacrifice des hommes ? Il s’en était fallu de peu pour que Godín offre une Europa League à l’Inter, buteur dans une finale perdue contre le spécialiste de l’épreuve, le Séville FC qu’il avait si souvent martyrisé en Liga.

La suite est sans relief. On espérait qu’il raccroche avant le braquage de trop, tout en se disant qu’il était comme ces truands burinés par la vie incapables de passer à autre chose. Il a fallu qu’il fasse encore une pige à Vélez, dans un environnement familier, un club à son image, où la sueur et la garra sont depuis toujours les principales vertus. Où les hommes de sa trempe sont fréquentables et admirés. Où il peut se ranger des voitures, en paix avec lui-même. Chao campeón!

28 réflexions sur « Diego Godín, El Sicario »

  1. De toute façon ses dernieres années sont anecdotiques, en Serie A, sa pige au Brésil, et pour finir dans une situation catastrophique à Vélez Sarsfield.
    Son meilleir fut donc à l’Atlético avec le Cholo une decennie presque et parmi les plus belles pages des colchoneros, et évidemment le patron de la Celeste.

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  2. Godin, c’est l’ouverture du score en finale 2014. J’etais avec un vieux copain colchonero et on attendait patiemment le coup de sifflet final. Et là, je lui rappelle que l’Atletico menait également 40 ans plus tôt, avant que le Bayern n’égalise à la toute fin. Putain, tête de Ramos… Dépités. Godin est le joueur central de la période Simeone.

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      1. Haha. En mode Cassandre, je te raconterai un jour comment j’ai annoncé la mort de Senna, le matin de l’accident, pour emmerder mon frère qui en était fan.

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      2. Zéro intérêt pour la F1, Senna encore moins.. Normalement je ne me rappelle jamais de ce que je faisais quand machin-chose est décédé.. sauf que lui, curieusement : ça je m’en rappelle très exactement (retour de France en Eurobus..et je ne comprenais/partageais absolument rien de la consternation de tous les gens autour de moi, « Senna est mort, c’est terrible »..et moi qui à la fin faisais « Olala, pppfffffffffffff »…………)……… Ton frère m’aurait haï! 🙂

        Ton pouvoir (prescience des plus involontaires, si je comprends bien) semble redoutable, sinon, bbrrrr…

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      3. J’etais pas allé chercher loin. Un pilote était mort pendant les essais. Mon frangin avait 11 ans. Moi, deux de plus. On s’est engueulé mais on n’a pas vu le grand prix. On avait foot cette après-midi là. On a appris la nouvelle à notre retour et on en a pleuré…

        Sinon, suis pas spécialiste, mais Spa était considéré comme le meilleur circuit il me semble…

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      4. Spa, plus beau circuit du monde? C’est peut-être bien vrai, je peux pas juger..mais on entend tellement ça jusqu’à la nausée dans ma région, pouilloullouille.. « plus belle région du monde » aussi, tu vois le genre..

        Déjà été au Nurburgring, vraiment tout près de la frontière. Plus tout-à-fait le même circuit (Spa non plus), mais même genre de décor. Et là-bas la moindre route semble taillée pour la vitesse, j’adore ce coin d’Europe.. Peut-être les pilotes sont-ils sincères envers Spa, mais pour moi qui suis du coin : ça a fini par me saouler, Liégeois = chauvins, vivent fort dans le passé.. Œuvrer un peu plus au futur y ferait du bien.

        Le pilote tué en essais, c’était Ratzinger, ou? Un jeune Autrichien.

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      5. Oui, c’était Ratzinger. Pour Spa, faut demander à Alpha qui est un fan de Formule 1.

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      6. Le weekend d’Imola 94 avec les morts de Ratzenberger le samedi aux essais puis de Senna le dimanche en course (et le très gros accident, heureusement sans conséquences, de Barrichello le vendredi) reste le plus marquant de l’histoire de la Formule 1, de par son impact historique.

        Sinon je rejoins Alex sur Senna, mais pas pour les mêmes raisons. J’ai un immense amour pour le sport mais la figure de Senna me laisse plus qu’indifférente, quand ce n’est pas carrément qu’elle me répugne. Si son talent naturel et sa pointe de vitesse ne peut être niée, sa dangerosité extrême et surtout le pataquès sur sa légende, au point que quiconque osant ne pas pleurer cet être, devenu quasi-parfait et christique selon ses groupies, est antagonisé, me dégoute au plus haut point.

        A propos du circuit de Spa-Francorchamps, si il est difficile de dire lequel est le meilleur de manière incontestable, il ne fait aucun doute que c’est l’un des circuits les plus légendaires et offrant généralement les meilleures courses tout les ans.

        Et puisque personne ne m’a demandé de le faire, les trois plus grands circuits automobiles de l’histoire selon moi :

        1) Nürburgring et particulièrement sa légendaire Nordschleife (boucle nord), surnommée « L’Enfer Vert » par l’immense Jackie Stewart.
        2) Spa-Francorchamps
        3) Monza, la ferveur des tifosi, un monument du sport comme il y’en a peu.

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      7. Par contre, la meilleure région en parlant de Spa…

        Je ne parle qu’en tant que fan de F1 mais bordel, qu’on soit en décembre, en mars ou en août, il pleut toujours dans ces foutues Ardennes belges !

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      8. Je prends sur Senna!, mon avis personnel (intuitif) ne vaut vraiment rien, suis un formulix.

        Plus beau circuit? Formulix mais je le connais bien : déjà conduit dessus (quand c’était encore un circuit semi-ouvert, il y a bien longtemps : on escaladait alors le Raidillon – c’était poussif en Ford Fiesta.. – pour aller de Spa à Malmedy), rapide, caractère de toboggan, des courbes mythiques.. J’y ai même travaillé!, distribuer des programmes de course à des hordes barbares, vraiment un job à la con.. mais en rien intéressé, bref?? J’ai vu Monza aussi, passé 2 nuits dans son camping, le long de la grande ligne droite.. : Francorchamps a un cachet incomparable à côté de Monza! Et le Hungaroring aussi, habité 6 mois durant dans le village à côté!!! (j’en retiens le paysage de collines pelées..et les centaines de pauvres filles prostituées pour le Grand Prix, sordide)

        Plus belle région? A l’échelle de l’Europe continentale du Nord (je suis précis à dessein! 😉 ), elle est vraiment belle. En Laponie, je me suis jadis demandé pourquoi avoir claqué autant de fric alors que, la frontière belgo-teutonne sous la neige.. Pas renversant mais vraiment charmant (et très mal géré)…..mais « plus belle région » est complètement déconné évidemment!!!, et pourtant qu’est-ce qu’on peut entendre ce couplet à la con dans le coin, ppffffffff….. Tu n’imagines pas, c’est d’un pénible..

        Bon côté des choses : on ne peut reprocher aux Liégeois de ne pas aimer leur coin du monde! Le mauvais : ils manquent « parfois » d’un « chouia » de sens de la mesure, lol.. « Gascons du Nord » en disait Hugo, pas faux.

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      9. Et, oui : il pleut..très souvent……. Ca fait de beaux torrents, cascades..mais c’est aussi pour ça que je préfère aller sur le versant allemand de la région, côté Nurburgring : (relativement) plus sec..et beaucoup mieux géré!!!

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      10. J’ai lu quelque part que Spa est le circuit préféré des pilotes depuis sa rénovation dans les années 1980. Pour les fans, il y a des scènes de course de premier ordre sur l’ancien Spa (et sur d’autres circuits, en particulier la séquence d’ouverture à Monaco et le dénouement à Monza) dans « Grand Prix » de John Frankenheimer.

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      11. J’étais pré-ado quand j’ai vu en direct l’accident de Lauda en 1976, et je n’avais pas vraiment tout compris sur le moment. À revoir les images plus tard, on se demande comment avoir osé laisser courir des F1 si longtemps sur ce tracé, sans échappatoire et sans accès facile par les secours…

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      12. Zolder fut un fameux nid à problèmes aussi. J’ai été marqué à vie par le départ de 81, horrible..

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  3. Punaise, tu parles que vous tournez à un rythme de publications au ralenti en été, lol..

    Mais vous faites bien, bel hommage. Le genre de joueurs que j’aurais adoré avoir chez les Diables durant ces 10 dernières années, que nous eûmes jadis..mais que l’Uruguay parvient encore à produire, lui – et tant mieux pour eux pardi.

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    1. Et si tu ne l’as pas déjà lu (encore faut-il aimer les romans noirs), Argent brûlé de Piglia est une merveille. Traduction d’une époque, un livre dur, sans concession et sans espoir.

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      1. Jamais lu, jamais même entendu! On a souvent le même genre de goûts, je note, merci!

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    1. J’en ai revu une il y a une semaine, Edwin VandenBergh, 1981.

      + d’autres il y a déjà un petit temps, années 60, 70.. Y avait un joueur illustre dans le tas, ça me reviendra.

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  4. Je n’imagine même pas lorsqu’il était à son top, la plaie que c’était que de devoir se le coltiner lorsqu’on était attaquant. Son but du dos face à l’Italie en 2014 étant d’ailleurs un bien beau symbole de persévérance.

    Godin, Suarez, Cavani, Muslera, Caceres… La fin d’une génération de titans pour l’Uruguay, j’ai hâte de voir s’ils arriveront à gérer l’après sans trop de dégâts.

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  5. Grande Verano !
    Recyclage d’un vieux commentaire peut-être mais bien plus que simplement bidouillé comme tu dis…
    Ici on pourrait presque dire que: c’est dans les vieux « post » qu’on fait les meilleures confitures !
    PS: Après l’Inter, Cagliari aura aussi constitué une étape supplémentaire sur le chemin d’errance, pour ne pas dire « de déchéance », qu’aura hélas représenté sa fin de carrière…

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