Ils ont fait la légende des compétitions internationales. Ils ont déchaîné les passions et déchiré les familles. Ils ont rythmé les règnes et ponctué les changements d’époque. Régulièrement, P2F évoque pour vous l’un des grands duels à répétition de l’histoire du football. Aujourd’hui, revenons sur les Tchécoslovaquie – Brésil du passé, des duels au parfum de naphtaline impliquant une nation disparue au riche passé. En trois Coupes du monde, ce duel a eu lieu cinq fois, les deux équipes s’étant affrontées à deux reprises lors des éditions 1938 et 1962.
Dans le premier article, nous nous sommes quittés en 1939, quand les pays limitrophes de la Tchécoslovaquie s’emparent de son territoire, l’Etat d’Europe centrale ne subsistant qu’à travers le gouvernement provisoire en exil d’Edvard Beneš. Le pays se reforme au printemps 1945, libéré à l’Est par l’Armée rouge, aidée de troupes roumaines et d’unités tchécoslovaques composées de nationaux réfugiés, à l’Ouest par la 3e armée du Général Patton. Les luttes d’influence et les soubresauts politiques se poursuivent jusqu’en 1948 et le Coup de Prague. L’éphémère Troisième République s’efface alors au profit d’une République socialiste dont la mise en orbite de la sphère soviétique ne tarde pas.
Quand le Brésil entreprend une grande tournée européenne en avril 1956, il se rend à Prague sans parvenir à triompher de son hôte (0-0). En août de la même année, la Tchécoslovaquie s’impose 1-0 au Maracanã et si elle s’incline lourdement (4-1) au Pacaembu trois jours plus tard, ses résultats et le leadership technique de Josef Masopust accréditent l’impression qu’elle évolue dans la même cour que le Brésil. Mais six ans plus tard, quand le tirage au sort de la phase finale de Coupe du monde 1962 exige des retrouvailles, la Tchécoslovaquie semble à la traîne d’une Seleção championne du monde en titre et dotée de l’arme fatale en la personne de Pelé. D’ailleurs, malgré une troisième place à l’Euro 1960, sa qualification tient du miracle. Contrainte à un match d’appui sur terrain neutre face à l’Ecosse, elle ne doit son salut qu’à une égalisation tardive d’Adolf Scherer et d’âpres prolongations au cours desquelles elle finit par faire la différence. La phase préparatoire ne rassure en rien les observateurs, le stage en Italie étant jalonné de défaites face à des clubs locaux de Serie B. Preuve du pessimisme régnant à Prague, la délégation se limite à 19 joueurs alors que 22 sont éligibles pour l’épreuve mondiale[1].
Drame et chevalerie à Viña del Mar
Préservé des terrifiantes conséquences du tremblement de terre de 1960, le coquet stade Sausalito de Viña del Mar se pare de ses plus beaux atours pour accueillir le Brésil, la Tchécoslovaquie, le Mexique et l’Espagne, un outsider pouvant compter sur Suárez, Del Sol, Gento et ses cracks naturalisés, Di Stéfano, Puskás, Santamaría. En toute logique, le Brésil, tête de série, et l’Espagne doivent se classer aux deux premières places offrant un sésame pour les quarts de finale.
Avec une ossature très proche de l’équipe sacrée en 1958, la Seleção écarte le Mexique (2-0) en ouverture de la compétition après avoir longtemps buté sur Antonio Carbajal dont c’est la quatrième participation à la Coupe du monde[2]. Attendu comme le Messie, Pelé ne se défile pas et satisfait les attentes de la dizaine de milliers de pèlerins se réchauffant au contact de sa présence magnétique, bien plus irradiante que le soleil de l’hiver austral. Passeur décisif pour la tête de Zagallo sur l’ouverture du score, il se lance ensuite dans un numéro de soliste au cours duquel il élimine six adversaires avant de conclure sa chevauchée d’une frappe tendue fatale à La Tota Carbajal.
Le lendemain, sous la pluie, la Tchécoslovaquie crée la surprise face à l’armada espagnole privée au dernier moment de Di Stéfano dont les vieilles jambes n’ont pas supporté la préparation physique démente exigée par Helenio Herrera, assistant du sélectionneur Pablo Hernández Coronado le temps de la Coupe du monde. La stérilité et la naïveté de la Roja – dont les attaquants sautent à pieds joints dans le piège du hors-jeu – tranchent avec le réalisme des joueurs d’Europe centrale parmi lesquels émergent Ján Popluhár et le gardien Viliam Schrojf. En fin de rencontre, Jozef Štibrányi trompe Carmelo Cedrún et offre un précieux succès aux siens, 1-0.
Le second match de poule met aux prises Brésiliens et Tchécoslovaques. Aymoré Moreira et Rudolf Vytlačil reconduisent les mêmes effectifs et les mêmes dispositifs, des 4-3-3 modulables en 4-2-4 en phase offensive. Eclairés par un soleil rasant, les Brésiliens dirigent les débats et se procurent plusieurs occasions dont une tentative de Garrincha que Schrojf repousse péniblement sur un de ses montants. A la 28e minute de jeu, le poteau sauve à nouveau le Chat noir du Slovan Bratislava sur un tir lointain de Pelé. Ce qui aurait dû être une péripétie vite oubliée, un fait de jeu parmi tant d’autres, se transforme en drame : sur la frappe, les tissus musculaires de l’aine du numéro 10 brésilien se sont déchirés. Durant plusieurs minutes, le massagista de la Seleção Mário Américo applique sur les chairs meurtries de mystérieux onguents extraits de ses sacoches en cuir. En vain, Pelé souffre trop et faute d’autorisation de remplacement, il s’exile sur l’aile et limite sa contribution au strict minimum. Confronté à un adversaire diminué, Josef Masopust refuse de défendre sur Pelé quand le ballon lui parvient. La noblesse du geste du meneur du Dukla Prague fait oublier la chute d’intensité de la rencontre, les deux équipes se satisfaisant d’un score de parité vierge de buts et remettant à plus tard la qualification pour les quarts de finale. Au coup de sifflet final, Pelé et Masopust quittent la pelouse bras dessus, bras dessous, le premier qualifiant le second de Chevalier du football.
Le Brésil bicampeão
Respectivement premiers et seconds de leur poule[3], Brésiliens et Tchécoslovaques empruntent des trajectoires distinctes mais convergentes vers le même objectif, le Nacional de Santiago, théâtre de la finale. En misant sur sa défense, la Tchécoslovaquie se débarrasse des autres républiques socialistes, celle populaire de Hongrie et celle fédérative de Yougoslavie, alors que la Seleção écarte l’Angleterre puis l’hôte chilien. Durant ce match contre la Roja sudaméricaine, la prestation de Garrincha touche au sublime et dans les pages d’El Mercurio, un chroniqueur chilien résume la tactique adoptée par Moreira d’une phrase : « il suffit de donner le ballon à Garrincha. » Plus loin, il s’interroge : « de quelle planète vient Garrincha ? » L’étincelant succès brésilien est terni par la fin de rencontre, Mané étant expulsé par l’arbitre péruvien Arturo Yamasaki après un geste d’humeur sur son adversaire direct, auteur de la faute de trop.
En toute urgence, le lobby brésilien se mobilise auprès de la FIFA afin de préserver Garrincha d’une suspension qui le priverait de finale et qui serait un second drame après le forfait définitif de Pelé. En comparaison, la blessure musculaire et l’absence de l’arrière droit tchécoslovaque Jan Lála paraissent anecdotiques. Mais alors qu’il dispose d’un latéral de métier en la personne de Jozef Bomba, Vytlačil remplace Lála par Jiří Tichý, le stoppeur du Slovnaft Bratislava (le futur Inter Bratislava). Parfait dans sa gestion des hommes depuis le début de la compétition, Vytlačil vient de commettre sa première erreur.
Comme s’il s’agissait de redorer l’éclat d’une Coupe du monde peu spectaculaire et violente, le soleil inonde de lumière le Nacional. Epargné par la commission de discipline, Mané est bien présent mais traverse la finale comme une ombre, affaibli par un état grippal. Après un quart d’heure de jeu de bataille tactique au milieu de terrain, Masopust bénéficie d’une offrande au cœur de la défense auriverde et trompe Gilmar. Durant deux minutes, les Tchécoslovaques sont en position d’être champions du monde. Deux minutes seulement car le Brésil identifie rapidement la faille dans la forteresse tchécoslovaque : Jiří Tichý. Mal positionné, désespérément lent, le Slovaque se fait surprendre une première fois par Amarildo : le remplaçant de Pelé s’infiltre en souplesse entre des piquets vêtus de blancs et trompe Schrojf, coupable d’avoir anticipé un centre.
En seconde période, alors que Européens imposent un rythme de sénateur, Amarildo réveille le public chilien en échappant à nouveau au marquage de Tichý. Revenu à grand peine, le défenseur se fait crocheter et ne peut qu’observer le centre pour la tête de Zito libre de tout marquage (2-1, photo d’en-tête sur laquelle il exulte). Le suspense disparaît définitivement sur deux coups du sort. L’arbitre soviétique Nikolaï Latychev refuse d’abord de désigner le point de pénalty quand Djalma Santos détourne de la main un centre de Josef Jelínek. Puis, sur une balle en cloche de ce même Djalma Santos, aveuglé par le soleil malgré le port d’une casquette, Viliam Schrojf relâche le ballon dans les pieds de Vavá à l’affût (3-1, score final). Considéré par de nombreux reporters comme le meilleur gardien de la compétition, le malheur vient de s’abattre sur le Chat noir dont le prestige n’égalera jamais celui du Chat de Prague Plánička, finaliste de la Coupe du monde 1934.
Après le championnat du monde de basket 1959[4], la ceinture mondiale du boxeur Eder Jofre ou la Palme d’or cannoise d’O Pagador de Promessas d’Anselmo Duarte, ce second sacre de la Canarinha confirme le rayonnement sportif et culturel du Brésil alors que la démocratie est aux abois, sous la pression des militaires et des ingérences étrangères. Jouissant d’une popularité inégalable, Garrincha sert d’alibi au pouvoir confronté aux pénuries alimentaires, exhibé comme une idole païenne permettant au président de la République Jango Goulart de se soustraire à la contestation.
A Prague, la satisfaction d’avoir déjoué les pronostics l’emporte sur la déception d’une seconde finale mondiale perdue. La foule se rend en nombre au Strahovský stadion pour y acclamer ses héros. La Tchécoslovaquie glane malgré tout un trophée à la fin de l’année 1962, Josef Masopust soufflant le Ballon d’Or à Eusébio[5].
Epilogue
De 1962 à sa dissolution, le 31 décembre 1992, la Tchécoslovaquie affronte à neuf reprises le Brésil et ne s’impose qu’une fois, en juin 1968 à Bratislava. Sous les yeux de Leônidas, reconverti en radioreporter après avoir été le héros des duels de 1938, Jozef Adamec illumine le Tehelné pole en réalisant un hat trick (victoire 3-2). Le dernier duel en Coupe du monde a lieu le 3 juin 1970 à Guadalajara en match de poule. Ce jour-là, Pelé inaugure le concept du « but qu’il n’a pas marqué »[6] en décochant une frappe du milieu de terrain, le ballon échouant à quelques centimètres du gardien tchèque Ivo Viktor. De ce geste génial, notre rédacteur Bobbyschanno a produit un remarquable article que je vous invite à lire ou relire avec gourmandise en guise de conclusion de cette série sur les duels entre le Brésil et la Tchécoslovaquie.
Feuilles de match
2 juin 1962, stade Sausalito de Viña del Mar
Brésil – Tchécoslovaquie : 0-0
Arbitre : Pierre Schwinte
Brésil : Gilmar – Djalma Santos, Mauro Ramos, Zózimo, Nilton Santos – Zito, Didi – Garrincha, Vavá, Pelé, Zagallo.
Tchécoslovaquie : Schrojf – Lalá, Popluhar, Pluskal, Novák – Štibrányi, Masopust – Adamec, Kvašňák, Scherer, Jelinek.
17 juin 1962, stade Nacional de Santiago de Chile
Brésil – Tchécoslovaquie : 3-1, Masopust (15e), Amarildo (17e), Zito (69e), Vavá (78e)
Arbitre : Nikolaï Latychev
Brésil : Gilmar – Djalma Santos, Mauro Ramos, Zózimo, Nilton Santos – Zito, Didi – Garrincha, Vavá, Amarildo, Zagallo.
Tchécoslovaquie : Schrojf – Tichý, Popluhar, Pluskal, Novák – Masopust, Kvašňák – Pospíchal, Kadraba, Scherer, Jelínek.
[1] En cours de compétition, avec les bons résultats, trois joueurs supplémentaires rejoignent l’effectif tchécoslovaque.
[2] De 1950 à 1966, il dispute cinq Coupes du monde et détient seul très longtemps le record avant que Matthäus puis d’autres n’égalent sa performance.
[3] La victoire 2-1 du Brésil face à l’Espagne qualifie la Tchécoslovaquie, défaite 3-1 par le Mexique.
[4] Sacré en 1959, le Brésil réalise le doublé en 1963.
[5] Le Ballon d’Or n’est encore décerné qu’à des Européens.
[6] Outre cette frappe, la tête détournée par Banks (Brésil – Angleterre) et le grand pont sur Mazurkiewicz (Brésil – Uruguay) sont deux actions de Pelé entrées dans l’histoire de cette Coupe du monde sans qu’elles ne soient associées à des buts.
Pourquoi Adamec ne disputa-t-il pas la finale? Indisposé? Choix tactique? C’était déjà l’un des plus grands atouts du football tchécoslovaque.
Kvasnak est un nom devenu..inconnu en Belgique, pas faute pourtant qu’il fut encore très bon durant les trois saisons qu’il y livra pour le Racing (ne pas confondre avec le KV!) Malines.. Rien moins que le « joueur du siècle » du Sparta Prague pourtant, c’est énorme..mais tombé dans l’oubli, et pas qu’en Belgique a priori.
Autre finaliste : Masopust l’avait précédé de peu au plat pays. De tête, voilà je crois qui furent « nos » deux premiers finalistes de coupe du monde. Assez curieusement d’ailleurs, bonne demi-dizaine de joueurs qui s’étaient illustrés durant cette WC62 aboutirent ensuite en Belgique.
Verano, j’aurais aimé que ça ne s’arrête pas si tôt..
Alexandre , toi qui est le pape du football néerlandais
J ai une question pour toi
Aujourd’hui neeskens ( joueur pour le moins innovant le premier box to box ) est décédé , bon nombre de ses coéquipiers en équipe nationale ou à l’ajax sont aussi partis trop tôt
Un peu à l image des cyclistes de cette époque
Y avait il une culture du dopage pour expliquer cela ?
Je ne suis le pape de rien du tout!
Mais premier box-to-box, non, c’est le roman ajacide qui entend cela : football total, 4-3-3, hors-jeu..toute cette bouillabaisse d’appropriations culturelles, qui en fait fut un cache-sexe, car..culture du dopage à Ajax, dis-tu?
Eh bien c’est le moins qu’on puisse dire..et il est prévu d’en parler un jour, article déjà sorti sous d’autres latitudes il y a près de vingt ans ; je vais le ressortir un de ces 4 😉
Et il est prévu aussi de régler son cas, dans 13 mois, à l’arnaque Michels.
Surtout : sois le bienvenu parmi nous!
NB : Le mois prochain, je dirai plein de trucs positifs sur plein de joueurs NL qui le valaient bien, faut pas croire 😉
Je vais me coucher mais, en fait de box-to-box l’ayant précédé, je pense qu’un Masopust, puisqu’on l’évoque, avait 2-3 trucs à expliquer à Neeskens par exemple.
Ou alors, plus récent quoique toujours antérieur (et supérieur!) à Neeskens : mon cher Billy Bremner, lui c’est indiscutable..par exemple!, il y en avait déjà un paquet en fait, un Van Moer en Belgique notamment.. Lui aussi était un bien meilleur footballeur, plus accompli. Et d’un registre box-to-box absolument moderne.
Je me permets de pinailler sur l’affirmation concernant le cyclisme. Dans les années 70, le dopage était bien moins prégnant que dans le foot (NL ou autre peu importe) même si Merckx a été suspendu pour dopage début 70’s. L’agonie de Tom Simpson sur le Ventoux a traumatisé tout le monde mais en fait peu de grands noms de l’époque sont décédés jeune de raison médicale, rien de statistiquement alarmant en tout cas. Criquelion et Fignon décèdent avant 60 ans. Le cas du français est plus suspect, il a reconnu s’être dopé mais niait tout lien avec l’apparition de son cancer avant de mourir.
Agostinho est mort d’un accident en course. Ocana est mort jeune mais d’un suicide (il était malade incurable mais suite à des accidents graves, probablement rien à voir des produits éventuellement ingérés plus jeune), Gimondi est mort à 76 ans d’un arrêt cardiaque. Les autres grands noms de l’époque sont encore vie: De Vlaeminck, Moser, Saronni, Hinault, Thévenet, Kuiper, Zoetemelk, Maertens, Janssen, Aimar, Martinez (le grand-père), … et sont tous largement septuagénaires voire plus.
Le dopage 70’s était relativement basique mais on reste sur du basique, des amphets, des infiltrations (pas interdit à l’époque). Un héritage des années 50 où Coppi fut l’un des premiers à reconnaitre en avoir pris. Coppi justement meurt jeune jeune mais des suites d’une malaria contractée en Afrique, pas forcément ce qu’il prenait coureur. Géminiani qui l’accompagnait et l’a contracté aussi, a survécu et a ensuite atteint les 100 ans. Koblet et Ockers décèdent accidentellement. Bobet et Anquetil meurent relativement jeune. Le doute est possible (en même temps Anquetil fumait et buvait) mais ce sont des exceptions. Kubler et Bahamontes meurent quasi centenaire également, Poulidor a vécu 83 ans. La plupart sont dans une fourchette d’espérance de vie moyenne. Van Looy est toujours vivant à 90 ans.
L’ère du dopage lourd (EPO, transfusions) commence vraiment dans les années 90 et « curieusement » hormis Pantani mort de dépression et d’overdose et quelques accidentés (Rebellin… dans les jours qui ont suivi sa retraite), tous sont encore en vie, quinquagénaires pour la plupart.
C’est paradoxal, alors que ce cyclisme des années 90-00 a été (à juste titre) stigmatisé et présenté comme la discipline la plus pourrie par le dopage, le bilan humain est finalement bien moins lourd à ce jour que chez les footballers du même âge, notamment ceux passés par la serie A à la même époque (Vialli, Mihajlovic, Schilaci, Brehme… série en cours).
@Sacha, une explication est probablement à chercher du côté de la nature des efforts propres, d’une part à ce cyclisme-là, et de l’autre à ce football post-moderne qui co-apparaît dans la seconde moitié des 60’s à Ajax, à savoir : un football fondé désormais sur la multiplication (parfois à mort, littéralement) des efforts de haute-intensité.
Contrairement à ce que d’influents (et, pour d’aucuns, corrompus) faiseurs d’opinion affirmèrent alors et reprirent en choeur ensuite, il n’y eut absolument rien d’inédit dans cet Ajax d’un point de vue culturel : le concept de foot-total avait été essayé à peu près partout (dont avec succès!) depuis des décennies.. Michels (en rien un penseur du jeu) garda longtemps dizaine d’années de retard sur le 4-3-3, qu’il adopta d’ailleurs contre sa volonté, en pompant Happel ; lui restait accroché comme une moule de Zélande au 4-2-4 voire au WM.. Hors-jeu, gardien-volant : je vais y revenir dans un article mais puis déjà renvoyer, par exemple, à mes papiers sur les années trudonnaires de Goethals..
Etc etc etc………. ==> Sur tous ces aspects où fut prêté à cet Ajax-là d’avoir bouleversé les paradigmes, révolutionné le jeu : il n’y a que du bullshit, c’est bidon de A à Z.
Mais l’intensité physique, ça……………………….. ==> Elle est là (et nulle part ailleurs), la révolution ajacide! Et le reste, tout le reste (révolution ajacide, ce tissu de conneries) : cache-sexe.
A bien des égards Ajax fut une réponse du Nord-Ouest européen à ce qu’avait abouti une clique de pourris à l’Inter la décennie précédente..mais en allant un pont plus loin (et ce dans tous les domaines d’ailleurs – nonobstant le mantra habituel, libertarisme amstellodamois etc., l’encadrement à Ajax fut plus encore intrusif qu’il ne l’avait été à l’Inter!!) : les joueurs ne sont désormais plus capables de presser comme des malades pendant 1/4h max, comme à la belle époque du « pot NL » de l’entre-deux-guerres….mais 60 voire 70..minutes, du jamais vu, et qui a abusé pas mal de monde aujourd’hui..et continue à abuser pas mal de monde qui ferait mieux de regarder les matchs de l’époque (que de panurgisme encore dans la foulée de la mort de Neeskens..), puis de mobiliser son esprit critique.
Pour parvenir à ce recul des frontières physiologiques toutefois, il n’y a pas à chipoter : le joueur NL lambda (dont 80% étaient chargés comme des mules, dixunt « médecins du sport »..NL de l’époque!) servit de cobayes, résistances physiques poussées dans leurs ultimes retranchements……….dont témoignent notamment (car que d’aveux des principaux intéressés!) des taux de morbidité et de mortalité extraordinairement supérieurs à la moyenne par tranches d’âge!, voilà bien le deuxième (et exclusif) truc ajacide à relever, le reste..
Je complète, 5 minutes encore puis basta, mais, ce que je voulais dire : mortalité et morbidité gagneraient, je crois, à être comparées non pas entre ce foot NL-là et cyclisme sur route..mais plutôt, par exemple, avec une variante du cyclisme de piste où les courses consisteraient en des sprints de haute-intensité répétés pendant plus d’une heure..et mâtinés de changements permanents de rythme et de directions, avec à chaque fois des reprises à fond la caisse……..
Je laisse, aux amateurs de cyclisme, d’imaginer l’effort inhumain que cela impliquerait..et le carnage sanitaire subséquent..
J’imagine très bien, ça s’appelle du cyclo-cross^^
Ca me paraît bien vu!
Adamec est la grande victime de la défaite contre le Mexique qui a failli coûter la qualification aux Tchécoslovaques. Il semble que Vytlačil privilégie alors le seul Scherer en pointe, Kadraba évoluant plus bas qu’Adamec. Contre la Hongrie et la Yougoslavie, les tchécoslovaques sont manifestement très prudents et ont de fait abandonné le 4-2-4.
Kvašňák, je ne le connaissais pas avant de regarder la finale 62 où il ne brille pas particulièrement. Je vais me rancarder !
C’est d’ailleurs la première victoire du Mexique dans un Mondial. Une événement pour le pays.
Kvasnak est une figure majeure chez les CZ, et semble-t-il (c’est ce que j’ai toujours lu) le plus grand talent passé par le Racing Malines – je vais t’en envoyer 2-3 photos, tu reconnaîtras des lieux abordés dans ma série sur les stades belges.
Un peu porté sur la boisson, en tout cas assez que pour avoir passé une nuit en cellule de dégrisement avant un match..où il brilla, à la Roger Claessen. Les plus anciens s’en rappellent surtout un corner « indirect » qu’il botta pour..lui-même : la balle poussée à quelques mètres sur la mise en jeu..et lui qui la refrappe aussitôt, but..dont n’est plus certain qu’il ait été validé, peu importe : c’était, semble-t-il, du jamais vu au pays.
Détail susceptible d’intéresser g-g-g : contrairement à Masopust, l’on ne sut jamais trop si, avant d’arriver en Belgique, les autorités de son pays avaient sollicité qu’il y fasse aussi du renseignement pour les services secrets tchécoslovaques.
Ce qui est amusant ici, c’est que tu mentionnes rapidement les matchs amicaux au Brésil, sans en faire plus, tandis qu’en Tchéquie ils parlent encore de la victoire au Maracana quand ils parlent de cette époque (mais ils se gardent bien de mentionner la défaite qui a suivi…).
La France a longtemps vécu sur le match nul de 1977 au Maracanã avec le but égalisateur de Marius Trésor. Depuis il y a eu 1986, 1998 et 2006 qui ont désacralisé le Brésil.
Le vrai événement, c’est quand le Baník Ostrava a battu le Brésil en 1976… bon, c’était le Brésil olympique, mais c’était le Brésil quand même !
Sur le papier, l’Espagne 1962 est une des plus talentueuses. Sur le papier… Elle n’est ouvertement dominée dans la compétition mais il manque un grain de folie. Et un peu d’organisation également puisque Herrera change régulièrement les compositions. Elle tombe face aux deux finalistes mais quand tu as Puskas, Suarez, Del Sol, Gento, Peiro… Le vieux Santamaria et Di Stefano blessé certes. Mais également Rivilla, Collar, Adelardo, Garay et Cedrun, que des gars qui seraient à coup sûr dans un top 100 du pays. Sans compter un des plus grands coachs, oui, y a de quoi être déçu…
Avec un peu plus de lucidité, l’Espagne aurait dû torpiller la Tchécoslovaquie. Tous les commentaires relatent une nervosité excessive et une grande maladresse devant le but. La victoire tchécoslovaque ressemble un peu à un hold-up.
62, a ete un peu insipide non ? Beaucoup le disent, je sais pas trop.
Ma seule certitude c’etait que le Bresil etait largement au dessus. Defensivement et offensivement.Meme avec les blessures et meformes, il y avait enormement de solutions et de ressource à disposition. La seleçao aurait pu aligner une equipe A et A’, que les deux iraient en finale. La densité et la qualité des joueurs bresiliens dans les années 1960 est tellement au dessus.
C’est vrai. L’Italie est décevante également. Me demande pourquoi les Oriundi, Maschio, Altafini ou Sivori n’ont plus aucune sélection avec la Nazionale après 62. Et finalement une présence de deux ans maximum dans le groupe. Les deux derniers restent compétitifs par la suite..
Gros bordel au sein de l’équipe, des sélectionneurs pas à la hauteur… Les Oriundi avaient été mis en cause dans l’échec à la qualif 1958 (Schiaffino, Montuori, Ghiggia notamment) et ils le sont encore en 1962, sans doute de manière exagérée. Bon, Omar Sívori n’a probablement pas tout fait pour éviter cette perception avec ses provocations vis à vis de l’encadrement mais ce n’est pas lui qui décide de ne pas jouer contre le Chili (les sélectionneurs craignent qu’ils craquent face aux provocations prévisibles des Chiliens).
Un caractère difficile à gérer le Sivori mais son Ballon d’or en 61 n’est pas uniquement le résultat de ses prestations avec la Juve. Il fait une très grosse année avec l’Italie. But face à l’Irlande du Nord, l’Argentine, l’Angleterre. Quadruplé face à Israël en qualifs pour le Mondial chilien. Des premiers pas excellents sous le maillot de la Nazionale.
La Tchécoslovaquie est déjà une bonne équipe en 58. Elle met d’ailleurs une branlée à l’Argentine. Un 6-1 si je dis pas de bêtise. Viendront la 3ème place à l’Euro 60 et cette finale de Mondial.
oui le 6-1 de 1958 qui achève le désastre de l’albi en suède. l’argentine lave son honneur au sudamericano 59. elle est pas au mieux non plus en 62, malgré des victoires contre des équipes prestigieuses et européennes sur son sol (un 2-0 contre l’espagne avec un doublé de sanfilippo par exemple), elle ne convainc pas plus que ça lors de sa tournée européenne 61, malgré une victoire inaugurale au portugal, battue par l’espagne, lourdement défaite en italie, des nuls en URSS et en CZ justement. derrière le brésil, le niveau était assez homogène semble t-il … et le chili surprend tout le monde à domicile.
Il existe de cette tournée et notamment des instants précédant le match en Tchécoslovaquie une photo géniale d’El Arlequín Corbatta, tenue de l’Albiceleste sur le dos, endormi sur un banc dans le vestiaire juste avant le début du match.
Ján Popluhár est un sacré gabarit quand tu mates la compétition. Je le pensais plus grand, il ne mesure qu’un 1m83 mais il est massif. Tu ne peux pas le rater tant il fait des dégâts à chaque intervention.
En reparlera-t-on lors du top 10 des défenseurs des années 1960? Je le crois…
Oui, enfin : si l’auteur y-assigné se sort enfin les doigts du hum..
Popluhar ne me paraît, loin s’en faut, pas le cas le plus difficile à traiter..et pas le moins intéressant non plus!
L’intérêt pour…
Ça s’en va et ça revient
C’est fait de tout petits riens
Ça se chante et ça se danse
Et ça revient, ça se retient
Comme une chanson Popluhár
Oui, cet ex-Lyonnais était aussi grand et massif que le Popluhár dans le jardin de mon grand-père.
Masopust, c’est l’art du tempo. C’est le géomètre du groupe. Une belle activité, une technique sûre, vraiment un superbe joueur.
Et une certaine lenteur qui n’est pas rédhibitoire pour l’époque.
Du beau Verano, comme d’habitude ! Schrojf a beaucoup contribué au parcours de la Tchécoslovaquie, avec en particulier un match de patron face à la Yougoslavie en demie. Il a pris un retour de karma en finale après sa chance de pendu (quatre poteaux) en quarts contre la Hongrie.
Ah ah, la conclusion…
Belle série : me suis régalé.