(Rappel des faits : Le 14 février 2016, et bien que l’action eût dû aboutir en trois temps via le Brésilien Neymar, l’Uruguayen Suarez court-circuitait victorieusement un pénalty joué indirectement par leur équipier catalan Lionel Messi… Si ce coup médiatique raviverait aussitôt celui fallacieusement réussi par les Ajacides Olsen et Cruyff en 1982, voire celui piteusement raté par deux Gunners en 2005 : ce sont aussi d’autres précédents que, ce-faisant et bien malgré elle, l’incorrigible fabrique des idiots n’allait pas tarder à ressusciter…)

« Le jazz n’est pas mort
c’est juste qu’il a une drôle d’odeur. »
(Frank Zappa)
Relayant des images qu’avait dix ans plus tôt livrées la télévision belge, dans la foulée de la vaine tentative gunner de 2005, l’un ou l’autre internautes rappelleraient en effet bien vite, sur les sites online des susmentionnés médias, que ce geste « inventé en 1982 par (Olsen et) Cruyff », « premier à avoir maîtrisé l’art de cet astucieux penalty », avait bien plutôt été exécuté dès 1957 par les internationaux belges Coppens et Popeye Piters…
Et si, dans le chef du second nommé, il s’était de fait agi d’une frémissante première – Pitters, voire dans une moindre mesure Suarez, semble être le seul des quelque 40 joueurs (!) qui s’y sont frottés à ne l’avoir au préalable répété – : il en allait par contre tout autrement pour le dénommé Coppens, lequel, bien avant la variante refusée un mois plus tôt aux Nord-Irlandais Blanchflower et McIlroy, l‘avait de longue date popularisé avec son acolyte Huysmans, sous les couleurs du Beerschot.

Le plus sensationnel toutefois, et que ne releva hélas aucun de ces estimables passionnés, reste pourtant que, contrairement à ce que pourrait suggérer ce long demi-siècle durant lequel il sembla relégué à d’obscures archives, le geste de Coppens avait bien plutôt été évoqué, déjà et abondamment, par la presse néerlandaise dès 1982, et plus précisément dans la semaine même de sa consciencieuse reproduction par Johan Cruyff et Jesper Olsen…
Toujours aux Pays-Bas, cette même année 1982 avait par ailleurs vu la parution dudit Spel om de bal : version néerlandaise du cultissime Soccer Tribe que l’excentrique éthologue Desmond Morris avait publié un an plus tôt, et que le poète et chroniqueur néerlandais Nico Scheepmaker agrémenta, dans sa très libérale traduction, de passages entiers exclusivement consacrés au football néerlandais – parmi lesquels, à la page 145, le natif d’Amsterdam livrait prophétiquement les clés de cet ancestral pénalty à deux :
« Ce qui est autorisé, et qui d’ailleurs se faisait autrefois bien qu’en pratique ce fût le plus souvent inefficace, consiste pour le tireur du pénalty à botter le ballon quelques mètres en diagonale vers l’avant, après quoi un équipier (qui doit toutefois veiller à ne pas démarrer trop tôt !) renvoie à son tour le cuir hors de portée du gardien, à sept mètres environ du but. De la sorte, on aboutit à une espèce de tir au but impliquant deux hommes, dont le second peut bien sûr décider de conclure lui-même l’action. Avec des gardiens volontiers intraitables aux pénaltys, comme l’est par exemple Piet Schrijvers, il peut être intéressant de s’y risquer. »
Une valse à deux temps

Didactique en diable, ce passage était remarquable pour trois raisons. Tout d’abord, il suggérait qu’aux tout débuts du football, il avait été courant qu’un pénalty soit tiré en deux temps…ou « en trois temps! », ainsi que le Belge Coppens tiendrait fort raisonnablement à qualifier ses plus complexes combinaisons des années 1950. Scheepmaker, quoi qu’il en soit et pour illustrer son propos, évoquait ensuite les Néerlandais Bas Paauwe et Gerard Kuppen, lesquels, lors d’un derby contre le Sparta le 4 mai 1944, avaient eu recours à une technique voisine sur l’ancienne pelouse de Feyenoord : anticipant Blanchflower, et plutôt que de tirer directement au but, Paauwe avait en effet décalé le cuir vers son équipier Kuppen, lequel, tel McIlroy treize ans plus tard, avait alors directement conclu hors de portée du gardien…
Du reste, au plus fort de l’effervescence cruyffiste qui déjà exacerbait « le moment de génie de Johan Cruyff », l’un ou l’autre journalistes avaient-ils eux aussi, et non moins spontanément, tenu à raviver le geste de ces lointains joueurs, tel le très réactif Hans Reismann lequel, le 6 décembre et parmi les pages sportives de ce qui avait été le plus grand quotidien des Pays-Bas, tiendrait en vain à ramener un brin de bon sens dans les affaires footballistiques du pays :
« Du jamais vu? Ne me faites pas rire », se sont de conserve étranglé les Rotterdamois de l’ancienne génération, en découvrant les louanges chantées par les chroniqueurs de Langs de Lijn puis de Studio Sport pour traiter de l’étrange pénalty converti par Cruyff contre Helmond, et que n’atténua pas même celui en tous points identiques que venait pourtant d’inscrire Mark Smeets, lors de la rencontre opposant le Velox au DOS d’Utrecht… »
Puis Reismann précisait : « Un lecteur se souvient : « Monsieur, j’ai vu Jan Lissen profiter d’un penalty comme celui-là avant la guerre! » Ce que confirma aussitôt le principal intéressé, bien qu’il tînt à préciser que ce n’était pas lui, mais son équipier Gerard Kuppen qui avait inscrit ce pénalty : « C’est arrivé lors d’un Feyenoord-Sparta que nous disputâmes sur la Dordtsestraatweg, dans le cadre me semble-t-il de cette compétition d’été, qu’organisaient entre eux les clubs de la région au terme de la saison. Et c’est Bas Paauwe qui avait le premier frappé dans le ballon, avant que Gerard ne l’envoyât enfin au fond des filets. »
Une valse à trois temps

Aux antipodes de tout le vomi hystérique produit 72 ans plus tard, lors de son involontaire reproduction par les Barcelonais Suarez et Messi, ce geste daté de 1944 avait pourtant été traité avec une légèreté telle, parmi les comptes-rendus néerlandais du mitan de ce siècle, que le plus probable reste encore qu’aient alors coexisté d’autres « Paauwe-Kuppen », voire que l’auront ici ou là précédé d’autres versions en deux temps, ainsi que le suggère d’ailleurs une évocation (hélas non documentée) le faisant remonter au moins jusqu’à 1937, soit une pleine génération avant les premières traces attestées de pénaltys à trois temps dans l’Histoire du ballon rond.
Et pourtant, parmi les pages prudemment ajoutées en 1981 pour aguicher ses compatriotes, c’est bel et bien le pénalty en trois temps que Scheepmaker identifiait comme pattern, tandis que celui à deux n’en fût rien plus qu’une variante, qui procédât du court-circuitage parfois de l’action – que celui-ci fût convenu, tel qu’en 1957 dans le chef de McIlroy, ou qu’il fût inopiné comme en 2016, quand l’avait raccourci l’ingénu Suarez.
Loin la spontanéité de l’Uruguayen, et loin même celle du Liégeois Popeye Piters, qui jura toujours ses grands dieux ne s’y être jamais frotté jusqu’au 5 juin 1957, c’est quoi qu’il en soit de manière préméditée et au terme de plusieurs séances d’entraînements (entreprises dès septembre selon Cruyff, mais bien plutôt en novembre selon Olsen), que les Ajacides exécutèrent à l’hiver 1982 leur pénalty en trois temps – soit une poignée de mois, à peine, après la sortie en mars du susmentionné et prophétique Spel om de Bal… Et pour autant, peut-on forcément conclure que c’est à la lecture de ce livre, qu’aura fini par germer l’idée du coup monté au sein du duo?
L’exception
Dans le messianisme cruyffiste naissant, la dialectique à l’oeuvre n’a jamais vraiment varié d’un iota : ses nègres et ses réseaux brodaient, sans la moindre limite posée à l’usurpation ni à l’invraisemblable…tandis que lui, tel un sphinx, laissa toujours dire et croire à compter du mitan des années 1970, sans plus jamais juger bon de devoir y apporter le moindre démenti. Aussi ne pourra-t-on jamais affirmer avec certitude, faute qu’il daignât un jour répondre à ces questions, si le principal intéressé avait été informé ou non de ces nombreux précédents. Mais au moins dispose-t-on de ses impressions, au soir du pénalty combiné avec Olsen : « On a tenté ça pour plaisanter à l’entraînement, et à dire vrai on aurait aimé pouvoir le faire plus tôt. C’est agréable pour le public d’avoir à nouveau un sujet de conversation, surtout maintenant que la trêve hivernale approche. Bien sûr, il faut d’abord que l’occasion se présente. Et pour le reste, la réussite d’un pénalty dépend du match, du score et de la confiance en soi. »

Qu’importassent le score, la dynamique de la rencontre ou son état psychique, la vérité pourtant est que Cruyff fut constamment médiocre dans l’exercice, et qu’il jugea par conséquent toujours plus prudent de s’y refuser. Quoique régulièrement gavé de fortifiants de toutes sortes, et bien que ses pieds eussent été rectifiés dès ses débuts en espérant qu’il y gagnât aussi en puissance, les uniques tentatives qu’on lui connaisse auront ainsi consisté en un pénalty certes transformé au printemps 1977, contre Séville, mais plus encore en un raté fatidique une semaine plus tard à Burgos, en ce qui techniquement fut en 1982 un raté entaché d’une position de hors-jeu à Helmond, et enfin en cet ultime essai piteusement hasardé avec Feyenoord, à l’été 1983, qui sur la pelouse de la Roma vit le ballon se perdre prévisiblement dans les tribunes, comme était hélas de coutume durant ses séances d’entraînement.

Aussi comprend-on mieux que le cruyffisme se fût tant employé à salir un exercice que Cruyff, faute de mieux, disait depuis des années mépriser… Mais c’est alors une nouvelle énigme qui s’impose, car sa nullité dans l’exercice étant de longue date consommée : pourquoi dès lors, dans cette froide après-midi de décembre 1982, avoir soudainement pris le risque de s’y frotter – fût-ce à la conclusion d’une action dont tout le poids reposât sur le jeune Olsen, et qui l’esseulerait aussi prudemment que possible face au but vide?
Au soir même de ce pénalty de toutes les faveurs, et après avoir d’emblée cédé, revanchard, à ses pulsions narcissiques (« Je garde encore deux-trois tours de cet acabit dans mon sac, mais il va sans dire que vous n’en saurez rien »), Cruyff se confessait déjà au micro de son ami et client, le journaliste corrompu et confident alcoolique Jean Nelissen : « Je suis content d’avoir pu lever les doutes que beaucoup de personnes gardaient à mon endroit, depuis mon come-back. Ce match me donne le sentiment du devoir accompli. (…) Dieu merci je retrouve enfin la forme, mais le chemin reste encore long. »
A cette déclaration peu commune dans son chef, et loin le panurgique panégyrique qui désormais prévaut dès qu’est question de son retour au pays, alors à son plus bas historique, l’on comprend qu’il fallait à Cruyff un coup médiatique pour lancer enfin une saison où il ne s’était jusqu’alors que traîné, qu’il ne disputa qu’épisodiquement dans la peau d’un titulaire, et au terme de laquelle il ne finirait que huitième meilleur buteur de son club, statistiquement coincé entre le back droit Ophof et le déjà ventripotent Jan Mœlby…

« J’avais déjà la tête tournée vers mes vacances, alors j’ai pensé que ce serait drôle de tirer un pénalty comme celui-là », s’empresserait-il toutefois de préciser, soudain goguenard et comme s’il fallait encore entretenir de faux airs dilettantes… Puis il partit en effet, tandis que son associé d’un soir devrait attendre plus de trente ans encore avant de pouvoir livrer enfin sa propre version : « L’idée est venue une ou deux semaines avant le match. Nous l’avions essayée plusieurs fois à l’entraînement, et puis nous n’en avons plus du tout parlé. C’est alors que l’arbitre nous accorda ce pénalty contre Helmond, et que Cruyff m’indiqua qu’il voulait l’effectuer sur le champ. »
Un quart de siècle plus tôt à Bruxelles, et quoique dans son chef rien n’avait été prémédité, son prédécesseur flamand n’avait à dire vrai pas procédé autrement : « Ce fut ma décision. Notre avance au score était confortable, et il ne pouvait plus rien nous arriver. Alors je voulus essayer quelque chose de spécial, pour le public. J’étais un showman, et j’adorais me montrer créatif. C’était tout à fait normal pour moi de me livrer à ce genre de facéties. »
Et si de fait le public apprécia, après avoir d’emblée sifflé des Diables trop peu dominants à son goût, il en fut tout autrement pour la Fédération belge qui, fidèle aussi à ses mauvaises habitudes, et échaudée par cette fantaisie de trop, préféra snober la superstar Coppens pour le match suivant.
« Le botté de pénaltys », dira-t-il des années plus tard bien qu’il eût toujours coutume de replacer le cuir quatre à cinq fois avant de tirer, « est un art des plus simples. Mais c’est l’affaire des joueurs techniques. Et pour ma part je n’ai jamais ressenti le besoin de m’y exercer, ils sont si simples… Je ne comprends pas qu’on puisse rater un pénalty. »
Une valse à mille temps

Coppens, il est vrai, n’était pas n’importe qui. Et c’est donc sans surprise si sa combinaison face à l’Islande avait été relayée par la presse internationale, ainsi qu’en atteste parmi d’autres l’archive ci-contre, extraite du fort roide quotidien néerlandais Haarlem‘s Dagblad lequel, quoique altier doyen de la presse européenne et réputé pour son entière aversion des futilités (en 1912, ses éditeurs avaient jugé « indigne d’intérêt » le naufrage du Titanic!), ferait pourtant état de ce septième but inscrit par Coppens sur coup de pied arrêté, au terme d’une astucieuse « combinaison avec Piters »… Dans cette édition du jeudi 6 juin 1957, pourtant marqué la veille d‘un combien plus prestigieux Argentine-Uruguay : c’est d’ailleurs cette peu emballante perspective de Belges affrontant d’aimables sparing-partners islandais qui, étrangement, avait été le seul événement sportif international à avoir trouvé grâce aux yeux du très sérieux et exigeant éditoriat.
C’est que la vérité au fond est des plus triviales, qui en 1957 puis dans une moindre mesure en 1982 excluait tout bonnement que la presse néerlandaise ne mentionnât du tout l’action de Coppens, tant footballs et sociétés belges et néerlandais, quoique extrêmement divers et pour tout dire inconciliables, restaient alors des plus poreux qui aient jamais existé…
Procédant moins d’un banal voisinage, de l’intimité linguistique ou d’une furtive Histoire commune entre 1815 et 1830, que d’une hache de guerre géopolitique fraîchement enterrée au début du siècle : cette absolue omniscience de l’un à l’autre touchait deux fois par an à son paroxysme dans le cadre très passionnel et parfois belliqueux du « derby des plats pays », lequel, pendant plus d’un demi-siècle et implacablement, verrait s’opposer à Rotterdam ou à Anvers les fines fleurs des pelouses belges et néerlandaises…

Sans équivalent planétaire, sinon aux non moins rituels affrontements Uruguay-Argentine, Autriche-Hongrie et Ecosse-Angleterre, l’événement était à ce point majeur, de l’actualité sportive comme politique de ces nations voisines, que la presse spécialisée des deux pays prêtait quotidiennement attention au football adverse, scrutant de semaine en semaine l’état de forme de ses vedettes (Lenstra et Wilkes aux Pays-Bas, et les prétendument incompatibles Mermans et Coppens pour la Belgique) ; finissant toujours, méthodiquement, par rapporter et décrypter dans le moindre détail le moindre match livré par le voisin…et en espionnant quelques-fois même les entraînements (ce qui incidemment, en 1973, donnerait d’ailleurs lieu à une ruse inouïe dans le chef des Néerlandais)!
Ce match de 1957 ayant par ailleurs été disputé dans un groupe qualificatif impliquant la France bientôt glorieuse des Kopa et Fontaine, à l’heure où celle-ci entretenait des liens plus étroits que jamais avec le football belge (rival traditionnel, alors, du français), c’est donc fort probablement que l’on retrouverait aussi, parmi les archives hexagonales, d’articles traitant du malicieux geste du joueur anversois… Et ce à plus forte raison que, depuis plusieurs années : Coppens était alors et tout bonnement tenu pour l’une des figures les plus remarquables du football européen.

Au terme de la Coupe du Monde 1954 où pourtant, amateurisme et faiblesse du noyau belges obligent, il ne disputa que deux rencontres ; et bien qu’il n’avait eu, sur le plan de l’engagement physique et outre son talent, que la pugnacité acquise sur les pavés à opposer dans un tournoi empreint de l’un ou l’autre dopages systémiques : Coppens s’était-il ainsi vu décerner ni plus ni moins, par les influents journalistes de L’Equipe, que le titre honorifique de « meilleur attaquant » de la compétition.
Dans les semaines qui suivraient, et après avoir conforté son aura internationale en humiliant l’Allemand Liebrich, meilleur défenseur officiel de la Coupe du Monde helvète (et tourmenteur attitré de Puskas – titre de la presse anversoise : « Coppens venge Puskas! »), lors d’une victoire 2-0 contre les tout frais Champions du Monde allemands, ce fut alors la presse italienne qui, annonçant prématurément son transfert au Napoli, ferait sa une sportive comme suit : « Le meilleur joueur du Monde débarque dans le Calcio »!
Quelques mois plus tard, et son bon souvenir ayant été rappelé, à l’appétit des grands clubs transalpins, par la grâce d‘un amical où il avait cette fois martyrisé la défense italienne : la presse milanaise annoncerait enfin, quoique toujours prématurément, le transfert imminent dans la Botte du « meilleur médian (sic) au Monde »…
Certes ces dithyrambes pourraient-ils paraître sensationnalistes, si l’admiration que témoignèrent alors ses pairs pour Coppens ne laissait tout au plus, avec le recul, qu’à en déplorer le fort européocentrisme… Et ainsi donc de Stanley Matthews, premier Ballon d’Or de l’Histoire et s’exclamant, au terme de leur légendaire affrontement mondial au Parc Saint-Jacques, en 1954, avoir affronté « un extraterrestre »!

Ou, plus parlant : du « Roi » Pelé en personne qui, le 31 mai 1960, après que Santos eut écrasé le Beerschot par 1 but à 10, et sans avoir le moindre mot pour la pâle prestation de la vieillissante star néerlandaise Faas Wilkes (lequel, ami de Coppens et modèle revendiqué plus tard par Cruyff, était venu renforcer les rangs anversois pour l‘occasion), s’empressa de demander aux journalistes quel était ce « phénomène » qui, des six mètres et après un sombrero au-dessus d’un adversaire, avait sauvé l’honneur des siens d’un somptueux ciseau dans la lucarne de Laercio…
Bien que le résultat – victoire ou défaite – ne l’obsédât jamais (ce qu’il paya d’ailleurs de sa carrière internationale, en 1959), mais pour une fois soucieux de laver l’affront : c’est un Coppens survolté qui, presqu’aussitôt et sublimant une sélection anversoise musclée pour l’occasion, arracherait un spectaculaire match nul à la bande des Pelé et Coutinho.
Loin toutefois d’avoir été le plus beau de ses quelque 300 buts, et si le plus illustre, avec le temps, deviendra sans doute celui inscrit le 5 juin 1957, le chef-d’œuvre de Coppens avait-il plutôt été réalisé en 1952, lors d’un derby au sommet au cours duquel il était parvenu à loger, d’instinct et sur la neige, un invraisemblable coup du scorpion dans la lucarne opposée du gardien de l’Antwerp! Joueur moins élégant qu’insolemment doué et créatif, qui avait gardé de la pratique du hockey sur glace une position arquée rendant à peu près impossible de lui confisquer le cuir, c’est encore en précurseur qu’il inscrirait un jour, de la main, un but que la presse sportive belge désignerait aussitôt comme suit : « la…main de Dieu »!

« Roi du Kiel » (du nom du stade du Beerschot), « Pelé belge » bien avant que la presse française n’en gratifiât Van Himst, « Paganini du rectangle vert » à ses 18 ans, international à 17, et meilleur buteur européen en 1953 puis 1955, puis buteur encore à Amsterdam avec la sélection mondiale 1953 : Coppens toutefois ne fut jamais autorisé par ses dirigeants à donner suite aux cours frénétiques du FC Barcelone, de l’Inter et de l’AC Milan ; lui dont le talent avait contraint le board anversois à ajouter trois rangées de sièges à leur stade de 28.000 places pour satisfaire d’un peu à la demande, et dont certain retour de blessure attira même, un soir, près de 10.000 fidèles à un entraînement…
A la question subséquente de savoir s’il n’était pas né trente ans trop tôt, Coppens répondrait d’ailleurs un jour, non sans philosophie : « Nous naissons tous trente ans trop tôt. (…) Chacun d’entre nous est le produit de son époque. (…) Dans les années 1950, nous étions pieds et poings liés à nos clubs ; la direction seule décidait de notre avenir. Quand le club disait « Non », c’était « Non ». Et basta. J’étais le poulain, l’attraction et l’aimant du public. Le moindre transfert était tout bonnement exclu. (…) »
« La seule solution eût été de déménager en Italie, d’accepter (sic!) la nationalité italienne, de passer une saison sans football, puis d’y effectuer mon service militaire. Mais alors je n’aurais plus jamais pu redevenir belge. Et de cela pour moi il n’était pas question.«

« Qui plus est, je n’avais pas à me plaindre au Beerschot. Je vivais comme un roi, je faisais ce que je voulais. J’ai dû attendre 1960 pour pouvoir quitter le club (NDLA : cela faisait un an que la fédération belge ne voulait plus entendre parler de lui), quand les dirigeants m’autorisèrent à partir à l’Espanyol de Barcelone. Sauf qu’à l’époque je n’en avais plus la moindre envie. »
Inhumé il y a dix ans, après un office qui mobilisa des milliers de fervents et jusqu’à la plus vaste cathédrale des « plats pays » (au sommet de laquelle un anonyme avait d’ailleurs accroché, de nuit et à 120 mètres, un maillot et un drapeau du Beerschot), le nom de Coppens sans doute ne dit-il plus grand-chose à grand-monde aujourd’hui…
La place réservée par les médias à ce qui fut « l’âge d’or du football », il est vrai, deviendrait avec le temps inverse de celle complaisamment prêtée au football, moins ludique et plus athlétique, des fort matérialistes et superficielles années 1970… Mais le fait surtout est que Coppens, à l’instar de tant de ses contemporains tombés aussi dans l‘oubli, appartenait à une race révolue d’hommes et de footballeurs que de profonds bouleversements, culturels comme sociétaux, ont entre-temps rendu à peu près impossible de se représenter…
Là par exemple où, dans le sillon profond de Cruyff, des Neymar ou Messi ne se résument plus guère qu’à de dociles et dépersonnalisés vecteurs d’un branding angéliste et mondialisé, fabriqué de toutes pièces et recyclant sans honte ni égards le passé aux seules fins d’un servile abrutissement de masse : l’anarchiste de droite Coppens au contraire, interrompant le jeu après avoir distingué, en tribune d’honneur, celui qui bientôt deviendrait le plus trouble et le plus populiste des politiciens belges de l’après-guerre, le désignerait avec défi du doigt, avant de décocher vers lui, en plein match et plein visage, un surréel missile depuis le rond central…

Joignant après-match la parole au geste, aujourd’hui inouï, quand il eut à répondre de son coup de sang contre le futur Premier-Ministre Vanden Boeynants (lequel, boucher de son état, s’était enrichi à la Libération grâce au monopole de la distribution de viande aux troupes américaines), Coppens déclarerait goguenard avoir « voulu faire comprendre, à Vanden Boeynants, la différence qu’il y a entre un ballon de football et une boulette de viande hachée »…
La moindre des vertus de Coppens, sans doute, n’est-elle point de nous rappeler que la réalité, si irrévérencieuse soit-elle, est bien souvent supérieure à la fiction… Dont en l’espèce à l’aimable fiction scénarisée en 1982 d’un Cruyff « révolutionnant le penalty », non moins qu’à celle 34 ans plus tard, mais combien piteuse, d’un Messi lui rendant « hommage » après avoir vainement tenté, déjà et par trois fois, de singer Maradona…
Quant à savoir si, en 1982 et puisque né en 1947, Cruyff pouvait vraiment ignorer Coppens, obsession première des médias de son enfance mais qu’au gré de ses milliers d’interviews il ne nomma jamais, et au nom duquel il refusa toujours de réagir, le mot de la fin nous semble pouvoir revenir à « l’Empereur de Herentals » Rik Van Looy – seul coureur de l’Histoire à avoir remporté l’ensemble des classiques, superstar mondiale du cyclisme des années 1950 et 1960, et qui, interrogé sur sa propre popularité alors aux « plats pays », répondrait toutefois avec une très appréciable humilité : « En Belgique et aux Pays-Bas, quand tu étais enfant dans ces années-là, tu ne rêvais que de deux choses : être Moulijn ou bien Coppens »…
(A suivre, dans le prochain épisode : un bateleur venu du froid)














Joueur tombé dans l’oubli..mais des images en reparaissent, de ci de là..
En voici donc quelques-unes, antérieures à sa fatale blessure de..1956, si je me rappelle bien?? Une blessure musculaire après laquelle il ne fut plus jamais vraiment le même.
Le voici donc dans ses oeuvres lors des éliminatoires de la WC54, face à la Suède……. C’était pas n’importe quoi, la Suède à l’époque, leur âge d’or et peut-être bien la nation européenne la plus régulière de son temps (3èmes puis 2èmes des WCs 50 et 58 ; vainqueur des JO48 puis 3èmes en 52)! Ils ne ratèrent que le tournoi de 54..et la faute en revint essentiellement à Coppens, lequel leur marcha littéralement dessus, à l’aller comme au retour :
https://www.youtube.com/watch?v=d9yR0AZhVAE
Face à la RFA, quelques mois après qu’elle fut sacrée en Suisse : Coppens porte le N°9, Lemberechts (dont on a beaucoup parlé) le 7.
https://www.youtube.com/watch?v=1vqJcxI6SyY
Dribble et protection du cuir :
https://youtu.be/v5GwxnbJ5XY?t=42
J’adore cette vidéo parce que, allez quoi.. A 0:56, ceux qui ont réalisé ce reportage se sont trompés de Coppens, lol : c’est celui de Malines qu’on voit être fleuri par sa fille!!!
Faut pas trop demander..
Pour témoigner de sa qualité de frappe à distance, face à l’Italie : https://www.youtube.com/watch?v=fZXQ9X1Am1Y&t=91s
..et c’est de son mauvais pied!, pas sûr du tout que 5 joueurs au monde fussent alors, avec des ballons pareils, capables de telles frappes avec leur mauvaise patte..
Quelques images extraites du 4-4 face à l’Angleterre, lors de la WC54 : https://youtu.be/hzArC6qQSkc?t=3497
La source de ces images : le documentaire ultime sur Coppens (toujours porteur du 9)…..mais n’existe pas en français.
Admirable ! Deux histoires en une, un penalty prétexte à un portrait de Coppens, le tout s’emboîtant parfaitement.
Qu’ajouter ? Que j’ai beaucoup aimé le « panurgique panégyrique « !
Eh, Coppens est un sujet en or!, plus facile à traiter que son pudique homonyme 😉
J’ai envie de parler du footballeur, car autant il fut l’un des meilleurs de son temps (j’y reviens), et autant plus personne ne se rappelle de lui. En quelques mots, donc : vif, explosif sur les premiers mètres, une protection du cuir aussi efficace qu’inesthétique (il avait coutume de couvrir le cuir avec son cul), frappe des deux pieds (celle du droit pouvant atteindre de rares degrés de violence pour l’époque), dribbleur en mouvement remarquable, joueur d’instinct, showman, roi du petit pont (qu’il démultipliait parfois pour le plaisir).. Si successeur il eut dans notre football : Eden Hazard, ils ont énormément en commun – dont peut-être au premier chef de n’avoir jamais voulu prendre ce jeu trop au sérieux.
L’un des meilleurs de son temps? Quand la tragicomédie Di Stefano trouve son épilogue, notamment car le Barca croyait pouvoir trouver meilleur que lui, c’est selon la presse NL à Coppens que le board catalan pense en priorité (il va sans dire que Di Stefano et Coppens n’avaient pas grand-chose en commun).
De 52 à 55, jusqu’à ses 25 ans disons : il appartient à la crème de la crème du football européen. L’AC Milan l’approche une première fois après la victoire 2-3 de la Belgique en Suède en 53, un match pour lequel ils avaient délégué un observateur habilité à lui proposer un contrat.. L’Inter en fait sa priorité à l’automne 55. Naples : dans la foulée immédiate de la WC54. Ce fut son acmé…………….. Le reste appartient à ses dirigeants..et à Coppens, qui refusa de renoncer à sa nationalité belge pour pouvoir forcer son transfert dans le Calcio.
Puis il y eut cette blessure musculaire, qui dès ses 25 ans lui fit perdre en souplesse et explosivité, et se rabattre sur des clubs d’un standing moindre : Crossing, Olympic Charleroi, Berchem..mais, j’ai lu pas mal d’archives traitant de cette seconde période (quinze ans, tout de même!) de son parcours, et elles sont unanimes : même en jouant au trot, il restait le plus souvent au-dessus du lot, souvent encore le meilleur sur la pelouse, il subsistait une classe naturelle d’écart avec plupart des footballeurs des années 1960.
Et on va y revenir mais, fondamentalement : Coppens était un joueur de hockey sur glace! C’est d’ailleurs peut-être ledit hockey sur glace, la véritable star de cette série..
Le football, il lui arrivait d’y jouer en Belgique, avec ses camarades du quartier du Seefhoek (l’acteur Schoenaerts aussi en est originaire – je l’aurais bien vu dans un biopic consacré à Coppens, tiens), un quartier extra muros où était plutôt commun de supporter le club de l’Antwerp, et dont est extraite la photo première illustrant cet article. Mais son sport premier, c’était le hockey! C’est comme réfugié de guerre, à Sète et faute de pouvoir y patiner encore sur la glace, que Coppens se mit pour de bon au football.
Évitons le biopic ! Foot et cinéma font un mauvais mariage…
J’espère que tu vas revenir sur cette période sétoise…
Je n’en sais pas beaucoup plus, en tout cas à peine évoquée dans sa biographie que je compulsai il y a déjà fort longtemps.
Les Flamands sont moins sirupeux et plus nuancés que le reste des Anglo-Saxons, dès lors?? Je n’aime pas le concept du biopic, horreur de ça et de surcroît je n’en vois jamais que des mauvais. Mais je fais confiance à mes voisins du Nord pour aboutir une narrative adulte qui tape juste, avec eux aux manettes ça pourrait être sympa. Leurs documentaires sur le football ne sont jamais hagiographiques, ils n’ont pas peur des zones d’ombre.
Le problème, du moins pour ceux qui ont intérêt pour ce genre de figures : ben tout a été dit de Coppens déjà!, type examiné jadis sous toutes les coutures possibles et imaginables………………. ==> Reste la question, fondatrice, des années d’exil à Sète, certes. Autant que je sache il n’y intégra pas de club, mais??
Faut envoyer l’ami Guits (qu’on ne voit plus guère par ici) fouiner sur le sujet.
Coppens était un gamin à l’époque, pré-ado.. Ca va être compliqué de trouver trace du moindre de ses passages dans un club français, mais qui sait?
En Belgique, il a toujours joué au football. Pour l’essentiel seul dans son coin jusqu’aux années d’exil, en tapant, je le cite, « dans le cuir contre le mur de la cour intérieure du domicile familial ». Années durant lesquelles il déclara tolérer tout au plus, mais vraiment quand il n’avait pas le choix, que son frère fasse le gardien.. Obsédé par le ballon!, et cependant sa grande passion restait le hockey sur glace. Puis le football passa devant le hockey durant les années d’exil, par défaut. A son retour de France : football über alles!, mais un football dans la pratique duquel il s’est entre-temps sociabilisé, il s’engage donc au Beerschot, joue dans la rue.. ==> Voilà peut-être ce que lui a apporté le football sétois, là-dessus l’avant et l’après est en tout cas manifeste.
Ne pas s’imaginer que c’était un gamin des rues, une espèce de Gavroche ou que sais-je : famille de poissonniers dont les affaires tournaient trrrèèèèèès bien, et qui mirent tout en oeuvre pour que leur petit Rik n’ait pas trop à se tracasser dans la vie – d’aucuns affirment que, sinon pour les choses du football, il n’a jamais dû travailler de sa vie. Ses études : comptabilité d’entreprise! Mais cette enfance plutôt dorée, il en avait profité pour travailler son coup de patin..et son tir et sa maîtrise du cuir dans la grand cour intérieure de la maison familiale.
Ca ne le rend pas moins estimable, y a du Brel là-dedans, le mec qui renonce au train-train moyen-bourgeois d’une PME florissante pour tracer sa propre route de saltimbanque.. Chapeau bas!
Pourquoi est-il allé à Sète pendant la guerre ?
En particulier à Sète : je sais pas, c’est extrêmement peu documenté comme passage.
J’ai en tête 1,5 millions de Belges réfugiés en France en 1940 (sur un total de 8 millions d’habitants à l’époque), le souvenir des massacres de civils en 1914 avait laissé des traces ; ceux qui avaient de l’argent et/ou du réseau partaient..
Il ne rentre qu’à la Libération ?
Il me semble que non, un an ou deux en France puis retour au pays?? J’ai spontanément envie de dire « en 42 », mais?? Longtemps que j’ai lu sa biographie, à vérifier.
En doutant que le web me propose le moindre résultat, j’ai tout de même googlé Coppens + Sète………………et un truc tout de même, à ce lien et que je retranscris : « (…) s’adonne d’abord au hockey sur glace avant de découvrir les joies du foot sur la plage de Sète durant l’exode de 1940. »
https://www.levif.be/sport/autres-sports/30-les-meilleurs-joueurs-du-foot-belge/
.. ==> C’est du pipi de chat ça, il était catégorique dans ses mémoires : beaucoup de foot déjà dans sa petite enfance, tout le temps même quoique en mode autiste, une passion solitaire..et c’était une passion moins prononcée que pour le hockey sur glace.
A son retour de France : le foot a pris le dessus et il est désormais disposé à composer avec d’autres joueurs, à « faire équipe ». Voilà (au moins?) une chose que son passage à Sète semble lui avoir apporté.
« La plage »..et rien d’autre?? Vu cette affirmation foireuse quant à cette prétendue absence de football dans sa vie avant l’exode, je ne jurerais pas sur cette base qu’il n’ait jamais tâté d’une structure quelconque en France.
Du caractère « autistique », solitaire, du bonhomme : ce lui fut reproché toute sa carrière, génial mais soliste………. Il n’y a pas que du bon chez Coppens ; d’une certaine manière et pour épater la galerie, il avait une fâcheuse tendance à prendre les rencontres en otage pour faire son show (dont le public redemandait, dès lors..), voire à ridiculiser autrui en multipliant les dribbles et les provocations.. Je le disais il y a peu : son parfait homonyme du Malinwa, homme inversement austère, ne l’appréciait absolument pas……et il n’était pas le seul!
Ceci dit et en dépit de défauts bien réels, Coppens n’a jamais entendu nuire à quiconque et ne voyait dans tout cela qu’une grosse farce ; c’est pas Cruyff, hein.
Ça se lit bien, à propos d’un joueur malheureusement tombé dans l’oubli. Bref, merci !
Tu n’as rien trouvé dans la presse française au sujet de ce pénalty ? Les archives de l’époque ne sont pas encore libres de droit. Par exemple, pour lire L’équipe de 1957, il faut aller au siège du journal à Boulogne-Billancourt.
Du mal à m’y retrouver avec Gallica, rien trouvé pour l’heure.. Rien trouvé sur ce pénalty ni sur quoi que ce soit, en fait ; je ne m’y retrouve tout simplement pas.
Ceci dit, sur d’autres sujets et même époque, quand je vois les points de détails (parfois des plus insignifiants) de notre football que votre presse était alors capable de relever et relayer ==> Il ne fait aucun doute que ça existe, a fortiori en évoluant dans le même groupe qualificatif pour la WC58, le contraire est juste inimaginable.
Me déplacer jusqu’à des archives physiques : c’est fini pour moi!, assez donné jadis.
Jan Molby, je l’aimais bien à Liverpool. Des frappes lourdes et un physique pas très athlétique, c’est vrai.
Un toucher de balle remarquable, de l’inspiration à gogo………..mais pour l’hygiène de vie ça n’a jamais été ça, et qu’est-ce qu’il était lent………….
Fin des fins assez incroyable qu’il ait réussi à faire son trou dans le football anglais, comme quoi..!
A Liverpool, il me semble qu’il est adoré.
Et sinon, bon.. Le dossier me semble suffisamment chargé pour douter que Cruyff fût le moins du monde réglo dans cette histoire de péno tiré à deux / péno à trois temps………… Vous je sais pas, mais vu le reste des exploits du lascar : ma religion est faite sur ce pan (et d’autres) de ses usurpations (whatelse?)!
Il y a des trucs que je n’ai pas évoqués, en 1ère division anglaise des 70’s par exemple on assista à l’un ou l’autre pénos tirés à deux, à Everton notamment.. Bon.. : j’ai livré le fond de ma pensée là-dessus (péno à deux > foot de rue), quoique.. Je laisse la porte ouverte à un truc, que pour l’heure je garde pour moi, je pressens que l’histoire fondamentale du péno à trois temps est encore beaucoup, beaucoup mieux que ça………mais il me faudrait rencontrer des anciens du Beerschot pour pouvoir enfin trancher..
Prochain épisode : une autre usurpation!, non moins constitutive de la narrative / grosse arnaque de la matrice cruyffienne.
Question naïve : que les Bataves, soumis et élevés à la narrative Cor Coster-Cruyff, n’aient pas relevé les mises en scène et la réécriture de l’histoire, soit, mais pourquoi cela se propagea-t-il un peu partout ? Pourquoi, par exemple, la presse allemande ne démonta t elle pas tout ça ?
Mes premiers textes sur ces questions ont une vingtaine d’années : dopages du Dr Rolink, appropriations/usurpations culturelles, manipulations médiatiques.. Franchement, à l’époque il n’y avait rien..nulle part!
Je me rappelle juste d’un (et un seul) article aux Pays-Bas, un journaliste trentenaire peu connu qui affirmait sans apporter le moindre détail que l’envergure prêtée à Cruyff était une mascarade, j’ai senti qu’il disait vrai………….et donc j’ai déroulé les fils de mon côté, en exploitant les archives NL comme tu sais.
Pourquoi je dis ça? Ben parce que je n’ai jamais rien lu de tel nulle part…………….. Même aux Pays-Bas, le matraquage a fait son oeuvre (Cruyff n’y faisait toujours pas autorité fin 70’s!!!)………..or ce n’est pas faute – ces quelques archives que je tiens régulièrement à partager en témoignent – que le récit ait été tout autre à l’époque des faits!!! Des journalistes savaient, disaient………mais c’est une autre voie qui a été privilégiée, la cruyffiste. Et la corruption n’y fut pas étrangère, son beau-père Cor Coster était un salopard de la pire espèce….sans oublier que l’ingénérie des futures radio/téléréalités joua aussi sa part, bref : des pros de la manipulation!…….. Probablement, surtout, que tout cela aura répondu à un besoin grégaire fondamental, va savoir.. Sommes-nous si stupides que nous requerrions des histoires stupides, des fables pour adultes? C’est fort probable et certains anthropologues l’ont d’ailleurs affirmé.
Les Allemands, je n’attendrais strictement rien d’eux, Ordnung und Disziplin, la pensée critique repassera chez eux, des veaux (ils l’étaient déjà sous le Kaiser..et le lavage de cerveau post-45 n’a rien arrangé chez eux).. Les Flamands savaient, par contre……….mais n’ont pas fait de vagues, et puis bon : qui écoute les Belges? Les Anglais et les Français : quid de la barrière de la langue? Je comprends le NL, il y a 20 ans il fallait cela + éreinter des archives poussiéreuses pour remettre bon ordre dans ces tissus de conneries.. Aujourd’hui, internet aidant : ça devient un jeu d’enfant, tu te rappelles peut-être d’Alphabet me sortant de son chapeau magique un lapin sur les fondamentaux du FC Bayern, éhéh..
Il y a de ci de là l’un ou l’autre NL qui lâchent 2-3 trucs sur ces questions, des éléments du puzzle….et pas n’importe qui, rappelle-toi le dénommé Johan Derksen (abordé dans « le vieil Hollandais » et Go Ahead), un ancien de la « Maison Cruyff », lol!!! Mais de structuré : il n’y a rien.
Le mal est fait et il est profond, car le cruyffisme : c’est aussi toute l’architecture grotesque du football-total, clé de voûte du récit de la (prétendue..) domination culturelle des footballs ouest-européens – dont l’idée même est si absurde qu’elle réclame pour toute réponse un bon gros LOL..
Tu vois un journaliste revenir radicalement sur toutes les imbécilités que lui et ses congénères recyclent et récitent en boucle depuis un demi-siècle?? Moi pas.
Perso, je crois qu’il y a eu conjonction d’intérêts : les intérêts privatifs de la mafia cruyffiste (Coster, De Vos), stimulés à l’international par l’ingénérie et le réseau médiatiques (c’est le plus dur à établir) des De Mol, ont narrativement répondu, dans un contexte de guerres froides culturelles tous azimuts (y a pas que les vilains Cocos qui aient instrumentalisé le foot, hein..), à un besoin de ré-affirmation culturelle de l’Europe de l’Ouest – laquelle, pour les choses du football, était à la ramasse depuis..toujours!! Le « la » de la culture-foot, c’est aux Îles, en Europe centrale et en Amérique du Sud qu’il avait été donné, mais certainement pas en Europe de l’Ouest………alors on a pillé, usurpé, synthétisé…..et on aboutit à cette narrative où l’Europe de l’Ouest se paie finalement la part du lion culturel, en abondant de codes occidentalistes (Ajax avait la gueule de l’emploi pour endosser le beau rôle du laboratoire créatif de l’Europe de l’Ouest : c’est par la science et le fric que ce club fut triomphant!)
Ces histoires d’enjeux symboliques avaient cours en littérature, cinéma, peinture.. ; médias, artistes et argent sale furent mobilisés à ces fins durant toute la guerre froide………et le football le fut aussi!, c’est tellement évident à l’examen des grands clubs du Nord transalpin, d’Anderlecht ou du Bayern……… Or, de par ses valeurs, le cruyffisme était tout à fait compatible avec ces enjeux, était un vecteur tip-top. Car en concentrant de la sorte xy révolutions sur la figure messianiste de sa tête de gondole / escroquerie (Cruyff, donc), c’est in fine et aussi l’Europe de l’Ouest qui devenait l’alpha et l’omega du football moderne (..alors que..).
Dans les grandes lignes, il n’y a qu’ainsi que je peux comprendre le succès éditorial de ces absurdités.
Bref (compliqué d’écrire en cuisinant – et je tiens à mes carbonnades!), ça arrangeait certainement beaucoup de monde sans trop en vexer (les grands pays n’avaient pas à être jaloux : ce n’est aucun d’entre eux qui était mis à l’honneur), qu’on prête à un messie sous hormones et amphétamines d’avoir révolutionné le jeu : ce-faisant, c’est toute l’Europe de l’Ouest qui se retrouvait enfin au coeur du jeu ; le tiers-monde sudam et les reliquats de Danubiens d’outre-Rideau de Fer pouvaient enfin passer au second plan.
Ca + des effets d’emballement médiatiques assez mécaniques, qui finissent par partir en vrille, deiviennent incontrôlables et s’auto-alimentent……. ==> J’ai pas mieux pour expliquer le succès de semblables fariboles.
L’examen du succès de l’une ou l’autre religions, jadis, pourrait être éclairant qui sait? Ce sont les mêmes mécanismes, les mêmes ficelles, codes…… Si on le regarde froidement, le cruyffisme n’est rien plus qu’un messianisme, une religion.
Tu as sans doute raison et l’impression visuelle laissée par Cruyff au Barça en 1973 puis des PB en 1974 ont dû tuer toute velléité de critique.
Barca et Cruyff, la rencontre de deux narratives qui n’eurent de cesse de s’auto-alimenter……………… Tu peux pas test’!
==> Je crois bien que tu as raison d’ajouter ce point..
Visuellement, esthétiquement : il s’est placé au-dessus de tous et du jeu aussi ; non plus servir le jeu mais s’en servir, ce qui aura plu à un certain public.
En fait de « certain public », surtout : c’est la dernière levée des boomers qui l’a porté aux nues (car il incarnait une rupture pour des raisons..bien souvent fallacieuses, mais peu importe), lesquels boomers détinrent un peu partout le capital médiatique.
J’étais censé passer l’après midi avec les bleus, mais me voilà joyeusement perdu ans les années 50 à suivre un duel à distance entre le célèbre Matthews et un Flamand, un anversois donc, dont je ne connaissais pas le nom il y a 24h… merci pour ce super portrait qui écorne le « récit officiel » (la « matrice cruyffienne » ? il faudra que je creuse ce concep …) et met en lumière ce beau joueur : R. COPPENS.
Dans une itw, il évoque, je crois comprendre, ce qu’un Amoros était pour Platoche (mais je ne comprends tout…). On en déduit qu’il n’avait pas beaucoup d’apports des joueurs « dits de côtés »
En face des Coppens et Panenka, sait-on quels sont les premiers goalkeppers à conditionner leurs environnements, à être protagonistes…. Les influenceurs des « jambes spaghettis », des « je te laisse plus d‘espace à droite », « j’écrase le point blanc » etc
On m’a dit qu’un Yachine avait, par exemple, bénéficié d’un récit plus que favorable… Je n’en ai aucune idée… ?
Ps 1 : Un biopic sur Coppens avec Matthias Schonnaert : je dis oui ! Décidément j’entends bcp parlé de cet acteur ici…
Ps 2 : L’ami Frank Zappa avait raison de tancer les critiques à l’endroit du jazz, d’ailleurs lui-même était aussi très à l’aise dans ce registre, mais les compils « Jazz is dead » (Adrian Younge , Ali Shaheed Muhammad) n’en sont pas moins parfaite d‘élégance et de volupté.
Ps 3 : Espérons que notre Giroud national tombe sur cet article…;)
Ps4 : C’est vraiment un chouette article ! et je mesure mon enthousiasme…
Tout cela est si sympa que ça me la coupe un peu, merci!
La préparation du repas m’incombe ce soir, je repasse tantôt pour ces points que tu soulèves.
« sait-on quels sont les premiers goalkeppers à conditionner leurs environnements, à être protagonistes »
Ah, ça……….. Des types qui ne se contentèrent pas de subir sur leur ligne, mais qui entendirent être davantage dans l’interaction voire la subversion, j’ai quand même l’impression que c’est assez vieux. Et il y a des cas illustres. Qui pour d’aucuns ne seraient plus possibles aujourd’hui.
Il y eut ce fameux gardien de Sheffield United par exemple, fin-XIX début-XXèmes siècles, un type énorme, un tonneau……….dont j’ai déjà lu que, lors de l’un ou l’autre pénaltys (que l’on tirait d’un peu où voire comme on voulait, c’était bien moins codifié que maintenant!) s’avançait le plus loin possible de sa ligne pour réduire autant que possible les angles…… Vu ses plus de 100 kilos, je présume que ce pût être efficace 🙂
(NB : il faudra que je me repenche sur ces histoires, les premiers pénos………. ==> C’est peut-être l’une des clés au sujet ici abordé en fait – comment exclure que le geste de 1937 prêté aux NL Paauwe et Kuppen n’était le reliquat de pratiques plus archaïques?)
Sinon il y eut aussi les keepers volants, gardiens-libéros….. D’aucuns prêtent au NL Jongbloed d’avoir été le premier, because matrice narrative du foot-total gnagnagna…..mais rien qu’à l’examen du foot belge (..il y a tous les autres footballs, donc..et pas qu’en Europe!!!) il est démontrable que c’est faux : du temps où Goethals fit jouer son jeune gardien Bosmans comme gardien-libéro, Jongbloed n’avait jamais encore fait quoi que ce soit de tel! Et il y a des vidéos pour Bosmans, j’en avais proposées ici :
https://www.pinte2foot.com/article/la-toile-du-sorcier-2-3-toujours-plus-haut
Merci d’avoir pris le temps de me répondre… je vais consulter les liens
A moi de te remercier, ton commentaire était très sympa……..et, en me rappelant à l’énorme William Foulke, il me fait considérer aussi des pistes intéressantes!
C’est que le pénalty n’a loin s’en faut pas toujours eu ce caractère « figé » qu’on lui connaît depuis quelques générations..or, c’est une caractéristique du pénalty joué à deux : il réinsuffle du mouvement et de la dynamique dans une situation où le jeu est à l’arrêt….
Jadis, à ce constat : je m’étais d’ailleurs dit qu’il n’était peut-être pas tout à fat anecdotique que Coppens fût un spécialiste de ce type de pénalty, lui qui procédait en ligne directe du hockey sur glace……..et de ses pénalités bien moins statiques qu’en football. Sous sa forme actuelle, le tir de pénalité du hockey sur glace date de 1934 (..et les plus vieilles traces de péno à deux dont j’aie entendu parler, en l’espèce dans la variante en deux temps : de 1937) ; allez savoir..
En profiter pour dire tout de même ce que je subodore (à tort peut-être – hypothèse pure, dans le cas d’espèce), de ce fameux péno en trois mouvements de 1957, face à l’Islande…………………….
Factuellement, que sait-on / lit-on?
On a la vidéo où, incontestablement, Coppens et Piters l’effectuent en trois temps.
Avant ça : aucune vidéo……………..mais des récits évoquant, sans toutefois préciser à ma connaissance si c’était en deux ou trois mouvements, que Coppens et son équipier du Beerschot faisaient de longue date des pénos joués à deux..
.. ==> Retour à 57 : et Coppens, et Piters, furent raccord pour dire que l’idée était de Coppens, et que le francophone Piters ne l’avait jamais fait, était totalement incrédule, ne comprenait pas (quand bien même le néerlandophone Coppens le lui disait en français).
Dans les récits qu’en fit Coppens, Piters est systématiquement pantois, et Coppens dut toujours insister en français : « en..deux temps! »
Tel que le raconte Coppens : Piters n’avait toutefois toujours pas trop l’air de comprendre………………………..et on voit bien qu’il fait ça à l’arrache, on dirait même qu’il cherche surtout à éviter la sortie du gardien!, d’un dribble désespéré en bout de course, qui du bout du bout de son pied se transforme en passe (volontaire?????) pour Coppens……… ==> Regardez l’image.
Vous me voyez venir? Mon hypothèse :
1) Les pénos effectués au Beerschot par Coppens et Huysmans furent peut-être bien des pénos en..deux temps! (rappel : autant que je sache, il en est tout au plus précisé qu’ils étaient joués à deux!)
2) En 57, Coppens pensait vraiment le jouer « en deux temps » (ses premiers mots)..
3) .. ==> Serait-ce par incompréhension (un flamand et un francophone?) et/ou par accident, un bug (comme souvent en termes de création, l’air de rien..), que l’action en deux temps se mua en action en trois temps..
Auquel cas :
1) Ce péno de 57 serait donc bel et bien, à ce stade, le premier « en trois temps » de l’Histoire (c’est d’ailleurs ainsi que Coppens se corrige systématiquement, à chaque fois qu’il fiit de raconter comment Piters joua sa part)..
5) Si ce pénalty en trois mouvements doit avoir un père : ce n’est alors pas Coppens………..mais ce pauvre Piters!, qui ne savait manifestement pas trop bien ce qu’il devait faire de ce ballon!, et qui, involontairement, par désespoir…..
Je trouve cette explication plus belle, plus poétique………et même à bien des égards plus crédible.
Comment en attester toutefois?? Bah : c’est peut-être pas plus mal ainsi..
Quoi qu’il en soit : inversement plus crédible que la fable d’un geste « inventé » ou « révolutionné » par Cruyff!, là-dessus le moins qu’on puisse dire est qu’il n’y a pas photo..
Que chacun se fasse son opinion :
https://www.youtube.com/watch?v=FdJgyKC3Zbs
Pas moi qui trancherai………..pas à ce stade!, je continue à chercher ;), et alors, qui sait..
Hors sujet: https://www.sofoot.com/breves/amical-des-bangers-et-une-remontada-ratee-lors-de-suede-algerie
Ce sera tout pour moi.
@Alex, en cherchant autre chose, je suis tombé sur Peter Doherty (pas le chanteur hein!), l’attaquant nord-irlandais champion avec City dans les années 1930. En 1945, avec Port Vale, il a manifestement effectué une passe à un équipier sur penalty, plusieurs sites relatent l’événement.
Yep, tout à fait. D’ailleurs je crois que c’est McIlroy qui s’en revendiquait – quelqu’un de bien élevé, c’est bien.
Variante à deux mouvements. Et parallèle donc à celle de 44 (..voire 37, voire..??) des Paauwe et Kuppen.