Meilleurs ennemis : Austria Vienne – Rapid Vienne

Ils se détestent et, pourtant, l’un ne pourrait pas vivre sans l’autre. Deux clubs rivaux depuis toujours ou presque, des affrontements qui sont bien plus qu’un match de foot… il est temps de choisir son camp. Aujourd’hui, le Wiener derby.

Un peu d’histoire

La légitimité d’un club par rapport à son rival vient souvent du bon vieux « j’étais là avant. » A ce petit jeu, c’est le Rapid de Vienne qui l’emporte. Fondé en 1899, il rend 11 ans à son rival l’Austria, qui n’a vu le jour qu’en 1910.

Les Vert et Blanc (qui joueront en rouge et bleu jusqu’en 1904) ont été créés en tant que club ouvrier de la capitale autrichienne. L’Austria Vienne, de son côté, évolue en violet depuis toujours et a été créé en tant que club de l’élite. Ses statuts initiaux mentionnaient même un niveau d’intelligence minimum requis pour devenir membre.

La rivalité entre les deux clubs est immédiate et les affrontements sont très attendus, d’autant plus que leurs stades se trouvent alors tous deux dans le quartier de Hietzing, à l’ouest de la ville. En 1938, l’Anschluss marque un tournant dans l’histoire des deux clubs. Le Rapid intègre le championnat allemand, où il brille (victoire en Tschammer-Pokal, ancêtre de la DFB-Pokal, en 1938 et victoire en championnat en 1941). L’Austria, pour sa part, est considéré comme un club juif. Ses membres juifs sont arrêtés et sa star de l’époque, Matthias Sindelar, est retrouvée morte asphyxiée à son domicile, sans que l’on ait pu élucider s’il s’agissait d’un meurtre, d’un accident ou d’un suicide.

L’heure de gloire

Les deux clubs partagent un record : ce sont les deux seules équipes autrichiennes n’ayant jamais été reléguées en deuxième division depuis la création du championnat d’Autriche, en 1911. Une longévité qui force le respect.

L’Austria Vienne ajoute à cette performance deux victoires en Coupe Mitropa en 1933 et 1936, ainsi qu’une finale de Coupe des vainqueurs de Coupe en 1978. Eliminant tour à tour Cardiff City, Košice, le Hajduk Split et le Dynamo Moscou, les Veilchen sont balayés en finale par Anderlecht (4-0), au Parc des Princes.

Le Rapid compte lui aussi deux Coupes Mitropa, glanées en 1930 et 1951. Mais il compte une finale de C2 de plus que son voisin. En 1985, porté par la paire Antonín Panenka-Johann Krankl, il se débarrasse du Besiktas, du Celtic Glasgow, du Dynamo Dresde, puis du Dynamo Moscou, avant de s’écrouler en finale contre Everton (3-1). En 1996, leurs victimes s’appellent Petrolul Ploiesti, Sporting Lisbonne, Dynamo Moscou (décidément !) et Feyenoord Rotterdam, mais les Rapidler tombent les armes à la main en finale, battus par le PSG de Bruno Ngotty (1-0).

C’est qui le plus fort ?

Au jeu du palmarès, l’Austria peut se vanter d’avoir plus de trophées (61) que son rival (53). Mais si les Veilchen comptent autant de titres, c’est notamment grâce à leurs superbes performances en Coupe d’Autriche (27 titres contre 14 pour le Rapid). En championnat, les Rapidler dominent nettement (32 à 24). Avec autant de titres continentaux mais une finale de plus pour le Rapid, ce sont les Vert et Blanc qui prennent l’avantage. Léger bémol tout de même : leur dernier titre en championnat remonte à 2008 et leur dernière Coupe à 1995. Il s’agirait de se remettre à gagner, bien que l’Austria soit aussi à la peine (dernier titre en 2013 et dernière Coupe en 2009), le football autrichien étant désormais dominé par le RedBull Salzbourg, champion d’Autriche sans interruption depuis 2013.

En prenant en compte les résultats dans le derby de Vienne, le Rapid est nettement devant. Vainqueur des 11 premières confrontations (dont un 9-0 en 1915, score le plus large de l’histoire du derby), le Rapid comptait, en 2021, 137 victoires, contre 117 pour l’Austria (et 75 matchs nuls).

Vu des tribunes

Il reste un critère important pour les départager : l’ambiance au stade. L’Austria Vienne évolue dans le Franz Horr stadium (ou Generali Arena pour les amoureux du naming), d’une capacité de 15 600 places et totalement carré d’apparence depuis l’extérieur. Simple et efficace, avec quatre tribunes bien droites et des sièges violets, il est animé par une Osttribüne qui semble bien remplie et assez active.

Le Rapid n’échappe pas au naming. Son Weststadion, d’une capacité de 28 600 places, a été renommé Allianz stadion. Avec ses formes un peu plus arrondies et son toit unique, il a l’air mieux fermé que le stade rival et est décoré par la mention, en immenses lettres rouges, du nom Rapid à l’entrée. Ici, c’est la tribune ouest qui met le feu. Si l’affluence y est supérieure que chez les voisins de l’Austria (un peu plus de 18 000 spectateurs en moyenne en championnat pour la saison 2022-2023 contre près de 11 700 pour l’Austria), le taux de remplissage est meilleur chez les Veilchen.

Les fans des Rapidler ont une particularité : pendant les 15 dernières minutes du match, ils applaudissent en rythme pour encourager leur équipe, quel que soit le score. Baptisée Rapid-Viertelstunde (littéralement « quart d’heure du Rapid »), cette coutume est presque aussi vieille que le club. Elle est mentionnée dès 1913, à une époque où le supportérisme n’avait pourtant rien à voir avec maintenant.

Alors, vous avez choisi votre camp ?

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35 réflexions sur « Meilleurs ennemis : Austria Vienne – Rapid Vienne »

    1. Le Standard a récemment connu un Président comme ça, Roland Duchâtelet.. La presse le rapporta d’ailleurs, mais beaucoup eurent du mal à croire un truc pareil, mirent cela sur le compte de la vaste (et efficace) conjuration alors montée contre lui – et cependant, ça m’a été confirmé par deux anciens employés : il imposa effectivement des opérations de calcul mental à toute personne (dont joueur!) candidatant à ce club, dont la complexité allait crescendo selon les responsabilités confiées au sein du club.

      Pour certains joueurs : des opérations de racines cubiques. Cela donne idée du type d’intelligence, très cartésienne, que ledit Duchâtelet entendait promouvoir au sein de ce club.

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  1. Merci Modro. Vienne, magnifique ville. Entre les deux, je ne sais qui choisir. J’ai tendance à plus apprécier l’histoire du Rapid mais il y a légèrement plus de joueurs que j’admire du côté de l’Austria… Dilemme… Va pour le Rapid !

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  2. En parlant du Red Bull Salzbourg, son ancêtre a une finale d’UEFA, en 1994. Face à l’Inter de Bergkamp et Ruben Sosa. Appelé Casino Salzbourg, ils avaient éliminé Francfort, le Sporting ou le Karlsruher d’Oliver Kahn. Red Bull a racheté la licence en 2005, pour créer leur mastodonte mais j’ignore comment il intègre, à leur histoire, ce parcours européen rare pour un club autrichien…

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    1. Sur leur site, le RB prend en compte les titres de champion de l’Austria, mais pas la finale européenne. Il y a quelques anciens de l’Austria Salzburg, qui bossent (ou ont bossé) pour le RB (Christoph Freund, les pères Lainer et Ilsanker…).

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      1. Ah? C’est bizarre de ne pas prendre en compte cette finale si les titres de champion le sont… Tu en connais la raison?

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      2. C’est une très bonne question et je te remercie de l’avoir posée. Je ne sais. Probablement pour éviter un malaise chez les fans de l’Austria Salzburg.

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  3. Je pensais aux articles sur les stades belges insolites d’Alex. Suis certain que l’on pourrait trouver des pépites en Autriche. Polster m’avait montré des stades vraiment chouettes, rien qu’à Vienne. Alors dans le reste du pays…

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      1. Tu mets combien de temps pour rejoindre Vienne ? Dans ce secteur, t’as 3 capitales relativement proches, comme Vienne et Budapest, ou très proche comme Vienne et Bratislava. J’avais trouvé Bratislava sympa. Calme et agréable en soirée.

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      2. @khia il me faut 4h en train pour être à Vienne.
        Bratislava, tu fais partie des rares qui en disent du bien ! Mais je n’y ai pas encore mis les pieds, je ne peux pas juger.

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      3. Ah ? Ecoute, j’y suis pas resté longtemps mais j’ai le souvenir d’un petit centre sympathique, avec ses bâtiments aux couleurs pastels que tu trouves souvent dans le coin. Pas dingue mais loin d’être moche. Alors, c’est pas comparable avec Prague evidemment, et maintenant je me souviens avoir traîné dans un quartier un peu pourri et industriel, mais comme étape, c’était pas mal.

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      4. Dans ce voyage, Bratislava était ma première étape. Ensuite, je retournais à Budapest, que j’avais fait 7 ans auparavant et que j’adore, pour me consacrer à un bon tour de Roumanie pendant un mois, avant de finir à Sofia. Qui est une ville très étrange. J’en avais parlé avec Totti de Sofoot qui y vit mais Sofia en été, c’est ville morte. C’est assez dingue. Avec des chiens errants partout. D’ailleurs, y en avait un qui m’a suivi une bonne partie de ma première journée là-bas. Impossible de m’en défaire. Haha

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    1. Ledit Hohe Warte est probablement le plus marqué. En tout cas, et s’il y en est un que je voudrais voir, de passage à Vienne..

      Je crois aussi que c’est l’une des villes les plus riches d’Europe en termes de patrimoine stadial. Ceci dit, Bruxelles me paraît imbaisable pour quelques décennies encore. Froidement, rayon diversité, Histoire et préservation patrimoniale : j’eus beau chercher pendant des années, je ne vois décidément pas mieux.

      Intuitivement porté plutôt vers le Rapid, sais pas pourquoi.. C’est con car, si ça se trouve, en connaissant d’un chouia les histoires respectives (VRAIES histoires!, pas les fables habituelles) de ces deux clubs-là : ce serait rationnellement l’exact contraire peut-être..

      Polstergeist est plutôt..Rapid, non?

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      1. J’ai une tendresse particulière pour le Wiener Sport-Club Platz, le plus ancien stade d’Autriche encore utilisé. C’est l’un des premiers terrains que j’ai découvert en arrivant à Vienne. Si les joueurs locaux étaient peut-être blasés, ma foi, j’étais bien content d’avoir la chance de jouer dans un lieu, qui a vu passer un paquet de grands joueurs.
        Le stade était dans un mauvais état et ça ne c’est guère arrangé depuis. Un projet de rénovation est dans les cartons depuis 2018, je crois, mais ça traîne comme d’autres choses à Vienne (le stade de l’équipe nationale par exemple… et pendant ce temps là, Linz a construit 2 stades).

        Le Sport-Club Platz fait petit stade anglais en milieu urbain. Le Hohe Warte donne plutôt dans le bucolique. Il y a d’autres terrains à voir évidemment comme celui du Wiener AC sur lequel s’est déroulé le premier match international de l’Autriche. Ou celui du Floridsdorfer AC, terrain sur lequel jouait initialement le grand Admira des 20’s et 30’s.

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  4. En voilà une ville passionnée de foot . Perso j’ai une petite faiblesse pour le Rapid, la couleur me rappelant mon petit Sainté et club de prolo sans doute … Mais j’ai un souvenir ému du Rapid de 1996 avec notre ami bulgare Trifon Ivanov et le panzer Carsten Jancker devant, durant la finale , dégueulasse dans mes souvenirs, au stade Baudoin. Stade du Heysel bien dégueulasse aussi d’ailleurs . Quel dommage que ce championnat, qui donna bien du fil à retordre quand ton club rencontrait un de ses représentants, soit maintenant écrasé par ce club en carton de Salzbourg … Où qu’il se situe , RB c’est de la merde … Against modern football .

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    1. Oui Trifon revenait de quelques saisons au Betis. Par la meilleure période du club… C’est drôle comme Trifon a marqué les années 90 pour son look et son regard! Je viens de voir qu’il est passé du Rapid à l’Austria.

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    2. Karlo. Et toi qui aimes le Milan, c’est au Rapid que finira sa carrière le funambule Savicevic. Une drôle de carrière milanaise pour Dejan. Des disparitions mais également de grands moments. Les confrontations face au PSG, le lob génial sur Zubi. Un talentueux…

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      1. Aaah ce cher Dejan . Aussi talentueux qu’inconstant . On l’appelait « il genio » au Milan . J’adorais ce joueur qui a marqué , selon ma petite expérience, un des plus beaux buts de finale de coupe d’Europe face au grand Zubi du grand Barça du grand Cruyff ( qui croyait avoir gagné avant de jouer la finale … quelle truffe ! ) . L’extase !
        On ne dira jamais assez l’énorme frustration que fut la fin de la Yougoslavie ( en dehors du drame humain bien sûr ) pour le foot européen . Quand on voit la compo de l’étoile rouge en 1991 , et les autres joueurs évoluant à Zagreb ou Split … quel malheur ! Ils auraient tout remporter !

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    3. Finale tristounette dans un stade « rénové » (reconstruit) à l’économie, du tout adapté au cahier des charges du foot moderne, que j’ai toujours trouvé moche..et dont c’était je crois, hors Diables Rouges, le premier rendez-vous international depuis le Heysel?

      Je n’ai donc jamais aimé ce stade, que ma foi personne (sinon les fans d’athlétisme) n’aime en Belgique. Mais il a une vertu! : avoir rapporté plus qu’il n’a coûté, et ce sans le concours du moindre club-résident! ==> C’est un tour de force, ce stade a donc le bon sens pour lui.

      A fins de comparaison, il me semble que celui de Bordeaux a coûté cinq fois plus, Bilbao six, Nice sept.. Le Heysel, moins de cinq ans après sa reconstruction : son coût était déjà totalement amorti – ce qui devrait être la priorité des priorités dès qu’est question d’argent public, voire de ces arnaques que sont les PPP.

      Je propose aux Belges qui réclament, eux aussi, leur arena surpayée à la con, de se porter volontaires pour un prélèvement spécifique sur leurs revenus, de sorte que qui n’en veut finance son temple belge de la consommation footballistique – en contrepartie, je m’engage à n’y jamais mettre le pied plus que je ne fais au Heysel 🙂

      NB : Comme Goethals, je suis pour que la Belgique dispute ses rencontres internationales dans des stades de club, comme jadis à Deurne, à Sclessin.. Pour un pays si densément peuplé, dont les grandes villes les plus distantes ne le sont que d’une heure 30 max en transports en commun : c’est le bon sens même.

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    4. Le Rapid, terminus des prétentieux pour le plus bel FC Nantes de tous les temps après son triomphe national de 1982-83. Premier tour de C1 1983-84, patatras : 0-3 à Vienne, deux buts en 14 minutes à Saupin au retour (la Beaujoire ne serait inaugurée que huit mois plus tard), Amisse qui foire le 3-0 seul à deux mètres devant le but de Feurer, puis Panenka qui vient glisser le but à l’extérieur qui tue juste avant la mi-temps. 3-1 pour les Canaris au final, par ici la sortie alors que tout le monde disait que ce premier tour était faisable. Une fois de plus, comme tant d’autres avec ces Nantais qui ont presque toujours déçu en Europe…

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    1. Les Mitropa d’avant-guerre ont elles la même valeur que dans les années 1950 ? J’ai mon avis… Le First en gagne une dans les années 30 face au Wiener SC, encore un club viennois.

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      1. Non, évidemment. Elle est quand même fantastique cette Compétition.

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      1. Un peu, oui mais aussi Josef Blum qu’on devrait retrouver dans le top des défenseurs des années 1920.

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      2. @Verano, et vu que Khiadia évoquait la question stadiale, pour ton prochain passage sur Rome : le Stade Trastevere est fait pour toi, il me semble..

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      3. Je ne connaissais pas ce stade qui semble en effet mériter le détour. Un fief de Romanista, probablement.

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