Gambardella – Les 30 glorieuses – Partie 5

La Coupe Gambardella souffle ses 70 bougies cette année. Ce trophée prestigieux, ainsi nommé en l’honneur de l’ancien président de la Fédération, Emmanuel Gambardella, mort en 1953, est un patchwork d’épopées et de naufrages sans cesse renouvelés qui mériterait assurément l’intégralité d’un ouvrage ! A défaut de ce travail titanesque, nous vous proposons humblement quelques courtes vignettes, quelques bouts de chemins et d’espoirs qui font le sel de cette compétition. Ce sont les 30 glorieuses. 30 comme le nombre de clubs différents à l’avoir remportée. Bonne lecture !

Incompréhensible…

21 ans après sa création, le PSG gagne la Gambardella en 1991. Son unique trophée dans l’épreuve… En 1978, la première génération de titis parisiens à briller est celle des Franck Tanasi et Jean-Claude Lemoult, auxquels s’ajoutent les Merelle, Cardinet ou Mongelli qui fouleront quelques fois la pelouse du Parc. Une équipe de futurs gérants dans le BTP et l’immobilier qui s’incline face à la maestria d’Alain Couriol de l’INF Vichy. Un natif de la capitale qui leur avait échappé, prémices d’un système de détection défaillant… 11 saisons plus tard, c’est le HAC qui brise à nouveau les ambitions du club. Dans un Geoffroy-Guichard tout acquis à sa cause, la bande de Revault résiste aux assauts des Francis Llacer, De Vasconcelos et Pascal Nouma. Une désillusion de plus que le beau parcours de la troupe d’Erick Mombaerts (élimination du LOSC, Caen et Metz) ne peut atténuer.

Le PSG s’approche néanmoins du but. Ayant sorti Martigues en demi-finale, Paris retrouve la finale en 1991 face à l’ogre incontesté de la compétition, l’AJ Auxerre. Dans les vestiaires du stade la Beaujoire, Nouma et Jean-Claude Fernandes, présents lors de la défaite face au Havre deux ans plus tôt, mettent leurs coéquipiers devant leurs responsabilités et jurent que le dénouement sera cette fois-ci différent. La rencontre est équilibrée, la séance de tirs au but est inévitable et c’est la grande tige, Richard Dutruel, qui se montre à son avantage. Un soulagement, plus qu’un accomplissement, pour les Bernard Allou et Laurent Boli qui pensent enfin conduire l’emblème de Paname sur la voie du succès. Ce ne sera pas le cas… Depuis ce sacre, le PSG n’a connu qu’une unique finale, perdue en 1998, face aux Verts de Julien Sablé. Il est d’ailleurs assez triste de constater qu’aucun finaliste parisien ce jour-là ne percera dans le monde professionnel. En définitive, si on additionne les deux sacres du Racing à celui du PSG, le poids de l’Île de France dans l’histoire de la Gambardella paraît presque anecdotique. Incompréhensible quand on connait son inestimable vivier…

Les guerriers de la Paillade

Loulou Nicollin a toujours eu une affection particulière pour ses poulains. Ces enfants, couvés jusqu’à l’asphyxie, qui lui ont procuré tant de joie. L’histoire n’est pas dénuée de déceptions. En 1984 et 1985, Montpellier accède à la finale de la Gambardella, l’effectif est d’une infinie qualité. Robin Huc dans la cage, Pascal Baills sur son côté droit, Franck Passi à la récupération et Kader Ferhaoui à l’explosivité. Un groupe cornaqué par la palette complète de Laurent Blanc. Nicollin, fier comme un pape, y croit dur comme fer, la claque sera sévère… Quand ce n’est pas Cantona qui claque un triplé d’anthologie, c’est sa meilleure arme, Laurent Blanc, qui déraille au pire moment, en ratant son penalty face au gardien lavallois. Une blessure qui ne se refermera qu’onze ans plus tard grâce à un attaquant ivoirien… Montpellier est loin d’être favori face à l’armada nantaise des Landreau, Piocelle et Monterrubio. C’est pourtant la malice d’Ibrahima Bakayoko qui offre le sacre au fidèle coach Mama Ouattara. Les Héraultais qui ont pu compter sur le soutien inattendu d’un public nîmois, venu en masse pour la finale de la Coupe, ce qui fit admettre à Nicollin qu’il avait « souvent raconté des conneries sur les supporteurs des Crocos mais cette manière d’encourager mon équipe, alors là, chapeau. »

Si la Paillade de Rémy Vercoutre et Toifilou Maoulida ne réussit pas à conserver son titre l’année suivante, en s’inclinant à nouveau aux penaltys face à l’OL du copain Aulas, elle va accueillir le siècle naissant avec la fougue d’un bronco sauvage. Auteurs d’un parcours exemplaire en phase de qualification, 19 buts marqués contre un seul encaissé, les Montpelliérains soulèvent leur deuxième Gambardella en 2009. Les prémices d’une période dorée pour le club puisqu’ils seront nombreux à connaître l’inespéré sacre en Ligue 1 en 2012. Dans l’ordre, Jonas Martin, Abdelhamid El Kaoutari, Younès Belhanda ou Remy Cabella. Nullement rassasié, Montpellier en remet une couche en 2017, aux dépens de l’OM. Un troisième titre qui le couronne comme le seigneur du foot languedocien de l’ère récente, reprenant ainsi le sceptre du Nîmes Olympique. Magnifique bilan de sept victoires, pour une région aujourd’hui disparue, accroc à la Gambardella…

La rillette et la grenouille

Les années 2000 sont la période la plus enthousiasmante de l’histoire du football manceau. Ayant atteint trois fois consécutivement le dernier carré de la Coupe de la Ligue et guinchant sur les riffs des solistes Gervinho et Daisuke Matsui, le MUC se laisse aller à des rêves de grandeur qui culmineront avec la construction de la funeste MMArena. En 2004, l’équipe A finit sa première saison dans l’élite à la 19ème place mais ce n’est que partie remise. Le ruthénois Frédéric Hantz reprend un gouvernail qu’il mène à une remontée immédiate, influencé par le superbe prestation des juniors en Coupe Gambardella, un an auparavant.

Lors de l’édition 2004, Le Mans de Mathieu Coutadeur et Mamadou Samassa passe par un trou de souris face à Guingamp et Auxerre et accède à une finale inattendue contre le Nîmes Olympique. Lycéens pour la plupart, ayant gravi un à un les échelons, les Manceaux forment un groupe soudé, capable de se dire les mots qui fâchent, sans que la rancune ne s’installe. Un moment de communion rare que seule la jeunesse sait offrir et dont ils vont croquer chaque seconde à pleines dents… Sur son banc, Arnaud Cormier, le coach, ne tient plus en place et tente de calmer les ardeurs de son capitaine, Jérémy Choplin. Le MUC domine et profite d’un but contre son camp nîmois pour prendre l’avantage, avant de parachever son succès sur une réalisation de son porteur de brassard préféré. Un moment hors du temps selon lui : « Je rêvais de porter la coupe. Maintenant, le rêve est devenu réalité. » La suite du roman n’aura pas la fin escomptée. Pris aux pièges de ses ambitions, mais n’est-ce pas inhérent au sport de compétition, le MUC ne tiendra que quelques années dans l’élite et verra la construction de sa nouvelle enceinte sévèrement critiquée par le microcosme économique local. La sempiternelle histoire de la grenouille voulant être plus grosse que le bœuf…

Toute histoire, même modeste, est belle…

Il est parfois tentant d’enjoliver les faits. Comme lors d’un entretien d’embauche où l’on n’assume pas son CV. C’est ce que fait la direction du Téfécé depuis plusieurs années. On s’approprie la date de création d’un club avalé par le Red Star depuis les années 1960. On récupère sa Coupe de France 1957 par la même occasion, de quoi combler une étagère vide de trophées prestigieux et ainsi s’offrir un peu de légitimité… Peu importe dès lors que les couleurs soient différentes, le public gobe tout car lui, non plus, ne supporte pas l’anonymat. Car il a honte de son passé, honte d’avoir été un parmi des millions de modestes à avoir reluqué les belles devantures… La première épopée en Gambardella du TFC actuel ne date donc pas des années 1960, bien que l’épisode 1963, en lever de rideau de France-Brésil à Colombes vaille son pesant de cacahuètes, mais bien de 1972 grâce aux exploits de l’US Toulouse, l’ancêtre des Violets. Les Pitchouns sang et or (sic) jouent les terreurs et atomisent le PSG 5-0 en demi-finale, avant de céder face à l’AS Monaco de Vitalis et Perruchini.

33 ans plus tard, le Téfécé ne fait pas le malin avant de rejoindre le Stade de France. Le sort a été plutôt clément avec lui sur la route de Paris (Hyères, Sedan et Amiens) mais le boss final a tout de l’Attila moderne… L’OL des Riou, Mounier, Ben Arfa, Benzema et Rémy à qui la planète foot promet de grands destins. Des jeunes déjà dans les clous professionnels pour certains, qui peut croire en l’escadron de Xavier Pentecôte et Kevin Constant ? Personne évidemment et c’est bien pour ça qu’ils vont le faire. 6-2, vous avez bien lu, un 6-2 cinglant, branlée d’un autre âge… Rémi Riou, abandonné par sa défense, passe une soirée cauchemardesque, sous les yeux d’un Jean-Marc Philippon, le coach toulousain, hilare. Il est là, le premier sacre national du Téfécé deuxième version et nulle part ailleurs… La Ville Rose regoûte au Stade de France en 2019 mais, bien que mieux outillée qu’en 2005 (Ngoumou, Manu Koné ou Amine Adli), ne peut rien face à la soif de victoire des Verts. Une défaite comme autant de souvenirs que la médiocrité des envieux ne pourra jamais comprendre…

Nissa la bella est en retard…

L’OGC Nice est le dernier grand bastion du foot français à avoir remporté la Gambardella. Étonnant pour une institution ayant formé, entre autres, les Dominique Baratelli, Hugo Lloris ou Daniel Bravo… En parlant du Petit Prince, c’est d’ailleurs grâce au talent du Toulousain que Nice acquiert sa première finale, en 1981, face au FC Metz de Luc Sonor. Bilan ? Une prestation malheureusement insipide au pire moment, qui gâche un peu le parcours de haute volée des Alain Wathelet, Volpatti ou Jannuzzi. Alain Wathelet, on le retrouve en 2002, au volant du Gym, pour un résultat analogue face au FC Nantes. Deuxième revers en finale, marqué par la tristesse infinie d’Anthony Scaramozzino mais une cure de jouvence pour son coach : « Cela ravive bien des souvenirs et me fait chaud au cœur. Notre groupe fait preuve de solidarité, a envie de vivre ensemble, dans le respect de notre devise, le progrès finit par payer… »

Et oui Alain, le travail finira par payer, en 2012… Suivant la dynamique de gamins fous amoureux de leur club, les Bosetti, Cardinale ou Dao Castellana, l’OGC Nice réalise une édition de toute beauté. Un derby de feu face à Monaco, Troyes pris dans la fournaise du Ray, Nantes enjambé à Orléans, le groupe de Guy Mengual débarque au Stade de France sûr de sa force et sans aucun complexe. Arthur Leblanc concrétise un corner de Jordan Amavi, avant qu’Alexy Bosetti, le pichichi de la compétition, ne place au fond des filets un ballon mal contrôlé par le gardien stéphanois. Nice mène 2 à 0, sans qu’il n’y ait rien à redire. La réduction du score des Verts, en seconde période, ne changera rien, ce sont bien les partenaires de Neal Maupay qui soulèvent la Coupe. Enfin…

Troyes II

Les uniques villes pouvant se targuer d’abriter deux vainqueurs différents de la Gambardella sont Paris et Troyes ! Nous l’avions vu au premier épisode, l’Association sportive troyenne et savinienne, qui comptait alors dans ses rangs Marcel Artelesa, avait gagné l’édition 1956 face à Reims. Equipe valeureuse pendant les années 1950, elle était réapparue, 10 ans plus tard, sous l’appellation de Troyes Aube Football et avait joué quelques saisons dans l’élite, avant de sombrer définitivement en 1979. En 1986, Angel Masoni reprend le flambeau et crée un nouveau club que nous connaissons sous le nom d’ESTAC.

L’édition 2018 de la Gambardella fait la part belle aux sans-grades. L’US Orléans, le Stade Brestois, l’ESTAC et Tours se partagent un dernier carré, débarrassé des cadors habituels, et tout ce beau monde a rendez-vous au Complexe Sportif Michel Amand de Buxerolles, au nord de Poitiers. A la suite de rencontres âprement disputées, ce sont les Troyens et les Tourangeaux qui tirent leur épingle du jeu. Leurs dirigeants s’enlacent, Paris nous voilà ! Malheureusement pour Tours, le suspense en finale sera de courte de durée… Mené 2-0 au bout de 20 minutes, deux réalisations de Bryan Mbeumo, l’actuel attaquant de Manchester United, Tours est groggy et le but de Buni Jorge arrive bien trop tard. Les Aubois s’imposent logiquement, pour le plus grand plaisir de leur coach Carlos Lopez, faisant de l’ESTAC, notre 30ème et dernier champion de la série ! Preuve que même une ville de taille moyenne est capable de luire plus régulièrement dans le ciel que la comète de Halley ! That’s all folks !

Ainsi s’achève la saga de la Coupe Gambardella. A notre sauce… Une épreuve en mouvement, amputée de deux éditions pendant le COVID et objet de tous les desirs, qui aura accumulé les miles aux quatre coins de l’Hexagone ! A Nancy, Caen ou la Corse désormais, d’enfin rejoindre le bal des diplômés…

23 réflexions sur « Gambardella – Les 30 glorieuses – Partie 5 »

    1. Haha. Oui, c’est le terrain du Rangueil Football Club ! Sur le droite, on a le Canal du Midi. A l’époque, on avait sans exagérer la pire pelouse de la ville. Des trous partout. On jouait régulièrement au stade Robert Barran, sur les coteaux de Pech David. C’était déjà mieux. J’ai vu qu’ils avaient récemment atteint le 5ème tour de la Coupe en 2020-21. Pas mal pour un club de départemental.

      0
      0
  1. Le Mans dans les années 2000, c’était sympa. Et puis ce fut la démesure avec des salaires insupportables après la relégation de 2010 et la remontée manquée de peu l’année suivante. Le club coule financièrement, le nouveau stade voulu par le président Lagarda n’a plus de sens et le naming, une première en France, se traduit par un fiasco pour l’annonceur après la liquidation du club qui retrouve sa vieille enceinte de Bollée faute de pouvoir supporter le loyer du MMArena.
    De retour en L2, ce serait sympa que le club retrouve sagement l’élite pour que ce joli stade goûte enfin à la L1.

    0
    0
      1. Je me rappelle bien de ses debuts, dans une equipe du RC Malines (ne pas confondre avec le plus illustre FC) qui etait un oiseau pour le chat. Pour ses debuts, il en etait l’un des rares joueurs à niveau, avec le futur standardman Asselman je dirais. Je l’ai vu ensuite à l’oeuvre au mythique Staayenveld (remember articles consacrés aux debuts de Goethals) de Saint-Trond, j’aimais bien, un joueur entier qui donnait envie de pousser l’equipe avec lui. Puis il n’y eut bientot plus que la presse pour temoigner qu’il etait devenu une attraction en D2 francaise.

        A une epoque où l’on bougeait bien moins – surtout les Belges, epouvantablement casaniers – , son parcours (d)etonnait.

        Revenu en Belgique, il a essentiellement travaillé pour le Standard, avant qu’une sale maladie.. C’etait notoirement un tres chic type.

        0
        0
  2. Un peu comme Sochaux en 83, les générations 84 et 85 de la Paillade sont assez marquantes. Plusieurs mecs participeront au premier match européen face à Benfica et à la victoire en Coupe face au Matra en 90.

    0
    0
      1. Oui, certains transferts étaient bizarres. Dutruel, c’est évidemment les grandes années du Celta. Mostovoi, Karpin, Makelele, Penev, Salgado, Revivo… et d’autres !

        0
        0
      2. Giovanni, dans mes souvenirs c’est une grosse frappe..sterile, un bourrin amelioré.

        Sans pour autant casser la baraque, Rochemback etait le meilleur des deux.

        Pour l’epoque, ca créait des attentes evidemment : Bresiliens, pas connus, le Barca……mais quel four au final..

        0
        0
      3. Vous parlez du Giovanni qui est une idole d’Olympiakos ? Alors oui, ce n’était pas un esthète et il ne s’est jamais imposé mais il était clairement en concurrence avec Sonny Anderson pour Van Gaal lors des sacres 98 et 99. En tout cas dans mes souvenirs, à confirmer…
        D’ailleurs, le recrutement de Sonny va être déterminant pour deux clubs. L’OL evidemment mais aussi Villarreal CF. Son unique saison là-bas correspond à l’éclosion de la plus belle réussite du foot espagnol de ce siècle.

        0
        0
      4. et des gustavo lopez, benni mc carthy, sacré équipe, oui… mais qui s’est fait retourné par bollaeert et les sang et or. Top 3 des plus grands matchs de notre histoire.

        0
        0
      5. Je visais ledit GEovanni (avec un « e » – desolé : foutu correcteur automatique), celui qui passa ensuite par le Portugal et la PL.

        Giovanni je ne m’en rappelais meme pas.

        0
        0
    1. Oui, Couriol sera également champion 82 avec Monaco. Et du mondial espagnol puisqu’il marque face à la Pologne. Je ne sais réellement quel était son niveau. Attaquant assez rapide, il me semble.

      0
      0
      1. Oui, j’ai aussi le souvenir de sa vitesse. Je crois qu’il était à son top à Monaco, pas très marquant à Paris. J’avais oublié qu’il était de l’aventure espagnole

        0
        0
  3. « Ainsi s’achève la saga de la Coupe Gambardella. A notre sauce » oui l été est bel et bien fini, il est temps de remballer. Merci pour avoir animer le stand 5 du marché haha

    Au moins une compétition à laquelle j ai participé. Pas vu mes exploits du 1er tour district mentionnés … haha le graal c etait d atteindre le tour (je sais plus lequel… au niveau regional non ?) où tu avais les maillots credit agricole…

    0
    0
      1. Pas grand chose à en dire hélas, je l’ai pas eu mon maillot crédit agricole putain !

        0
        0

Laisser un commentaire