Le vrai Captain Tsubasa

Musashi Mizushima est l’un des joueurs japonais les plus importants de l’histoire, non pas pour ses buts, ses passes décisives ou ses dribbles, pas même pour avoir été un joueur novateur dans son pays mais car il fut le joueur qui inspirera dans un premier temps Yoichi Takahashi pour son manga Captain Tsubasa, ce dernier devenant l’étincelle qui fera naître le football nippon.

L’histoire d’un précurseur

La vie de Mizushima débute en 1964 quand il naît à Tokyo d’un père fan de football. Dans un pays où le baseball est roi, le jeune garçon commence à taper dans un ballon rond dès ses trois ans. Le football nippon est alors tout juste en train d’éclore, la JSL, Japan Soccer League, est fondée en 1965 et la première grande star du football au sein de l’archipel, Kunishige Kamamoto, commence à faire parler d’elle.

En 1971, il déménage de la capitale vers Shizuoka, 200 kilomètres plus au sud et surtout place centrale du jeune sport dans le pays. Là-bas, il montre un talent certain, dépassant largement celui des autres garçons de son âge. Sa vie change quand en novembre 1974, Pelé atterrit au Japon pour donner des cours de football à de jeunes garçons au stade olympique national de Tokyo. Au milieu des autres enfants, le jeune Musashi impressionne et, récompense suprême, reçoit des louanges de la part du Roi lui-même. C’est décidé, il étudiera au Brésil.

Arrivé au Brésil en avril 1975, il rejoint l’équipe des jeunes de São Paulo FC avec l’aide d’un entraîneur nippo-brésilien nommé Nelson Matsubara. Là-bas, il devient le tout premier japonais à partir au Brésil pour jouer le football, un chemin que nombre de ses compatriotes suivront dans les décennies à venir.

Son parcours, en dehors des sentiers battus, attire l’attention de la chaine de télévision TV Asahi, qui se lance dans la promotion de Mizushima en le suivant et en diffusant des reportages de son quotidien en tant que joueur. A l’adolescence, cette promotion permet à Musashi de remporter un premier parrainage avec la société Yashica, fabriquant d’appareils photo et d’accessoires photographiques. Arriverons ensuite d’autres marques nippones tel que l’équipementier sportif Mizuno.

Son rêve se réalise le 3 septembre 1984 lorsqu’il signe officiellement un contrat professionnel avec le São Paulo FC. Mais dans un effectif cinq étoiles où Darío Pereyra est un titulaire indiscutable, le statut d’étranger de Mizushima se heurte à la réalité des règles. Malgré une naturalisation, il n’a pas sa place dans l’équipe première de São Paulo, devant lutter face à des joueurs tels que Careca, Müller ou Falcão. Suivront des prêts, d’abord à São Bento en 1986 puis à Portuguesa et Santos en 1987 puis 1988.

Il revient dans son pays de naissance en 1989, rejoignant le Hitachi Soccer Club, futur Kashiwa Reysol. Là-bas, il jouera une vingtaine de match en deux ans avant de partir au All Nippon Airways Soccer Club, futur Yokohama Flügels. Alors âgé de 28 ans seulement, il prendra sa retraite en 1992, due à de nombreuses blessures.

Star d’un manga

Musashi Mizushima devient une personnalité majeure dans l’histoire du football japonais quand, en 1981, le jeune auteur Yōichi Takahashi publie dans le Weekly Shōnen Jump un manga qui le rendra célèbre : Captain Tsubasa.

L’auteur tokyoïte, dans le chapitre 9 de son œuvre, sème les graines qui aboutiront au départ vers le Brésil de son protagoniste bien des années plus tard.

Ledit protagoniste, Tsubasa Ozora, est un jeune garçon de Shizuoka qui décide de partir au Brésil sur les conseils d’un grand joueur à la retraite. L’inspiration est évidente.

Le succès du manga vit le football devenir un sport populaire chez la jeune génération. Il est estimé qu’environ 250 000 Japonais rejoignirent des écoles de football entre 1981 et 1987. Cette réussite dans le domaine de la bande dessinée, couplée à la popularité du ballon rond chez les jeunes fit avancer le football nippon avec la création de la J-League en 1992, année où le Japon organisa la Coupe d’Asie pour la première fois.

Mais malgré cela, Musashi Mizushima reste un joueur très méconnu, voire totalement inconnu en dehors de son archipel de naissance. Sa carrière décevante et son absence de sélections en équipe nationale aurait dû lui assurer de ne pas rester dans l’histoire, si ce n’était pour son parcours, jusqu’alors unique, qui en fit l’un des joueurs les plus capitaux dans la popularisation et la professionnalisation du sport-roi au sein du pays du Soleil levant.

18 réflexions sur « Le vrai Captain Tsubasa »

  1. Difficile en effet de trouver sa place dans ce São Paulo FC champion 86 avec Careca, Müller, Silas, Pita, Dario Pereira. En revanche, Falcão ne joue pratiquement pas, les genoux en capilotade et n’est pour rien dans le titre du Tricolor.

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      1. J’ai jamais aimé le personnage d’ Aton. Même dans les dessins animés, je préférais les outsiders! J’aimais les frères Derrick et l’équipe de Philippe Callahan. La Toho, c’était quand même pas mal. Avec Landers, Ed Warner et Danny Melow. Haha, ces noms. .

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      2. Ouais les noms sont folklo, méthode AB Prod oblige !

        Il aura fallu attendre le remake de 2018 pour que les japonais imposent les noms originaux à l’étranger, et ce même si les noms à la con sont devenus cultes !

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      3. Tu sais, chacun faisait à sa sauce. En Espagne, ça s’appelait Oliver y Benji. Au Maghreb, Captain Magyd…

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  2. Le genre de sujet où je n’ai que des questions 🙂

    Réalité des règles, nombre d’étrangers.. C’était combien d’étrangers max, au Brésil à l’époque?

    Vu de loin, avec tous les détails, contexte et que sais-je qui m’échappent, au vu de son parcours ensuite : que pouvait-il inspirer au sein d’un effectif voire d’un club pareils?

    Le gros plan com a-t-il déjà été envisagé, au titre d’hypothèse, pour expliquer l’appréciation de Pelé, la bédé, ce contrat au FC SP peut-être..??

    Je veux dire : il quitte son pays pour le Brésil, aux antipodes donc, à ses 10 ans………………. ==> Quel talent en faisait autant à l’époque???

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    1. Alors c’est un étranger maximum, avant Darío Pereyra, c’était son compatriote Pedro Rocha qui servait d’étranger pour le Tricolor !

      Mais ça ne changeait rien pour Mizushima qui, à partir de 1984, avait été naturalisé et rentrait donc dans les quotas.

      Vis-à-vis de ce qu’on pensait de lui à l’époque au sein de Sao Paulo, il était vu comme un bon joueur mais y’avait juste pas la place pour rentrer dans la rotation d’un tel effectif. Finalement, il aura un peu de temps de jeu dans des équipes de niveau moindre mais il s’est révélé assez fragile et même lorsqu’il joue au Japon, alors qu’il devrait logiquement être à son pinacle (25-26 ans), il joue peu et en plus, prends une place d’étranger…

      Quand au côté communication, le début de sa vie semble légitimement être un rêve éveillé fait pour écrire une belle histoire mais est pourtant totalement inopiné. Pelé a fait une visite au Japon, il a vu ce gamin et il a fait des choix forts.

      Par contre, à partir du moment où il quitte le pays, son côté exotique en fait évidemment une attraction, c’est « le gamin qui a été adoubé par Pelé et est parti joué au Brésil ». TV Asahi le suit régulièrement, il devient nationalement connu (alors qu’il joue en équipe jeunes !) et les marques s’intéresse à lui.

      Pour ce qui est de Tsubasa, c’est surtout Takahashi qui, en fan de baseball qu’il est (il est devenu fan de football sur le tard et a choisi ce sport pour son manga car peu de concurrence, contrairement aux mangas sur le baseball qui était saturés) s’est intéressé aux grands joueurs de son temps car il n’était pas du tout un spécialiste.

      Le manga débute en 1981 mais un one-shot avait déjà été fait en 1980, c’est la CDM 78 et la CDM Junior de 79 qui ont grandement inspirés les débuts du manga. Donc à ce moment-là, Mizushima est un joueur pertinent, un espoir nippon qui va réussir à jouer dans le pays du football, un vrai modèle à suivre pour le personnage de Tsubasa Ozora.

      C’est d’ailleurs intéressant de noter que des années après, Takahashi évoquera surtout Miura comme inspiration, ce dernier ayant fait le trajet au Brésil également jeune mais en ayant une carrière ensuite. Aujourd’hui, l’auteur alterne entre les deux voire évoque les deux en fonction de son humeur.

      (J’adore le manga et son auteur mais on sent fort qu’il suit le football de loin sur bien des points et c’est très très frustrant dans son œuvre.)

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      1. Olivier Aton finit par jouer au Sao Paulo, non? Prevue que l’auteur suit les traces de Mizushima.

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      2. Et Thomas Price à Hambourg, il me semble. A l’époque où c’était un grand d’Europe.

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      3. Tout à fait, d’ailleurs les mecs qui ont fait le nom occidental ont du se sentir bien cons en voyant que l’un des personnages du titre se barrait en RFA au bout de 30 épisodes…

        Et d’ailleurs, le personnage à annoncé qu’il quittait Hambourg pour le Bayern y’a quelques mois.

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      4. Y a un truc avec le personnage de b.d sur le foot et la Barça. Eric Castel y passe également dans les années 70.

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