Top 51 – Stade de Reims (partie 1)

Après le top 50 lensois du camarade Ajde, mythique jusqu’aux ruelles de Potosí, l’ami Ubri nous offre celui du non moins mythique Stade de Reims ! Nous le remercions chaleureusement et bonne lecture !

Numéro 51 : Aissa Mandi

J’ai finalement décidé d’arriver au chiffre 51, plus significatif pour un club de Marne ! Et qui d’autre qu’un natif du département pouvait tenir ce poste…
Au club depuis ses huit ans, Aissa Mandi est un pur produit de la formation rémoise. Il sera même le seul joueur du groupe qui retrouve la Ligue 1 en 2012 dans ce cas. Polyvalent, il joue arrière droit ou gauche mais c’est sur le flanc droit qu’il s’impose en 2013. Rapide et porté vers l’offensive, il s’impose comme un des latéraux les plus prometteurs du championnat. Mais également très bon de la tête, il est replacé en défense centrale à partir de 2015. Il devient aussi le premier joueur formé au club à disputer la Coupe du monde (avec l’Algérie) depuis Robert Pirès. Après le départ de Krychowiak, il devient le véritable taulier de l’équipe mais ne parvient à éviter la relégation en 2016. Après 172 matchs (et 14 buts, pas mal du tout pour un défenseur), il rejoint le Betis.

Numéro 50 : Alain Afflelou

Afflelou n’a jamais porté le maillot rouge et blanc, ni même évolué au sein de l’organigramme du club. Son seul lien est d’avoir vibré devant les exploits de Kopa, Fontaine et Piantoni comme beaucoup de gamins ayant grandi dans les années 50. C’est bien plus tard qu’il réalise un geste de très grande classe justifiant sa présence dans ce classement… Octobre 1992, à l’issue d’une seconde liquidation judiciaire en moins d’un an, le club est contraint de se séparer de ses bijoux de famille. L’un des deux clubs français les plus titrés (à l’époque) vend aux enchères l’intégralité de ses coupes et trophées. Même si l’opération n’est pas dénuée de communication, l’opticien débourse 700 000 francs pour s’adjuger tous les lots… avant de les restituer au club champenois

Numéro 49 : Robert Pirès

J’ai également hésité à coucher ce deuxième nom sur ma liste puisqu’il n’a jamais évolué en équipe première.
Mais là encore, c’est un symbole des années noires et un rendez-vous manqué. Le plus grand espoir du club, enfant de la ville et capitaine de la « Gambardella » doit partir (à Metz) en 1992 suite à la perte de statut professionnel et la fermeture du centre de formation. La suite, tout le monde la connaît. Celui qui se faisait appeler à l’époque Roberto a débuté le foot à l’ES Sainte Anne, le grand rival local du Stade en équipe de jeunes. Il n’enfile le maillot rouge et blanc qu’à 15 ans (au grand dam de son père selon la légende) avant d’en intégrer le centre de formation. Son attachement à ses premiers clubs ne s’est jamais démenti. Très vite propulsé parrain du club de St Anne (avec qui il a remporté un titre national chez les U10), leur stade porte désormais son nom. Quant au Stade de Reims, il a toujours montré son attachement au club. Vers la fin de sa carrière, la rumeur de son retour revenait chaque année. En vain, évidemment. Une sorte d’Arlésienne… ou de Drogba.

Numéro 48 : François Calderaro

Un autre enfant de la ville qui connut lui aussi la gloire et (presque) la sélection en partant au FC Metz. La comparaison s’arrêtant très vite ensuite… Avant ça, Calderaro c’était mon premier souvenir de stade, le bomber de la D2. Lancé par Carlos Bianchi qui en connaissait un rayon en la matière, il plante à 58 reprises, formant un temps le duo le plus prolifique de D2 avec le buteur chilien Ivo Basay. Cela ne suffira malheureusement pas à faire remonter le club parmi l’élite qui échoue de peu chaque fin de saison. La prouesse de cette génération restera d’atteindre deux années de suite la demi-finale de coupe (1987 et 1988, éliminés par l’OM puis Metz).

Numéro 47 : Jean-Pierre Bertolino

Avant Calderaro le rôle de buteur maison fut tenu pendant près de 10 ans par Bertolino. Ce dernier s’impose lors de la saison 1979, la dernière passée en D1 avant… 33 ans. Le jeune Berto y inscrit quatre buts et sera l’une des rares satisfactions dune saison catastrophique. Il devait penser retrouver très vite l’élite… A tort, le restant de sa carrière s’écrira exclusivement en D2 où il plante 91 buts. Très lié au club, il reprendra du service comme entraîneur adjoint pendant les années noires de retour à l’amateurisme. Son fils Joffrey après des débuts prometteurs en équipe première se blessera lourdement.

Numéro 46 : Michel Hidalgo

Avant d’être l’homme de la renaissance du foot français et avant même d’être l’un des piliers de la première grande équipe de Monaco, Michel Hidalgo effectua trois saisons en Champagne. Arrivé du Havre, en 1954 il peine à s’imposer parmi par la ligne d’attaque, ne disputant que 78 matchs en trois ans. S’il n’est pas toujours titulaire et pas toujours à son poste fétiche d’ailier droit, il dispute néanmoins deux grandes finales à un an d’intervalle. Lors de la dernière édition de la Coupe latine en 1955 et lors de la première coupe d’Europe des clubs champions en 1956 (toutes deux perdues face au Real). Point d’orgue de sa carrière à Reims, il s’offrira même le luxe d’y inscrire un but. La dernière saison décevante individuellement et collectivement, est marquée par le match de la honte contre les amateurs d’El Biar en coupe de France. N’entrant plus dans les plans du duo Germain-Batteux qui recrutent coup sur coup Jean Vincent et Roger Piantoni, il quitte le club en 1957.

Numéro 45 : Yunis Abdelhamid

Après une saison très décevante où le club vient de rater la montée en L1 (qu’il avait quitté un an plus tôt), l’effectif est largement remanié. Profil recherché pour les nouvelles recrues : des revanchards n’ayant pas ou peu connu l’élite mais qui veulent y goûter à tout prix. C’est ainsi que débarque l’international marocain de 30 ans, Yunis Abdelhamid. D’entrée, il s’impose comme le taulier d’une défense de fer qui établit le record du plus faible nombre de buts de l’histoire de la L2.
Pas du tout impressionné par la Ligue 1, Abdelhamid est l’homme de base du coffre-fort mis en place David Guion et le symbole de cette équipe qui retrouve l’Europe 57 ans après sa dernière participation. Ses partenaires en défense centrale changent (Julian Jeanvier puis le belge Björn Engels et enfin le néo-pro Axel Disasi) mais au final Reims encaisse toujours aussi peu de buts. Véritable roc, il est le seul joueur de champ de champ qui dispute l’intégralité des 38 rencontres de la saison 2019 et établit un record de nombre de matchs consécutifs disputés.

Numéro 44 : Hassan Akesbi

Recruté au Nîmes Olympique dont il a fait les beaux jours pendant six saisons, en multipliant les places d’honneur mais sans jamais atteindre le Graal, Akesbi rejoint Reims en 1961 avec la ferme intention d’étoffer son palmarès. Au club, tout va mal. Ils sortent d’une saison ratée. Fontaine est gravement blessé et Jonquet tire sa révérence. L’avant-centre marocain est la recrue phare de la saison. Il va devenir le dernier grand buteur de l’âge d’or du club. Grâce à 22 buts dont un doublé dans le match phare face au Racing (balayé 6-2), puis un autre lors de la dernière journée face à Strasbourg, il est le grand artisan de cet ultime titre de champion de France du club rémois acquis dans la douleur (avec cette règle du goal-average chère à Fred Astaire qui permit de coiffer son cher Racing d’un fil !). La saison suivante est celle du déclin pour Reims mais Akesbi continue de planter, 24 buts cette fois. L’aventure se terminera en D2 où le club est relégué en 1964. Le Marocain s’y appliquera avec 11 buts mais insuffisant pour remonter.

Numéro 43 : Marc Collat

Arrivé au cours de la saison 2000-2001 en provenance de St Brieuc, Marc Collat a derrière lui une carrière amateur et entraîne depuis près de 20 ans. Il a notamment été directeur du centre de formation du PSG. Le Stade est alors en pleine reconstruction est remonté en National la saison précédente.
Très vite Collat impose son style, résolument offensif et obtient des résultats. Reims refait parler de lui pour la première fois depuis des lustres en sortant une Ligue 1 (Bastia) en huitième de finale de Coupe de France. Le club finira également la saison très fort (autant de points marqués sur les matchs retour que le champion de National) mais devra attendre un an avant de retrouver la Ligue 2, 10 ans après l’avoir quitté. Mais la marche est trop haute et l’effectif n’a pas le niveau. Il est remercié à la trêve et le club redescendra aussitôt. A la surprise générale, Jean-Pierre Caillot le rappelle sept ans plus tard. Même mission : remonter de National en Ligue 2. Mission réussie avec la manière une fois encore, mais à 60 ans le martiniquais ne veut plus connaitre la pression des divisions professionnelles. Il laisse donc les rennes à son adjoint Hubert Fournier qui poursuivant ses principes de jeu obtiendra la remontée en Ligue 1 deux ans plus tard.

Numéro 42 : Raymond Cicci

Repéré à 22 ans chez les amateurs de Longwy, le petit milieu de terrain Raymond Cicci débarque à Reims en 1951. Le club est alors en pleine transformation. Albert Batteux est devenu entraîneur (tout en continuant à jouer) et compte bien passer la vitesse supérieure en recrutant des jeunes prometteurs comme Raymond Kopa en provenance d’Angers. Cicci s’impose au milieu de terrain aux côtés de Penverne. Il remporte son premier titre de champion en 1953 et la même année la coupe latine (3-0 face au Milan des GreNoLi), seul trophée continental remporté par le club. Rapidement en concurrence avec Siatka et Leblond, son temps de jeu s’amenuise d’année en année. Il étoffera son palmarès d’un deuxième titre de champion (1955) et deux finales européennes mais sans être titulaire. Après 188 matchs, il quitte le club en 1957 pour Limoges.

Numéro 41 : Grzegorz Krychowiak

2 mars 2013. Fraîchement promu en ligue 1 après 33 ans de disette, Reims reçoit l’armada parisienne et ses stars qui roulent sur le championnat. Après une heure de combat intense, un homme surgit au second poteau pour ouvrir la marque, le Polonais Grzegorz Krychowiak. Réduits à 10, les Rémois tiendront héroïquement leur exploit, signant un déclic les conduisant au maintien. A 23 ans, Krychowiak réalise la grande prestation de sa carrière, non seulement buteur, infatigable il est partout et gagne un nombre incalculable de duels au milieu, muselant Matuidi, Verratti et Pastore.
Retour en arrière, arrivé de Pologne au centre de formation de Bordeaux à 16 ans, il cherche du temps de jeu et part en prêt en National à 19 ans. Reims tente le coup, bonne pioche. Le gamin s’impose en milieu défensif et participe à la remontée en L2. Il découvre ainsi le niveau professionnel et effectue une année pleine à l’issue de laquelle il est désigné joueur de l’année par le public mais se voit rappeler par les Girondins qui le prêtent à nouveau en L2, à Nantes.

Krycho rate ainsi l’année de la montée en L1 mais personne ne l’a oublié pour autant. Très proche d’Olivier Létang (qui le fera venir quelques années plus tard également au PSG) , il sera la recrue prioritaire du mercato. Ca tombe bien, Francis Gilot nouveau coach bordelais, ne compte pas sur lui (il va vite le regretter). La transition avec la L1 est instantanée. Dans une équipe de niveau Ligue 2 qui peine à chercher ses marques dans le grand bain, le Polonais surnage et enchaine des prestations XXL qui lui valent la sélection nationale. Son activité porte le club pendant deux saisons avant de rejoindre Emery à Séville. Le vide laissé au milieu de terrain se fera sentir et Reims connaîtra deux saisons très compliquées avant d’être relégué.

Ubri pour Pinte de Foot !

44 réflexions sur « Top 51 – Stade de Reims (partie 1) »

  1. Calderaro. Notre seule lumière dans les années D2 à Toulouse dans les années 90. Super mentalité. D’ailleurs, il faisait déjà son saut de main à la Hugo Sanchez quand il était à Reims ou ça a commencé à Metz ?

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  2. La photo de Pires le représente lors de la finale nationale des poussins. Jouée au Parc. Je me souviens avoir participé à cette compétition. Je ne sais pas si ça existe encore…

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  3. Merci pour ce top 51 original. J’avais oublié ce geste d’Afflelou, en effet très médiatisé à l’époque où on ne voyait que lui sur les écrans télé, et je pensais que le passage de Hidalgo avait été plus marquant, sans doute influencé par son statut de buteur en finale de C1.

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  4. Est-ce que je me trompe en disant que malgré son glorieux passé, le Stade de Reims n’a pas su conserver l’affection du grand public comme a pu le faire un club comme Saint-Etienne, autre grand déclassé du foot français ? Peut-être parce que le soutien populaire était moindre (Reims jouait ses grands matchs à Paris). Parce que l’impact de la télé dans les 50es était marginal. Parce que le temps a fini par effacer les traces de Batteux et Germain alors que Herbin et Rocher sont encore des noms familiers pour certains…

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    1. J’entrevois d’autres pistes, complémentaires : Parce que c’est plus lointain.. Parce que le noir et blanc.. Parce que c’était culturellement trop marqué, trop « french touch », trop « génie/genius français » (là où la contribution de Herbin consista surtout à importer/calquer de plus athlétiques méthodes et logiciels-jeu, en l’espèce issus du Nord de l’Europe).

      Ceci dit, pour moi et dans mon entourage, fût-ce au sortir des glorieuses années stéphanoises (Sainté = grande équipe, là n’est pas la question) : le sentiment le plus prononcé allait résolument vers Reims, ça restait LE totem du foot français, l’expression la plus illustre qui fût du football français…………mais c’est peut-être : 1) parce que nous av(i?)ons gardé conscience de l’apport rémois (perpétué à l’échelle européenne par Anderlecht).. 2) parce que, si Sainté contribua assurément à dépoussiérer le football français, fut d’autant impactant chez vous : son jeu n’avait par contre absolument rien d’inédit pour des footballistes du Nord.

      Et son fils prodigue Sinibaldi explique énormément de cela.

      Hors-Belgique par contre, faute peut-être de la moindre conscience de ce dont Reims fut culturellement significatif en son temps : Reims me paraît parler autant que ne le ferait l’Union St-Gilloise des années 30…………

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      1. Je t’avoue que je suis passé complètement à coté du parcours belge de Sinibaldi. Mais oui c’est un des porteurs de flamme du jeu à la rémoise, comme Batteux à St Etienne, Vincent à Nantes ou Flamion qui selon la légende a initié Guy Roux au coaching à Limoges.

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      2. Sinibaldi : trop long, pas le moment (pas le temps).. Je me rappelle toutefois en avoir touché un mot ici : https://www.pinte2foot.com/article/la-toile-du-sorcier-1-2-alignements

        En gros : en sus de ses apports rémois (le « petit-jeu » / foot-champagne se perpétue à Anderlecht alors même qu’il disparaît un peu partout), Sinibaldi fut le premier à jouer la défense en ligne en Belgique…mais de manière beaucoup trop radicale, et sans disposer de joueurs suffisamment intelligents, solidaires et disciplinés….. ==> Pour faire bref : Goethals améliora les idées de Sinibaldi, les expurgea de leurs tares, en modulant la ligne du hors-jeu selon le jeu de l’adversaire, en ajoutant une dimension de pressing et, surtout, en comblant les boulevards laissés derrière par le recours (voire l’invention??? en tout cas c’est antérieur à un Jongbloed) à un gardien-libéro – je ne connais pas de cas antérieur à celui-là.

        J’en mets 2-3 copiés-collés, allez :

        Laurent Verbiest, Pierre Sinibaldi et l’auteur des propos ci-rapportés, Paul Van Himst : « Notre ligne arrière se positionnait au milieu du terrain. Et en fait de marquage, c’était la défense de zone qui primait. Cela nous valut pas mal de déboires, surtout dans le cadre des coupes d’Europe. Ainsi à l’automne 1965, quand Liverpool nous a retournés le plus simplement du monde : cela faisait 30 minutes que nous monopolisions la balle, sauf qu’au moindre contre… A la pause, le score fut de 3-0. Nous jouions sur une ligne, et eux passaient à travers, comme dans du beurre. Et cependant Sinibaldi s’entêtait avec son système. Il fondait tous ses espoirs sur Lorenzo Verbiest, notre libéro : balle au pied, Laurent était aussi fort que Beckenbauer. Un talent immense, que Sinibaldi faisait jouer devant la défense. C’est Verbiest qui lançait et orientait le jeu, sonnait la charge, cisaillait les premières lignes adverses. C’était un jeu d’enfant pour lui. En fait, nous étions en permanence dans le camp de l’adversaire. Je trouvais ça formidable : ne jamais devoir reculer, ne penser qu’à attaquer, mais… Sinibaldi était une personne formidable, une influence décisive dans ma vie. Mais têtu comme une mule aussi : tout en fonction de nos qualités propres, ne jamais tenir compte de celles de l’adversaire. Cela nous joua bien des tours en Europe : éliminer le Real, brillamment…et puis en prendre trois de la tête contre Dundee – une équipe sur laquelle Sinibaldi n’avait, comme de coutume, pas jugé utile de se renseigner, et dont nous ne savions donc rien… Mais l’on n’aurait jamais parlé de football-champagne, si Sinibladi ne s’était à ce point accroché à ses principes. »

        (…)

        Ainsi que Goethals en conviendrait, « il faut avouer que les Anderlechtois étaient toujours bien reçus chez nous. J’avais en défense quelques durs à cuire qui adoraient faire valser les vedettes bruxelloises. On jouait physique, quoi. Mais que voulez-vous, on n’allait quand même pas leur offrir des pralines. Anderlecht, c’était l’ennemi à abattre. Le Sporting possédait une équipe formidable qui allait gagner cinq titres consécutifs entre 1964 et 1968. C’était l’époque de Van Himst, Jurion, Hanon et compagnie. L’entraîneur était le Corse Pierre Sinibaldi. Il pratiquait la défense en ligne, et pourtant Anderlecht n’avait pas les joueurs adéquats pour développer ce système… »

        « Comme Saint-Trond jouait le dimanche, j’allais pratiquement assister à tous les matchs à domicile du Sporting, qui se disputaient le samedi soir. J’ai largement eu l’occasion d’étudier le jeu anderlechtois. En fin de compte, je me suis dit que ma propre équipe de Saint-Trond était bien mieux armée pour jouer la ligne. Et, progressivement, nous sommes devenus les véritables spécialistes de la défense à plat !

        Prendre une défense en ligne à son propre piège, c’est la performance que j’ai réalisée avec Marseille contre l’AC Milan. Mais figurez-vous que j’avais déjà réussi cet exploit un quart de siècle plus tôt, en battant Anderlecht plusieurs fois avec les petits Limbourgeois. Vous savez, le foot c’est comme la mode. On n’invente plus rien aujourd’hui. Toutes ces histoires de défense en ligne datent des années 1960. »

        Trop modeste, Goethals omettait de préciser avoir, déjà à l’époque, entrepris d’avancer sa ligne à 30 mètres, 40 mètres, 50 mètres (« mais pas un centimètre de plus! »)… Et que dire de son gardien Léon Bosmans, déniché parmi la jeunesse du cru, et que Goethals encourageait à participer lui aussi au piège du hors-jeu, en s’aventurant toujours plus haut hors de son grand rectangle…

        (…)

        Lemoine : « A ce propos, il serait peut-être temps qu’on dise enfin la vérité sur ces histoires de piège du hors-jeu, et ce de la manière la plus honnête et sincère qui soit. Sans plus mentir le moins du monde, comme tant d’autres l’ont déjà fait. Et donc Raymond avait fait venir Jean Claes, en provenance de l’Union Saint-Gilloise. Un stoppeur doté d’un bon jeu de position, et qui excellait tout particulièrement dans le jeu de tête. »

        « Avant le coup d’envoi du championnat, nous avons disputé une rencontre de coupe. Et à chaque fois que l’adversaire faisait une passe dans la profondeur, je voyais Claes se projeter soudain en avant…sauf que moi je ne comprenais pas qu’il essayait de mettre son adversaire hors-jeu! Et pour cause : mon problème, en fait, c’est que j’avais été dressé à pratiquer la couverture mutuelle, alors je m’efforçais à chaque fois de combler les écarts… Et puis, à un moment : j’en eus mon saoul, la comédie n’avait que trop duré. Si bien que, de conserve avec Claes, je fis moi aussi un pas en avant. Et c’est ainsi que notre piège du hors-jeu est apparu, pas autrement. »

        Henderix s’interroge : « Ce n’était pas trop frustrant, pour un défenseur ? »

        Lemoine semble amusé : « Frustrant ? Oui, à certains égards c’était frustrant. Mais le fait est que je n’ai jamais aussi peu couru qu’à cette époque-là. »

        Polleunis poursuit : « Nos défenseurs étaient très forts dans les duels, on peut même dire qu’ils excellaient dans le jeu de tête. Mais ils manquaient dramatiquement de vitesse… Seul Martens, l’arrière-droit, pouvait rivaliser avec des attaquants rapides. Nous devions trouver une solution. Alors nous nous sommes tous réunis, en présence de Goethals. Et nous avons décidé collectivement de jouer haut, très haut, jusqu’à trois mètres derrière la ligne médiane, de sorte de pouvoir tendre le piège du hors-jeu. Il fallait cependant trouver l’homme qui donnerait le signal pour avancer, et en toute logique nous avons confié cette responsabilité à Jean Claes. »

        Lemoine intervient : « Je ne sais plus si c’était trois mètres, je crois me rappeler que ce fut moins parfois. Et surtout, j’ai souvenir aussi de Raymond me criant : « Jusqu’à 10 mètres au-delà de la ligne, Marcel. Mais pas un mètre de plus ! »

        Ajoutant à la confusion, Henderix ajoute : « Moi, ce qui m’a le plus marqué, c’est quand je dus remplacer Lucien Boffin dans une rencontre contre le Standard. Mon adversaire direct, Léon Semmeling, décrochait de plus en plus, et délibérément pour m’attirer dans un piège… Et bien entendu, j’entendais Raymond qui hurlait : « Non, Gustaaf : on reste derrière la ligne médiane ! » C’est alors qu’il y eut cet autre jour, un dimanche où Goethals était souffrant… Soudain, son épouse apparut à la porte du vestiaire ! Et elle tenait une lettre en mains, pour chacun d’entre nous. Dans celle qui m’était destinée, Raymond avait écrit ceci : « Derrière la ligne médiane, Gustaaf ! » Ce n’était pas un grand sorcier, ça peut-être une fois ?

        Polleunis reprend : « En fait, Raymond s’adaptait constamment à nos capacités et à celles de l’adversaire, c’était perceptible lors des entraînements. D’ailleurs, c’est à partir de ce moment-là que nous avons commencé à travailler nos mouvements collectifs. Et le système fonctionnait parfaitement : les attaquants adverses, si rapides fussent-ils, étaient constamment offside ! Et si l’un d’entre eux parvenait à passer à travers les mailles du filet, alors il était attendu par notre gardien Bosmans, ça : c’était la trouvaille de Goethals ! Il jouait 25 mètres devant son but, comme une sorte de libéro. »

        « Le plan était que nous autres, les milieux de terrain et les joueurs de pointe, devions exercer un pressing sur le porteur du ballon. Nos défenseurs, pour leur part, étaient donc sur la ligne médiane. Et derrière il y avait enfin cette tête brûlée de Léon Bosmans, qui se tenait en permanence aux abords de son grand rectangle. Qu’un adversaire échappât au piège que nous lui tendions, et il n’y avait alors plus qu’une et une seule façon de l’arrêter : le choper ! Léon Bosmans arrivait généralement au sprint. Et il visait toujours et l’homme, et le ballon. Même à l’entraînement. S’il faisait cela maintenant, il recevrait un carton rouge à chaque match. Cette manière de jouer a surpris la plupart de nos adversaires, et nous a permis de devenir vice-champions. »

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      3. Pour le cyclisme, rien à rajouter : a minima jusqu’aux 50’s y a pas photo, c’est LE sport dominant chez vous!

        Rien à rajouter non plus sur le traitement asymétrique, mais lié, héros du gazon Vs toxicos du vélo – façon de parler et ben voyons, lol..

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      1. Exact, ajde. Le cyclisme restait la véritable passion française.

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      2. Le football occupait la majeure partie des discussions dans les cours de récré, pas le cyclisme.

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    2. Et quand j’écris « trop français » : j’invite à considérer toute la ringardise, qui des décennies durant fut accolée à la francité.

      Ce qui, à juger de ce que vos penseurs du jeu ont expérimenté, apporté (des Batteux, Baron, Sinibaldi, Pibarot.. ==> tous sans équivalent dans l’une ou l’autre scènes footballistiques que votre presse-système a fantasmatiquement encensés), est à hurler, une hérésie..

      La modernité à temps T, l’enrichissement du logos-football : parmi quelques autres, ce furent eux! Bien plus que ne furent par exemple des Michels ou plus tard Sacchi.

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    3. La France des années 50 est encore un pays largement rural et dans les campagnes comme les petites villes, comme dit plus haut, c’est le cyclisme qui règne sans partage. L’age d’or même. Bobet, Robic, Anquetil, Poulidor (rien que pour les français). Coppi, Bartali, Kubler, Koblet, Van Looy, Gaul, Bahamontes (pour les grands noms étrangers) . Le foot est peu suivi. Les exploits même du Stade de Reims pèsent moins que les grands duels sur le Tour pour le grand public français.

      Le foot est implanté dans les grandes villes. Marseille est déjà une ville de foot. Le Nord, héritage de la culture minière et ouvrière, s’y intéresse depuis longtemps (le LOSC et ses divers ancêtres et voisins dominent la D1 d’avant et après guerre, Lens connait déjà un engouement, les grands noms de l’époque à commencer par Kopa viennent du bassin minier du 62). Fred parle de la popularité du foot dans la cour d’école, mais je crois qu’il grandit en région parisienne où effectivement le foot y est déjà présent.
      Reims est une ville de taille moyenne pour l’époque et le foot n’est clairement pas implanté. Ce qui est frappant c’est que l’engouement ne prend pas. Delaune sonne souvent creux et Germain délocalise les grands matchs à Paris. Cette génération n’avait pas conscience de la valeur de l’équipe et ne s’intéressait simplement pas au foot. C’est la génération suivante qui affichera une vraie passion et remplira le stade (période Carlos Bianchi des années 70).
      Au niveau national, la montée en puissance du foot se fait par étapes. D’abord, le parcours des Verts qui coïncide aussi avec la période où les citadins deviennent plus nombreux que les ruraux (à noter que St Etienne, bastion ouvrier par excellence, n’est pas vraiment une ville de foot non plus avant leur premier titre en 1957).
      Ensuite la génération Platini. La place de Séville dans l’inconscient collectif, l’Euro 84 à domicile, succès sportif et populaire.
      La dernière étape c’est 1998. Pas seulement la victoire des bleus mais aussi un événement qui se déroule exactement au même moment: l’affaire Festina. Le vélo est brulé en place publique pendant qu’on ferme les yeux sur les pratiques des champions du monde dans leurs clubs italiens. La bascule est faite.

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      1. Exact, Festina est concomitant à la CM, l’idole Virenque devient un sujet de moquerie…

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      2. La différence de traitement avec des Zidane / Thuram qu’on voit en train de se piquouzer à l’époque, est effarante.

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  5. Super Ubri pour ce top 50.

    Ps: Le top 50 du RC Lens est connu aux quatre coins du monde c’est vrai ! haha (et jusqu’au fond des mines de Potosí fut un clin d’œil plus approprié hehe), on dit qu’il a été traduit en 28 langues aussi … :p

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  6. Superbe Top 50 qui va aller crescendo !
    Petite rectification: Fred Astaire l’opportuniste était plutôt pour le Stade de Reims et non pour le Racing. Donc ce n’était pas « son » Racing. C’était son cousin qui était dingue des « Ciel et blanc » et en particulier de Joseph Ujlaki.

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    1. Non malheureusement, pas assez de place^^ J’ai tenu à mettre Collat qui représente cette belle génération qui réalise une superbe montée en L2 dans un Delaune en ruines.

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      1. C’est des cyclistes italiens tous les deux^^ Pseudo que j’ai créé pendant le Giro 2022

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      2. Pour info, j’ai appris que face au désastre à venir en sprint sur piste aux JO, la fédé a demandé à Daniel Morelon de venir faire des piges pour motiver les jeunes qui se comportent apparemment comme des petits branleurs.

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      3. Le cyclisme sur piste c’est le marqueur d’une nation qui veut progresser rapidement sur l’échelon olympique quand elle y met des « moyens ». Même sans qu’il y ait une quelconque culture de ce sport. Longtemps dominé par la RDA, les français ont récupéré leur « technologie sportive » pour donner vie à la génération, Rousseau, Gané, Ballanger,..
        Puis l’Australie qui organisait ses JO et enfin évidemment la GB. La piste étant l’épisode le plus caricatural de JO de Londres qui l’étaient déjà dans leur ensemble.
        Bref, que la piste française se soit pas métamorphosé et soit pas dans prête à rouler sur le monde dans 3 mois est plutôt un bon signe en fait.
        D’ailleurs y a pas vraiment de nation dominante en ce moment mais l’Italie est pas mal du tout. C’est d’autant plus flagrant qu’ils n’ont jamais été aussi nuls sur route. D’ailleurs leurs deux seuls coureurs encore performants, Filippo Ganna et Jonathan Milan sont… issus de la piste. Et puis chez les filles, il y aura Letizia Paternoster^^

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    1. Je vais pas spoiler mais il y aura un certain nombre de joueurs passés par Lens. Au sens large, beaucoup de très grands noms du club sont originaires du Nord, bassin minier (Kopa et Glowacki viennent du même bled et se sont cotoyés dès leur plus jeune âge par exemple) ou métropole lilloise (Jean Vincent).

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  7. Tiens, la photo épinglant certain Carlo Weiss….. ==> Je connaissais ce type, ça fait tilt en googlant son nom : titulaire pendant trois ans à Winterslag, il est d’ailleurs de l’exploit (Winterslag était une équipe de village) qui les voit se qualifier face à Arsenal en Coupe d’Europe (un Arsenal qui ne manquait pas de noms prestigieux : Nicholas, Rix, Sansom, Jennings……ça va, quoi)…………et je lis que, derrière ça : il aboutit à Reims, ok..mais qu’il semble y avoir été comme « déclassé » (???) en équipe B????

    Pas un grand grand joueur, certes, mais quand même solide, avait fait ses preuves dans un championnat belge alors supérieur au français………..et il se voit recalé (mais est-ce vrai?) dans l’équipe B d’un club français de D2?

    C’est tout à fait possible mais étonnant ; que s’est-il passé? Une blessure peut-être?

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      1. Rensenbrink était un génie fini pour le foot, une quenelle.

        Le Luxembourgeois Weiss : un joueur correct, rien de plus..et à part ça, ben..??

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  8. Ivo Bassay, s’il n’a jamais joué en d1 française, a une carrière consistante. Un des meneurs du Chili 87, finaliste de la Copa America, qui avait collé un 4-0 au Bresil. Il est une des figures du Necaxa mexicain dominant des années 90. Aux côtés d’Aguinaga.

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