Ce que Mark Robins peut enseigner à Manchester United

Après un décevant match nul 3-3 sur à Istanbul, Manchester United a quasiment réduit à néant ses chances de participer aux phases à élimination directe. Le nul de Copenhague à l’Allianz Arena force les hommes d’Erik Ten Hag à battre le Bayern à Old Trafford et à espérer que Danois et Turcs partagent les points au Parken.

Depuis 2013 et la retraite du totémique Sir Alex Ferguson, Manchester United semble faire un pas en avant avant d’en faire deux en arrière. Après Fergie arriva David Moyes, adoubé par la légende écossaise en personne. Un an après, une piteuse septième place en Premier League acquise et un jeu plus que décevant scelleront le sort de l’ancien manager d’Everton.

Le cycle infernal continue ainsi depuis maintenant une décennie, Moyes fut succédé par Van Gaal, dont l’engagement à faire jouer les jeunes de l’académie fut apprécié mais son jeu poussif et ses relations avec certains joueurs le poussa vers la sortie. La Tulipe de Fer semblait néanmoins avoir construit quelque chose et il fallait alors continuer sur cette voie, le Néerlandais lui-même le fit comprendre en mettant grandement en avant son adjoint Ryan Giggs sur les dernières journées de Premier League. Ce fut cependant José Mourinho qui devint le nouveau coach des Red Devils. Malgré des succès sportifs incontestables, son style de management créa une rupture avec l’effectif qui le vit se faire licencier le 18 décembre 2018. Ole Gunnar Solskjær prit sa place, d’abord comme intérimaire avant d’être confirmé pour la saison suivante. Si le jeu débridé de son Manchester United plut, le catastrophique début de saison 2020-2021 entraîna le départ du Norvégien. Ralf Rangnick devint intérimaire pour le reste de la saison avant qu’Erik Ten Hag soit annoncé comme le nouvel entraîneur des Red Devils.

Un an et demi après l’arrivée du néerlandais à Old Trafford, son bilan est mitigé. Si il faut mettre à son crédit le fait que United ait terminé sur le podium de la Premier League et qu’il ait remporté la Carabao Cup, certains transferts semblent être de parfaits échecs et le jeu reste très bancal, capable du meilleur comme du pire. En plus de cela, le club a vécu certaines de ses pires humiliations durant l’année et demi du natif de Haaksbergen.

Cette situation de géant endormi n’est pourtant pas une première pour ce club. Avant l’ère dorée que fut le règne de Sir Alex Ferguson, Manchester United était déjà un ancien grand d’Europe devenu un club banal.

Matt Busby fit de Manchester United un des plus grands clubs du Royaume à partir de l’après-guerre. Malgré le tragique accident de Munich en 1958, les Red Devils remportaient la First Division en 1967 puis la Coupe des clubs champions européens l’année suivante. Busby annonça sa retraite pour la fin de saison 1968-1969. Son successeur, Wilf McGuinness, fut remercié un an et demi après son arrivée et le néo-retraité Busby dut sortir de sa retraite pour six mois.

Après sa retraite définitive, Manchester United dut se battre pour le maintien durant plusieurs années avant de finalement descendre en Second Division en 1974. C’était la première fois depuis 1938 que les Red Devils ne joueraient pas au premier échelon du football anglais. Et même si Tommy Docherty fit remonter le club en première division dès 1975, United stagnera pendant une décennie encore.

Trois FA Cup, en 1977,1983 et 1985, furent gagnées par Manchester United. Mais en début de saison 1986-1987, les Red Devils, habitués aux places d’honneurs en championnat, font un début de saison désastreux et le coach Ron Atkinson est viré. Il sera remplacé par un écossais ayant eu du succès à Aberdeen, Alex Ferguson. L’histoire est connue, Fergie deviendra légende à Manchester avec deux Ligue des Champions, une Coupe des Coupes, des Premier League à foison et plus encore.

Mais avant d’avoir du succès, Ferguson a aussi du souffrir.

Malgré une première saison complète réussie, Alex Ferguson n’est pas au mieux le 7 janvier 1990. United a fait des gros investissements depuis l’arrivée du manager écossais et la quinzième place des Red Devils est évidemment une déception. Un mois plus tôt, lors d’une défaite 2-1 à domicile face à Crystal Palace, on avait pu lire sur la bannière d’un certain Pete Molyneux : « 3 années d’excuses et c’est toujours de la merde… Au revoir Fergie. » Mais le 7 janvier est un tournant pour Alex Ferguson comme pour Manchester United. Ce jour là, les Red Devils entrent en lice en FA Cup avec un 32e de finale contre Nottingham Forest. Sur un terrain plus proche du marécage que du green de golf, Mark Robins marque d’une tête molle peu avant l’heure de jeu, trompant Steve Sutton. Alors que la presse annonçait à qui veut l’entendre que Fergie serait viré en cas de défaite, ce dernier survit et un peu plus de trois mois plus tard, il soulève son premier trophée mancunien. Cette FA Cup 1990 sera le début de son empire.

Alors pourquoi raconter cette courte histoire de Manchester United ?

Car la situation actuelle doit stopper, la boucle des changements d’entraineurs doit s’arrêter. Sir Alex Ferguson était à une tête de Mark Robins et une pelouse boueuse d’être potentiellement renvoyé et, tel le nez de Cléopâtre si on en croit Pascal, toute la face du monde aurait changé.

27 réflexions sur « Ce que Mark Robins peut enseigner à Manchester United »

  1. Y a manifestement déjà un peu plus de patience que ces dernières années car ETH aurait pu être viré après quelques unes des raclées que le club a subi depuis 18 mois. Peut-être bénéficie-t-il de la jurisprudence Arteta à Arsenal, dont les résultats actuels récompensent la patience des dirigeants alors qu’il aurait été si facile de le « sacker » il y a 2 ans…

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  2. Mark Robbins, c’était le tube de l’année 90 à United. Jusqu’à la victoire en Cup face au Palace de Ian Wright.
    D’ailleurs, United avait éliminé Oldham en demi-finale et en deux manches. Où l’on trouvait son futur arrière droit, Denis Irwin!

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    1. Oldham c’était du costaud à l’époque, club de D2 mais doté de sacrés bons joueurs dans toutes les lignes : Irwin donc, mais aussi le dénommé Andy Ritchie.. voilà les deux premiers noms qui me viennent à l’esprit, le binaire mais très précieux Paul Warhurst également, le défenseur Barrett.. Costaud!

      J’ai déjà évoqué le Tranmere de cette époque? Ben c’était du même acabit, deux clubs singulièrement ambitieux, déterminés à monter en D1, des noyaux xxl pour la D2 anglaise..mais Tranmere manqua toujours la montée de peu.

      Irwin, Ritchie.. De quoi avoir des regrets du côté de Leeds.

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    2. Tu vois, Tranmere me fait immanquablement pensé à John Aldridge. Mais je pensais qu’il avait joué là-bas avant Liverpool, alors que c’est après son départ de La Real Sociedad. La première star étrangère du club basque.

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      1. Aldridge y arrive dans le cadre des campagnes de recrutement alors très ambitieuses de ce club, quand il est déjà une valeur confirmée.

        Tranmere eut une ligne offensive WTF pour un club de D2, ledit Ian Muir était un tueur par exemple, un autre attaquant qui avait fait des dégâts en Écosse aussi, l’ailier gauche était remarquable..et celui de droite on en reparle bientôt.

        L’un dans l’autre, offensivement y avait même de quoi jouer les places dites « européennes », quelle armada.

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  3. J’ai deja raconté que cette victoire en Cup en 90 avait fait de moi un gros fan de United pendant un peu plus de 20 ans. J’adorais cette equipe 90. Ince qui venait de West Ham. Danny Wallace, l’ailier supersonique. Le duo genial de britannitude?, Hughes-McClair. Sans oublier le malheureusement si souvent blessé, Robson.

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    1. En 89-90 l’un de mes chouchous anglais de l’époque jouait encore à United : Neil Webb, joueur d’ une classe dingue à l’époque..sinon que cette saison fut pour lui le début de la fin, une sale blessure en équipe nationale, suivie de »un irrépressible et prématuré déclin.. Énorme gâchis.

      Je crois qu’il est toujours facteur, maintenant??

      Y avait Pallister aussi..que je suis tenté de tenir aujourd’hui encore pour, allez, le meilleur défenseur central anglais que j’aie vu ces 30-40 dernières années? Ça se jouerait selon moi entre lui, Des Walker et Ferdinand, le reste.. mais son compère Bruce était castard, aussi!

      Le noyau de United était fort inégal a l’époque, je trouve.

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      1. Bruce – Pallister c’était une charnière sacrément solide oui, Steve Bruce n’a cependant jamais été sélectionné avec les Three Lions, une anomalie que je n’ai jamais comprise.

        Avant eux y avait surtout Paul McGrath, quel joueur !

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      2. Steve Bruce c’est incompréhensible, déjà à Norwich il était top.

        En parlant de Norwich, c’est toujours à ce club que j’associe spontanément Robins. Avec Sutton c’y était un tout tout bon duo.

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    2. Robson reste un de mes joueurs favoris et sans l’ombre d’un doute mon chouchou de la période pré-Ferguson de United, mauvais timing de jouer à United dans les années 80, dix ans après, il aurait forcé Nicky Butt à changer de club.

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      1. S’il n’y aurait eu que Butt à devoir changer d’air!

        Si United fait sien un jour le concept des « 5 étoiles » cher à l’ER ou que/qui sais-je : dedans les yeux fermés en ce qui me concerne, car quel crack et quel battant. « Captain Marvel » ou un truc du genre : c’est pas comme ça qu’on l’appelait?? (j’ai ça en tête, je sais plus)

        Le genre même de joueurs avec lesquels tu vas a la guerre les yeux fermés, United lui doit une fière chandelle.

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      2. Le début de carrière de Robson est sympa également. Au sein de West Bromwich et de Three degrees. Cunningham, Cyrille Regis le guyanais et Brandon Baston. Ce trio qui fit accepter un peu plus la présence de noirs sur les pelouses anglaises. Quand on pense à ce qu’a subi Clyde Best de West Ham. Et malheureusement parfois de ses propres supporteurs…
        C’est drôle de savoir que Regisb, né en Guyane française, mais de parents de St Lucie, est le certainement le premier francophone à avoir réussi en Angleterre. Il a même quelques sélections.

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      3. Captain Marvel oui ! Dans mon XI type de United, la concurrence au milieu est rude mais Robson était dans la liste.

        Pas le souvenir avant lui en Angleterre de ce genre de milieux qui feront le sel de la PL des années 90, les Box-To-Box increvables capable de défendre, marquer, passer, bref des moteurs turbos au milieu d’une équipe qui pouvait ressemble parfois à une 2CV…

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      4. Premier qui me passe par la tête, probablement car j’adore (de surcroît diabolisé pour de bonnes..et mauvaises raisons) : Bremner.

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      5. Une de faite, ouf..

        Box to box anglais, 60’s-70’s : Alan Ball!

        Et compliqué d’en trouver des images pour s’en faire idée mais, sur base des moult récits dithyrambiques en-faits : tu en oublies un fameux, icône absolue de..United, même.. 😉

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      6. Cyrille Regis était francophone?? Je l’ignorais totalement, lol.. Merci!

        Lawrie Cunningham, je l’ai découvert live sur la fin de son passage au Real, je le voyais comme un autre Anglais de couleur passé par l’AC Milan, un ancien de Watford, son nom m’échappe, bref : je le voyais conséquemment comme une buse totale à l’époque..mais en fait j’ignorais tout des problèmes physiques (et déjà familiaux?) qu’il avait dû affronter!

        Et puis surtout, bénies soient les archives-web dont l’on dispose désormais : quel joueur extraordinaire il avait été en fait, en effet.. Frappé par la scoumoune le Lawrie, triste destin que voilà.

        Et, oui : ce WBA-là garde aux Îles une rare réputation de jeu et de fantaisie pour l’époque.

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      7. Regis quitte la Guyane à 5 ans pour l’Angleterre. Son pere est de St Lucie qui fut britannique mais sa mère s’appelle Mathilde.
        Mais j’extrapole peut-être sur le côté francophone. J’ai pas mal de copains qui ont bossé en Guyane et même actuellement, dans certains coins, ils parlent pas ou peu français.

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    1. Je ne connaissais pas ce collectif, merci! Du situationnisme, si je comprends bien?

      Blissett, je ne suis même pas certain qu’il fût si mauvais que ça, il y avait une aisance certaine dans son jeu avec Watford, et puis ce n’est pas comme si aucun Anglais ne s’était cassé les dents au contact du Calcio avant lui, des footballs quand même fort antinomiques.

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      1. Oui, du situationnisme à l’italienne (c’est à dire, avec du sens de l’humour). Ceci dit, j’avais acheté le premier des livre du collectif et je ne crois pas avoir lu au-delà de la page 30.

        Blisset le joueur n’était pas mauvais du tout, bon attaquant pour jouer en Angleterre mais sans le niveau pour la Serie A de l’époque.

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      2. Eh, réciproquement : on ne saura jamais ce qu’auraient donné des footballeurs italiens en D1 anglaise. Jusqu’au Heysel, c’étaient encore et toujours les clubs anglais qui donnaient le « la » en coupes d’Europe.

        A peu près tout opposait ces deux scènes : style (beaucoup moins frileux aux Îles), management (beaucoup plus libéral en Angleterre), atmosphère, médias.. Passer de l’un à l’autre ne devait pas être simple. Et c’est formidable que les deux grandes scènes du foot européen fussent à ce point opposées, il n’y a hélas plus rien de tel désormais.

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  4. L’anomalie c’est que MU avait été fortement dominant sous l’ère Ferguson. Je crois que Fergie n’a connu que des podiums au passage de la PL jusqu’à sa fin.
    Puis dans les années 2000, les médias ont institutionnalisé un big 4 / 5 / 6 sur une dizaine d’années qui est contestable et ahistorique dans le football anglais. Mettant MU naturellement dedans et comme si c’était sa place naturelle depuis le début. Le seul club qui a été sur une longue période toujours placé (titres, podium récurrents, toujours dans les places européennes) c’est Liverpool depuis les années 1960 environ. Même si ils ont pas connu le titre durant 30 ans ils ont été rarement en déclin sur plusieurs saisons (c-à-d au déla d’une 7 ou 8e place). Rares sont les autres clubs, la plupart ont connu la D2 ou des passages à vide prolongés. Dans une PL qui est devenu ultra-compétitive autant sportivement que sur le plan financier à l’heure actuelle (les écarts de niveaux sont plus restreints entre clubs qu’il y a 20 ans), à vrai dire c’est pas non plus catastrophique, mis à part qu’ils ne rivalisent plus en LDC avec les meilleurs et qu’il ne sont pas un candidat sérieux au titre, le club n’est pas non plus en milieu de tableau, irrégulier certes (au délà de choix et trajectoires sportifs râtés).

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