Pierre van Hooijdonk, serial buteur sur coup francs

Attaquant redoutable des années 1990 et 2000, Pierre van Hooijdonk a ébloui les supporters des équipes pour lesquelles il a évolué, grâce à son efficacité. Des terrains néerlandais aux enceintes portugaises en passant par l’Angleterre et l’Ecosse, les clubs qu’il a quittés en laissant un ratio de moins de 0,5 buts/match sont rares. En Europe, on ne compte plus les défenseurs et gardiens martyrisés par le gamin de Steenbergen. Mais cette performance brute ne doit pas éclipser une autre de ses statistiques, encore plus impressionnante et autrement plus rare à très haut niveau : son rendement sur coups francs.

Zico, Platini, des modèles d’inspiration

Au cours de sa carrière, van Hooijdonk a planté plus de 70 buts sur coups de pied arrêtés directs. Sa moyenne se situe aux alentours d’un tous les trois matchs joués, un rythme tout à fait exceptionnel étant donné la difficulté de l’exercice. S’est-il donc entraîné comme un enragé pour en arriver à une telle efficacité ? Certainement, mais comme beaucoup d’acharnés du travail, il a forgé sa propre méthode, eu ses modèles et ses inspirations.

Pierre Van Hooijdonk pose en compagnie de la légende Zico.

A commencer par deux monuments des footballs brésilien et français, Zico et Michel Platini. L’attaquant néerlandais l’avoue lui-même, il a été subjugué par ces joueurs alors qu’il entamait son adolescence.

Je me souviens avoir regardé la Coupe du monde 1982 en Espagne. J’ai vu Zico, ainsi qu’Eder, enchaîner les coups francs. Puis j’ai regardé le Championnat d’Europe en 1984, celui que la France a gagné, et je voyais Platini comme un spécialiste des coups francs. De mémoire, il en a marqué trois durant la compétition, et ça a commencé à m’intéresser. Je me suis senti encore plus attiré par ça. J’ai donc commencé à m’entraîner sérieusement.

À contresens de Sinisa Mihajlovic

Sinisa Mihajlovic, un autre spécialiste des coups francs, expliquait qu’étant enfant, il mitraillait si fort la porte du garage familial que son père devait la réparer toutes les semaines. Le Serbe avait d’abord travaillé la puissance avant d’y ajouter de la précision, au cours de sa carrière. Certains joueurs s’en souviennent encore : tout d’abord, Jürgen Klinsmann qui, lors d’un match de la Coupe du monde 1998 entre la Yougoslavie et l’Allemagne, est sorti sur civière après que ses côtes aient mal encaissé un missile de Mihajlovic ; puis son coéquipier à l’Inter Álvaro Recoba, au physique déjà fragile, qui a vu son genou exploser suite à un coup franc surpuissant tiré par le même homme, à l’entraînement.

Entraînement aux coups francs

Mais Pierre van Hooijdonk, lui, a confié avoir eu une approche tout à fait différente.

J’étais jeune, et je jouais dans des clubs amateurs qui n’avaient pas de mur dédié à l’entraînement pour les coups francs, j’ai donc commencé avec… rien. Contrairement à Mihajlovic qui devait rester contre sa porte de garage, nous, nous avions beaucoup d’espace au village. Je me suis entraîné directement sur des terrains ouverts. J’ai eu la précision très rapidement, mais ça, beaucoup de personnes peuvent l’obtenir parce que ce n’est pas très difficile à travailler. Ce qui fait la différence, c’est la vitesse !

Des risques dès le départ

Tout en débutant sa carrière professionnelle au RBC Roosendaal, en Eerste Divisie (la deuxième division néerlandaise), van Hooijdonk se met donc en tête d’améliorer son efficacité, en rajoutant peu à peu de la vitesse, et donc de la puissance. Ce qui, pour lui, était synonyme de risques.

J’ai commencé à prendre plus de risques avec mes tirs, mais en conservant toujours ma précision. Je savais que je pouvais frapper la balle plus fort que beaucoup de personnes, avec l’intérieur du pied. J’ai donc continué ma prise de risques et à frapper de plus en plus fort. Tant que je savais où allait la balle, je pouvais y aller franchement.

Son premier coup franc en match officiel, lui, est marqué lors de sa seconde et dernière saison au RBC, face au FC Dordrecht, le 22 août 1990. Son dur travail commence à porter ses fruits, d’autant plus qu’il s’agit d’une année explosive pour van Hooijdonk, qui cumule 27 buts en 37 matchs. Ce bilan va lui permettre de rejoindre son club de cœur, le NAC Breda, toujours en Eerste Divisie. Puis d’exploser en Eredivisie, avant de rejoindre le Celtic Glasgow quatre ans plus tard. La machine est en marche, et elle constellera la carrière du joueur de magnifiques coups francs.

La consécration européenne face aux Allemands

La Coupe UEFA 2001-2002 sera particulièrement révélatrice de son talent sur les coups de pied arrêtés. Arrivé en seizièmes de finale sous les couleurs de Feyenoord, face au SC Freiburg, van Hooijdonk place une praline de plus de 30 mètres, depuis un angle fermé, qui atteint la lucarne opposée du but allemand. Richard Golz a beau s’étaler de tout son long, il ne touchera jamais ce ballon qui semble le fuir.

Pierre van Hooijdonk marque un sublime coup franc face au SC Freiburg.

Mais s’il ne fallait retenir qu’un seul coup franc dans la carrière du Batave, alors ce serait celui qu’il s’apprête à marquer quelques mois plus tard, en finale de cette même coupe. Cette fois, le Feyenoord rencontre le Borussia Dortmund et, comble du hasard, ce match se déroule dans son antre du Stadion Feijenoord – alias De Kuip.

Van Hooijdonk s’y présente en pleine forme et, après avoir ouvert le score sur penalty, son équipe obtient un coup franc plein axe, à une trentaine de mètres des cages gardées par l’excellent Jens Lehmann. Le portier allemand sait à qui il a affaire, et les supporters néerlandais aussi : ceux-ci entonnent alors un chant sur un air bien connu. Put Your Hands Up for Pi-Air résonne alors au De Kuip. Van Hooijdonk se sent pousser des ailes, s’élance… et double la mise !

L’un des coups de pied arrêtés les plus importants de sa carrière.

La consécration est totale pour le joueur qui sort de deux saisons où il a terminé meilleur buteur de l’Eredivisie. Il fera ensuite route vers Fenerbahçe, dont il deviendra l’un des favoris, avant de revenir aux Pays-Bas, d’abord au NAC puis au Feyenoord de nouveau.

Une petite carrière internationale

Le gros bémol de van Hooijdonk restera certainement sa carrière internationale avec les Pays-Bas. Son bilan est tout à fait correct, concluant 14 buts en 46 apparitions, mais s’imposer dans une telle sélection était d’une atroce difficulté à l’époque : Dennis Bergkamp, Ruud van Nistelrooy, Roy Makaay, Patrick Kluivert et Jimmy Floyd Hasselbaink étaient ses concurrents durant cette période.

Pierre van Hooijdonk sous les couleurs des Pays-Bas.

À partir d’une telle brochette de stars, il semblait difficile pour le joueur de prendre une place de titulaire sur la base de son talent sur balle arrêtée et de ses capacités de buteur dans le jeu qui, si elles étaient très bonnes, ne pouvaient décemment pas rivaliser avec les joueurs cités. Membre régulier des Oranje mais barré pour ces raisons, il n’aura donc jamais pu montrer ce qui le caractérisait le mieux à l’échelle planétaire.

Et la relève ?

Si la fin de sa longue carrière (18 ans) reste honorable, il a continué à marquer des coups francs jusqu’aux derniers instants de celle-ci. Les supporters de Feyenoord s’en souviennent certainement : juste avant de prendre sa retraite, Pi-Air plante deux banderilles directes, lors d’un même match, face au Roda JC, en Eredivisie, avant de frapper une dernière fois en coupe des Pays-Bas, sur le terrain de Groningen. Cette rencontre fut d’ailleurs sa dernière.

Son fils, Sydney, est lui aussi footballeur professionnel, et comme son père, il évolue au poste d’attaquant. Toutefois, son talent pour les coups de pied arrêtés est nettement moins marqué. Sous contrat avec le club Italien de Bologna, actuellement en prêt au SC Heerenveen, arrivera-t-il à se faire un nom d’une manière ou d’une autre ? En tout cas, il semble émerger à peu près au même âge.

PS : en guise de friandise, Pinte de Foot vous offre le top 10 des plus beaux coups de savate de van Hooijdonk.

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26 réflexions sur « Pierre van Hooijdonk, serial buteur sur coup francs »

    1. bien dit mon pâté !
      libérez pâté du goulag
      ah mince c’est vrai qu’ici tu es libre comme l’air…

      ça fait bizarre de lire un article bien écrit, sans fautes de style et où on apprend deux trois trucs. ça change du site de S(ciences) F(iction), histoire de ne pas faire de pub déguisée.

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  1. Merci Sebek. Super choix. van Hooijdonk, c’est aussi une question de mauvais tempo. Il joue pour le Celtic, Benfica ou Feyenoord mais n’est pas champion. Il descend avec Forest, début de la longue disparition de l’élite du club.
    Finalement, il n y a qu’au Fener qu’il est champion. Sans oublier la c3 avec Feyenoord.
    Des stars partout mais pas récompensé de ses efforts.

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  2. J’avais complètement oublié que ce joueur était aussi fort sur coup franc.
    Quel but de 30m excentré à gauche là… pfiou.

    Il est passé à la trappe de mon cerveau, derrière cette fantastique ligne d attaque hollandaise de ces années la..

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  3. Y a quand même un nombre hallucinant de grosses nations sans buteur de haute valeur ni promesse pour le futur. Le Bresil, l’Argentine, l’Espagne, le Portugal, l’Allemagne, l’Italie ou les Pays Bas… Je vois pas de cadors se détacher. Le jeu a changé.

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  4. Pendant une moitié de saison, le Celtic avait une attaque composée de van Hooijdonk, Di Canio et Jorge Cadete! 3 gros caractères, dans des styles différents, c’est vrai. Tout ça épaulé par Andreas Thom, l’ancienne gloire du Dinamo Berlin.

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  5. Super cet article ! Paradoxalement, mon premier souvent de Van Hooijdonk c’est lors du mondial 98 où il plante un énorme coup de casque lors du 5-0 face à la Corée du Sud. Il était totalement chauve à l’époque haha !

    C’est dire aussi le niveau offensif néerlandais à l’époque : même l’immense Roy Makaay n’a pas réussi à s’imposer sous le maillot orange avec un bilan plus quelconque (6 buts en 43 sélections).

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