Le jour où les Girondins… se sont mis en grève !

En ce 7 novembre 1948, les Girondins AS du Port, alors sixièmes au classement, reçoivent la lanterne rouge, Valenciennes. Une victoire leur permettrait de se rapprocher des équipes de tête dans ce championnat de deuxième division.
Alors imaginez la stupeur et l’incompréhension des 10 734 spectateurs du stade municipal de Bordeaux quand on leur a annoncé, à quelques instants du coup d’envoi, que sept des titulaires des Girondins avaient décidé de refuser de jouer, de se mettre en grève !

Les dirigeants avaient refusé de donner suite à leurs revendications « d’ordre professionnel », concernant notamment leurs primes. Au micro du speaker, ils qualifient ce geste d’« attitude inconcevable ». Les Marine et Blanc peuvent compter sur René Gallice et Jean Swiatek et sur le renfort de la légende basque Urtizberea mais les jeunes remplaçants bordelais, malgré toute leur bonne volonté, ne pourront éviter la défaite (1-3). C’est d’ailleurs Santi Urtizberea, âgé de 39 ans, qui inscrira l’unique but girondin. Comble de cette journée maudite, un dirigeant girondin, M. Boucher, boxera le juge de touche, M. Lauga, sous prétexte que le deuxième but nordiste était entaché d’un hors-jeu !

La semaine suivante, au cours d’une séance extraordinaire du Conseil d’administration du club, les joueurs grévistes, qui avaient demandé audience, vont manifester leurs regrets et présenter leurs excuses. Les sanctions tombent : le club suspend le gardien Depoorter pour un mois tandis que Libar, M’Barek, Mérignac et Garriga écopent d’une lourde amende. Une récidive entrainerait leur radiation immédiate.

Mais l’affaire n’est pas terminée ! Les Girondins demandent la semaine suivante au Groupement des Clubs Autorisés (qui gère la compétition) que le match soit rejoué car ils estiment que le championnat a été faussé par cette décision des joueurs. Et ça marche ! Le Groupement décide, le 7 décembre, que, dorénavant, tout joueur gréviste sera rayé du Groupement des Professionnels et donne le match à rejouer !

Et cette fois, le 2 mars 1949, Bordeaux, au complet, ne va pas laisser passer l’occasion et s’impose sans forcer 2-0 grâce à des buts de Libar et Kargulewicz. A la fin de la saison, les Girondins termineront deuxièmes… avec deux points d’avance sur Rouen, obtenant ainsi leur retour parmi l’élite… avant d’être sacrés champions de France la saison suivante !

sebdelescure pour Pinte de Foot

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26 réflexions sur « Le jour où les Girondins… se sont mis en grève ! »

  1. Eh ben ! J’avais jamais entendu parlé de cette histoire !
    Merci beaucoup !

    Donc le droit de grève n’était pas au top de sa forme en 1948 ?
    Y’a eu des évolutions à ce sujet ? Les footballeurs professionnels ne sont-ils pas des salariés comme les autres ?

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    1. Non, les footballeurs pros ne sont alors pas des travailleurs comme les autres. Pas plus que les fonctionnaires, par exemple. On rappellera qu’ils ne peuvent pas choisir leur employeur.

      En 1948, il n’y a plus de syndicat de joueurs. Celui créé par Jacques Mairesse en 1936 a sombré dans la guerre et la défaite. En 1938, il avait ambitionné d’organiser une grève des joueurs à l’occasion de France-Belgique. La presse s’était déchaînée : https://dialectik-football.info/30-janvier-1938-france-belgique-et-lechec-de-la-greve-des-footballeurs/

      Il faudra attendre 1961 pour voir la naissance de l’UNFP : https://www.pinte2foot.com/article/le-faux-coupable

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    1. L’article n’est pas de moi mais bien de sebdelescure! J’ai juste fait la mise en page!

      Seb travaille à mettre en valeur le patrimoine de Stade Lescure, de son quartier et des Girondins évidemment avec son association Preservons Lescure.

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      1. Merci de votre invitation. C’est un grand plaisir pour moi. Effectivement, notre association Préservons Lescure œuvre depuis 2016 pour la préservation du patrimoine du Parc Lescure, c’est à dire du stade chaban delmas, où joue désormais les rugbymen de L’UBB, et de son stade annexe, réservé aux sportifs amateurs et scolaires. On le fait notamment visiter chaque année au moment des Journées du patrimoine.

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      2. Merci Seb. J’aime beaucoup le stade Lescure. Deux questions. L’entrée au niveau de l’avenue du parc Lescure, la porte B pour les partenaires a toujours existée? Je trouve ça hallucinant que tu puisses entrer dans le stade par une entrée de maisons bourgeoises!

        Et sinon quid de la tranchée autour du terrain?

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      3. Effectivement, l’entrée du stade par une maison bourgeoise de l’avenue du parc de lescure participe au fait que ce stade soit unique. C’est une entrée depuis la rénovation de 1987 quand ils ont détruit les pistes et agrandi la capacité du stade de 23000 à 40000. Il manquait une entrée pour respecter les normes de sécurité. Les Girondins ont donc acheté cette maison et l’ont revendu ensuite à la mairie de Bordeaux. Elle est vide et malheureusement pas entretenue, c’est dommage car c’est effectivement l’entrée des officiels et des partenaires.
        La fosse est aussi une particularité du stade. Le choix se fait en 1985-1986, donc juste post-Heysel. C’est Claude Bez qui préférait cette solution aux grillages par rapport à la visibilité des spectateurs et une solution qui devait faciliter l’évacuation des spectateurs vers la pelouse en cas d’urgence. Au niveau esthétique, il n’y a pas photo non plus, on préfère ça…même si un joueur de rugby, nommé Harry Potter, aurait pu s’y blesser gravement il y a 2-3 ans en champions cup.

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      4. Merci
        Oui, je m’étonne qu’aucun sportif ne se soit gravement blessé avec cette tranchée. Et j’imagine le bordel à l’intérieur des maisons de l’avenue les jours du match!

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      5. Il me semble avoir lu dans une interview de Bernard LAcombe au début des années 80 que Lescure était déjà classé monument historique à l’époque. Si c’était le cas (Seb ?), ça aurait plombé la candidature de Bordeaux par rapport à d’autres villes (Nantes et Strasbourg surtout) qui avaient au moins autant besoin d’un stade moderne que les Girondins et posaient moins de problèmes administratifs. La guerre entre Claude Bez et la FFF (il est arrivé en 1979, au moment où on choisissait les villes-hôtes) n’a rien dû arranger à l’affaire.

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      6. Concernant l’Euro 84, je pense que c’est tout simplement à cause de la capacité du stade à l’époque. Il y avait encore les 2 pistes (vélo et athlétisme), il n’y avait donc réellement que 23000 places en tribune (40000 en serrant avec les places debout), c’était suffisant pour la Coupe du Monde 1938 mais plus en 1984. Je crois que le plus petit stade de l’Euro était celui de Strasbourg avec 42000 places.
        Le stade n’est inscrit (pas classé) au titre des monuments historiques que depuis l’année dernière. Il n’avait aucune protection, ne faisant même pas partie de la zone classée UNESCO (qui s’arrête aux boulevards, de l’autre côté du stade), c’est pourquoi il avait été menacé de destruction partielle en 2015…et pourquoi nous nous sommes regroupés en association.

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  2. Révooooooooooolte!!!!

    Préservons les curés !!!!

    Oh putain je t’attaque la journée avé des blagues de merde comme ça
    Ça va être long pour les autres aujourd’hui

    À plus les poussiéreux

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    1. Merci mon bon croutas
      Recevez ma bénédiction ainsi qu’une cagette d’hosties et 5 futs de flottes transformées en pinard
      N’empêche, je ne m’en remets pas. qu’est ce que c’est ce site où les articles sont bien écrit et ou on y pige quelque chose…
      Tout fout l’camp mon pauv’ pâté. Tout fout l’camp

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  3. Merci ! A propos de Santi Urtizberea, tu parles de légende basque et le terme n’est pas galvaudé. Cet attaquant puissant a longtemps joué à la Real Unión (Irún) mais aussi à la Real Sociedad quand le club était appelé Donostia. Aux côtés du stratège René Petit et d’Antonio Emery (gardien de but et grand père d’Unai), il a joué la première Liga de l’histoire (début 1929) et a été à plusieurs reprises parmi les meilleurs buteurs du championnat. C’est la guerre civile qui le pousse à franchir la frontière et s’établir à Bordeaux.

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  4. Vu Lescure une fois, une (très!) agréable découverte, je ne soupçonnais pas alors cette richesse patrimoniale..mais j’ignorais encore totalement l’existence de cette entrée via une maison bourgeoise!

    En cherchant un peu : c’est la « porte B », c’est ça? Un truc à la Luton Town en somme..mais avec un sacré supplément d’élégance bordelaise, moins qu’on puisse dire.

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      1. Oui, tout à fait, le quartier Lescure, construit entre 1920 et 1940, est un des plus beaux de Bordeaux, un éventail incroyable de l’architecture de l’époque (néoclassique, éclectique, art déco) et, au milieu, une cité ouvrière avec un ensemble d’échoppes destinés au personnel des trams de Bordeaux . A visiter si vous venez dans le coin.

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      2. Déjà « visité » par le plus grand des hasards, j’aime bien me perdre sans but particulier quand je vais pour la première fois dans une ville. J’eus la déambulation heureuse.

        Le stade, le quartier de manière générale.. : magnifique! Ca me faisait penser à ce quartier du Sud d’Anvers-Berchem (où se trouve aussi un stade d’intérêt architectural), le « Zurenborg », où ne vont se perdre nul visiteur, alors que.. Les trésors cachés.

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