Supporters de Cruzeiro fêtant la remontée

Cruzeiro, voyage au bout de l’enfer

Cruzeiro est l’un des très grands noms du championnat brésilien. Club d’immigrants italiens fondé en 1921 sous le nom de Palestra Itália, le club a connu de nombreuses heures de gloire, remportant notamment deux Copa Libertadores en 1976 et 1997.  Et il était jusqu’à peu l’un des rares clubs n’ayant jamais connu de relégation en deuxième division brésilienne. Mais seulement jusqu’à il y a peu, car les dernières années du club ont été plutôt mouvementées.

La décennie 2010 avait pourtant bien commencé pour le géant de Belo Horizonte. Le club caracolait pendant des années en haut de tableau du brasileirão, garnissant son palmarès de deux championnats, en 2013 et 2014, puis deux coupes en 2017 et 2018. Rien ne laissait présager de la tempête qui allait s’abattre sur le club.
Encore une fois, pour le début de saison 2019, le club montrait de grosses ambitions avec un recrutement ambitieux et l’envie affichée d’essayer de gagner de nouveaux titres. Pedro Rocha, Rodreguinho et Dodô arrivaient pour enrichir un effectif fort de joueurs dominants même si vieillissants, tels que Thiago Neves ou Fred, l’ancien Lyonnais. Seule ombre au tableau, le départ de Giorgian de Arrascaeta pour Flamengo, après une demande plutôt insistante du meneur uruguayen.

Et tout commença plutôt bien, le club emportant le championnat mineiro devant son frère ennemi, l’Atlético Mineiro, en terminant invaincu. Même chose en Copa Libertadores où le club enchainait les victoires contre Huracán, Emelec et le Deportivo Lara. Si bien qu’à l’aube de la saison du championnat brésilien, le club comptait déjà 16 victoires et cinq nuls pour aucune défaite.

Mais dès le premier match, contre Flamengo, tout se délita. Une défaite 3-1 comme premier couac. Mais le pire était à venir, et en coulisse. Suite à des dénonciations de blanchiment d’argent et de faux et usage de faux, la police entre au club pour enquêter et découvre une situation catastrophique.   
Le club est endetté. Archi-endetté. Et pour combler les trous et payer les salaires délirants qu’ils se sont octroyés, les dirigeants étaient prêts à tout. Ainsi, ils cédèrent des pourcentages des droits sur les futurs transferts de joueurs à des créanciers n’ayant aucun rapport avec le monde du football, malgré l’interdiction de la pratique il y a plusieurs années. Ils allèrent même jusqu’à céder les futurs droits d’un espoir du centre de formation âgé de seulement 12 ans. Pratique bien évidemment formellement interdite. Voguant ainsi de scandale en scandale durant toute la saison, au fur et à mesure des découvertes ahurissantes des enquêteurs, tout alla de mal en pis sur le terrain, avec des joueurs dont le manque flagrant d’implication semblait corrélé avec les retards salariaux qu’ils subissaient. Ainsi le club s’effondra, relégué en Serie B avec une dette colossale et une longue liste de procès en perspective.

Si les supporters espéraient une reconstruction pour 2020, il n’en fut rien. Année de covid-19 et de stades vides, pas de quoi améliorer la situation du club, qui passa sa saison dans l’anonymat du milieu de tableau de Serie B, avec des changements d’entraîneurs et une situation sportive tout juste sauvée d’un départ catastrophique par un Scolari pourtant bien critiqué.
De quoi attaquer 2021, année du centenaire du club, avec des perspectives d’avenir plus que moroses. Le club héritait d’une restructuration de dette d’un milliard de reais payable en 10 ans, soit environ 180 millions d’euros, et d’une équipe de ventre mou de seconde division. Et cela se confirma sur le terrain, avec une 14e place en championnat, une valse continue des entraîneurs et dirigeants, ainsi qu’une ribambelle de procès concernant les agissements du club pendant les saisons précédentes. 

Mais soudain, il surgit hors de la nuit, pour courir vers l’aventure au galop.
Qui ça ? Zorro ?
Mais non ! Alors que le club naviguait de catastrophes en déceptions, il sortit de nulle part.
Batman alors ?
Non plus. Comme en 93, lorsqu’à 16 ans il marqua 28 buts en 29 matchs pour le club.
Mais qui ça ? Qui ?
Ronaldo ! Le Ronaldo. R9 lui-même.

Ainsi, le 18 décembre 2021, juste avant Noël, il signe son retour. Et même si son ventre est trop proéminent pour rentrer par la cheminée, et qu’il n’a pas encore de barbe blanche, avec 400 millions de reais à investir pour acheter 90% des actions de son club de jeunesse, il fait le plus beau des cadeaux de cette fin d’année à tous les supporters de Cruzeiro.
Car quelques mois plus tôt, fut voté au parlement une loi déterminante dans l’avenir du club. Ainsi en aout 2021 fut publiée la loi sur les Sociétés Anonymes de Football qui permet l’investissement dans les clubs du pays. Avant, ces derniers reposaient sur un modèle d’association à but non lucratif. Et c’est ce changement législatif qui permit l’investissement de Ronaldo pour sauver son club.

Et dès la reprise du club, R9 acta un changement de cap. Dehors la direction sportive du club, et place aux jeunes. Dehors également Fabio, le gardien historique et ses presque 1000 matchs avec le club, pour un grand coup de balai dans l’effectif. Et ce nouveau Cruzeiro vola. Survola même. Il boucla la Serie B brésilienne avec 21 victoires, huit nuls et seulement trois défaites, devenant le club dont la promotion en Serie A et le titre furent actés le plus tôt dans l’histoire. Le tout avec une affluence moyenne de 43 000 spectateurs au stade. Là aussi, la meilleure de l’histoire de la Serie B.

Et voilà, après trois années d’horreur, sept coachs, de nombreux dirigeants, et de trop nombreux scandales, le club revient en Serie A avec une ambition dévorante et la juste impression d’être revenu de l’enfer.
Pas le moindre des exploits de Ronaldo.

Et il n’a besoin ni de Robin, ni de Bernardo
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26 réflexions sur « Cruzeiro, voyage au bout de l’enfer »

  1. Incroyable cette histoire de relégation en D2 !
    Y a vraiment de fins connaisseurs du foot sud-américain ici c’est un vrai régal !

    Pour moi Cruzeiro c’est Tostao, Jairzinho, Ronaldo, Alex, Maicon et Rivaldo 🇧🇷

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    1. Garder à l’esprit que ce n’est là-bas qu’un grand club parmi tant d’autres……….. Et pourtant, quand on considère la liste de joueurs qui te sont venus à l’esprit, lol.. Quelle richesse qu’à ce football jadis!

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    2. Rivaldo et Cruzeiro – j’avais totalement oublié qu’il avait mis les pieds la-bas. Le concermant je pense plutot a Palmeiras et Santa Cruz le club de ses debuts dans son Recife natal.
      A Cruzeiro dans les dernieres années, j’aimais bien Marcelo Martins le goleador bolivien, joueurs pas mal et le plus côté de la Verde. Il a laissé une belle empreinte dams ce club.

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  2. Merci Cebolinha !
    Cruzeiro, certainement mon club brésilien préféré, pour les joueurs cités par PB plus haut tout d’abord, pour le maillot ensuite… enfin et surtout: pour aucune raison particulière ! Un club qui m’a touché un jour, je ne sais plus trop quand ni comment…
    Il y a un an et demi~deux ans environ, j’étais justement entré en contact avec eux pour un projet… Ce n’était hélas, évidemment pas la meilleure des périodes et encore moins le contexte idéal (en général comme en interne) mais mon correspondant m’a tout de même laissé, malgré l’actualité du club donc à cette époque, une très bonne image de Cruzeiro. Effectivement, toujours souriant, très sympathique et j’irai presque jusqu’à dire enthousiaste et dynamique au milieu pourtant de ce chaos. De quoi en tout cas, renforcer mon affection pour ce beau club.

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    1. Salut et bienvenue à toi ajde !
      Je compte sur toi pour nous mettre ton formidable top 50 du RC Lens. Étalé sur 5 jours agrémenté de photos, par exemple. Un peu de foot français vintage ne peut pas nous faire de mal.

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      1. Fred,
        pourquoi pas, si les redacteurs du site en sont d’accord. Je veux bien proposer ce top 50 maison, déja quasi prêt.

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      2. Ajde
        On propose à nos lecteurs de nous confier leurs ecrits. Donc ce sera évidemment avec plaisir.
        Mais on a pas encore fait de top aussi conséquent! Juste deux Top 10 en 2 jours à chaque fois.
        Pour en discuter, je te propose de nous rejoindre sur le Discord. Ce sera plus facile pour echanger. A toute!
        https://discord.gg/rqgqmw8Q

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      3. Puisque 50 c’est trop je propose un top 10 avec photos et de la 50ème à la 11ème place juste citer le joueur.

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      4. Hehe
        J’ai pas dit que c’était trop! Je veux juste en discuter avec Ajde pour voir comment on programme tout ça! J’ai 4 équipes. Et Lens en fait parti. Un top 50 sang et or, suis ravi!

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      5. Fredo
        On était chaud pour ton top 50 francilien. Heureusement que Ajde est un homme d’action, lui! Hehe

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      6. En effet, ajde est un homme d’action et moi je suis une loque humaine qui entre dans sa 65ème année !

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  3. Cruzeiro, c’est aussi la belle histoire des Moreira. Zezé, vainqueur de la Libertadores 76 avec Nelinho superstar, Piazza, Jairzinho, alors que le vieil entraîneur est au crépuscule de sa prestigieuse carrière.
    Que ce soit avec Cruzeiro qu’il gagne ce trophée n’est pas anodin : l’année précédente, son frère Ayrton est décédé. Il était à la tête de le Bestia negra dans les années 60 quand émergent Dirceu Lopes, Tostão et déjà Piazza. Ayrton mène le Cruzeiro au titre national 1966 et est un coach promis à un grand avenir, on parle de lui pour la seleção après ses frères Zezé et Aymoré. L’histoire n’est pas aussi belle qu’elle aurait pu l’être : il tombe malade et ne retrouve jamais ses capacités physiques lui permettant de revenir. Sur la fin, il est l’adjoint de son frère Zezé mais n’est plus là pour la Libertadores 76 gagnée face à River.

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    1. Oui, j’aimais bien leur période avec Everton Ribeiro et Ricardo Goulart, j’ai regardé pas mal de leurs matchs à l’époque. Goulart était un super joueur, c’est dommage qu’il ait cédé à l’appel des millions chinois, sportivement il aurait pu faire une belle carrière.

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