Roberto Dinamite, l’artilheiro de Vasco

Immense buteur de Vasco décédé hier, Roberto Dinamite tente sans succès sa chance au Barça en 1980. Il aurait pu revenir piteusement au Maracanã, il revient en héros.

Roberto Dinamite et Vasco da Gama affrontent le Barça lors du Trofeo Ciudad de Palma au cours de l’été 1979 et on ne peut pas dire que l’attaquant brésilien brille particulièrement. Il fait pourtant tourner la tête du président blaugrana Josep Lluís Núñez : alors que Hans Krankl est une de ses premières réussites à la tête du Barça, il décide de prêter l’Autrichien au First Vienna en janvier 1980 pour laisser une place d’étranger à Dinamite. Krankl vient pourtant de réaliser une excellente première saison, Pichichi de Liga et auteur du but décisif en finale de Coupe d’Europe des vainqueurs de coupe[1]. Mais rien n’y fait, Nuñez veut son buteur sud-américain.

Roberto Dinamite n’est pas un quelconque espoir, c’est déjà un joueur confirmé ayant gagné son surnom explosif après qu’un journaliste a été séduit par sa frappe et son efficacité. Souvent préféré par Coutinho au rebelle Reinaldo, il inscrit trois buts lors de la Coupe du monde 1978, notamment un but décisif face à l’Autriche de Krankl sans lequel le Brésil aurait échoue dès le premier tour. C’est surtout une immense star à Vasco da Gama. Depuis 1971, il martyrise les défenses brésiliennes, artilheiro prolifique (plus de 700 buts en carrière avec le Time do Rei, vainqueur du Brasileirão 1974 en finissant meilleur buteur) au point d’être considéré aujourd’hui encore comme le plus grand avant-centre de l’histoire de Vasco, devant Romario et Ademir. Son transfert vers le Barça est un drame pour les torcidas du Vascão auxquels la direction promet en compensation l’achat de Reinaldo, le prodige de l’Atlético Mineiro (il n’en sera rien, c’est Jorge Mendonça en conflit avec Telê Santana à Palmeiras qui vient se perdre à Rio).

Buteur face à l’Autriche en 1978.

Le 5 janvier 1980, Mundo Deportivo titre en une : Llego el crack, « le crack est arrivé ». Les journalistes catalans découvrent ce joueur à la chevelure abondante, teint bronzé, veste claire, énorme collier, look de danseur de flamenco. Les périodistes le présentent sans originalité avec des bâtons de dynamite, reprenant quelques-unes de ses phrases chocs, par exemple : « les défenseurs qui veulent se confronter à moi se blesseront. » L’attente est considérable mais l’optimiste est total.

Il débute dans le froid de l’hiver barcelonais le 20 janvier contre Almería au Camp Nou et inscrit un doublé. Les journalistes sont totalement sous le charme : quelle efficacité pour un joueur invisible dans le jeu ! La lune de miel est de courte durée, très vite les doutes émergent sur la compatibilité du Brésilien avec le Barça, car en effet, il est transparent. Si les observateurs blaugranas avaient regardé quelques vidéos, ils auraient su que Roberto Dinamite est un pur finisseur, un joueur de surface participant a minima aux actions collectives.

Ses deux buts face à Almería sont ses seules réalisations en Liga alors que Krankl brille à Vienne[2]. En mars, l’entraîneur Joaquim Rifé est démis de ses fonctions, remplacé par le pré-retraité Helenio Herrera qui ne compte pas sur lui et avec lequel il entre en conflit.

Fin avril, Núñez cède Roberto Dinamite à Vasco pour la moitié du prix auquel il l’a acheté. Le 4 mai, il fait son retour au Maracanã face au Corinthians de Sócrates. Devant plus de 100 000 spectateurs venus pour lui, il fait exploser la défense des Paulistas en inscrivant les cinq buts du triomphe carioca, 5-2 score final. Les torcidas ont oublié son infidélité, ils ne rêvent plus de Reinaldo, l’histoire d’amour entre Roberto Dinamite et le Vascão reprend et dure jusqu’en 1993.


[1] Victoire 4-3 contre Fortuna Düsseldorf.

[2] 12 buts en 17 matchs de championnat.

32 réflexions sur « Roberto Dinamite, l’artilheiro de Vasco »

  1. Meilleur buteur du championnat brésilien, du Carioca, c’est pas rien.
    Qui était le meilleur entre lui et Reinaldo?
    Champion du Bresil 74 avec le funeste Edgardo Andrada qui eût un rôle peu glorieux au sein de la junte de Videla.
    Dinamite, c’est le premier nom qui me vient quand je pense au Vasco. Et ce maillot…

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    1. Reinaldo, bien sûr ! O Rei do Mineirão était un joueur extraordinaire, un artiste, dont la carrière aurait été différente sans ses blessures au genou à répétition (et peut-être avec une meilleure hygiène de vie). Rapide, technique, adroit, ce joueur avait tout pour lui. Il a eu la chance et la malchance de jouer avec l’Atlético Mineiro, une des plus belles équipes des années 70 et du début des années 80, mais terriblement malchanceuse, et pas seulement victime de décisions arbitrales pour le moins étrange. On pense bien sûr aux oppositions contre Flamengo en 1980 et 1981 et aux prestations des José (les arbitres José de Assis et José Roberto Wright), mais il y a aussi cette finale de championnat perdue aux TAB contre São Paulo FC 1977 après une saison exceptionnelle.
      A propos de Reinaldo, Zico a toujours prétendu qu’il était le plus doué de sa génération, le seul à pouvoir prétendre assumer la succession de Pelé. Mais à la différence de Pelé, le physique de Reinaldo n’était pas à la hauteur de son immense talent.

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      1. Ajde
        J’ai lu qu’Andrada contestait les faits de torture et les assassinats commandités. Il en est quoi réellement?

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      2. Agent S.. C’est quoi, cette histoire?

        Bien content de te relire, ça fait plaisir!

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      3. Edgardo Andrada gardien de Rosario Central, international argentin, puis de Vasco donc.
        Apres sa carriere: l’agent S.
        Il travaille comme agent de renseignement au sein de l’armée durant la dictature pour traquer et espionner les « subversifs » de Rosario. A en croire les archives, il etait meme tres bon dans sa tâche et ses superieurs lui en étaient reconnaissants.
        Jugé des annes apres pour l implication de son unité dans la torture et assasinats de militants de gauche. Andrada ne fut pas condamné, faute de preuves suffisantes de son implication.

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      4. L’excellent équipier que voilà, lol..

        Vos échanges sont nébuleux sur ce point : il les torturait lui-même?? Je crois comprendre que non, mais?

        Autre bord politique, Yashine traîna longtemps cette réputation, aussi un type de Ferencvaros pour qui ce fut attesté.. En fait il y en a eu un paquet, mais eux, c’est sûr, ils en restaient au stade du renseignement.

        Au service de régimes démocratiques (pas en reste), l’un des deux frères Robledo (ex-Newcastle) aurait fait du renseignement aussi, MI6.. ou que dire de « La Taupe » d’Evra.. 🙂

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      5. @Khia
        en fait je crois meme qu il y a pas eu de proces pour lui, faute de preuves. donc il n’a pas ete jugé judiciairement parlant, plutot accusé et « entendu » par la justic ?

        Lui, niait toutes relations avec les services de renseignement et la dictature, alors que bon les preuves de son receutement et travail existaient selon les archives.

        En tous cas, une face noire pour ce gardien de talent et reconnu, idem pour sa carriere bresilienne à Vasco beaucoup d’eloges.

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      6. Alex
        Les frangins Robledo bossaient pour les Anglais? Et bien…
        On va apprendre qu’Alberto Terry le Péruvien le faisait également. Hehe
        J’ai plus le nom du hongrois mais Albert ne voulut plus entendre parler de lui.
        Kirsten aurait bossé pour la Stasi également. Apres, avaient-ils le choix? Ou le courage de s’opposer?

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      7. Un seul des deux, je ne sais plus lequel.

        Mais, dans mes souvenirs, c’était davantage une très forte présomption que quelque chose d’absolument irréfutable, à vérifier.

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      8. Et ça n’engage que moi mais je crois bien volontiers qu’un commentateur-star, jadis, du foot belge put çà et là profiter aussi de ses voyages à travers l’Europe pour faire du renseignement. De nos figures historiques, c’est certainement celui pour qui ça m’étonnerait le moins.

        Ce qui est acquis : il donnait concomitamment de sa carrière des conférences anti-communistes. Et il avait gardé beaucoup de contacts de ses années à Londres durant l’occupation allemande.

        Un profil intéressant.

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      9. Ah, la Stasi, vaste sujet ! J’avais fait un petit peu de recherche dessus vers 2014, au moment de réécrire la page Wikipédia de l’équipe de RDA qui avait bien besoin d’une refonte. Ulf Kirsten, donc, confirmé. Bernd Stange, longtemps sélectionneur, aussi. À l’occasion de la rédaction d’un article prévu sur p2f, je crois, le 27, j’ai trouvé un cas moins banal : un joueur qui a dit « Sch… » à la Fédération et à la Stasi à la fois mais a réussi à garder sa place en équipe nationale. J’en ferai un article un de ces jours, il est en quatrième position dans la liste de mes sujets à rédiger.

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    2. J’ai visité le musée de la Stasi à Leipzig, ce sont en réalité les anciens bureaux de la Stasi locale gardés en l’état, dans leur style fin des années 80 et qui a été converti en musée. C’est vraiment très intéressant. Et au sein même du musée, il y a un regroupement d’archives détruites par les communistes qui sont toujours en train d’être reconstituées à l’heure actuelle. Et si vous êtes Allemand, il est possible de faire des recherches afin de savoir si votre famille était surveillée par la Stasi et à quel degré.

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      1. Tu en as profité pour faire un peu de groundhopping ? Pas au Zentralstadion (il n’existe plus, en tout cas pas le vrai, celui de la RDA) mais peut-être au « Bruno », le Bruno-Plache-Stadion, l’antre du Lok Leipzig avec sa tribune en bois vintage ?

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  2. Ajde
    L’histoire de Rosario Central est certainement celle que je connais la moins chez les historiques argentins. Peut-être parce que je trouve leur maillot très moche! Bon après ces considérations esthétiques hautement intéressantes, faudrait que j’y plonge plus sérieusement.

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    1. J’aime bien Central, plus que Newell’s. Kempes, Poy, les Killer, Carnevali, Solari père, Boveda, Vairo, Landucci, Massei, ça me parle. Et puis Zof, coach mythique au parcours improbable, rajoute à la beauté de ce club. Zof mérite un article, d’ailleurs.

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      1. Un défenseur nommé Killer, ça ne s’invente pas ! Pas entré en jeu au Mundial 78 mais maillot numéro 11, juste après Kempes, dans l’ordre alphabétique intégral qu’utilisait l’Albiceleste cette année-là. (Ah, l’immortel 5 de Fillol…)

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      2. Eh eh, ils étaient 3 frères, les Killer : Daniel (CM 78), Mario (ex Sporting Gijón notamment) et Alfredo. J’avais écrit un texte sur Sofoot à propos de la trahison des deux aînés, passés (indirectement) de Central à Newell’s et dont la « réhabilitation » du nom de famille est passée par Alfredo, buteur lors d’un derby de Rosario pour Central.

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